ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO VENDREDI 28 NOVEMBRE 2025
drés. Ensuite, l’existence d’une autorité de sûreté nucléaire forte, indépendante à la fois des opérateurs industriels et de l’exécutif, capable de «porter un jugement objectif sur toutes les phases du projet, et d’être prête à émettre des décisions radicales à l’encontre des enjeux économiques» , écrit Nechfate. À cela s’ajoute un point rarement dis- cuté dans le débat public, mais central dans l’analyse : l’état du réseau de l’ONEE. Une centrale nucléaire, surtout opérée en base, suppose un réseau moderne, interconnecté, capable d’absorber et de redistribuer en toute sécurité une production continue de plusieurs centaines de mégawatts. «Si le réseau électrique est instable ou mal dimensionné, il peut devenir incapable d’absorber toute l’énergie produite, ce qui oblige parfois à réduire la puis- sance de la centrale, voire à arrêter une tranche, ce qui n’est ni optimal ni éco- nomique» , rappelle l’étude. Autrement dit, on ne plaque pas une centrale sur un réseau fragilisé sans repenser en profondeur la planification, les investis- sements, la gouvernance de la distribu- tion et du transport. Reste enfin la question qui fâche : celle du financement. Un programme nucléaire - même limité à quelques SMR - implique des montants qui se chiffrent en dizaines de milliards de dirhams. Un financement 100% public serait difficilement soutenable pour un État déjà très sollicité sur d’autres fronts (eau, santé, éducation, infras- tructures sociales). Les modèles étran- gers sont éclairants : en Égypte, la cen- trale d’El Dabaa est financée à 85% par un prêt d’État russe, le reste par des investisseurs privés; les Émirats Arabes Unis ont bâti Barakah sur un montage associant capitaux nationaux, ingénie- rie sud-coréenne et régulation domes- tique très solide. Pour le Maroc, les partenariats public-privé, sur le modèle des centrales solaires Noor, ou des montages combinant dette bancaire et dette souveraine apparaissent comme les options les plus réalistes, au prix d’une dépendance accrue vis-à-vis des bailleurs. Approche graduelle Alors, le Maroc doit-il franchir le pas ? La réponse, pour l’instant, est moins dans le «oui» ou le «non» que dans le «quand» et le «comment» . Pour Nechfate, la condition sine qua non est claire: «avant d’investir dans les
nique, c’est un engagement politique de long terme. S’il décide d’y entrer, le Maroc le fera en sachant qu’il n’achète pas seulement des réacteurs, mais qu’il choisit une architecture énergé- tique, industrielle et diplomatique qui le liera pour plusieurs générations. C’est précisément pour cela que le débat doit s’ouvrir maintenant, tant que l’atome demeure un choix stratégique, et non une trajectoire imposée par les circonstances. ◆
À la fin des années 1970, Hassan II envisageait déjà la construction d’une centrale sur l’Atlantique, entre Safi et Essaouira, dans le sillage du premier choc pétrolier.
adossée à une montée en puissance maîtrisée de la filière uranium-phos- phate et à une stratégie de partenaires assumée, et non subie. Le nucléaire n’est pas un pari tech-
SMR, il est nécessaire de résoudre les défis structurels de l’ONEE ainsi que ceux du marché de production élec- trique marocain». Charaf Louhmadi, lui, plaide pour une approche graduelle,
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