FNH N_ 1211

BOURSE & FINANCES

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 16 OCTOBRE 2025

nabilité de la dette privée, qui limite les risques financiers. Le meilleur remède contre un surendettement malsain reste une économie qui croît en phase avec le crédit. Lorsque les revenus des ménages aug- mentent régulièrement grâce à la croissance et à l’emploi, leur capacité d’emprunt progresse sans fragiliser leur situation. Lorsque les entreprises voient leur chiffre d’affaires s’amé- liorer, elles peuvent suppor- ter davantage de dette pour investir. Il devient alors essen- tiel de mener des politiques économiques stimulantes et équilibrées. L’amélioration de la productivité, la promotion des secteurs exportateurs et le soutien aux PME innovantes génèrent une croissance de qualité. Dans ce cadre, le cré- dit bancaire agit comme cata- lyseur du développement plu- tôt que comme fin en soi. La coordination entre poli- tiques budgétaire et moné- taire demeure décisive. Le crédit doit évoluer au rythme du potentiel de l’économie. En deçà, le rationnement freine la croissance. Au-delà, l’ex- cès alimente la surchauffe et accroît les vulnérabilités. Une autre voie consiste à diversifier les sources de financement afin de contenir le risque sans brider l’activité. Le développement du mar- ché des capitaux et du capi- tal investissement offre aux entreprises des alternatives à l’endettement bancaire et réduit la pression sur les bilans bancaires. L’encouragement du microcrédit supervisé et des fintechs de financement permet aussi de canaliser les petits besoins vers des institu- tions spécialisées. Ces canaux doivent rester régulés pour prévenir des bulles hors du secteur bancaire. Toutefois, ils favorisent un partage du risque plus large. Un système financier plus polyvalent rend l’économie moins dépendante du crédit bancaire traditionnel et donc moins exposée en cas de restriction. ◆

 L’encouragement du microcrédit supervisé et des fintechs de financement permet aussi de canaliser les petits besoins vers des institutions spécialisées.

est d’autant plus significa- tive qu’elle intervient après une période de stagnation. Elle permet de répondre aux besoins de liquidités et d’in- vestissement différés durant les années précédentes, mar- quées par la crise sanitaire et ses effets persistants sur l’économie. Cependant, cette contribution à la croissance présente des limites. Une expansion trop rapide du crédit peut créer des déséquilibres macroécono- miques et financiers. Lorsque le crédit bancaire croît plus vite que la production réelle sur une période prolongée, la demande globale augmente plus vite que la capacité d’offre, ce qui génère des ten- sions inflationnistes. Ce phé- nomène conduit à une sur- chauffe de l’économie, alimen- tée par le financement ban- caire. Par ailleurs, un excès de crédit peut provoquer un surendettement des ménages et des entreprises. Lorsque les conditions de financement deviennent trop favorables, certains emprunteurs peuvent s’endetter au-delà de leurs capacités de remboursement. Ce processus crée d’abord un effet de croissance artificiel, mais il se transforme ensuite en facteur de fragilité. Les défauts de paiement augmen- tent, la rentabilité des banques se dégrade et le risque sys- témique s’accroît. Plusieurs études internationales confir-

ment qu’un niveau de crédit privé trop élevé par rapport au PIB constitue souvent un indicateur précurseur de crise bancaire. Dans le cas du Maroc, la situa- tion demeure globalement sous contrôle. Le ratio crédit bancaire sur PIB avoisine 73%, un niveau stable au cours des dernières années, ce qui tra- duit une évolution prudente du financement bancaire par rapport à la richesse natio- nale. L’inflation reste modé- rée, autour de 1% en moyenne en 2024. Dans ces conditions, la progression du crédit peut encore stimuler l’activité sans générer de pressions inflation- nistes notables. Néanmoins, certains indica- teurs appellent à la vigilance. La qualité du portefeuille de crédit des banques reste perfectible. Le taux de créances en souf- france atteint 8,4% de l’en- cours total à la fin de 2024, un niveau élevé malgré sa relative stabilité. L’endettement des ménages présente également des signes de vulnérabilité. Le taux de prêts non rembour- sés par les ménages s’élève à 10,4% de leur encours, en hausse au cours des dernières années. Cette évolution traduit la difficulté croissante de cer- taines familles à honorer leurs échéances. Les entreprises privées connaissent des difficul- tés similaires, avec un taux de créances en souffrance

qui témoigne d’une fragilité financière persistante dans le tissu productif. Ces constats montrent qu’une partie de la croissance passée du crédit s’est déjà traduite par une accumulation de créances difficiles. Si la distribution de nouveaux crédits devait s’ac- célérer sans un renforcement des mécanismes d’évaluation du risque et de suivi de la sol- vabilité, le système bancaire marocain s’exposerait à une aggravation de ces vulnérabi- lités. F. N. H. : Face à une dette privée qui aug- mente, notamment chez les ménages (3%), quels garde-fous ou ajuste- ments structurels fau- drait-il envisager ? A. K. : La progression récente du crédit, portée surtout par l’endettement des ménages, soulève la question des garde- fous nécessaires pour éviter un surendettement tout en préservant la dynamique de financement. L’enjeu consiste à trouver un équilibre entre l’expansion du crédit, qui sou- tient la croissance, et la soute-

Avec un ratio de crédit bancaire sur PIB avoisinant 73% et une inflation modérée de 1% en moyenne, le cas du Maroc demeure globalement sous contrôle, permettant ainsi au crédit de continuer à stimuler l’activité économique sans générer de pressions inflationnistes notables.

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