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ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 20 NOVEMBRE 2025

Soutien aux entreprises Armer les TPME pour gagner la bataille de l’investissement et de l’emploi Le gouvernement a lancé mardi 12 novembre le nouveau dispositif de soutien aux TPME. Une subvention pouvant atteindre 30% de l’investissement éligible. Mais sa faisabilité sur le terrain interroge encore.

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Par Désy M.

u’attendre du nouveau dispositif des TPME ? La question se pose à toutes les parties prenantes ayant œuvré à la conception et l’élaboration de ce dernier, notamment le gouvernement et le patronat. Mais aussi à ceux qui l’implémenteront sur l’étendue du territoire national, à savoir les Centres régionaux d’inves- tissements (CRI), et aux TPME elles-mêmes. Rappelons que le Maroc entend créer 500.000 emplois et mobi- liser 550 milliards de dirhams d’investissements d’ici 2026. Et pour y parvenir, il fait le pari d’une croissance portée par l’an- crage local, l’emploi stable et l’initiative privée qui, pour l’ins- tant, est en dessous des attentes avec un investissement plafonné à 25% du PIB national. Il faut donc inverser la tendance en mettant en place ce nouveau dis- positif public de soutien, ciblant directement les TPME, en leur offrant des aides sur-mesure pour investir, recruter et se déve- lopper partout sur le territoire.

et des projets privés rarement assurés d’un financement stable. L’idée d’une subvention pouvant atteindre 30% de l’investisse- ment l’a interpellé. «J’ai pensé que c’était enfin l’occasion de moderniser mon matériel, d’acheter une mini-pelle ou un camion supplémentaire», dit-il. Mais il ajoute aussitôt : « quand j’ai compris qu’il fallait un chiffre d’affaire d’un million de dirhams au minimum et apporter 10% en fonds propres, je me suis dit que ce n’était pas pour nous. Dans les villages, on travaille quand il y a de quoi travailler, pas avec des montants pareils », renchérit l’entrepreneur. Pourtant, il répond à deux des critères essentiels du disposi- tif, à savoir la situation géogra- phique qui lui donne accès à la prime territoriale de 15% et celui de la création d’emplois. «Les jeunes sont là, prêts à travailler», insiste-t-il. Toutefois, sans garan- ties bancaires, ses perspectives d’investissement restent fragiles. Le CRI pourra l’accompagner dans son dossier, mais pas lever l’obstacle structurel des garan- ties demandées par les banques, souvent supérieures au montant sollicité.

Cet outil adossé à la nouvelle charte d’investissement promet des subventions directes allant jusqu'à 30% de l'investissement éligible via trois leviers : emploi, territoire et activités prioritaires. «Ce dispositif peut résoudre le problème de financement, mais sans résorber les autres pro- blèmes auxquels font face les TPME, à savoir la concurrence déloyale du secteur informel, le taux élevé des faillites, le retard de paiement des mar- chés publics et même l’accès à ces marchés. Encore faut-il prévoir des mesures d’accompa- gnement pour donner toutes les chances à la réussite de ces pro- jets», souligne Nizar Benyoussef, docteur en sciences de gestion. Au vu de ces défis, on en vient à se demander comment concrè- tement ce dispositif est perçu par les TPME qui constituent plus de 90% du tissu écono- mique national ? Omar, entrepreneur dans le BTP issu de la province rurale de Tinghir, a écouté l’annonce avec un mélange d’espoir et de prudence. Son entreprise fami- liale, qui emploie une dizaine d’ouvriers, travaille par à-coups au gré des chantiers publics

À Casablanca, la situation de Fatima, à la tête d’une petite société de services hôteliers, est différente, mais l’interroga- tion est la même. Son entreprise, qui intervient auprès d’hôtels et de maisons d’hôtes pour l’inten- dance et la gestion des équipes de housekeeping, affiche un chiffre d’affaires qui la rend éli- gible aux seuils fixés par les arrê- tés. Elle voit dans ce dispositif une réelle opportunité d’apporter une valeur ajoutée à son activité, notamment dans la formation de nouvelles équipes. «Le tourisme bénéficie d’un ratio d’emploi plus souple, et dans mon secteur, il est possible de créer rapidement des postes» , témoigne-t-elle. Elle nuance toutefois que «même pour une petite structure orga- nisée comme la mienne, réunir 10% de fonds propres, c’est un effort énorme. Nous sommes dans un secteur où les contrats sont irréguliers et les impayés fréquents». Si les subventions promises deviennent un effet de levier bancaire, son entreprise pourrait franchir un palier. Mais sans cela, c’est un pari risqué. Ces deux cas illustrent les pre- miers défis d’un dispositif ambi- tieux, mais qui repose sur des

L’État soutient, mais l’entreprise doit démontrer sa capacité à investir. C’est un partage de risque, pas un financement à blanc.

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