FNH N_ 1203

ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 10 JUILLET 2025

encourageants, mais restent partiels. Sur plus de 900 projets industriels identifiés dans le cadre de ce programme, plus de 140 ont été validés pour un investissement global dépas- sant 40 milliards de dirhams, avec la promesse de créer une dizaine de milliers d’emplois. Des secteurs comme le tex- tile technique, l’agro-indus- trie, la plasturgie et les pièces de rechange automobiles ont connu une impulsion notable. Cela dit, l’impact réel sur la balance commerciale reste encore limité. Les délais de réalisation, les contraintes technologiques, l’accès au financement et la dépendance aux intrants importés freinent parfois la mise en œuvre rapide des projets. Autrement dit, la substitution ne peut pas être immédiate, car elle suppose un écosystème industriel com- plet, des compétences locales qualifiées et une politique d’ac- compagnement plus intégrée. Il faut donc saluer l’ambition de ce programme, tout en soulignant qu’il s’agit d’un tra- vail de fond, à inscrire dans la durée, et qui nécessitera une synergie renforcée entre l’État, les industriels, les centres de recherche et les opérateurs financiers. F. N. H. : Quelles pistes prioritaires devraient être privilégiées pour réé- quilibrer durablement la balance commerciale du Maroc, dans un contexte marqué par la relance industrielle et les ambi- tions exportatrices du Royaume. M. B. : Le rééquilibrage durable de la balance com- merciale du Maroc exige une approche multidimensionnelle, articulée autour de trois leviers prioritaires. Premièrement, il est indispen- sable de renforcer la capacité productive locale dans les seg- ments à forte valeur ajoutée. Cela suppose d’accélérer l’in- tégration industrielle, notam- ment en développant des écosystèmes capables de pro-

nisseurs locaux à plus forte valeur ajoutée. Ce modèle de montée en gamme peut aussi inspirer le développement de nouveaux secteurs indus- triels, tels que la production de trains à grande vitesse et la fabrication de produits élec- troniques. Par ailleurs, la transformation de l’agriculture vers l’agro- business et l’agro-industrie constitue un levier essentiel. Étant donné la part impor- tante de l’agriculture dans le PIB, cette montée en valeur ajoutée permettra de renfor- cer la compétitivité des expor- tations agricoles. Enfin, l’ouverture prochaine des ports de Nador West Med et de Dakhla Atlantic offre une opportunité stratégique majeure. Ces infrastructures doivent être mises à profit pour créer de nouvelles zones industrielles qui attireront les investissements étrangers, notamment dans les régions du nord et du sud du pays. Ces pôles industriels inno- vants renforceront l’attracti- vité du Maroc et faciliteront la montée en gamme indus- trielle, contribuant ainsi à un rééquilibrage durable de la balance commerciale. Cette combinaison d’efforts sectoriels et territoriaux peut véritablement repositionner le Maroc sur une trajectoire de souveraineté économique et de croissance équilibrée. ◆  Plus de 140 projets validés sur les 900 identifiés dans le cadre du programme de substitution aux importations, pour un investissement global de plus de 40 milliards de dirhams.

duire localement les intrants stratégiques des filières expor- tatrices (automobile, aéronau- tique, pharmacie, etc.). Il faut aller au-delà de l’assemblage pour monter en gamme et gagner en autonomie. Deuxièmement, le Maroc doit adopter une stratégie expor- tatrice plus agressive et mieux ciblée. Cela implique de diver- sifier les marchés d’exporta- tion, notamment vers l’Afrique subsaharienne, l’Amérique latine et l’Asie du Sud-Est, tout en consolidant les posi- tions dans l’UE. Il faut aussi promouvoir le label «Made in Morocco» comme un gage de qualité, en misant sur la certi- fication, la normalisation et la compétitivité logistique. Enfin, la troisième priorité est énergétique. Le Royaume doit réduire structurellement sa facture énergétique à travers une transition vers les énergies renouvelables, domaine dans lequel il a un avantage compa- ratif indéniable. Produire loca- lement une part croissante de son énergie est une condition essentielle pour alléger la pres- sion sur les importations. Seule une politique industrielle cohérente, appuyée par une diplomatie économique proac- tive et une stratégie énergé- tique structurée, pourra per- mettre au Maroc de corriger durablement ses déséquilibres extérieurs tout en consolidant sa souveraineté économique.

F. N. H. : À la lumière des dernières données, quels sont les secteurs indus- triels qui vous semblent aujourd’hui stratégiques pour inverser la tendance du déficit commercial et renforcer la souveraineté productive du Maroc à moyen terme ? M. B. : Plusieurs secteurs se distinguent particulièrement pour inverser la tendance du déficit commercial et renfor- cer la souveraineté productive du Maroc. D’abord, l’industrie du phos- phate, portée par l’Office ché- rifien des phosphates (OCP), connaît un réel boost. L’OCP poursuit une stratégie ambi- tieuse de diversification et de personnalisation des engrais, adaptés aux besoins spé- cifiques de chaque pays et marché, en réponse à une demande mondiale crois- sante. Cela dynamise forte- ment les exportations maro- caines. Dans l’automobile et l’aéro- nautique, il est primordial d’augmenter le taux d’intégra- tion locale en attirant davan- tage d’investisseurs étrangers et en développant des four-

Pour corriger durablement ses déséquilibres extérieurs, le Maroc devra s’appuyer sur une politique industrielle solide, une diplomatie économique proactive et une stratégie énergétique bien structurée.

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