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CULTURE

FINANCES NEWS HEBDO

MERCREDI 30 SEPTEMBRE 2020

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teur privé ou au secteur public, la 2 ème alternative n’étant pas un choix, mais surtout une nécessité. Grosso modo, les jeunes lauréats, plus ou moins nantis, vont travailler chez un confrère puis, au bout de quelques années ouvriront, leur propre agence. Cependant, à l’instar de l’Europe des années 60, une tendance commence à s’esquisser. Les jeunes lauréats découvrent que l’architecture a beaucoup plus de débouchés qu’ils n’auraient pensé. De par leur riche formation, les archi- tectes sont les meilleurs directeurs de centres culturels, de musées… de très bons gestion- naires du patrimoine immobilier. Quand ils s’es- saient au design, leurs travaux sont très aboutis et lorsqu’ils décident de revisiter l’artisanat, leurs propositions ont du sens. En bref, ces dernières années, nous assistons à une ouverture d’esprit amenant les architectes à investir bien plus de domaines d’activité que leurs aînés. F.N.H. : Est-ce difficile de se faire repérer ? F. A. : Oui, c’est très difficile pour un jeune architecte qui veut ouvrir sa propre agence d’architecture de se faire repérer. C’est pourquoi la première étape est d’abord le salariat chez un confrère bien installé dans le marché. Cela per- met d’acquérir de l’expérience, se faire la main et, surtout, mener à bien ses propres projets sous la houlette du chef d’agence. C’est avec ses projets dont il peut légitimement se prévaloir qu’il peut, quand il en a les moyens financiers car les démarrages sont difficiles, prospecter le marché privé de l’architecture. F.N.H. : Les architectes doivent prendre en compte davantage la dimension du développement durable. Ceci devient un paramètre important dans la construc- tion d’un bâtiment. L'écologie change-t- elle le métier ? F. A. : Avant même cette «mode» qu’est la construction durable, les architectes anciens et nouveaux ont été tous formés à l’architecture bioclimatique. Construire en tenant compte de l’orientation, des vents et du climat est le mini- mum de maîtrise qu’on attend d’un architecte. A toutes ces règles de bon sens sont venues s’ajouter d’autres dispositions autrefois impos- sibles à réaliser, comme les casquettes et autres auvents, les stores télécommandés, l’usage de matériaux d’isolation performants rendant la «construction durable», une technique à part entière qui est aujourd’hui «monitorable» à coup de logiciels. Toutes ces dispositions architec- turales plus ou moins abouties influent sur l’es- thétique architecturale. Désormais, les édifices

comportent plus d’auvents et la double peau est devenue courante. L’architecture change !

jusqu’au 10 octobre 2020.

F.N.H. : Quel regard portez-vous sur l'architecture marocaine ? F. A. : Le Maroc a été autrefois un empire qui s’étendait du sud de la France au Mali. Géographiquement, il est situé entre deux conti- nents et deux mers. Il a été occupé pendant cinq siècles par Rome. Avec l’invasion de l’Espagne, les Maures, ces Marocains berbères arabisés, ont installé une civilisation qui a illuminé le monde et toutes les sciences, dont l’architec- ture. L’architecture maroco-andalouse est née, avec sa maîtrise des proportions et la finesse de ses modénatures. Elle a développé un artisanat marocain extrêmement sophistiqué qui a fait la beauté de nos ouvrages et continue d’être une source d’inspiration inépuisable pour les archi- tectes. Une des rares architectures mondiales qui se projette dans la modernité tout en ayant des traditions artisanales très fortes est l’archi- tecture japonaise. Le Maroc est sur ce chemin. F.N.H. : Le mot de la fin pour l’avenir de l’architecture ? F. A. : Malgré les difficultés que connaissent les architectes dans leur quotidien, l’architecture marocaine avance. Nous avons aujourd’hui de jeunes architectes marocains qui assurent la relève et dont les œuvres rivalisent avec les grands architectes mondiaux. Plus que jamais, le patrimoine est défendu par la société civile et l’architecture de terre intéresse de plus en plus de monde grâce aux engagements d’architectes comme Salima Naji. Je pense sincèrement que l’architecture maro- caine a de beaux jours devant elle. ◆

F.N.H. : Le béton envahit maintenant les réalisations architecturales... Selon vous, que faut-il changer ? F. A. : Le développement et la croissance nécessitent un matériau de construction et le béton a encore de beaux jours devant lui. Cependant, le Maroc ancestral a son béton : la terre. Il est malheureux de voir le ciment envahir les beaux paysages du sud alors que l’archi- tecture de terre est bien plus belle et bien plus performante sur le plan du confort. Pour inverser la tendance, il faudrait une volonté politique. On n’y est pas encore ! F.N.H. : Pourquoi vous avez choisi d'or- ganiser la compétition Young Moroccan Architecture Awards ? F. A. : La typologie de la population des archi- tectes connaît un changement important, avec une diminution de l’âge moyen des praticiens. Chaque année, des centaines de jeunes lau- réats issus principalement des écoles nationales intègrent le marché du travail et l’intérêt pour le patrimoine architectural connaît un engouement perceptible. Aujourd’hui plus que jamais, il est nécessaire d’honorer ces praticiens, de stimuler leur créativité, de reconnaître les particularités et les centres d’intérêt de chacun, mais également de donner aux plus talentueux la reconnais- sance qu’ils méritent. F.N.H. : Combien de dossiers avez-vous reçu ? F. A. : Jusqu’à présent, nous avons reçu plus de 120 dossiers et les inscriptions se prolongent

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