CARDIO H - N°68 / DÉCEMBRE 2024
Intox sur notre système de santé ? Interview du Dr Olivier MILLERON 1 1. Hôpital Bichat - Claude-Bernard à Paris.
notre système de santé étaient plutôt enviés dans le reste du monde, mais parce que les politiques ont décidé sans débat démocratique que l’on dépensait trop pour notre système de santé. Nous devons abandonner les idées fausses qui nous ont conduit dans le mur : non la santé n’est pas un marché, la concurrence entre les acteurs ne permet pas une bonne allocation des ressources ni de ré- pondre aux besoins de la population. Nous avons besoin d’une organisation territoriale de la santé qui favorise la coopération des acteurs de la ville et de l’hôpital avec comme seul objectif de répondre aux besoins de soins de la population en proposant le juste soin au moindre coût pour la collectivité. L’idée de déficit (ou de rentabilité) est absurde pour un hô- pital public. On ne finance pas une caserne de pompiers en fonction du nombre de feux éteints. L’hôpital doit être financé pour pouvoir répondre aux besoins de soins de la population ce qui nécessite d’avoir des équipes soignantes stables, bien formées et en nombre. Il faut donc réformer le mode de financement de l’hôpital public et supprimer la tarification à l’activité pour la prise en charge des maladies chroniques décompensées, qui est le principal besoin de la population. Il convient aussi d’inscrire dans la loi le nombre maximum de patients par infirmière et aide-soignante dans les lits de MCO pour qu’il y ait adéquation entre la charge de travail et les effectifs. Bien sûr, il faut une revalorisation des salaires des PNM afin de rattraper le niveau de salaire des pays voisins. Enfin, il faut réformer la gouvernance des hôpitaux en associant les usagers, les personnels et les élus locaux pour mettre en place une démocratie sanitaire. La tarification à l’activité (T2A) est selon vous à l’origine de tous les maux et génère des actes inutiles... N’a-t-elle pas des vertus par rapport à l’ancien budget global ? Plutôt que supprimer la T2A, ne faut-il pas plutôt sanctionner les établissements ou les médecins qui effectuent des actes non pertinents ? Dr MILLERON : La tarification à l’activité est inadaptée à la prise en charge de l’épidémie de maladies chroniques que nous vivons. La population vieillit et plus de 12 millions de personnes sont prises en charge en ALD. Les patients qui ont une insuf- fisance cardiaque chronique devraient être pris en charge par des équipes pluridisciplinaires (médecins, infirmière formée dans des protocoles de coopération, IPA, diététi- cienne, activité physique adaptée) en ville et à l’hôpital.
Dr Olivier MILLERON, vous venez de publier avec le Pr André GRIMALDI, un livre intitulé « LE GUIDE DES INTOX SUR NOTRE SYSTEME DE SANTE » aux éditions Textuel, pourriez-vous tout d’abord nous présenter votre parcours professionnel de cardiologue et vos engagements au sein du Collectif Inter-Hospitalier ? Dr MILLERON : Je suis cardiologue hospitalier, clinicien et échographiste, j’ai travaillé de 2005 à 2014 au CHG le Raincy-Montfermeil en Seine Saint-Denis dans le service du Dr Simon CATTAN. J’ai un très bon souvenir de ces années durant lesquelles j’ai développé l’activité d’échographie de stress et l’IRM cardiaque. Depuis 2014, je travaille au CHU Bichat à Paris où mon activité se partage entre la maladie rare au sein du « Centre National de Référence Syndrome de Mar- fan et apparentées, maladies aortiques rares » et l’insuffi- sance cardiaque. J’ai participé à la création du Collectif Inter-Hôpitaux en septembre 2019 avec l’idée de réunir usagers, paramédi- caux et médecins pour la défense de l’hôpital public car le projet de loi de finance de la Sécurité Sociale nous annon- çait encore une austérité devenue insupportable. Cela m’a permis de rencontrer des gens issus de toutes les régions de France, de tous les métiers de l’hôpital, de CH et de CHU... J’ai aussi eu le bonheur de faire la connaissance d’André GRIMALDI, défenseur inépuisable du service public hos- pitalier, qui m’a transmis sa connaissance et ses analyses sur les causes de la dégradation actuelle de notre système de santé. Il nous est apparu utile d’expliquer aux non-initiés le fonctionnement de notre système de santé, son finance- ment, les forces en présence et les enjeux. Nous avons donc écrit le « Guide des intox sur notre système de santé » dans lequel nous faisons aussi des propositions. Quelles seraient, de votre point de vue, les propositions ma- jeures pour sortir l’hôpital public de la crise qu’il traverse actuellement ? Dr MILLERON : Il faut avant tout un changement de paradigme sur le fonc- tionnement et le financement de notre système de santé et de l’hôpital. Après plus de 20 ans de « réformes » de l’hôpital public qui ont donné le pouvoir à la technocratie, les hôpitaux ne sont plus capables de répondre aux besoins de la population et pourtant plus de 60% des hôpitaux sont en déficit. Rappe- lons que les « réformes » ont été initiées, non pas parce que les hôpitaux publics fonctionnaient mal, l’hôpital public et
1 / Dr Olivier MILLERON, vous « LE GUIDE DES INTOX SUR N tout d’abord nous présenter engagements au sein du Col Je suis cardiologue hospitalier Raincy-Montfermeil en Seine S souvenir de ces années duran l’IRM cardiaque. Depuis 2014, la maladie rare au sein du « Ce maladies aortiques rares » et l J’ai participé à la création du C usagers, paramédicaux et méd finance de la Sécurité Sociale Cela m’a permis de rencontre métiers de l’hôpital, de CH et Grimaldi, défenseur inépuisab et ses analyses sur les causes apparu utile d’expliquer aux no financement, les forces en pré sur notre système de santé » d 2/ Quelles seraient, de votre public de la crise qu’il traver Il faut avant tout un changeme système de santé et de l’hôpit Après plus de 20 ans de « réfo technocratie, les hôpitaux ne s pourtant plus de 60% des hôp initiées, non pas parce que les système de santé étaient plut ont décidé sans débat démoc
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