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biens de spécialité, les niches B2B qui échappent à l’export grand public», explique-t-il. Pour lui, une politique de soutien à l’exportation réellement tournée vers la création de valeur ne peut faire l’économie d’un repérage fin de ces niches, ni d’une réflexion straté- gique sur les secteurs porteurs hors des sentiers battus.

à l’image du label Made in Morocco». La diversification souhaitée par le gou- vernement semble osciller entre deux logiques : d’un côté, l’élargissement de la base exportatrice à plus d’entre- prises; de l’autre, la montée en gamme sur les filières existantes. Or, ces deux ambitions ne requièrent pas les mêmes outils. «C’est là où le flou persiste : veut- on exporter davantage de produits clas- siques avec plus d’acteurs, ou veut-on pousser certains secteurs vers l’innova- tion et la spécialisation ? Les deux sont légitimes, mais il faut des choix cohé- rents» , estime-t-il. D’autant que les débouchés eux- mêmes évoluent. L’Europe reste le premier client, mais les normes y deviennent de plus en plus strictes. Les marchés africains offrent des volumes croissants, mais demandent des produits adaptés, avec moins de contraintes techniques mais davantage de flexibilité logistique et commerciale. Le Maroc a encore des cartes à jouer sur le terrain exportateur, à condition d’assumer une stratégie de transfor- mation de son offre. L’identification des produits à fort potentiel ne suffira pas si elle ne s’accompagne pas d’un investissement soutenu dans la capaci- té productive locale, la certification, la logistique, et surtout dans la formation du capital humain. Le potentiel existe donc. Il est sectoriel, mais aussi structurel. La feuille de route peut réussir à le révéler, à condition de comprendre que la croissance n’est plus une affaire de flux. Elle est deve- nue une affaire de contenu.

Le Maroc vise une nouvelle étape dans sa politique d’exportation : sortir de la dépendance de quelques filières dominantes et explorer de nouveaux secteurs à fort potentiel.

fique ou technologique. Le secteur du textile, quant à lui, tente une reconversion vers le haut de gamme. Le repositionnement vers des vêtements techniques ou des tissus recyclés, à plus forte intensité environ- nementale ou technologique, pourrait offrir un refuge face à la concurrence asiatique, qui domine le segment des produits à bas prix. Mais cette muta- tion reste encore marginale, portée par quelques industriels pionniers. Dans l’électronique, la production de composants et de capteurs, notam- ment pour l’industrie automobile ou les dispositifs de gestion de l’énergie, commence à émerger. Néanmoins, les capacités de production locales restent fragmentées et ne permettent pas encore de répondre à une demande internationale de masse. Le défi réside autant dans la consolidation de la filière que dans l’industrialisation à l’échelle. Enfin, les cosmétiques naturels à base d’argan, de figue de barbarie ou de plantes médicinales bénéficient d’une forte notoriété à l’international. Mais cette image ne s’est pas encore traduite en volumes exportés conséquents. Les chaînes de production sont encore majoritairement artisanales, peu nor- malisées, et rarement capables de fran- chir les exigences d’exportation vers les marchés à forte réglementation. «On a souvent tendance à chercher des relais de croissance là où l’on produit déjà» , constate Tahiri. « Or, le vrai gise- ment est parfois dans ce qu’on ne voit pas : les produits intermédiaires, les

Entre contrainte productive et arbitrage stratégique

Mais le potentiel ne dépend pas que des produits : il dépend surtout de la capacité du pays à les produire de façon compétitive, aux normes interna- tionales, et en quantités suffisantes. Or, c’est là où le bât blesse. De nombreuses PME n’ont pas les certifications néces- saires, ni les capacités d’investissement pour adapter leurs lignes de production aux exigences étrangères. L’écosystème industriel reste fragmenté, et les passe- relles entre R&D, production et logis- tique sont encore faibles. «Le Maroc a du potentiel, mais il lui faut des filières, pas seulement des usines» , résume notre interlocuteur, ajoutant que «ce qu’on attend d’un pays expor- tateur aujourd’hui, c’est une cohérence sectorielle. C’est-à-dire une offre lisible, stable, soutenue par une marque pays

Le vrai gisement est parfois dans ce qu’on ne voit pas, notamment les produits intermédiaires, les biens de spécialité, les niches B2B qui échappent à l’export grand public.

FINANCES NEWS HEBDO / HORS-SÉRIE N°49 14

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