FNH N° 1083

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BOURSE & FINANCES

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 3 NOVEMBRE 2022

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OPCI

◆ Le Projet de Loi de Finances 2023, s’il est adopté en l’état, signera l’arrêt de mort des OPCI. Les acteurs se disent «traumatisés» par les annonces du gouvernement. L’Etat retourne sa veste L ancés en grande pompe durant l’été 2019, les organismes de placement col- lectif en immobilier Par A. Hlimi

des banques à liquéfier leurs bilans. À transformer des biens immobiliers en argent frais qui sera redéployé dans l’économie. L'Etat, lui-même, les considère comme un ins- trument à exploiter pour la sor- tie de crise. Deuxièmement, le cadre réglementaire a été extrêmement bien verrouillé par l’AMMC, tout en offrant de la souplesse aux opéra- teurs en matière d’opportunité business. La profession a sou- vent salué, sur notre support, la rapidité avec laquelle les textes ont été adoptés ainsi que leur pertinence et le champ du possible (possibilité d'être cotés, etc.). Troisièmement, la fiscalité des OPCI a facilité leur développement en en faisant des véhicules neutres de ce point de vue-là. Et c’est jus- tement ce dernier pilier que le PLF 2023 remet totalement en cause.

nement prévoit de supprimer l’abattement de 60% au titre des dividendes remontés par les OPCI à leurs actionnaires. Concrètement, dans la régle- mentation actuelle, lorsqu’un OPCI verse 100 DH de divi- dendes à son actionnaire, seuls 40 DH sont imposables. L’Etat souhaite supprimer totalement cet avantage et soumettre la totalité des dividendes à l'impôt. Notre enquête nous a permis de comprendre la raison auprès d’opérateurs du secteur. L’Etat estime que certains investisseurs institu- tionnels utilisent cet abatte- ment pour faire de l’optimi- sation fiscale «appuyée». Ils apportent leurs actifs à un fonds dont ils sont les action- naires exclusifs, payent des loyers au fonds, puis récu- pèrent ces loyers sous forme de dividendes défiscalisés à hauteur de 60%, tout en géné- rant une plus-value d’apport au passage. Sur le papier, ce raisonnement est juste. Mais sur le terrain, l’on constate que les principaux actionnaires des fonds qui ont apporté des biens à leurs fonds, ont vendu une partie des parts à d'autres actionnaires externes. Cela se traduit par le paiement d’un IS excep- tionnel au profit de l’Etat et par l’arrivée de nou- veaux investisseurs dans le fonds qui partagent la richesse créée, balayant l'avantage fiscal décrit plus haut. Les opérations les plus médiatisées ces dernières années, notamment dans le secteur bancaire, ont

toutes connues ce sort. L’autre «pseudo abus» repro- ché à certains investisseurs institutionnels et qui en fait n’en est pas un, est d’être à la fois actionnaires des OPCI et locataires des actifs détenus par ces mêmes OPCI, ce qui contribuerait à optimiser fis- calement les loyers versés aux OPCI détenus. Cet argument n’est pas recevable dans la mesure où ces mêmes acteurs n’ont fait que remplacer une partie des amortissements desdits actifs, constatés dans leurs comptes, par les loyers qu’ils versent aux OPCI ainsi créés, ce qui se traduit par une quasi neutralité sur leur résultat. Par ailleurs, comme indiqué précédemment, une grande partie de ces acteurs ne bénéficient pas de la tota- lité des dividendes versés par lesdits OPCI puisqu’ils en ont cédé une partie des actions détenues. Pour la rédaction de cet article, OPCI, banques et ins- titutionnels témoignent sous anonymat pour des raisons évidentes. Mais le discours qui ressort de nos discussions est que quand bien même l’Etat a constaté des abus, il aurait fallu légiférer sur les abus et leurs causes et non sur le véhi- cule en entier. «Faut-il interdire aux gens de conduire à cause des accidents de la circulation ou faut-il lutter contre les acci- dents ?», résume, médusé, un acteur du secteur bancaire. Des conséquences drama- tiques pour le secteur Dans la profession, c’est

(OPCI) ont connu une ascen- sion fulgurante. Ni la crise sanitaire et encore moins les tensions géopolitiques n’ont eu raison de la croissance à deux chiffres de cette indus- trie. On parle aujourd’hui, après 3 années quasi pleines d’activité, d’une quarantaine de fonds, gérés par 9 sociétés de gestion avec un encours qui dépasse les 37 milliards de dirhams. Dans l’histoire des véhicules de placement au Maroc, des OPCVM aux fonds de titrisation, en passant par les contrats d’épargne classiques et les OPCR, aucun instrument n’a connu un tel démarrage. Et les raisons sont nombreuses. Premièrement, ce mécanisme répond à un réel besoin des investisseurs institutionnels et

La sup- pression de l’abattement va rendre les foncières classiques, pourtant moins régle- mentées, plus avantageuses que les OPCI.

Le raisonnement de l’Etat Dans le PLF 2023, le gouver-

Dans le PLF 2023, le gouvernement prévoit de suppri- mer l’abattement de 60% au titre des dividendes remon- tés par les OPCI à leurs actionnaires.

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