Hors Se<0301>rie 49 Final 2

P OLITIQUE

directe, dont ils vantent aujourd’hui les mérites, ils l’avaient rejetée lorsqu’ils étaient avec nous au gouvernement. Et même cette aide, dans sa forme actuelle, est insuffisante. C’est une illusion de solidarité. F. N. H. : Vous critiquez la conception gouver- nementale de «l’Etat social» en la qualifiant de «produit défectueux». Quelle serait, selon vous, une version aboutie et opérationnelle de ce modèle pour le Maroc ? N. B. : Dans un véritable Etat social, cer- taines notions ne devraient pas être gal- vaudées : le service public, la justice sociale concrète et une santé publique de qualité. Cela implique non seule- ment des hôpitaux régionaux ou uni- versitaires performants, mais aussi une offre de soins accessible et digne sur l’ensemble du territoire. Or aujourd’hui, la réalité est tout autre : l’essentiel de l’offre de soins est désormais accaparé par le secteur privé. Plus de 400 cli- niques privées ont vu le jour récem- ment. Pourquoi ? Parce que 80% des fonds de la CNSS et 95% de ceux de la CNOPS sont absorbés par ces établis- sements privés. C’est tout simplement alarmant. Dans ces conditions, comment espérer financer durablement l’enseignement public ou le système de santé public ? C’est là un échec de plus à mettre au passif de ce gouvernement. Une preuve de plus que «l’Etat social» dont il se réclame n’est qu’un slogan trompeur. Un Etat social digne de ce nom, c’est aussi l’élargissement de la démocratie. C’est l’accès à la libre initiative et le soutien à l’entreprise nationale pour qu’elle puisse pleinement jouer son rôle économique, mais aussi social. Car c’est elle qui crée de la richesse, investit et embauche. Mais là encore, ce gouvernement tourne le dos à cette vision. Non pas par ignorance, mais parce que, fondamentalement, ils ne croient pas à l’idée même d’un Etat social. Car l’Etat social, c’est d’abord une conviction. C’est une philosophie issue des valeurs de gauche, avec une exigence de lutte contre la pauvreté et une ambition d’élargir véritablement la classe moyenne. Les chiffres sont là : le bilan est désastreux, contrairement au discours officiel. Face à cela, il est temps de proposer une alternative. Une vision différente, ambitieuse et résolument tournée vers le progrès.

levier pour mettre en échec ce gouver- nement. Je saisis l’occasion que vous m’offrez pour relancer cet appel : si l’on veut faire barrage au pouvoir de l’argent et à la corruption (ou fassad, comme on dit en arabe) qui gangrènent aussi bien le champ politique qu’électoral, alors il n’y a qu’une seule voie : une participation populaire massive et un vote sanction à l’égard de ce gouverne- ment. Et dans cette dynamique, nous espérons que le PPS bénéficiera d’un soutien large et résolu, porté par ce vote du changement. F. N. H. : Face au désenchantement politique croissant, que propose concrètement le PPS pour redonner envie de voter, en particulier chez les jeunes et les classes moyennes ? N. B. : Nous travaillons actuellement à l’éla- boration de notre programme. Il s’ap- puie sur les fondements que nous avons défendus durant notre action d’oppo- sition à ce gouvernement. Aujourd’hui, nous lançons une vaste concertation, en particulier avec les jeunes, et plus largement avec l’ensemble des citoyens, afin de co-construire, de manière par- ticipative et citoyenne, un programme qui puisera à la fois dans nos engage- ments passés et dans les orientations du Nouveau modèle de développement, un document officiel que le gouvernement actuel a pourtant relégué aux oubliettes. Notre ambition est claire : élargir les espaces de démocratie et renforcer la participation citoyenne. On ne peut pas avancer sans un portage politique fort et sans l’adhésion active de toutes les composantes de la société au processus du changement. Et même lorsque les décisions sont difficiles sur le plan politique, économique ou social, il faut des femmes et des hommes capables de les expliquer, que ce soit au Parlement, dans les associations ou lors

de réunions publiques. La réforme ne peut avancer que si elle est comprise, portée et défendue. Nous comptons également mettre en œuvre une véritable stratégie de relance économique. Une politique où l’Etat retrouve son rôle d’orientation et de régulation, et où l’investissement public devient un levier majeur. Le gouverne- ment actuel avait promis 550 milliards de dirhams d’investissements pour la création de 500.000 emplois. Nous attendons toujours de voir la couleur de ces promesses : ni les investissements, ni les emplois ne sont au rendez-vous. Un échec de plus à mettre à leur actif. Nous voulons au contraire promouvoir une politique audacieuse de soutien à l’entreprise nationale, encourager l’in- vestissement productif et instaurer des mécanismes rigoureux de transparence pour lutter contre la rente, la corrup- tion et les conflits d’intérêts. Il s’agit de restaurer la confiance des porteurs de projets et des entrepreneurs, condi- tion indispensable pour faire reculer le chômage, créer des opportunités et remettre l’économie sur les rails d’une croissance réelle et inclusive. Sur le plan social, nous entendons cor- riger les erreurs flagrantes de l’actuelle majorité. On nous parle de généralisa- tion de la couverture sociale, mais la réalité est tout autre. Les données du CESE et du HCP sont édifiantes : 8,5 millions de Marocains sont aujourd’hui sans couverture. Autrefois bénéficiaires du Ramed, ils se retrouvent désormais sans filet de sécurité, ni dans l’AMO, ni dans l’AMO solidarité. Quant à l’aide

Selon Benabdellah,

le gouvernement n’a pas respecté ses engagements

en matière de création d’emplois.

Tout ce qu’on retient de l’action de ce gouvernement se résume à une flambée des prix, un chômage endémique, des conflits d’intérêts et un désert politique.

FINANCES NEWS HEBDO / HORS-SÉRIE N°49 106

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