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E XPORT

MACF, normes ESG, décarbonation…, le Royaume n’a pas le choix que de verdir ses exportations. En 2026, les exportateurs marocains dans certains secteurs devront prouver la sobriété carbone de leurs produits ou s’acquitter d’une taxe carbone européenne, gage de leur compétitivité dans ce marché traditionnel. Pas le choix que de verdir Exportations vertes

L

e monde du com- merce international est en pleine mutation. L’environnement, long- temps relégué au second

ment en vigueur dès 2026. Il impo- sera une taxe carbone sur les produits importés par l’Union européenne, dont l’empreinte carbone est jugée excessive. Le ciment, l’aluminium, l’électricité, les engrais ou encore l’hydrogène sont les premières filières concernées. D’autres suivront rapidement. Si les industriels maro- cains ne se mettent pas en conformi- té, leurs exportations seront soumises à cette nouvelle fiscalité environne- mentale, dont le montant pourrait atteindre entre 80 et 100 euros la tonne de CO2. Lors de la semaine de la synergie verte organisée en mai dernier à Rabat, Matilde Ceravolo, Cheffe de la section économie-environnement et com- pétitivité à la Délégation de l’Union européenne au Maroc, avait tenu à clarifier la nature de cet instrument. «Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières n’est pas une taxe, mais un outil de justice environnementale. Il vise à mettre tous les producteurs, qu’ils soient en Europe ou ailleurs, sur un pied d’égalité en matière d’émis- sions carbone, afin d’éviter les délo- calisations polluantes et garantir une concurrence loyale». Une précision essentielle, alors que ce mécanisme est parfois perçu comme une mesure protectionniste déguisée.

Mohamed Boiti alerte néanmoins sur les conséquences concrètes pour l’économie marocaine : «À partir de 2026, si les industriels marocains n’in- tègrent pas cette logique, ils devront payer une taxe carbone sur leurs exportations vers l’Europe. Et s’ils ne la paient pas ici, c’est l’importateur européen qui la versera, mais avec un pouvoir de négociation tel qu’il la répercutera automatiquement sur notre exportateur, via une baisse de prix». Face à cette réalité, l’expert recom- mande au gouvernement marocain de prendre les devants : «Je recom- mande fortement au ministère des Finances d’appliquer dès janvier 2026 une taxe carbone pour un montant équivalent à celui fixé par l’UE. Autrement, l’Union bénéficie- ra de la différence en la percevant au détriment de nos recettes natio- nales» . Cette taxe, prélevée locale- ment, pourrait être réinvestie dans la transition énergétique des filières exportatrices marocaines. «C’est une manière pragmatique de transformer une contrainte en levier de finan- cement pour notre développement durable» , insiste-t-il. Matilde Ceravolo se veut rassurante quant à la place du Maroc dans ce nouveau paysage commercial. «Le

plan des stratégies commerciales, s’impose désormais comme un déterminant central de la compéti- tivité. Le Maroc, fortement tourné vers l’export, voit ses ambitions éco- nomiques mises à l’épreuve par des exigences environnementales de plus en plus strictes. Le développement durable et les exportations vertes deviennent ainsi une condition de survie sur les marchés internatio- naux. En ligne de mire, l’Europe et son mécanisme d’ajustement car- bone aux frontières (MACF), qui va reconfigurer les règles du commerce extérieur mondial. Pour le professeur Mohamed Boiti, expert en transition énergétique et décarbonation, il ne fait aucun doute que le sujet est désormais «crucial pour l’avenir des échanges extérieurs marocains». Selon lui, ce nouveau cadre réglementaire «constitue un enjeu majeur, qui va impacter direc- tement les exportateurs marocains et les réserves de change de Bank Al-Maghrib». Le MACF, pierre angulaire du pacte vert pour l’Europe, entrera pleine-

FINANCES NEWS HEBDO / HORS-SÉRIE N°49 52

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