DEVELOPPEMENT DURABLE
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 23 JANVIER 2025
Réformes énergétiques «Nous devons passer à une stratégie chiffrée, avec des projets précis»
CO2 à 2050 seront donc les 107 TWh d’électricité, et les 22 mil- liards de gasoil et essence, et on doit se mettre sur la trajectoire qui va nous permettre de décarbo- ner ces deux énergies. La France dispose de six modèles de transi- tion à 2050, l’Espagne travaille sur quatre. Ce sont les résultats de ces modèles qui permettent d’élaborer les stratégies et les réglementa- tions, et surtout les coûts qui vont être occasionnés. Ces deux pays n’ont pas encore pris de décisions, et les modèles s’affinent de jour en jour, mais ils savent ce qui est inévitable, et qui ne risque pas de changer de manière significative. Pour le cas Maroc, on sait qu’on ne peut pas éviter 3 à 4 GW de nucléaire; la préparation de la pro- duction électrique nucléaire devait commencer il y a des années. La modélisation qui suit porte sur un projet de mix électrique du Maroc en 2050, avec une option de renou- velables à 50%, nucléaire à 25%, biomasse à 9,5%, autoproduction 5%, hydrogène 10%, hydraulique 0,5%. En deuxième lieu, si le Maroc opte pour l’hydrogène pour le trans- port, le besoin annuel en hydro- gène serait de 6,6 millions de tonnes hydrogène par an à 2050, qui doit être comparé à l’option du tout électrique, voire un mix des deux solutions. Si les choix tech- nologiques sont validés, tous les éléments de la stratégie qui vont permettre au Maroc de rencontrer ses objectifs à 2050 seront clari- fiés, et on sait où on va. Il devient plus aisé de décomposer chaque constituant du futur mix électrique en projets sur les 12 régions du Maroc, facilitant ainsi la planifica- tion des puissances électriques, tout en offrant une très bonne visi- bilité aux investisseurs. Le coût prévisionnel de la transition élec-
Dans un contexte où le Maroc s’engage résolument vers la neutralité carbone à l’horizon 2050, les défis de la transition énergétique demeurent nombreux. Le rapport de la Cour des comptes 2023-2024 souligne la nécessité de réajuster la stratégie actuelle pour répondre aux objectifs nationaux. Entretien avec Said Guemra, expert et consultant en énergie.
Propos recueillis par Désy M.
Finances News Hebdo : Le rapport du conseil de la Cour des comptes revient sur la nécessité de révision des composantes de la gou- vernance de la stratégie de la transition énergétique du Maroc. Quels sont, selon vous, les ajustements néces- saires qui vont permettre à la transition énergétique de mieux avancer vers l’atteinte de ses objectifs ? Said Guemra : Nous avons eu plusieurs évaluations très consis- tantes de la part du CESE, du Conseil de la concurrence, de l’AN- RE, et plus récemment celles de la Cour des comptes, qui versent toutes dans le même sens quant à la nécessité de réajustement de la stratégie énergétique. Il y a égale- ment le fait que cette stratégie est centrée sur l’électricité, qui reste à 45% de notre mix énergétique, les 55% restants représentant les énergies consommées par le trans- port, l’industrie, et le bâtiment… Tout ce mix énergétique ne repré- sente que 70% à 80% de l’en- semble de nos émissions de gaz à effet serre, qui fait l’objet de la tran- sition énergétique, le Maroc étant
signataire des accords de Paris; ce qui veut dire une neutralité carbone à 2050. Le constat est que tous les efforts actuels dans le domaine de la tran- sition énergétique étaient relatifs à la mise en place d’une petite moyenne de 200 MW de projets renouvelables par an sur une durée de 15 ans. L’objectif de 52% du mix électrique en 2030 n’est qu’un objectif partiel, le véritable objectif est relatif à 2050, et on doit se placer sur cette trajectoire 2050, et rien d’autre. Ce qui veut dire une installation minimale de 900 à 1.000 MW/an, et nous sommes bien loin de cette trajectoire. Ce qui est demandé aujourd’hui, c’est une stratégie qui vise 2050, avec des objectifs partiels tous les cinq ans. Les différents rapports reviennent sur la liberté de conception du futur mix électrique accordée par Sa Majesté le Roi en 2009, sur la liberté des choix technologiques, y compris le nucléaire, à condition d’être économiquement viables.
La stratégie de la transition éner- gétique devait verser sur toutes les composantes du camembert électrique national à 2050, et pas uniquement sur une partie, qui est l’éolien et le photovoltaïque. C’est tout un travail de modélisation qui devait être fait pour avoir une vision énergie du Maroc à 2050. A quoi elle ressemble-t-elle ? Partant d’une production de 42 TWh en 2023, le Maroc sera en moyenne vers les 107 TWh d’électricité par an, qui doit être renouvelable et bas carbone. La demande électrique nationale en 2050 doit être l’un des objectifs principaux de notre transition éner- gétique. Pour le secteur du trans- port, le Maroc a importé en 2023 une quantité de 8,12 milliards de litres gasoil et essence, avec une progression de 3,75% par an. Elle sera en 2050, avec la progression du parc automobile, de l’ordre de 22 milliards de litres, si rien n’est fait d’ici là. Le plus gros de nos émetteurs
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