Ère magazine, édition avril 2024

« Ce 175 e anniversaire des Rentes Genevoises signifie que les institutions de retraite en capitalisation, établies dans des pays comme la Suisse qui n’ont connu ni guerres destructrices, ni inflation galopante, ont une longévité incroyable.» Jacques-André Schneider Avocat et professeur, spécialiste de la prévoyance

La question des retraites et de la prévoyance est régulièrement au cœur de l’actualité. Ce fut encore le cas avec les votations du 3 mars dernier. L’évolution démographique nous incite à nous poser des questions sur l’avenir... Le choc démographique est un défi majeur, auquel le Japon est déjà confronté depuis un certain nombre d’années. A l’instar du choc climatique, il faut s’en préoccuper sérieusement. Selon l’Office fédéral de la statistique, en Suisse, les retraités hommes perçoivent en moyenne 3900 francs (entre AVS et 2 e pilier) et les femmes 3000 francs. Pourrons-nous vivre avec une telle somme à l’avenir si l’on sait aussi que les taux de conversion du deu- xième pilier sont en diminution ? En France, la pension moyenne brute s’éta- blit à 1531 euros mensuels. En Allemagne, les hommes perçoivent en moyenne 1728 euros de pension brute par mois, les femmes 1316 euros. En majorant ces données de 50 à 80 % pour tenir compte du coût de la vie plus élevé en Suisse, on s’aperçoit que les rentes suisses sont sensiblement plus éle- vées en moyenne que dans les pays voisins. Il est vrai que la baisse des taux de conver- sion a alimenté le soutien à une 13 e rente de l’AVS, mais les statistiques les plus récentes de l’OFAS nous indiquent qu’outre l’AVS, les �/� des assurés de la prévoyance professionnelle reçoivent des prestations supérieures à celles du minimum obligatoire selon la LPP. C’est tout à fait étonnant et unique en Europe. Il faut savoir aussi, comme l’a montré dans une étude le démographe et professeur de l’UNIGE Philippe Wanner, que la richesse moyenne des rentiers suisses a continuellement augmenté, grâce notamment aux capitaux versés par la prévoyance professionnelle.

T Titulaire du brevet d’avocat, spécialiste du droit des assurances sociales et de la pré- voyance, professeur d’université retraité, cofondateur de la Fondation Ethos. La carte de visite de Jacques-André Schneider indique le sérieux de l’expert méticuleux. L’interview a lieu avant la préparation d’un repas qu’il concocte pour des amis. Il a, dit-il, choisi un très bon vin. Il y a une cigale derrière la fourmi. D’abord, j’ai hérité de mes parents l’esprit du protestantisme social, avec l’idéal de la pro- tection sociale et non de la charité en faveur d’une large part de la population. Ensuite, après ma licence en droit et l’obtention du brevet d’avocat, j’ai obtenu un DES (diplôme d’études supérieures en droit), le master d’au- jourd’hui, dans le domaine des assurances sociales, avec un mémoire sur la prévoyance professionnelle. J’ai poursuivi avec une thèse de doctorat, ayant pour sujet la gestion pari- taire et la libre circulation des salariés en droit suisse et européen des régimes complémen- taires de retraite (2 e pilier). Ce fut une aven- ture car la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) venait d’entrer en vigueur le 1 er janvier 1985 et il n’y avait à l’époque pratiquement aucun écrit juridique sur le 2 e pilier en français. Monsieur Schneider, quelle fibre a été touchée dans votre être, votre ADN, pour qu’un jour vous deveniez expert en prévoyance professionnelle ?

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avril 2024 - èremagazine

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