# 17 Juillet - Août 2025 Roots Summer Trip
Sommaire
Salut Cher Lecteur ! Comment ça va ? Moi je suis crevé, j'ai besoin de me reposer. Entre le travail et le magazine, je n'en peux plus, mais je suis quand même satisfait de ce numéro XXL avec 38 pages (ça va coûter cher en encre) ! Tout d'abord je tient a dédicacer ce numéro à la contrôleuse de la CAF qui m'a gentiment demandé d'envoyer une centaine de documents pour me demander au final de rembourser une grosse somme. J'attends encore qu'elle finalise le dossier pour savoir combien (en vrai je suis ironique, mais elle était très agréable et elle va même faire une demande de prime d'activité pour moi, j'espère que la CAF n'est pas entrain de lire ça, je ne veux pas de problème!) Dans ce numéro, j'invite presque que des personnes qui sont dans mon travail. Il y a plein de gens créatifs, que ce soit de la musique, de la vidéo, de l'écriture ou du dessin, je vais sûrement faire participer d'autres personnes dans les prochains numéros. On a aussi la conclusion de la chronique Au Bout du Conte, pour l'occasion j'ai mis lʼentièreté de l'histoire. Je remercie mon ami de toujours pour avoir autant écrit pour moi (il doit en avoir marre de moi haha). Je le connais depuis que j'ai l'âge de 4 ans, cela fait plus de 25 ans qu'on est amis ! Ce numéro marque la fin de la saison 2024-2025. C'était une année particulière où j'ai galéré à trouver du travail après la fin de mes études en art, mais grâce à France Travail j'ai trouvé une formation et un emploi où je suis bien, même si ça n'a aucun rapport avec l'art. On se retrouve en Septembre pour une nouvelle saison. Je fait des bisous à tous mes lecteurs, je vous remercie d'être là et de prendre du temps pour lire mon magazine. Profitez bien de vos vacances ! Bonne lecture !
������ �� ������� Chronique de Nino Roux �� ���� ��� ����� Illustrations de Morane Wallerand
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�������� �� �’��� Recette de Wass
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��� �� ������� Photographies de Lily Josancy �� ���� �� ����� (5) Chronique du Roi des Ondes ������� ��� ������ ���� �� ����� BD de Ninos
P25
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��������� 18 (7) Protocole de Ninux
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Rapide et Furieux
La famille est un élèment clé dans la compréhension de la saga Fast and Furious. C'est cette notion de famille qui lient tous les personnages et qui va les emmener dans de grandes aventures pour protéger cette famille. Dans les opus suivant, on retrouve moins l'espionnage qui faisaient le charme des films. Il y a toujours plus d'actions à grand budget avec des scènes extrêmes comme la scène où une voiture saute d'un immeuble à l'autre deux fois de suite dans l'épisode 7. Mais la famille prend tous son sens lorsque la vrai vie et la fiction se mêle. Paul Walker est décédé dans un accident de voiture le 30 Novembre 2013 alors qu'il est en train de tourner Fast and Furious 7. O'Connor sera joué par une doublure pour le reste du tournage. A la fin du film est fait lors d'une scène surréaliste où l'on voit tous les membres de la famille sur une plage qui regardent une dernière fois O'Connor avec son fils et sa femme. Ensuite O'Connor et Toretto partent ensemble pour une dernière virée ensemble avant de prendre deux routes différentes. Cette virée est accompagnée de la magnifique chanson See you again de Wiz Khalifa et Charlie Puth. J'ai moi même versé une larme. Si vous avez du temps cet été, je vous conseille fortement de vous refaire la saga Fast and Furious. Il y a tout ce qu'il faut: du soleil, des voitures qui vont vite, Vin Diesel (un des meilleur acteur de sa génération, surtout dans le film Les Chroniques de Riddick, regarder le aussi, c'est une pépite!) et des voitures qui sautent d'un immeuble et d'un avion, des voitures avec des armes, des voitures blindées, des voitures qui driftent, plein de voitures. Par contre vous pouvez vous arrêter après le 8eme film, après c'est devenue des films d'actions génériques où il y a plus d'actions que de voitures.
Je voudrais vous parler de la sage Fast and Furious. Cette saga commencée en 2001 est toujours en cours, même si la formule commence a s'épuiser au cinquième opus. Il y a actuellement 11 films Fast and Furious. Personnellement, je ne mʼintéresse pas eu voiture, je n'ai même pas mon permis, mais je trouve que l'on trouve dans les premiers Fast and Furious l'essence des films d'action des années 2000 : une BO avec du bon rap américain, des ralentis et des couleurs pétantes. Enfin voilà, j'aime beaucoup ces films et je les revoie de temps en temps. Même Christopher Nolan est fan de Fast and Furious. Dans le premier Fast and Furious on suit l'histoire de l'agent spécial Brian O'Connor joué par Paul Walker. O'Connor s'infiltre dans le clan de Dominic Toretto joué par Vin Diesel pour trouver qui vole des lecteurs DVD dans les camions de transports dans des casses spectaculaires (c'était les années 2000). Après plusieurs péripéties O'Connor révèle à Toretto qu'il était un agent infiltré et le laisse s'enfuir. Dans le deuxième opus, O'Connor et Roman Pearce joué par Tyrese Gibson s'infiltre dans un cartel en faisant les passeurs à bord de voitures. Dans le troisième, Fast and Furious Tokyo Drift, le meilleur de la saga, il n'y a pas de débat, on suit l'histoire de Sean. Sean est un jeune américain envoyé chez son père, ex-militaire, à Tokyo. Cette épisode hors série nous gratifie d'une histoire rafraîchissante et de jolie plan du Japon, notamment une séquence de drift de nuit dans les montagnes. Dans le quatrième opus O'Connor et Toretto se recroise pour retrouver le tueur de Letty, la copine de Toretto joué par Michelle Rodriguez. A la fin du film O'Connor rentre dans la famille de Toretto.
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Skincare de l’été
POUR 50CL D'HUILE DE CAROTTE Ustenciles une casserole, une passoire, un bocal de 50cl, une râpe Ingrédients 2 carottes, 50 cl de huile de tournesol, du gros sel Comment faire ? 1. Épluchez 2 carottes puis à l'aide d'une râpe, les rapper en fine lamelles 2. Versez 50cl d'huile de tournesol dans un casserole puis faire chauffer à feu doux 3. Une fois l'huile chaude, ajoutez les carottes rappées dans l'huile 4. Laissez cuire 25 minutes et remuez de temps en temps 5. Une fois les 25 minutes passées, éteindre le feu et laisser refroidir 6. Une fois refroidit, prendre une passoire puis filtrer 7. Prendre un bocal vide et propre puis y versez l'huile et mettre une demi cuillère à café de gros sel pour la conservation L'été arrive et il commence à faire beau. C'est le moment parfait pour aller bronzer à la plage, mais il ne faut surtout pas oublier de se protéger la peau ! La carotte est idéal avec avec ses vitamines A, B, C, E, K, ainsi que ses bêta-carotène et ses caroténoïdes. Cette huile vous permettra d'être bronzé et beau gosse, tout en évitant les coups de soleil. En plus vous allez sentir bon !
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Ma relation avec mon pays natal, la Chine, a toujours été difficile à définir. Je n'y ai vécu que jusqu’à l’âge d’un an, je n'en ai donc aucun souvenir. Ces dernières années, j'ai ressenti de plus en plus le besoin de m'y confronter. Mon troisième voyage a été le plus mémorable, car j'ai pu visiter ma province d’origine du Hubei, ma ville natale Huangshi et donc potentiellement des endroits que j’ai connus ou que j’aurais pu connaître si j’y étais restée. Et tout cela, d'une certaine manière, m'a rappelé que je ne suis ni complètement Chinoise parmi les Chinois, ni complètement Française parmi les Français. Je suis à la frontière entre les deux.
The In Between
Lily Josancy
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Huangshi
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Wuhan
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Biyang
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Au bout du conte Chapitre 1 Il se réveilla en sueur, en sursaut, sans un cri. Les yeux exorbités. Le cauchemar avait semblé trop réel. Jean devait partir. Il nʼavait plus le choix, il lui était impossible de rester en sécurité dans la maison qui lʼavait vu grandir. Il nʼy avait guère plus de nuits où il ne se réveillait pas trempé. Son départ imminent, immuable, faisait résonner lʼécho nouveau du vide de son existence. Jean se leva hagard et prit le verre dʼeau posé sur sa minuscule table de chevet. Il allait éviter les dolipranes et les anxiolytiques. Il savait quʼil ne valait mieux pas, au vu des recommandations médicales, pourtant il voulait affronter avec lʼesprit clair la réalité de cette fin de première vie. Autour de lui régnait la pénombre. Jean actionna lʼinterrupteur, chassant obscurité et cauchemars. Sa chambre était aussi chaotique que son cerveau avant le début du traitement. Des livres trainaient ça et là, à même le sol, parfois couverts dʼune fine pellicule de poussière. Des vêtements ni propres ni sales aux pieds du lit. Ses figurines de collection couvraient les étagères, souvenirs de passions déchues les unes après les autres. Jean souffla bruyamment. « Allez, jʼy vais, je nʼaurai pas besoin de tout ça là-bas de toutes façons. Jʼsuis sûr que papa les vendra dès quʼil en aura lʼoccase… » Il se dirigea vers le salon, prit sa valise, préparée la veille avec lʼattention dʼun poisson rouge et entreprit dʼy fourrer ses médicaments. Lʼesprit légèrement plus reposé que lorsquʼil sʼétait couché, il pouvait finir de préparer le grand départ. Le voyage promettait dʼêtre long. Une fois arrivé à destination il pourrait trouver des réponses à ses questions. Dʼoù venait- il réellement ? Il était intimement convaincu quʼil venait dʼun conte mais personne ne le croyait. Il allait prouver au monde entier que cʼétait vrai, même sʼil fallait pour ça plonger la tête la première dans un amas de vieux papiers défraichis et sentant lʼodeur des greniers… Après avoir fini sa valise et prit de quoi grignoter sur la route (un paquet de biscuits au chocolat défraichis) il enfila ses vieilles chaussures de randonnée, un manteau long quʼon aurait pu penser fait pour un chasseur écossais et un bandana pour empêcher ses longs cheveux ondulés de lui cacher la vue. « Maintenant je suis prêt. Adieu tout le monde, vous allez voir que je ne mentais pas quand toutes ces années je vous disais que 25
jʼétais approché par le grand méchant loup et compagnie. Ici commence mon voyage pas si inattendu, les cauchemars doivent finir pour de bon… » Jean sorti de chez lui, traversa la petite cour du jardin sans un regard en arrière et sʼenfonça bien vite dans le bois adjacent à la bicoque qui servait de maison à ses parents et lui. Chapitre 2 Le passage dans ce petit bois fut bref. Une fois sorti, couvert de feuilles et de pensées lumineuses, il sut que sa destination ne serait pas la porte à côté, quʼil nʼaurait pas simplement à traverser la rue. Il monta dans son véhicule, une vieille Punto rouge achetée dʼoccasion. Ses jantes désuètes et abimés tenaient sans doute plus de lʼHistoire quʼil ne pourrait jamais y prétendre. Peut-être bien, quʼaprès tout, il devrait plonger dans le plus profond des lacs, la plus noire des mers ; gravir le plus haut des sommets. Peut-être bien aussi que finalement sʼil nʼétait pas issu dʼun conte, il sʼécrirait lui même. Cela lui donna faim et il mangea un premier biscuit, maintenant soucieux. « Comment mʼécrire sans vocabulaire, sans même connaître le nom que je me serais donné, si jʼavais dʼabord appris à me connaître ? » sʼinterrogea Jean, pris au dépourvu par ses pensées. Ses mains tremblèrent, faisant tomber des miettes de son paquet de gâteau, entre ses pieds, sur les pédales, alors quʼil le rangeait dans son sac. Il avait franchi le perron de la bicoque et la frontière imaginaire du bois sans un regard vers son passé. Mais sʼil sʼétait trompé ? Il souffla doucement. Une bonne respiration, au milieu de cette route quʼil avait fréquenté jadis, quand il allait encore à lʼécole à pied, près de chez lui. Cʼétait simplement quʼil nʼy ait personne qui le retienne qui lui semblait étrange. Auparavant cʼétait plus simple. Son cerveau arrivait à capturer le bonheur tout seul. Les contes dʼavant le coucher étaient le pilier de ses journées. Sans être orphelin pour autant, Jean réussissait à trouver ses vrais parents dans les marâtres, les magiciens et les fées des histoires. Où aller maintenant ? Jean consulta le plan quʼil sʼétait fixé. Il avait cependant oublié une étape ESSENTIELLE, la BIBLIOTHEQUE ! Nul lieu qui ne soit plus à la croisée des chemins, des contes, du réel et du mythique, voir du carrément magique. Cʼétait la clé pour vraiment démarrer son voyage, sa Geste De LʼIrréel dans ce banal pas vraiment banal. Démarrage en trombe directement en deuxième. La clé tournée, contact pour trouver la clé de la route en évitant la clé des champs. Un champion. Voilà quʼil
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pensait en assonances et en allitération. Pas moyen dʼaccepter la moindre petite énumération, sur le trajet dʼune route de campagne sans un chat à la ronde. Un matin pareil, dans ce beau pays de la Gironde. Une fois quʼil fut arrivé à la magnifique BIBLIOTHEQUE, hors de lʼespace et du temps, Jean se sentit mieux. Cʼétait un bâtiment aussi âgé que sa voiture. Elle avait une banalité hors du monde. Une banalité quʼon ne reproduit plus de nos jours. Des murs, un toit de grandes fenêtres et quelques portes. Pourtant il le savait, cʼétait un lieu mythique. Ici les hommes, les femmes et les enfants devenaient tous les sujets dʼune expérience sociale divine. Chacun peu importait son niveau de connaissance, dʼintérêt, de richesse matérielle ou morale, était confronté au Savoir…Derrière les portes vitrées mortellement mornes se cachaient les trésors du langage. Il passa le sas sans un mot. Jusquʼil y a peu, il nʼavait pas saisi la portée symbolique de ce lieu ouvert à tous et si facile dʼaccès. Ici il trouverait le vocabulaire pour la suite de son voyage… Le vestibule était aussi morne et fréquent quʼon aurait pu se figurer nʼimporte quelle bibliothèque de France et de Navarre. Le sol était fait de carrelage brun-jaune délavé, résonnant piteusement à chaque pas que faisaient les chaussures de notre protagoniste. Pourtant il savait que cette initiale désolation apparente nʼétait que le premier et le plus criard de tous les gardiens du verbe et du savoir. On ne juge pas un livre à sa couverture ; on ne juge pas une bibliothèque à la couleur de son sol. Les bibliothécaires assignés à lʼentrée et qui lʼaccueillirent dʼun geste élégant de la tête, étaient tout aussi bien cerbères que passeurs dʼâme, dragons ou compagnons fidèles. Passé le vestibule on accédait à la seconde épreuve. Jean nʼen avait pris conscience quʼen y retournant bien des années après sa primaire, lorsquʼil avait redécouvert malgré lui le plaisir des histoires qui tissent les liens entre les hommes et les peuples. Par omission peut- être, pour échapper à son passé sans doute, il avait évité le rayon jeunesse. Erreur monumentale et il sʼen rendait compte à présent. Quʼallait-il y trouver ? Que devrait-il affronter ? Il décida de faire un rapide état des lieux en sʼasseyant sur un canapé usé aux coussins rouge bleu et jaunes criards. Le monde semblait moins vaste à lʼextérieur que ce quʼil nʼétait à lʼintérieur de lui-même… Chapitre 3 Son identité était là, entre les pages dʼun de ces exemplaires de Oliver Twist ou de Narnia. Il sʼapprocha de la première étagère qui semblait 27
briller, parcourue par la lumière douce de la LED réglée à la parfaite intensité. Toutes ces tranches… à trancher. Nʼimporte quelle histoire serait une porte non ? Sʼil était bien fils de conte, aucun doute. Ou aller dʼabord ? Un magazine qui nʼavait rien à faire dans le rayon roman attira son attention. Il le prit entre ses mains et lʼexamina. « RST numéro 48. Réussir Sans Tricher ». Drôle de nom pour un magazine, drôle de numéro aussi… Enfin. Il le mit sous son bras, choisit quelques romans de voyage et dʼaventures de Jules Vernes, pour faire bonne mesure, et retourna sʼasseoir sur le canapé. Il ouvrit le roman et mit à lʼintérieur le petit magazine quʼil ouvrit également, ni vu ni connu. Il était toujours tenté par ces bizarreries qui sortaient de nulle part de temps à autres. Cela lui arrivait bien moins souvent depuis quʼil était devenu majeur mais le mystère avait toujours fait partie de sa vie. Ce magazine quʼil commença à feuilleter lui rappela sa propre situation, ici entre tous ces monuments du roman jeunesse le magazine semblait perdu, pas à sa place. Et dans le magazine cʼétait comme dans sa tête, il y avait de tout, beaucoup de rire et dʼidées, de belles photos mais aussi des larmes retenues. Il regarda plus attentivement le numéro des pages et revint au sommaire. Il lut lʼédito, le rédac chef disait quʼaprès tout ce temps le prochain numéro serait édité avec la collaboration dʼune maison dʼédition prestigieuse et quʼune exposition serait consacrée à retracer la création du magazine ainsi que lʼœuvre dʼart éphémère quʼavait produit lʼartiste, un projet sʼétendant sur plusieurs kilomètres de long. Cela le fit sourire, puis tournant la tête il lut le sommaire et, écrit en lettres italiques « Au bout du Conte – Voyage de Jean peu ordinaires ». Surpris il alla à la page correspondante. Il y lut la première page qui se terminait par « …et il sut quʼil devait créer son identité luimême et pour cela il avait besoin de… » la page suivante était arrachée. Sa formule magique à demi finie, quʼest ce quʼil pouvait bien y avoir derrière ces étranges manigances. Il alla à la toute fin du magazine. Rien. Désormais il se sentait encore un peu plus perdu. On cherchait à orienter son chemin. Quelquʼun avant lui, peut-être le petit poucet lui- même, avait eu lʼaudace de laisser des petits cailloux à suivre. Son aventure était interrompue par tant de bizarreries quʼil sut que cʼétait le meilleur moment dʼavancer. Comme le petit poucet avant lui, il décida de marquer dʼun signe ce magazine et le remit à sa place. Il emprunta Jules Vernes et sʼen alla sans dire un mot. Le passage à la bibliothèque était achevé mais représentait une nouvelle ouverture béante dans un futur incertain. Revenu dans sa voiture, il pesta contre sa capacité à se laisser distraire par les moindres stimuli sensoriels et à attendre dʼêtre au bord du
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précipice pour effectuer la moindre action qui pourrait le sauver de lui- même. Fallait vraiment être dingue pour vouloir trouver son identité dans un livre au hasard dans une bibliothèque. Son estomac sʼétait serré sur lui-même. Il valait mieux que ça. Il se rendit compte quʼil tenait bien trop fort son livre nouvellement emprunté. Chapitre 4 Sa main le brûlait. Il lâcha le livre sur le plancher de lʼhabitacle, et le bouquin sʼouvrit en grand. Il crut halluciner, il manquait des mots sur la page. Pas de manière hasardeuse, pas pour marquer des fins de paragraphes ou de chapitre. Cʼétait comme sʼil manquait des parties de lʼhistoire. Il aurait juré que ça nʼétait pas le cas encore quelques instants plus tôt, toujours à la médiathèque. De la fumée se mit à sortir dʼentre les feuilles, une odeur de sel de mer se répandant dans la voiture. Jean sentit son siège se mettre à tanguer. De lʼeau sʼinfiltrait dans lʼhabitacle pourtant il faisait beau dehors. Il ouvrit la porte du véhicule, sortit et se saisit du livre. 20 000 lieues sous les mers ! Voilà lʼexplication ! Après avoir regardé plus attentivement les pages du bouquin il se sentit attiré par le papier. Son visage sʼapprocha de lʼouvrage. Le nom dʼun des personnages avait disparu. Sa main se mit à coller à la couverture. « Quʼest-ce que cʼest que ça ? ». Il nʼarrivait plus à la décoller, lʼodeur de sel marin se renforçait petit à petit lʼenvoutant et le faisant chavirer de gauche à droite. Sa main sʼenfonçait maintenant littéralement dans la couverture du livre, tandis que des mots commençaient à se répandre entre ses doigts. Sa chair blanchissait et se mettait lentement à disparaître en brillant. Il chercha à jeter le livre, confus et plein de stupeur mais cela nʼeut dʼautre effet que de le faire tomber lui-même au sol, les mains désormais enfoncées pleinement dans le bouquin. Il sentait que là ou étaient censées se trouver ses extrémités il nʼy avait désormais plus quʼune sensation aqueuse, une piscine ou un océan de mots et dʼoubli. Il cligna des yeux, le sol goudronné semblait désormais se mouvoir indépendamment des lois physiques les plus élémentaires. Jean avait la sensation dʼêtre sur un matelas gonflable, ses bras disparaissaient désormais et il regarda ses jambes sʼenfoncer doucement dans ce qui était auparavant du goudron mais désormais pas tout à fait de lʼeau. Lʼodeur de sel était plus forte encore, un vent se leva, le soleil accentua son silencieux impact lumineux et Jean se vit disparaître tout à fait, le regard plongé dans son livre. Ses derniers mots furent entendus par de curieux moineaux et un 29
nonchalant pigeon. Dans une dernière tentative de se libérer il proféra avec dépit : « Tout mais pas ce Jules Vernes là ! Jʼai horreur des profondeu… » Puis le silence. Jean avait peut-être trouvé bien malgré lui la suite de sa quête identitaire en touchant au classique ainsi quʼaux méandres des fonds marins. La magie toute ordinaire venait de faire sortir du réel Jean qui cherchait encore le matin même à la trouver, à se retrouver. Chapitre 5 Jean se réveilla violemment, secoué par un ensemble de sensations désagréables. Il entendit le bruit des vagues avant même dʼouvrir les yeux et avala une goulée dʼeau salée quʼil recracha immédiatement. Il se mit à tousser alors que ses paupières se décollaient avec difficulté. Rien ne lʼavait préparé à ce quʼil aperçut. Il scruta immédiatement lʼhorizon devant ses yeux. Il flottait littéralement dans une mer remplie de livres ouverts, immenses, et de pages arrachées qui nageaient en ondulant telles des méduses de papier. Il se surpris lui-même en se rendant compte quʼil était toujours accroché à lʼouvrage qui lʼavait conduit ici. Cependant il était retourné et ouvert et lʼintérieur ressemblait à une fenêtre déformée du monde réel, il voyait sa voiture, le parking et le bâtiment de la bibliothèque. Il en eu la nausée et lâcha le précieux ouvrage, la fenêtre sur son passé disparue petit à petit. Cependant il se remit à flotter et une vague le propulsa dans un immense livre ouvert lui aussi. Les jours passèrent. Jean ne faisait rien mais ne sentait pas la faim. Le temps passait au rythme de la traversée. Il ne savait pas où il allait. Ses médicaments lui manquaient de plus en plus. Il nʼavait même plus un gâteau ou un livre à lire. Tous les mots écrits, les inscriptions dans cette mer de papier étaient illisibles. Il essayait de dormir comme il le pouvait, bringuebalé par les mouvements des pages sur lʼeau. Il rêvait de ses parents, de sa chambre, de ses collections de jouets. Il sentait en se réveillant quʼil avait déjà vécu tout ce quʼil avait à vivre là-bas. « Allez je peux pas me faire à lʼidée de pas retrouver le chemin… Cʼest pas comme ça que je vais retrouver mes origines ». Des pensées tournaient en rond. Il sʼimmobilisa ce matin-là. Il nʼen pouvait plus. Alors il se dit quʼil était obligé de plonger. Il sauta dans lʼeau dʼencre. Il sentit la dissolution arriver de nouveau. Il lʼaccepta. Il ne serait plus quʼune goutte parmi les gouttes et un bout dʼhistoire parmi tous ces livres oubliés. « Voilà la fin du voyage, jʼaurais du mʼen douter, je nʼétais pas issu du réel mais dʼune histoire dont on a oublié lʼexistence ». Pas de
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Zebulon est bloqué Dans le métro
grand méchant loup, pas de chaperon rouge, de cendrillon ou de dragons. Cʼétait juste le bal des mots illisibles et la mer de tous ces récits inachevés. Il nʼétait pas si mal dedans. Il fut saisit par le vertige et sʼenfonça profondément dans la mer de plus en plus sombre. Petit à petit il se changea lui-même en livre. Flottant dans lʼocéan dʼinachevé, seul et accompagné. « Jean… Jean ! Revenez avec nous » Les pulsations de son cœur lui tambourinèrent dans les oreilles. Il était sur le sol de la bibliothèque. Entouré par les gardiens du savoir. « Ouf il est de retour, tout le monde nʼest pas aussi sensible aux mots. Cʼest une perle on doit le garder. » Des voix, des voix après ce qui semblait avoir duré des jours. Il sʼassit avec difficulté. Sous ses fesses le livre de Jules Vernes. Ca ne faisait pas de sens. « Je vais rentrer chez moi, je vais tout vous laisser, je nʼemprunterai rien aujourdʼhui finalement. » Les bibliothécaires le regardèrent médusés. Ses propos nʼavaient ni queue ni tête. Ils le laissèrent partir après avoir proposé de lui offrir du café ce quʼil refusa. De retour chez lui il se coucha dans son salon. La journée avait passée et il nʼavait rien mangé. Le paquet de gâteau était écrasé mais pas ouvert. Il se demanda quand il avait commencé à halluciner. Quelque chose se mit à le gêner. Il mit sa main dans la poche arrière de son pantalon. Une feuille mouillée et couverte dʼencre. « Tu ne vis que par les mots aléatoires dʼun écrivain sans but … » Il hurla et se retourna. Derrière lui, une page blanche.
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