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FINANCES NEWS HEBDO / JEUDI 19 SEPTEMBRE 2024
ECONOMIE
ports et des notes d’information sur la migration et le dévelop- pement de la Banque mondiale, qui concordent avec les chiffres de l’Office des changes et de Bank Al-Maghrib, confirment cette perspective prometteuse. En effet, les flux de remise des fonds vers le Maroc dépassent constamment les flux d’IDE, d’où l’apport macroéconomique incon- testable de ces fonds. L’apport immédiat de ces ressources financières réside dans l’alimen- tation continuelle de la caisse des avoirs extérieurs, sécurisant et améliorant ainsi la capacité du Royaume à financer ses importa- tions. De plus, ces fonds versés soutiennent l’économie et contri- buent à la création de la richesse nationale (PIB). Les canaux de transmission de cet apport au PIB sont la consommation, l’investis- sement et l’importation. Depuis 2019, la valeur des trans- ferts suit une tendance haussière. De même pour la part des trans- ferts de fonds des MRE par rap- port au PIB, qui peut dépasser le record de 8,5% réalisé en 2007 et atteindre ainsi les 10% du PIB en 2025. Les projections dans l’avenir sont aussi optimistes pour différentes raisons. D’abord, la nature contracyclique des flux de fonds, qui ont tendance à aug- menter à la suite des moments difficiles, soit dans les pays d’ori- gine des migrants, soit dans les pays d’accueil. Ainsi, l’augmen- tation soutenue de ces flux ces dernières années, en valeur et en part au PIB, s’explique par le fait que nous sommes encore à la phase post-covid et post-séisme d’Al Haouz. Et puis, les MRE sont séduits par la baisse des coûts de transfert ainsi que la fluidité et la rapidité de la digitalisation de ces opérations. J’ajouterais à cela l’effet Qatar 2022 et des chantiers et projets prometteurs, de grande enver- gure, lancés par le Royaume, y compris l’organisation de la Coupe du monde 2030. A mon avis, l’at- tachement émotionnel des nou- velles générations de Marocains du monde au Royaume devien- drait plus fort, et leur engagement
La valeur des fonds transférés par les MRE est plus élevée que les autres flux financiers en direction du Maroc.
dans la vie sociale et économique de leur patrie serait plus intense. J’estime également qu’on a droit à l’optimisme, vu l’augmenta- tion constante du nombre des migrants et l’évolution culturelle et sociale des nouveaux entrepre- neurs MRE qui deviendront plus créatifs et plus aventuriers dans des investissements à forte valeur ajoutée. Il convient de dire que même avec une contribution de 10% au PIB, cela reste faible comparativement aux nations où l’apport de fonds de leurs migrants au financement des déficits du compte courant et des finances publiques est plus élevé. A titre d’exemple, selon la Banque mondiale, la part de ces flux au PIB au Tadjikistan est de 51%, 44% aux Tonga, 36% au Liban, 34% aux Samoa et 31% à la République kirghize. F.N.H. : Comment sont réparties ces entrées de flux au niveau du Maroc ? Il est révélé que seulement 2% de ces flux vont vers le secteur productif et la majeure partie de l’inves- tissement vers l’immobi- lier. Qu’est-ce qui cause ce fossé ? Pr H. E. : Avant de discuter du
pourquoi, je voulais d’abord pré- senter succinctement la com- position des fonds transférés. Les dépenses de consomma- tion courante représentent près de 71% de la structure globale. En deuxième position, avec près de 21%, on trouve des dépôts effectués auprès des institutions financières. Le reste, presque 8% seulement, est destiné à financer des investissements, de toutes sortes. Maintenant, dans les 8% des transferts monétaires qui vont à l’investissement, l’immobilier s’accapare l’essentiel de l’inves- tissement, à plus de 80%. Loin derrière, viennent les autres sec- teurs représentant ainsi moins de 20% des fonds investis et presque 2% du global des flux monétaires émis par les MRE vers le Maroc. Je profite de l’occasion pour atti- rer l’attention quant aux inégali- tés inter et intra-régionales de
l’utilisation des fonds transférés. Les investissements sont par- ticulièrement importants dans certaines régions ou provinces d'origine, mais dans d'autres ils s'avèrent faibles, voire inexis- tants par rapport aux flux de transferts reçus. De manière générale, les investissements au Maroc, notamment hors immobilier, demeurent en deçà du poten- tiel et des ressources des MRE. Différentes raisons peuvent jus- tifier ce phénomène. Le manque d’information et de savoir dans des secteurs producteurs mais nouveaux ou à haute tech- nicité entrave le plein poten- tiel économique. De surcroît, les avantages fiscaux actuels et les mesures incitatives ne sont pas assez pragmatiques et avantageux pour stimuler des investissements lourds ou à grand risque. Outre ces rai- sons objectives, je vois que le facteur culturel et cognitif est aussi déterminant à ce niveau. L’entrepreneur marocain, bien qu’il réside à l’étranger, est généralement loin du profil «Schumpetérien», l’innovateur et le preneur de risques. Du coup, en l’absence de mesures incita- tives plus fortes et plus ciblées,
«L’apport immédiat de ces ressources financières réside dans l’alimentation continuelle de la caisse des avoirs extérieurs, sécurisant et améliorant ainsi la capacité du Royaume à financer ses importations».
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