RST 17 Roots Summer Trip

Au bout du conte Chapitre 1 Il se réveilla en sueur, en sursaut, sans un cri. Les yeux exorbités. Le cauchemar avait semblé trop réel. Jean devait partir. Il nʼavait plus le choix, il lui était impossible de rester en sécurité dans la maison qui lʼavait vu grandir. Il nʼy avait guère plus de nuits où il ne se réveillait pas trempé. Son départ imminent, immuable, faisait résonner lʼécho nouveau du vide de son existence. Jean se leva hagard et prit le verre dʼeau posé sur sa minuscule table de chevet. Il allait éviter les dolipranes et les anxiolytiques. Il savait quʼil ne valait mieux pas, au vu des recommandations médicales, pourtant il voulait affronter avec lʼesprit clair la réalité de cette fin de première vie. Autour de lui régnait la pénombre. Jean actionna lʼinterrupteur, chassant obscurité et cauchemars. Sa chambre était aussi chaotique que son cerveau avant le début du traitement. Des livres trainaient ça et là, à même le sol, parfois couverts dʼune fine pellicule de poussière. Des vêtements ni propres ni sales aux pieds du lit. Ses figurines de collection couvraient les étagères, souvenirs de passions déchues les unes après les autres. Jean souffla bruyamment. « Allez, jʼy vais, je nʼaurai pas besoin de tout ça là-bas de toutes façons. Jʼsuis sûr que papa les vendra dès quʼil en aura lʼoccase… » Il se dirigea vers le salon, prit sa valise, préparée la veille avec lʼattention dʼun poisson rouge et entreprit dʼy fourrer ses médicaments. Lʼesprit légèrement plus reposé que lorsquʼil sʼétait couché, il pouvait finir de préparer le grand départ. Le voyage promettait dʼêtre long. Une fois arrivé à destination il pourrait trouver des réponses à ses questions. Dʼoù venait- il réellement ? Il était intimement convaincu quʼil venait dʼun conte mais personne ne le croyait. Il allait prouver au monde entier que cʼétait vrai, même sʼil fallait pour ça plonger la tête la première dans un amas de vieux papiers défraichis et sentant lʼodeur des greniers… Après avoir fini sa valise et prit de quoi grignoter sur la route (un paquet de biscuits au chocolat défraichis) il enfila ses vieilles chaussures de randonnée, un manteau long quʼon aurait pu penser fait pour un chasseur écossais et un bandana pour empêcher ses longs cheveux ondulés de lui cacher la vue. « Maintenant je suis prêt. Adieu tout le monde, vous allez voir que je ne mentais pas quand toutes ces années je vous disais que 25

jʼétais approché par le grand méchant loup et compagnie. Ici commence mon voyage pas si inattendu, les cauchemars doivent finir pour de bon… » Jean sorti de chez lui, traversa la petite cour du jardin sans un regard en arrière et sʼenfonça bien vite dans le bois adjacent à la bicoque qui servait de maison à ses parents et lui. Chapitre 2 Le passage dans ce petit bois fut bref. Une fois sorti, couvert de feuilles et de pensées lumineuses, il sut que sa destination ne serait pas la porte à côté, quʼil nʼaurait pas simplement à traverser la rue. Il monta dans son véhicule, une vieille Punto rouge achetée dʼoccasion. Ses jantes désuètes et abimés tenaient sans doute plus de lʼHistoire quʼil ne pourrait jamais y prétendre. Peut-être bien, quʼaprès tout, il devrait plonger dans le plus profond des lacs, la plus noire des mers ; gravir le plus haut des sommets. Peut-être bien aussi que finalement sʼil nʼétait pas issu dʼun conte, il sʼécrirait lui même. Cela lui donna faim et il mangea un premier biscuit, maintenant soucieux. « Comment mʼécrire sans vocabulaire, sans même connaître le nom que je me serais donné, si jʼavais dʼabord appris à me connaître ? » sʼinterrogea Jean, pris au dépourvu par ses pensées. Ses mains tremblèrent, faisant tomber des miettes de son paquet de gâteau, entre ses pieds, sur les pédales, alors quʼil le rangeait dans son sac. Il avait franchi le perron de la bicoque et la frontière imaginaire du bois sans un regard vers son passé. Mais sʼil sʼétait trompé ? Il souffla doucement. Une bonne respiration, au milieu de cette route quʼil avait fréquenté jadis, quand il allait encore à lʼécole à pied, près de chez lui. Cʼétait simplement quʼil nʼy ait personne qui le retienne qui lui semblait étrange. Auparavant cʼétait plus simple. Son cerveau arrivait à capturer le bonheur tout seul. Les contes dʼavant le coucher étaient le pilier de ses journées. Sans être orphelin pour autant, Jean réussissait à trouver ses vrais parents dans les marâtres, les magiciens et les fées des histoires. Où aller maintenant ? Jean consulta le plan quʼil sʼétait fixé. Il avait cependant oublié une étape ESSENTIELLE, la BIBLIOTHEQUE ! Nul lieu qui ne soit plus à la croisée des chemins, des contes, du réel et du mythique, voir du carrément magique. Cʼétait la clé pour vraiment démarrer son voyage, sa Geste De LʼIrréel dans ce banal pas vraiment banal. Démarrage en trombe directement en deuxième. La clé tournée, contact pour trouver la clé de la route en évitant la clé des champs. Un champion. Voilà quʼil

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