FNH N° 1100

C ULTURE

32

JEUDI 16 MARS 2023 FINANCES NEWS HEBDO

www.fnh.ma

Cy Twombly

Au pays du soleil couchant

◆ La Fondation Jardin Majorelle, en collaboration avec la Cy Twombly Foundation et la Fondazione Nicola Del Roscio, donne à voir, jusqu’au 2 juillet 2023, une exposition temporaire dédiée à l’un des plus grands artistes de la seconde moitié du vingtième siècle : «Cy Twombly, Maroc 1952/1953». ◆ Sous le commissariat de Nicola Del Roscio & Alexis Sornin, le musée Yves Saint-Laurent Marrakech met en relief «Volubilus», quelques photographies et divers éléments d’archive du peintre américain, mort en 2011 à 83 ans.

des années 50, au mythique Black Mountain College, près d'Asheville (Caroline du Nord), que tout a été précipi- té avec la rencontre d'autres artistes majeurs de sa géné- ration, devenus ses amis : Robert Rauschenberg, Franz Kline, Robert Motherwell, mais aussi le musicien John Cage ou le chorégraphe Merce Cunningham. Après un service militaire passé à découvrir et exercer la cryptologie, ce qui mar- quera à jamais son rapport à la graphie, dans une quête incessante à mixer dessin et peinture, Twombly s’installe à New York où, en compa- gnie de son coloc d’atelier Rauschenberg, mais aussi de Jasper Johns, il participe à l’inflexion d’un mouvement artistique déjà bien amorcé et connu sous le nom de New York School. Et ce, en y introduisant notamment avec ses sculptures faites d’objets de récupération une atten- tion marquée pour le primiti- visme. Habité tout autant par la culture classique, il choisit, alors qu’il n’a pas encore 30 ans, de quitter cette scène new-yorkaise pour s’ins-

grands cycles et consacrée par tous les grands musées du monde. Son style original, entre dessin et peinture, s'inspire de l'his- toire et de la géographie de la Méditerranée antique, de la mythologie gréco-romaine et de la poésie épique. A travers ses œuvres, Twombly crée un monde iconographique, métaphorique et mythique souvent impénétrable, trans- posant des savoirs anciens en art contemporain. Ses griffonnages qu'on finit par voir comme les empreintes d'un sismographe dont les lignes, ourlées ou acérées, pointues, appuyées ou relâ- chées, semblent directement connectées aux battements de la main et des sensa- tions de l'artiste. Car c'est une œuvre pleine de nerfs et de nervures, filandreuse, corporelle et sexuée (les sil- houettes de corps féminins ou masculins s'étreignant, ainsi que des annotations crues, pointent ici ou là), qu'attisent la violence du monde et les conflits, intimes ou militaires. La source qui vient alimenter ses tensions, il la trouve à la faveur de ses voyages - sur des sites archéologiques sur- tout. C'est pour lui une révé- lation. Sa peinture paraît une peinture d'histoire et d'his- toires.

Maroc, love story À l'automne 1952, Cy Twombly reçoit une bourse de voyage du musée des beaux-arts de Virginie et quitte New York pour son premier voyage en Europe et en Afrique du Nord. Il retrouve l'artiste Robert Rauschenberg à Casablanca en octobre 1952, et tous deux se rendent à Marrakech et dans le massif de l'Atlas, puis à Tanger. Ils rendent visite à l'écrivain Paul Bowles à Tétouan et l'accompagnent en excursion dans les villages et les ruines romaines alen- tours. Twombly mène là-bas ses premières et dernières fouilles archéologiques. De retour à Rome en février 1953, Twombly étudie les objets ethnographiques et les artefacts tribaux exposés au Museo Nazionale Preistorico Etnografico Luigi Pigorini, dont il réalise des esquisses. Ces croquis nous sont parve- nus sous la forme des North African Sketchbooks [Carnets d'Afrique du Nord]. La plupart des œuvres qui subsistent de ce voyage sont des photogra- phies prises avec un Rolleiflex partagé par les artistes, ainsi que des croquis, conservés dans les archives de la Cy Twombly Foundation et de la Fondazione Nicola Del Roscio : ils offrent un regard unique sur l'affinité méconnue de

N é Edwin Parker Twombly en 1928 à Lexington (Virginie) et vite appelé Cy, comme son père (un ancien champion de base-ball), Twombly a traversé dans ses grandes largeurs la deuxième moitié de l'art du XX ème siècle. C'est à Rome que tout ou presque a également com- mencé pour lui. Mais Rome en Géorgie où il a fréquenté la Darlington School après s'être initié, enfant, au dessin. C'est surtout au tout début Par R. K. Houdaïfa

La source qui vient ali- menter ses tensions, il la trouve à la faveur de ses voyages.

taller entre Rome et Naples, à Gaeta, où il aura vécu jusqu’à la fin, construisant une œuvre monumentale au fil de

Cy Twombly par Rauschenberg

Made with FlippingBook flipbook maker