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ECONOMIE
FINANCES NEWS HEBDO
MARDI 28 FÉVRIER 2023
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Le nombre des nouvelles installations, au fil des ans, a été pratiquement exponentiel dans un marché pharmaceutique qualifié d’étroit et dont la croissance est restée rela- tivement limitée. La conséquence a été une importante baisse du chiffre d’affaires des
officines ayant conduit à des situations de faillites aussi bien pour d’anciennes pharmacies jadis florissantes que pour les nouvelles installations souvent qua- lifiées, à juste titre, d’installations sui- cidaires. Le numerus clausus aura été une solution pour limiter les dégâts. Cela consiste à limiter le nombre de pharmacies à ouvrir dans chaque région ou ville en fonction de la démographie locale et d’orienter les jeunes pharma- ciens vers d’autres régions (rurales ou
Les prix des médi- caments conti- nuent de baisser, alors que les prix des matières premières et les coûts logistiques au niveau mondial connaissent une flambée.
enclavées) manquant cruellement de phar- macies. Devant les effectifs importants de pharmaciens arrivant chaque année sur le marché, la solution consiste aussi à orienter les nouveaux pharmaciens vers d’autres activités où ils pourront aussi exercer leur art de la chimie, tels que les pharmacies hospitalières, la pharmacie industrielle, le contrôle des denrées alimentaires ou des eaux, etc. Car il n’est écrit nulle part qu’un diplômé en pharmacie ne peut travailler que dans une pharmacie d’officine. Ce secteur a aussi été durement touché par l’effri- tement du monopole pharmaceutique. La logique est que tous les produits de santé ne doivent être commercialisés que dans les pharmacies d’officines. Or, au fil des ans, de nombreux produits se vendent par- tout sauf dans les pharmacies. C’est le cas notamment des produits vétérinaires et des dispositifs médicaux, sans parler des com- pléments alimentaires et des produits cos- métiques. Aux pharmaciens, il n’est resté que les yeux pour pleurer, avec en plus des médicaments dont les prix n’ont cessé de baisser depuis 2014. Le secteur de la distribution, représenté par les grossistes-répartiteurs pharmaceu- tiques, a vu sa marge réduite par le décret de fixation des prix des médicaments, publié en 2013 et mis en application en 2014. Ce secteur, dont l’activité fait appel à de nombreux moyens de transport (camions, voitures utilitaires et motocyclettes) pour livrer les médicaments dans des délais très courts aux pharmacies, a également été impacté par les augmentations des prix des carburants dans un contexte de baisses continues des prix des médicaments, et donc de leurs marges absolues. Quant au secteur pharmaceutique indus- triel, il est confronté à des retards dans
la délivrance de diverses autorisations, et notamment des autorisations de mise sur le marché (A.M.M.) des médicaments et des dispositifs médicaux. Il y a aussi le problème des prix des médicaments qui continuent de baisser, alors que les prix des matières premières et les coûts logistiques au niveau mondial connaissent une flambée. Sans oublier le recours abusif aux importations pour des médicaments parfaitement fabri- cables au Maroc, alors que le potentiel de production de l’industrie pharmaceutique locale est pratiquement égal au double de la consommation de notre pays en médica- ments. F.N.H. : Selon vous, quels sont les axes de travail sur lesquels il fau- drait se pencher afin de renforcer la souveraineté pharmaceutique du Maroc ? A. B. : Le grand enseignement de la pandé- mie du Covid-19, puis de la guerre russo- ukrainienne, a été le caractère impératif de sauvegarder les souverainetés nationales, notamment celle sanitaire. La souveraineté pharmaceutique est au cœur de la souverai- neté sanitaire. Aujourd’hui, le monde connaît d’importantes pénuries et les produits de santé les plus essentiels n’y échappent pas. En Europe, des produits aussi basiques que le paracé- tamol ou l’amoxicilline manquent dans les pharmacies, et l’on parle de faire revenir les industries pharmaceutiques délocalisées en Asie vers leurs pays d’origine, même à des coûts plus élevés, au nom des souverai- netés sanitaires de ces pays. L’industrie pharmaceutique marocaine a été résiliente, y compris pendant les moments les plus forts de la pandémie. Les laboratoires ont
continué de tourner et de livrer aux gros- sistes-répartiteurs qui, à leur tour, ont régu- lièrement alimenté des pharmacies où les pharmaciens étaient tout le temps présents malgré les risques. Mais il ne faut pas rester dans l’autosatisfaction, car le monde actuel et le prochain sont porteurs de menaces. Nous devons au contraire renforcer, voire sanctuariser notre souveraineté sanitaire. Cela passe d’abord par le renforcement de la fabrication locale pour garantir les appro- visionnements de notre pays en produits de santé et la diversification des sources d’approvisionnement à l’importation pour les produits non fabricables au Maroc. Et ce, tout en visant la maîtrise rapide des biotechnologies de fabrication de pro- duits aussi indispensables que coûteux. Le chantier actuel de la généralisation de la couverture sanitaire universelle (CSU) va générer une très forte demande sur les médicaments, y compris pour les affections chroniques ou onéreuses. Comment satis- faire alors cette demande sans ruiner les caisses des organismes gestionnaires de la CSU ? La solution consistera à prioriser l’utilisation des médicaments génériques et des biosimilaires. Les génériques repré- sentent déjà l’essentiel de la fabrication locale, mais ce n’est pas encore le cas des biosimilaires dont la présence reste très timide. L’ensemble du secteur pharmaceu- tique attend avec impatience la mise en place de l’Agence marocaine des médica- ments et des produits de santé. Les pro- fessionnels dudit secteur s’attendent à ce que celle-ci fasse preuve de transparence et respecte les traitements avec célérité des différentes demandes d’autorisations, en sus de la simplification des procédures administratives. ◆
Il ne faut pas rester dans l’autosatis- faction, car le monde actuel et le prochain sont porteurs de menaces. Nous devons au contraire renforcer, voire sanc- tuariser notre souveraineté sanitaire.
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