FNH N° 1061

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CULTURE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 7 AVRIL 2022

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Débat

◆ Dans la série des communications suscitées par h ORIE zo TALISME , nous avons relevé celle de la critique d’art SyhamWeigant, pour l’intérêt qu’elle présente. Verticalité occidentale...

P uisqu’il s’agit de postuler ici l’horizontalité orientale, j’ai choisi pour ma part d’établir une démonstration inversée qui considère la vertica- lité occidentale... Soit une démarche soustractive dont je m’expliquerais en conclusion. Une question de temps... Nous vivons, nous mourrons, et c’est notamment pour quantifier et opérer une gestion de nos vies plutôt que de notre mort, que la mesure du temps se trouve au cœur des préoccupations occidentales. L’Histoire, la vitesse, l’hé- donisme jouissif du maintenant comme célébration de la vie plutôt que de la mort forment une première dichotomie quant aux cultures non occidentales, dont les rites funéraires, le respect dû aux morts et aux ancêtres ouvrent la voie à un monde aussi intéressant, voire davantage que celui de notre fini- tude ici-bas. Tout s’arrête quand tout commence. Enterrer les corps permet de nourrir la terre, quand l’incinéra- tion qui produit de la fumée et des matières éthérées disparaît dans l’air. Et ceci constitue un premier révélateur de l’opposition, verticale/horizontale qui oppose l’Occidental à l’Oriental ou plutôt au non-occidental, puisque j’ai choisi dans ma communication de considérer différentes altérités, dont l’africanité plutôt que l’arabité orien- tale stricto sensu. Une opposition qui, lorsque l’on considère les différents présupposés, nous éclaire davantage sur les conséquences de cette vertica- lité à l’étude : le chimique qui permet aux corps de disparaitre dans une désincarnation et une métaphysique transcendantale de l’immanence. À l’inverse, la réincarnation organique que permet l’enfouissement des corps

suppose plutôt une forme de perma- nence réincarnée en une pluralité de matières, dont les cultures non-hégé- moniques cultivent une pluralité de considérations métaphysiques. C’est dire que l’obsolescence programmée au cœur du capitalisme américain et européen s’applique également aux hommes, là où le recyclage, la trans- formation de la matière, dont les corps humains, permettent une durabilité. Soit un temps de l’éphémère et de l’instant là-bas, et ici, le temps long où l’individu, même lorsqu’il disparaît, continue à nourrir et à renforcer la communauté. Ce qui permet de consi- dérer là encore les individualismes, voire l’égoïsme des sociétés occiden- tales qui érigent l’individu seul, dont le désir et la volonté de s’élever par le matérialisme économique et le pouvoir hiérarchique forme une autre compo- sante de cette verticalité occidentale. Il s’agit donc d’une ascension volon- taire qui privilégie le personnel, quand d’autres sociétés, dont la nôtre, consi- dèrent davantage les rapports sociaux de l’ensemble de la population qui forme une communauté en distribuant des fonctions sans considération à la personnalité, mais plutôt l’utilité inter- dépendante au service d’un destin col- lectif. Nos considérations locales sont quan- titatives, c’est-à-dire qu’elles visent à s’emparer du maximum de ses citoyens, tandis que l’Occident fonc- tionne davantage par électivité et pas sélection qualitative : il faut se distin- guer pour parvenir au sommet, de pré- férence seul pour former élite ou caste minoritaire, mais aux pouvoirs exacer- bés. Alors qu’en Afrique, c’est par la base horizontale que peut se construire une assise commune et solidaire qui forme société.

L’Occidental, et il l’a prouvé à plusieurs reprises, s’élance de manière verticale et ascendante pour pouvoir dominer en maître sur ceux-là qui font corps ensemble pour se défendre éventuel- lement, alors que l’Occident attaque pour asservir ces corps dont il fera un usage inhumain pour maximiser et augmenter ses profits. L’Occident est souvent agressif, conquérant, exploi- tant plutôt qu’exploiteur, alors que l’indigène est souvent pacifique au mieux défensif... Et les principes mêmes de cette éco- nomie qui forme la substance du poli- tique impérial est celui futile des plai- sirs de la consommation à outrance, puisqu’elle outrepasse les besoins et ignore le passé et le futur, car elle épuise toutes les ressources sans s’in- quiéter de ces destructions au gré desquelles du vivant (tribu, minorité), de la faune, de la flore disparaissent définitivement et irrémédiablement. Une célébration de la vie donc comme nous l’avons évoqué, mais qui se nour- rit de la mort et de l’annihilation de tout ce qu’il pourra par ambition de s’élever encore davantage et à la verticale au- dessus des autres et de la terre qu’il faut dominer, surplomber.

L’Occident est souvent agressif, conquérant, exploitant plutôt qu’ex- ploiteur, alors que l’indigène est souvent pacifique, au mieux défen- sif...

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