Ère magazine, édition avril 2024

AVRIL 2024

REGARD SUR DEMAIN L’univers de la prévoyance décrypté par Jacques-André Schneider AGIR POUR DEMAIN Patricia Bidaux milite pour une meilleure reconnaissance des agriculteurs RETRAITE ÉTONNANTE Passionné, il consacre son temps libre à la réfection de murs en pierres sèches INSPIRER L’AVENIR

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Parler prévoyance Adapter sa prévoyance au fil de la vie

Regard sur demain La prévoyance sous le regard avisé de Jacques-André Schneider 2

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Qui est qui ? Un nouveau 22 24 Eclairage Un ambassadeur unique de la biodiversité visage au Conseil d’administration

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Retraite étonnante Entretenus par des passionnés, les murs en pierres sèches traversent les âges

Agir pour demain La présidente d’AgriGenève mise sur l’intelligence et la solidarité des consommateurs

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INSPIRER

L’AVENIR

Poursuivons… Promenade avec Patricia Bidaux, présidente d’AgriGenève, qui tout en finesse, mais avec conviction, nous présente les enjeux d’une agri- culture locale et l’art de poser les bonnes questions… A consommer sans modération. A l’heure des imprimantes 3D qui permettent de construire des maisons, pourquoi ne pas revenir aux fondamentaux et bâtir des murs, hauts et so- lides, avec comme seuls matériaux des pierres sèches… Balade en compagnie de Charly Wuilloud et découverte d’une passion, mais également d’un savoir-faire. Se battre pour ses idéaux, c’est à n’en point douter ce que fera Olivier Baudry, l’administrateur récemment désigné par les assurées et les assu- rés, aux côtés de Nicole Beiner. Rencontre avec une personnalité engagée et chaleureuse. Des idéaux, vous en trouverez aussi dans les autres rubriques… Je vous laisse les découvrir au fil de votre lecture. Pour ma part, je vous souhaite un magnifique prin- temps et une bonne lecture de ce premier numéro de l’année et de son encart sur les comptes 2023 de l’Etablissement. Ces derniers sont, eux aussi, le reflet de l’engagement de celles et ceux qui se battent pour les Rentes Genevoises et pour les idéaux de leurs plus de 20 000 assurés.

L L’année 2024, faut-il le rappeler, est celle des 175 ans de notre Etablissement. En 1849, James Fazy posait les bases de ce que sont aujourd’hui les Rentes Genevoises. Génie politique et homme d’ac- tion, il a fait preuve de courage et de ténacité pour mettre sur pied une assurance pour la vieillesse, en imaginer le financement sans recourir aux deniers de l’Etat et changer les mentalités pour faire ac- cepter qu’il est normal d’avoir une retraite sereine et décente… Si aujourd’hui la forme de l’Etablisse- ment a changé, son but est resté le même. Ce n’est plus un seul homme politique qui défend cette idée, mais une multitude d’acteurs : le Conseil d’Etat, le Département des finances, des ressources humaines et des affaires extérieures, le Conseil d’administra- tion, la Direction et chaque Talent qui travaille aux Rentes Genevoises. SE BATTRE POUR SES IDÉAUX A une époque où les certitudes s’effritent, où les rendements s’érodent, où le doute s’installe, qu’il est bon de savoir que des femmes et des hommes, sincères et motivés, s’engagent pour de belles et nobles causes ! Si, en introduction de ce numéro d’Ère magazine, je fais référence aux Talents qui tra- vaillent aux et pour les Rentes Genevoises, c’est qu’il est bon le matin de se réveiller et d’aller travailler, heureux de savoir que l’on peut compter sur cha- cune et chacun ! Je les remercie du plus profond de mon cœur. Il y a encore d’autres personnalités que je voudrais mettre en avant parce qu’elles sont des exemples à suivre… Tenez, Jacques-André Schneider, qui modestement se présente comme un retraité… Que de combats menés dans le cadre du 2 e pilier, que d’étudiants for- més à la prévoyance, que de conseils donnés pour façonner la prévoyance et la durabilité d’aujourd’hui ! C’est à lui que revient la lourde responsabilité de dé- buter une série d’articles sur les Rentes Genevoises, leur histoire, leurs anecdotes.

Avec mes bons messages.

Pierre Zumwald Directeur général

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RENCONTRE AVEC

CHNEIDER QUES-ANDRÉ

Spécialiste de la prévoyance, Jacques-André Schneider est, à certains égards, un des héritiers spirituels de James Fazy, le fondateur des Rentes Genevoises. Bien que 175 ans les séparent, tous deux sont animés par le même souci de protéger la population sur le plan social.

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« Ce 175 e anniversaire des Rentes Genevoises signifie que les institutions de retraite en capitalisation, établies dans des pays comme la Suisse qui n’ont connu ni guerres destructrices, ni inflation galopante, ont une longévité incroyable.» Jacques-André Schneider Avocat et professeur, spécialiste de la prévoyance

La question des retraites et de la prévoyance est régulièrement au cœur de l’actualité. Ce fut encore le cas avec les votations du 3 mars dernier. L’évolution démographique nous incite à nous poser des questions sur l’avenir... Le choc démographique est un défi majeur, auquel le Japon est déjà confronté depuis un certain nombre d’années. A l’instar du choc climatique, il faut s’en préoccuper sérieusement. Selon l’Office fédéral de la statistique, en Suisse, les retraités hommes perçoivent en moyenne 3900 francs (entre AVS et 2 e pilier) et les femmes 3000 francs. Pourrons-nous vivre avec une telle somme à l’avenir si l’on sait aussi que les taux de conversion du deu- xième pilier sont en diminution ? En France, la pension moyenne brute s’éta- blit à 1531 euros mensuels. En Allemagne, les hommes perçoivent en moyenne 1728 euros de pension brute par mois, les femmes 1316 euros. En majorant ces données de 50 à 80 % pour tenir compte du coût de la vie plus élevé en Suisse, on s’aperçoit que les rentes suisses sont sensiblement plus éle- vées en moyenne que dans les pays voisins. Il est vrai que la baisse des taux de conver- sion a alimenté le soutien à une 13 e rente de l’AVS, mais les statistiques les plus récentes de l’OFAS nous indiquent qu’outre l’AVS, les �/� des assurés de la prévoyance professionnelle reçoivent des prestations supérieures à celles du minimum obligatoire selon la LPP. C’est tout à fait étonnant et unique en Europe. Il faut savoir aussi, comme l’a montré dans une étude le démographe et professeur de l’UNIGE Philippe Wanner, que la richesse moyenne des rentiers suisses a continuellement augmenté, grâce notamment aux capitaux versés par la prévoyance professionnelle.

T Titulaire du brevet d’avocat, spécialiste du droit des assurances sociales et de la pré- voyance, professeur d’université retraité, cofondateur de la Fondation Ethos. La carte de visite de Jacques-André Schneider indique le sérieux de l’expert méticuleux. L’interview a lieu avant la préparation d’un repas qu’il concocte pour des amis. Il a, dit-il, choisi un très bon vin. Il y a une cigale derrière la fourmi. D’abord, j’ai hérité de mes parents l’esprit du protestantisme social, avec l’idéal de la pro- tection sociale et non de la charité en faveur d’une large part de la population. Ensuite, après ma licence en droit et l’obtention du brevet d’avocat, j’ai obtenu un DES (diplôme d’études supérieures en droit), le master d’au- jourd’hui, dans le domaine des assurances sociales, avec un mémoire sur la prévoyance professionnelle. J’ai poursuivi avec une thèse de doctorat, ayant pour sujet la gestion pari- taire et la libre circulation des salariés en droit suisse et européen des régimes complémen- taires de retraite (2 e pilier). Ce fut une aven- ture car la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) venait d’entrer en vigueur le 1 er janvier 1985 et il n’y avait à l’époque pratiquement aucun écrit juridique sur le 2 e pilier en français. Monsieur Schneider, quelle fibre a été touchée dans votre être, votre ADN, pour qu’un jour vous deveniez expert en prévoyance professionnelle ?

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▲ Jacques-André Schneider a longtemps été membre du Conseil d’administration des Rentes Genevoises.

Selon l’étude de l’Université de Genève que vous mentionnez, les retraités suisses disposent d’une fortune de plus de 200 000 francs en moyenne. Mais les jeunes épargnent nette- ment moins. Les jeunes veulent plus profiter de la vie, travailler moins... On touche là un phénomène sociologique, en notant que l’épargne des actifs n’apparaît pas au plan fiscal car elle se situe essentiellement dans les 2 e et 3 e piliers. La généralisation du temps partiel va toutefois changer la donne. Si vous travaillez à temps partiel, c’est autant de reve- nus sur lesquels vous ne cotisez pas ! Le temps partiel, c’est un sujet encore non débattu mais majeur. Et on ne mesure pas encore très bien ce que cela signifiera pour l’AVS. J’ai ma petite idée. On aura un double choc : l’arrivée massive à la retraite des baby-boomers et sans doute moins de ressources pour l’AVS provenant des couches les plus aisées, qui sont celles qui diminuent le plus facilement leur temps de travail. De nombreux retraités partent vivre à l’étranger où la vie est moins chère. Est-ce vrai ? Le phénomène pourrait-il se généraliser ? J’en doute. Les études chiffrées le montrent. Qui part ? Les ressortissants de l’UE qui rentrent chez eux. Dont les frontaliers. Quant aux Suisses, très peu s’en vont afin de conser- ver leur réseau social et culturel suisse, grâce à l’AVS et au 2 e pilier.

L’étude universitaire du Professeur Wanner montre aussi que 15 % à 20 % des seniors vivant seuls sont dans une situation de précarité. Inquiétant, non ? Les vrais problèmes sociaux concernent ces personnes-là, en effet. Ce sont des poches de pauvreté qui sont couvertes en partie par les prestations complémentaires. On doit faire mieux. Clairement. Et on l’a vu, les femmes sont souvent désavantagées... Les différences de genre, liées à la prise en charge des enfants, existent bel et bien. C’est une réalité. Et pour résoudre ce problème, la première chose à faire, c’est d’enlever la déduction de coordination, c’est-à-dire faire en sorte que l’on cotise dès le premier franc dans le 2 e pilier. C’est aussi important pour tous ceux qui travaillent à temps partiel. Actuellement, les premiers 22 050 francs de salaire ne sont pas assurés selon la LPP, pénalité aujourd’hui anachronique qui pourra devenir à terme un piège à pauvreté. Il faut aussi favoriser l’épargne, via le 3 e pilier ou, par exemple, les rentes viagères, une des spécialités des Rentes Genevoises. C’est une rente à vie. Vous versez vos primes et quand vous arrivez à l’âge de la retraite vous recevez une rente jusqu’à votre décès.

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QUESTIONS EXPRESS À JACQUES-ANDRÉ SCHNEIDER Votre retraite idéale ? Longue, avec ma famille, active et en bonne santé. Les Rentes Genevoises fêtent cette année leurs 175 ans, ça vous inspire quoi ? Pour paraphraser Jean de La Fontaine, la fourmi qui a traversé de très nombreux hivers. Si vous étiez un moment de la journée, lequel seriez-vous ? L’aube et ses lumières. Quelle est votre fleur préférée ? La Protea.

Sans entrer dans des considérations trop privées, comment faites-vous vous-même pour préparer votre retraite ? Vous êtes comme le cordonnier mal chaussé ? Non ! D’abord je dirais que j’ai beaucoup tra- vaillé ! J’étais indépendant, je me suis inscrit dans une caisse de pension pour vraiment commencer à cotiser à l’âge de 40 ans, parce qu’avant je faisais mon doctorat et j’avais des enfants en bas âge. Je me suis aussi constitué un 3 e pilier. Disons que j’ai suivi les traditions familiales : être un bon vivant mais en fonction des revenus qui restaient après avoir épargné pour le futur. Et cela ne m’a pas empêché de bien vivre… Donc on est une bonne cigale si on est d’abord une fourmi ? En fait la cigale doit être hybride, à la fois fourmi et cigale… Qu’est-ce que vieillir pour vous ? C’est grave, c’est une chance, c’est un privilège ? Vieillir en bonne santé, en étant bien dans son corps, bien avec les siens – j’ai eu la chance de trouver l’âme sœur jeune et nous sommes très heureux et complices, quarante-trois ans après – ça c’est un privilège énorme. Et il faut savoir se retirer. J’étais indépen- dant, j’avais une activité débordante, j’étais apprécié, j’aurais pu continuer. Mais j’ai décidé qu’à 67 ans je quitterai le Barreau, tout en en poursuivant à temps par- tiel une activité d’administrateur spécialisé. Résultat : je peux faire plus de chant choral, plus de sport, j’ai plus de temps pour flâner et voir nos amis, pour notre petit-fils, pour aller au théâtre, au concert. Vous savez, je ne pourrais pas être plus heureux !

Qu’est-ce que vous savez faire que peu de gens savent faire ? Les dons relèvent de la Grâce et,

selon ChatGPT, la modestie protestante encourage à éviter l’orgueil, l’égoïsme et l’attention personnelle.

Cela se fait aussi dans d’autres institutions… Exact, mais les Rentes Genevoises offrent un léger avantage par rapport aux assu- rances privées parce qu’elles n’ont pas d’actionnaires à rémunérer. Ainsi, les ex- cédents sont redistribués aux assurés. Et les rentes servies sont garanties par l’Etat de Genève. Elles célèbrent leurs 175 ans en cette année et elles se portent très bien ! Justement, que signifie cet anniversaire à vos yeux? Ce 175 e anniversaire des Rentes Genevoises signifie que les institutions de retraite en capitalisation, établies dans des pays comme la Suisse qui n’ont connu ni guerres destruc- trices, ni inflation galopante, ont une longévité incroyable. Quand elles cultivent en plus la prudence et la patience… Bref ces 175 ans montrent la pertinence d’épargner sur le long terme. C’est aussi simple que ça !

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CHOISIR

Que ce soit dans le cadre professionnel ou privé, de nombreuses décisions sont prises tout au long de la vie. Chacune a un impact immédiat qu’il est facile de prendre en compte. En revanche, les impacts à long terme sont plus difficiles à anticiper. Ils peuvent avoir des conséquences importantes, notamment sur la prévoyance. Voici quelques situations concrètes et nos recommandations. AUJOURD’HUI POUR DEMAIN

Notre conseil : La première action à entreprendre est bien entendu de verser la cotisation minimale de CHF 514.- à l’AVS dès le 1 er janvier qui suit le vingtième anniversaire afin de bénéficier de la totalité des années de cotisation (44). La seconde est de s’intéresser à sa prévoyance individuelle dès son premier emploi, celle-ci pourra compenser le retard pris sur la prévoyance professionnelle.

LONGUES ÉTUDES Faire de longues études ouvre de nombreuses perspectives, mais retarde l’entrée dans la vie professionnelle et réduit en conséquence la durée de cotisation aux trois piliers (AVS, LPP, 3 e pilier). Cet impact est encore plus marqué si l’on considère qu’une cotisation précoce générera davantage d’intérêts composés.

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VRAI / FAUX «L’AVS et la prévoyance professionnelle couvrent toutes les situations possibles et je suis certain d’avoir un revenu suffisant à la retraite ! » FAUX ! L’AVS et la prévoyance professionnelle se combinent. L’objectif est de permettre, en additionnant les deux rentes, d’atteindre le 60 % du dernier salaire. Cependant, cet objectif ne se réalise que dans les meilleures conditions, c’est-à-dire lorsque la durée de cotisation AVS s’étend sur une carrière complète, sans interruption, et que le plan de prévoyance dans le 2 e pilier a été entièrement souscrit (rachat d’années, etc.) Pour vous assurer de conserver votre niveau de vie à la retraite, vous devez anticiper les conséquences de vos choix de vie. Des solutions existent, notamment au moyen d’un 3 e pilier, pour combler les lacunes de prévoyance.

CHANGEMENT D’EMPLOI Un nouvel emploi assorti d’un salaire supé- rieur marque la reconnaissance de ses com- pétences et génère une grande satisfaction. Cependant, ce n’est pas nécessairement une bonne nouvelle pour la prévoyance. En effet, les prestations de prévoyance professionnelle varient fortement d’un employeur à l’autre. Légalement, l’employeur est tenu de cotiser au 2 e pilier de son employé à hauteur de 50 %, mais il peut verser un pourcentage plus élevé. De même, les conditions de la part sur-obligatoire, c’est-à-dire les prestations allant au-delà du minimum prévu par la loi, peuvent différer sensiblement (taux d’intérêt, montant maximum assuré, taux de cotisation plus important, part de l’employeur supérieure à 50%, etc.) Notre conseil : Avant de céder à l’appel d’une rémunération plus élevée, il est important de se renseigner sur les conditions offertes par la caisse de pension du nouvel employeur, surtout lorsque l’âge de la retraite approche.Des spécialistes de la prévoyance peuvent aider à comparer les plans de prévoyance de différents employeurs. ARRIVÉE EN SUISSE Les personnes qui arrivent en Suisse en cours de carrière, par exemple les frontaliers ou les expatriés, doivent porter une attention toute particulière à leur prévoyance. Pour les per- sonnes concernées, il est fort probable que la prévoyance constituée dans le pays d’origine soit inférieure à celle qui aurait été obtenue en Suisse, en raison du coût de la vie et du niveau des salaires. Les revenus pour une retraite en Suisse pourraient donc s’avérer insuffisants. Notre conseil : Deux solutions s’offrent aux personnes dans cette situation. La première consiste à racheter des années dans le cadre du 2 e pilier. En effet, il est probable que le montant rachetable, indiqué dans le certificat de prévoyance, soit important. La seconde est de débuter le plus rapidement pos- sible une prévoyance individuelle. Elle facilite le processus d’épargne et offre de nombreux avantages.

TEMPS PARTIEL Un emploi à temps partiel est très attirant du point de vue de la qualité de vie. Cependant, la prévoyance s’en trouvera impactée. Avant de prendre une telle décision, il est préférable de vérifier que les revenus à la retraite seront suffisants par rapport aux besoins. Il faut se rappeler que le 2 e pilier prévoit une déduc- tion de coordination de CHF 25 725.-. Cela signifie que seule la partie du salaire supé- rieure à ce montant fait l’objet de cotisations. En cas de cumul de deux emplois à temps partiel, cette déduction concerne les deux sa- laires et engendre une forte diminution des montants cotisés. Notre conseil : Avant de réduire son taux d’activité, il ne faut pas uniquement évaluer la baisse de salaire immédiate, mais également celle des revenus lors de la retraite. Une analyse de la situation par un professionnel permettra d’identifier les éventuelles lacunes de prévoyance et d’anticiper les solutions. LE CONSEIL DES RENTES GENEVOISES En résumé, quelle que soit la situation, des so- lutions existent. Il convient cependant de les anticiper. Dans un sujet aussi complexe que la prévoyance, le conseil d’un spécialiste peut s’avérer précieux. Il ne faut jamais hésiter à faire appel à lui suffisamment tôt.

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LES RENDEZ-VOUS

PRÉVOYANCE

Le Pilier accueille le grand public pour le former et l’informer sur les diverses facettes de la prévoyance. Ces conférences, aux thèmes variés, sont animées par un(e) ou plusieurs spécialistes, et apportent aux participants une information claire et vulgarisée sur les différents enjeux de la prévoyance.

Modification de l’âge de référence pour le départ à la retraite des femmes, réforme sur la stabilisation de l’AVS (AVS 21), 13 e rente AVS, rente-pont dès 58 ans : la prévoyance devient de plus en plus un enjeu électoral et s’affiche en gras dans les agendas des politi- ciens suisses. Cette conférence a pour but de cibler les enjeux et intérêts de tous les acteurs concernés, de mieux comprendre les décisions à venir et d’identifier les prochains défis pour la prévoyance. Conférencière : Mme Franca Renzi Ferraro Fondatrice et directrice de l’Ecole supérieure en prévoyance professionnelle à Genève 13 JUIN « RETRAITE : COMPRENDRE LES RÉVISIONS EN COURS» Le Pilier, 8h00-9h00

A bien des égards, le 3 e pilier constitue un allié efficace pour la prévoyance, mais n’est-il pas plus avantageux de faire des rachats dans sa caisse de pension au lieu de se constituer un 3 e pilier ? Est-il possible de faire des rachats en vue d’une retraite anticipée ? Cette confé- rence apportera un éclairage pratique sur les avantages, les inconvénients et les risques inhérents aux rachats dans le 2 e pilier. Conférencière : Mme Franca Renzi Ferraro Fondatrice et directrice de l’Ecole supérieure en prévoyance professionnelle à Genève Mme Renzi Ferraro est titulaire d’un diplôme fédéral en assurances sociales. Elle exerce depuis plus de trente-cinq ans une activité de conseils en matière de prévoyance professionnelle. Elle enseigne dans le domaine de la pré- voyance et tient régulièrement des conférences sur la thématique de la LPP. 23 MAI « FAUT-IL FAIRE DES RACHATS DANS SA CAISSE DE PENSION ? » Le Pilier, 8h00-9h00

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Le vieillissement constant de la population suisse est désormais reconnu par les autorités compétentes. Cette conférence a pour objectif d’en identifier les multiples conséquences et d’il- lustrer comment les entreprises se préparent à gérer efficacement, voire à anticiper, ces chan- gements à court, moyen et long terme. Diverses initiatives ainsi que des stratégies et processus en matière de diversité, d’équité et d’inclusion de l’âge dans les pratiques internes seront présentés. Conférencières : Mme Ellen Kocher Fondatrice de la société Whealthness, coach certifiée Après dix ans de carrière dans le domaine de la finance internationale, Mme Kocher a créé la société Wealthness, avec laquelle elle promeut depuis plus de quinze ans la santé en entreprise, une nutrition adaptée et une hygiène de vie correcte. Coach certifiée, Mme Kocher focalise son travail sur les « 50+ », en animant régulière- ment des conférences, des séminaires et des ateliers de modification comportementale. Mme Dominique Ben Dhaou Fondatrice et directrice de la société de conseil PointNorth International Mme Ben Dhaou a acquis une solide expérience du lea- dership durant plus de trente années passées au sein de plusieurs départements des Ressources humaines d’importantes organisations internationales. Certifiée dans différents outils d’évaluation, elle accompagne tout projet de reconversion professionnelle pour qu’il soit conforme à l’expérience, aux valeurs, aux compétences et à la vocation des personnes qui la contactent. 27 JUIN «S’ADAPTER AVEC SAGESSE: STRATÉGIES D’INCLUSION DE L’ÂGE POUR LES ENTREPRISES INNOVANTES» Le Pilier, 8h00-9h00

29 AOÛT « PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES ET PRÉVOYANCE » Le Pilier, 8h00-9h00

De plus en plus de personnes se retrouvent en situation de précarité à la retraite : quelle aide peuvent leur offrir les prestations com- plémentaires ? Comment celles-ci sont-elles structurées et qui y a droit ? Autant de ques- tions auxquelles cette conférence se propose d’apporter des réponses concrètes. Conférencière : Mme Franca Renzi Ferraro Fondatrice et directrice de l’Ecole supérieure en prévoyance professionnelle à Genève

POUR PLUS D’INFORMATIONS ET POUR VOUS INSCRIRE lepilier.ch/conferences

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▲ Patricia Bidaux a vécu en milieu urbain, à Onex, avant d’épouser un agriculteur. Elle fait le lien entre la ville et la campagne.

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UNE INFIRMIÈRE POUR ’AGRICULTURE La présidente d’AgriGenève aime jouer avec les mots. Elle a, dit-elle, « épousé l’agriculture en épousant un agriculteur ». Au Grand Conseil, l’élue a surpris les

députés en se présentant comme quelqu’un qui avait fait huit ans de prison : infirmière à Champ-Dollon.

Vous ironisez parce que j’ai un paquet de noix de cajou dans la poche. Ce n’est pas très local, dites-vous, mais c’est un bien alimentaire quand même ? Bien sûr, mais j’aimerais bien connaître les conditions de travail des femmes qui sont em- ployées à décortiquer ces noix de cajou dans leur pays. De quelle protection jouissent-elles ? Ont-elles droit à une assurance-chômage ? Le développement durable, ce n’est pas que le critère environnemental, c’est aussi l’aspect social. Le consommateur ne doit pas oublier qu’ici, à Genève ou en Suisse, les paysannes et paysans assurent leurs employés, cotisent pour eux, pour leur AVS, etc. Et cela doit être pris en compte pour le volet économique qui nous préoccupe beaucoup. Sur ce plan-là, celui de la concurrence, votre marge de manœuvre est très étroite… C’est la grande question, maintenant, avec les règles de l’OMC qui, pour moi, ont totalement déséquilibré le marché agricole. Parce que, justement, on échange des produits et non des biens alimentaires…

D Depuis l’année dernière, Patricia Bidaux est la présidente d’AgriGenève. Elle est la deuxième femme à présider une chambre d’agriculture en Suisse, la première à Genève. Patricia Bidaux, avant de devenir présidente d’AgriGenève, vous avez vécu dans une tour de quinze étages et grandi à Onex, où vous avez vu « pousser les immeubles ». Les mots sont importants pour vous. Et vous tenez à parler non pas de produits, mais de biens alimentaires. Pourquoi cette distinction ? Parce qu’un produit, cela s’échange, cela peut même être sans valeur éthique, morale ou nutritive, alors qu’un bien a une valeur. Je pré- fère parler de bien alimentaire pour redonner de la valeur à ce que l’on mange.

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« L’acte d’achat est un acte militant. J’aime aussi l’idée d’un contrat social entre la ville et la campagne.» Patricia Bidaux Présidente d’AgriGenève

Cette concurrence, elle se concrétise comment ? Vous le voyez très bien quand vous allez dans un supermarché. Vous avez, côte à côte, un bien alimentaire suisse et un autre qui vient de l’étranger. Même s’ils sont tous les deux bio, ils ne sont pas produits selon les mêmes critères et avec les mêmes normes sociales. D’où la différence de prix. Quand vous êtes dans ce supermarché et que vous voyez cette concurrence de marché, vous en voulez à qui ? Je dirais que j’en veux à la personne qui vient à la ferme, qui me félicite pour la qualité de mes volailles et qui se rend ensuite dans une grande surface parce que, finalement, cette personne achète très peu à la ferme. L’acte d’achat est un acte militant. J’aime aussi l’idée d’un contrat social entre la ville et la campagne. Cela dit, je ne ferai jamais aucun reproche à ceux qui doivent se serrer la ceinture.

J’ai grandi à Onex, à Cité-Nouvelle, de mère suisse et de père immigré espagnol, je sais ce que manger modestement veut dire, mais les gens qui connaissent des difficultés ne sont pas forcément ceux qui n’achètent pas de bons produits, parce qu’ils savent que le bon produit, au niveau des légumes par exemple, ça dure plus longtemps. Et il y a un nombre certain de personnes qui ont les moyens. Que dites-vous de la colère qui a grondé en Europe et en Suisse ? J’ai écrit à mes collègues des chambres d’agriculture de l’Ain et de la Haute-Savoie pour leur dire ma solidarité. En tant que pré- sidente d’AgriGenève, j’ai, depuis l’automne passé déjà, attiré l’attention de l’Union suisse des paysans, notamment, sur ce qui est en train de germer dans les campagnes : un ras- le-bol, une lassitude. Pour moi ce qui est le plus important, dans cette colère qui monte, c’est que les paysans restent unis pour faire face ensemble. Ce n’est pas évident, parce que les prix font que les tensions sont vives au sein des familles. Vous sentez le décalage ville-campagne ? Bien sûr. Pour les pesticides on est d’accord : on a aujourd’hui pris beaucoup de recul sur l’utilisation des produits phytosanitaires. Les avancées technologiques permettent de mieux gérer leur utilisation qu’au siècle dernier, où les connaissances étaient insuf- fisantes. Une nouvelle tendance arrive avec les citadins qui veulent manger moins de viande. Ce qui ne sera pas sans impact sur la disponibilité des fertilisants naturels comme le fumier ou le lisier, puisque les élevages vont diminuer. Il faudra pourtant bien continuer à nourrir la terre pour produire des biens ali- mentaires. Devra-t-on importer du fumier ? La nature est un tout, un équilibre à respec- ter. Comme le corps humain. Je le sais, j’ai été infirmière.

AGRIGENÈVE AgriGenève est la faîtière de l’agriculture genevoise. Elle est en contact permanent avec l’USP, l’Union suisse des paysans, et fait partie d’AGORA, l’association réunissant tous les groupements et organisations de Suisse romande liés à l’agriculture. AgriGenève défend les intérêts de la profession dans les 389 exploitations agricoles du canton, qui génèrent 1636 emplois. Plus d’un tiers du territoire est en surface agricole utile, soit un total de 10 000 hectares. L’agriculture genevoise est avant tout axée sur les grandes cultures, le maraîchage et la viticulture.

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QUESTIONS EXPRESS À PATRICIA BIDAUX Votre retraite idéale ? Continuer à aimer les gens. Et à aimer apprendre. Les Rentes Genevoises fêtent cette année leurs 175 ans, ça vous inspire quoi ? Longévité. Je pense, une certaine cohérence. Et recherche de solutions, créativité. Si vous étiez un moment de la journée, lequel seriez-vous ? Moi j’aime bien la soirée, c’est un peu plus calme et c’est là où je peux faire plein de choses. Quelle est votre fleur préférée ? Les roses anciennes. Je ne me suis jamais posé cette question… Vous m’auriez demandé ce que je ne sais pas faire et que d’autres savent très bien faire, j’aurais répondu : rien faire, ça je ne sais pas ! Mais disons que j’ai une grande capacité d’adaptation (que tout le monde n’a pas !). Qu’est-ce que vous savez faire que peu de gens savent faire ?

Quelle est votre solution pour que l’agricultu- re continue d’exister à l’avenir ? Les consommateurs et consommatrices peuvent faire bouger les lignes. Je ne de- mande pas de ne plus aller dans les supermar- chés. Mais j’aimerais que les gens se mettent à poser des questions au vendeur ou au gérant : « Dites-moi, pourquoi vous avez des oignons de Nouvelle-Zélande alors que la production locale a déjà commencé?» C’est un exemple parmi d’autres. En fait c’est avec nos pourquoi qu’on changera les choses… La prévoyance est une thématique parfois ou- bliée dans le secteur agricole. Vous, avez-vous préparé votre retraite ? Pas de deuxième pilier, nous sommes indépendants, mon mari et moi. Mais nous avons un troisième pilier. J’ai toujours été indépendante, même quand j’étais infirmière.

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DES COURSES

ANTI-

GASPI Entre le champ et l’assiette, environ un tiers des aliments produits en Suisse sont perdus ou gaspillés. A l’heure de remplir son caddie, quels réflexes adopter pour réduire le gaspillage alimentaire ?

E En Suisse, l’alimentation joue un rôle impor- tant dans notre impact environnemental. Dans ce secteur, le gaspillage alimentaire compte pour un quart de cette pollution. Selon l’Office fédéral de l’environnement, la part la plus importante de ces pertes est engendrée par les ménages, qui à eux seuls génèrent chaque année 778000tonnes de déchets ali- mentaires. Pourtant, des solutions existent pour faire baisser ce chiffre. En tant que consommateurs, nous achetons souvent davantage que ce dont nous avons besoin. Attention toutefois à ce réflexe perni- cieux. Car si le paquet de 2.5 kg de pommes de terre ou de carottes préemballées nous a sem- blé plus attrayant, il est possible que quelques pièces suffisent à la recette prévue. Dans ce cas, il vaut mieux acheter uniquement les quantités nécessaires. N’oubliez donc pas de les préciser dans votre liste de courses avant de partir remplir votre panier. ACHETEZ LES QUANTITÉS NÉCESSAIRES, PAS PLUS

NE BOUDEZ PAS LES LÉGUMES MOCHES

Dans la filière alimentaire, le calibrage des légumes ne pardonne pas. Une tomate trop grosse ? Une courgette trop petite ? Une ca- rotte toute tordue ? En temps normal, un paysan se voit refuser 30 % de sa production non calibrée. Mais depuis quelque temps, plusieurs enseignes lancent des initiatives pour valoriser ces produits « hors calibre ». La gamme « Ünique » de la Coop propose ces ali- ments à prix réduits. Du côté de la Migros, la plupart des grands magasins disposent éga- lement d’un petit rayon où vous trouverez ces légumes hors calibre. Au marché aussi, po- sez la question à votre maraîcher. Il vous fera peut-être un petit rabais sur ses légumes les plus moches qu’il ne s’attendait pas à vendre. LE PAIN DE LA VEILLE VOUS FERA CRAQUER ! La boulangerie de votre quartier le fait peut- être : un petit coin du présentoir dédié aux pains et viennoiseries d’hier, le tout à moitié prix.

16 avril 2024 - èremagazine

BON, MÊME APRÈS LA DATE DE PÉREMPTION ? « A consommer jusqu’au… » est réservé aux denrées très périssables. Ces produits se conservent généralement au frais et ne peuvent pas être consommés après la date indiquée. « A consommer de préférence avant… » indique la date jusqu’à laquelle un produit garde ses qualités intactes (son goût, son odeur, sa texture…). Passé ce délai, il sera encore consommable. Par exemple… Yaourt, beurre Deux semaines après la date, parfois même plus. Lait UHT S’il n’est pas ouvert, jusqu’à un mois après la date. Biscuits et chocolat Plusieurs mois après la date. Pâtes, riz, semoule, farine, café, sucre, sel, moutarde, vinaigre Sauf signe de dégradation, tous ces produits n’ont pas de limite.

Eh oui, ils peuvent être tout aussi bons ! Sur- tout après un petit passage dans le grille-pain. Certaines enseignes, comme Äss Bar, vont même plus loin et ont fait du « non frais » leur marque de fabrique en ne vendant que des produits de boulangerie de la veille. Chaque matin, une collecte est organisée dans diffé- rentes boulangeries partenaires. Vous trouve- rez ensuite croissants, pains ou sandwiches revendus à des prix fortement réduits. Née en 2013 à Zurich, l’entreprise a fait pousser ses points de vente dans sept villes de Suisse. Deux seuls se trouvent côté romand : à Bienne et Lausanne.

SUR NOTRE BLOG, DIX ASTUCES POUR PROLONGER LA VIE DE

VOS ALIMENTS rentesgenevoises.ch/blog

17 èremagazine - avril 2024

AUX PIER IL DONNE UNE NOUVELLE

Edifier des murs de pierres en montagne, les retaper, créer des esplanades avec vue époustouflante sur la plaine, c’est la passion dévorante qui habite Charly Wuilloud, depuis qu’il a pris sa retraite il y a plus de dix ans.

avril 2024 - èremagazine 18

RES VIE

19 èremagazine - avril 2024

«Tout à coup, ça m’a pris. C’était encore plus grand qu’une passion.» Charly Wuilloud Bâtisseur de murs en pierres sèches

L La vie de Charly Wuilloud, guide et ingénieur de formation, a été celle d’un homme d’action, faite de situations d’urgence, de relations humaines innombrables et souvent bouleversantes. Lorsque la perspective de la retraite s’est dessinée, il a pris le taureau par les cornes : « Je me suis préparé pendant presque une année à cette échéance, à être seul. Il me fallait une occupation. Alors, comme en famille on a de la vigne et des murs, j’ai commencé par suivre un cours de cinq jours à l’Ecole d’agriculture du Valais, sur l’entretien et le montage des murs en pierres sèches. Ensuite, sur le terrain, je n’ai d’abord fait que d’enlever des lierres. Et j’ai découvert, derrière ces lierres, des murs qui avaient mauvaise mine. Alors j’ai commencé à les rebâtir et là, tout à coup, ça m’a pris, c’était encore plus grand qu’une passion. C’est presque devenu une drogue. » Dès lors, Charly Wuilloud arpente les routes et les chemins à vélo. Il repère les pierres avec lesquelles il va bâtir ses ouvrages, vient les re- chercher en voiture pour les placer ensuite au bon endroit, dans le mur ou la construction qu’il édifie.

DES CAILLOUX « SOCIAUX » En homme de terrain, le bâtisseur aime les comparaisons concrètes. A ses yeux, les pierres sont comme les individus d’une société, il y en a de toutes sortes : « Certaines doivent tenir des rôles modestes à l’arrière et d’autres peuvent être mises avantageusement sur la face frontale du mur. » Et pourquoi dit-on mur en pierres sèches ? Réponse de l’intéressé : « Parce qu’il n’y a que de la pierre. Pas de sable, pas d’eau, pas de ciment, rien du tout. On entasse ces pierres les unes sur les autres et elles se tiennent entre elles, comme un grand puzzle en trois dimensions. » Les avantages d’un mur en pierre par rapport à un mur en béton sont clairs pour Charly Wuilloud. Outre le gain esthétique, les pierres laissent passer l’eau. Elles ne lui font pas barrage, ce qui évite que l’eau et la terre trempée n’exercent une pression sur le mur. Cela freine l’érosion et contribue à expliquer la durée séculaire de ces ouvrages. Charly Wuilloud construit et entretient des murs de soutènement pour les vignes, mais il a aussi bâti une guérite, des terrasses, des es- planades imposantes. Dans la création de ces ouvrages, il estime que chaque caillou a son utilité : « Les pierres constituent une partie de notre monde et c’est frappant dans nos Alpes. Les agriculteurs les ont sorties de la terre pour édifier leurs cultures, en vivre. Je dirais que chaque caillou a sa raison d’être et je reste sans voix devant ces murs qui peuvent monter jusqu’à 28 mètres ! »

▼ Malgré leur robustesse, les murs en pierres sèches subissent des déformations au fil du temps. Il est donc parfois nécessaire de les réparer en comblant leurs failles.

avril 2024 - èremagazine 20

DU CANTONNIER AU CONSEILLER FÉDÉRAL Dans son existence, Charly Wuilloud a eu la chance de faire ce qui le passionnait. Bien avant de travailler la pierre dans la région de Mont d’Orge au-dessus de Sion, sa profession l’a comblé. Enfant, il se rêvait glaciologue. Il est parti deux fois en expédition au pôle Nord, avant de décider de changer d’orientation et de se former comme ingénieur forestier (à l’EPFZ) et comme guide de montagne. De retour en Valais, il se voit confier la charge de la ges- tion des dangers naturels du canton : chutes de pierres, éboulements, laves torrentielles, chutes de glace et bien sûr les avalanches. Une fonction qu’il exercera pendant trente ans : « C’était d’une grande richesse sur tous les plans, j’avais des contacts qui allaient du cantonnier au conseiller fédéral. » Dans sa nouvelle vie active, le terme de dan- gers naturels prend un autre sens. « Le danger le plus grand, c’est la pierre qui peut tomber sur les pieds ! Alors il faut toujours prendre de bonnes chaussures et faire bien sûr aussi attention à ne pas se coincer les doigts ! ». Et quel équipement nécessite ce travail ? Peu de choses, en fait. Le sac à dos de Charly ne contient qu’une petite massette qui lui sert parfois à tapoter un caillou ou l’autre pour mieux le caler dans l’ouvrage : « Certaines personnes, pour faire leurs murs, vont cher- cher leurs pierres dans une grande carrière, des blocs qui ont déjà été formatés. Moi je me sers des pierres qui sont ici. Je ne prends pratiquement jamais une pierre qui a déjà été travaillée. »

▲ Le canton du Valais comporte quelque 3000 km de murs en pierres sèches. Soit la distance de Genève à Antalya en Turquie !

PLUSIEURS TONNES PAR JOUR Et physiquement ? A 74 ans, Charly Wuilloud ne se prend pas pour Obélix, infatigable li- vreur de menhirs, et il concède que son tra- vail demande quelques efforts : « C’est assez dur, surtout quand on a de grands blocs. Ça représente plusieurs tonnes par jour. En fait, chaque pierre que j’utilise, pour bâtir un mur par exemple, je dois la soulever quatre ou cinq fois : une fois pour la sortir de son pierrier, une fois pour la charger sur une brouette, ensuite il faut l’amener jusqu’à l’ouvrage, l’enlever et la remettre plusieurs fois jusqu’à ce qu’elle se cale correctement. » Enfin, quel regard Charly Wuilloud porte-t-il sur l’ensemble de son travail ? « Quand je re- garde ce que d’autres que moi ont fait, les murs qu’ils ont montés pour pouvoir survivre économiquement avec leurs cultures, je trouve extraordinaire ce qu’ils ont réalisé. Alors quand je vois ce que je fais moi, je me dis que c’est une petite goutte d’eau dans la mer, mais que c’est au moins une goutte. »

LA CONSTRUCTION DES MURS EN PIERRES SÈCHES, À DÉCOUVRIR EN VIDÉO

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èremagazine - avril 2024 21

UN AMBASSADEUR

UNIQUE DE LA BIODIVERSITÉ Au Bioparc, les animaux d’ici ou d’ailleurs sont les bienvenus. Les missions de l’ancien parc Pierre-Challandes sont autant d’actions en faveur de la préservation des espèces. C

Centre de soins et refuge pour animaux exotiques et locaux, lieu destiné à la préser- vation des espèces menacées, à l’éducation et à la sensibilisation à la cause animale et environnementale, et site de recherche scien- tifique et thérapeutique, le Bioparc Genève est tout cela à la fois. Plus de 250 animaux d’environ 85 espèces différentes – dont 40 % sont menacées à l’état sauvage – y sont ob- servables de près, tous les jours. « Le 90 % des animaux que nous recueillons proviennent de saisies ou ont été abandonnés », précise le Dr Tobias Blaha.

Depuis que ce jeune vétérinaire en a repris les rênes en 2018, le Bioparc Genève s’est peu à peu transformé en arche de Noé de la biodi- versité. « Préserver la biodiversité et protéger les animaux, c’est mon dada », confirme-t-il dans un débit aussi vif que son enthousiasme et teinté d’accent germanique. « Je suis né en Allemagne, à la frontière avec l’Autriche, mais surtout en pleine nature. » Peut-être faut-il y voir la raison de sa vocation… BÉNÉFICES DE LA ZOOTHÉRAPIE Pour l’heure, le directeur négocie, sur son bu- reau, un espace de travail digne de ce nom avec Eugène, un félin Savannah au regard magnétique, issu d’un croisement entre un serval et un chat domestique. En raison de son passé d’artiste de cirque, l’animal aux pattes de velours est entraîné au contact humain. Il a ainsi pu intégrer le programme de zoothérapie d’Intervention assistée par l’animal (IAA). Cette méthode se révèle doublement bénéfique. Elle soigne les maux des humains tout en créant un lien fort avec la nature. « Un animal ne juge pas. Grâce aux interactions avec lui, les partici- pants développent de nouvelles ressources et des capacités émotionnelles qui contribuent à leur épanouissement », explique le Dr Blaha. EXOTISME ET PROXIMITÉ Toutes les missions du Bioparc poursuivent ce même objectif : reconnecter l’humain au vivant. « L’animal est un puissant vecteur. Il suscite une prise de conscience quant à la nécessité de préserver le milieu naturel », relève le vété- rinaire et directeur de l’institution zoologique.

▲ Séduites par les missions du Bioparc qui correspondent à leur enga- gement en faveur de la durabilité, les Rentes Genevoises ont financé l’enclos du parc aux ânes et aux chèvres.

avril 2024 - èremagazine 22

SOUTIEN DES RENTES GENEVOISES La préservation de la biodiversité rejoint l’engagement en faveur de la durabilité pris par les Rentes Genevoises. A l’issue d’une journée du personnel passée au Bioparc, l’Etablissement a décidé de soutenir le travail de l’institution zoologique de Bellevue en finançant le renouvellement du parc aux ânes et aux chèvres. Il faut dire que les « biquettes » – en réalité des retraitées du cirque Knie – avaient tout pour séduire l’Etablissement. Lotti, Miou- Miou, Tango, Benjo, Bambi et Eglantine sont en effet restées très actives. Elles participent au programme d’Intervention assistée par l’animal (IAA). Lotti a même tissé des liens étroits avec un jeune garçon autiste, le motivant à quitter son fauteuil roulant pour effectuer quelques pas en forêt. Une retraite animalière étonnante qui ne pouvait que susciter l’intérêt des Rentes Genevoises. « L’animal est un puissant vecteur. Il suscite une prise de conscience quant à la nécessité de préserver le milieu naturel. » Tobias Blaha Vétérinaire et directeur du Bioparc Genève

▲ Institution zoologique au service de la biodiversité, le Bioparc Genève reconnecte le visiteur à la force de la nature par le biais d’interactions animalières uniques.

Autre spécificité du Bioparc, sa capacité à mo- biliser les ressources locales, mais aussi interna- tionales. Ainsi, des collaborations sont menées notamment avec la Colombie pour la protec- tion des tamarins pinchés, de petits singes en danger critique d’extinction. Et à Genève, le Bioparc collabore avec le collectif des centres de soins de la faune sauvage du canton. Trop à l’étroit à Bellevue, l’équipe pluridiscipli- naire du Bioparc Genève et ses pensionnaires s’installeront sur le site de Belle-Idée à Thônex en 2027. Ils y disposeront d’infrastructures et d’un environnement mieux adaptés. Le futur déménagement améliorera également l’ac- cueil des visiteurs – jusqu’à 600 les jours de forte affluence – en leur offrant une immersion au cœur de la biodiversité, afin de les inciter à agir pour la nature.

NOTRE REPORTAGE PHOTO ET VIDÉO DANS LES COULISSES DU BIOPARC rentesgenevoises.ch/blog

èremagazine - avril 2024 23

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