CARDIO H - N°68 / DÉCEMBRE 2024
SUMMIT : Tirzépatide dans le traitement de l’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection préservée et obésité Dr Mazou TEMGOUA 1 , Dr Alexandru MISCHIE 2 , Dr Simon CATTAN 3 1. CH de Haute Corrèze. 2. CH de Châteauroux. 3. Conseiller du Président du C.N.C.H., Paris. CONTEXTE
d’origine cardiovasculaire et l’aggravation de l’insuffisance cardiaque évalués dans le cadre d’un critère composite prin- cipal. Les auteurs ont observé un risque plus faible d’un évé- nement du critère composite principal avec le tirzépatide par rapport au placebo sur une médiane de 2 ans, en par- ticulier moins de cas d’insuffisance cardiaque se détériorant et nécessitant une hospitalisation ou l’utilisation de médi- caments par voie intraveineuse dans un contexte de soins d’urgence. Ce bénéfice a été accompagné d’une amélioration de la qualité de vie (évalué par le KCCQ-CSS) et de la to- lérance à l’exercice (évaluée par la distance de marche de 6 minutes) et d’une diminution du poids corporel et du taux de CRP ultra-sensible. Ces résultats étaient similaires à ceux rapportés dans les méta-analyses des effets du sémaglutide chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée. Contrairement aux précédents essais, SUMMIT n’a pas exigé que les patients aient des taux accrus de peptides na- triurétiques, car ces peptides peuvent ne pas être significati- vement élevés chez de nombreux patients atteints d’insuffi- sance cardiaque à fraction d’éjection préservée en contexte d’obésité, malgré des pressions de remplissage élevées et une altération significative des paramètres fonctionnels. Parmi les patients susceptibles d’avoir une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, la mesure des peptides natriu- rétiques n’ajoute pas de plus-value significative au diagnos- tic. Bien que le taux médian de NT-proBNP au départ dans l’essai SUMMIT était <200 pg/ml, les patients présentaient une limitation marquée de leur statut fonctionnelle et de leur tolérance à l’exercice, et près de la moitié avaient eu une aggravation de leur insuffisance cardiaque entraînant une hospitalisation ou un traitement intraveineux au cours des 12 mois précédents. Les patients inclus dans l’essai STEP-HFpEF qui évaluait le sémaglutide avaient un taux de NT-proBNP de base deux fois supérieur à celui des patients de l’essai SUMMIT, mais l’essai SUMMIT avait des pourcentages plus élevés de pa- tients présentant des événements d’insuffisance cardiaque parce que les auteurs ont spécifié des critères supplémen- taires exposant à un risque accru d’insuffisance cardiaque dans cet essai. Les effets du tirzépatide sur les deux princi- paux critères de jugement ne semblent pas être atténués chez les patients avec des taux de NTproBNP <200 pg/ml. Pris collectivement, ces résultats suggèrent qu’une exigence de taux nettement élevés de peptides natriurétiques pour initier le traitement pourrait exclure de nombreux patients atteints d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée en contexte d’obésité et ainsi limiter les bénéfices du tirzépatide. Bien que les symptômes gastro-intestinaux aient été fré- quents avec le tirzépatide, ils se sont en général dissipés au fil du temps et n’ont conduit à l’arrêt du traitement que chez 4 % des patients. Les événements indésirables graves surve- naient avec une fréquence similaire dans les deux groupes. Les décès de causes cardiovasculaires et les décès de causes indéterminées sont survenus chez 10 patients dans le groupe
L’obésité augmente le risque d’insuffisance cardiaque à frac- tion d’éjection préservée. Le tirzépatide, agoniste à action prolongée des récepteurs du GLP-1, entraîne une perte de poids considérable, mais ses effets sur les résultats cardio- vasculaires sont inconnus. MÉTHODES Dans cet essai international, en double aveugle, randomisé et contrôlé par placebo, les auteurs ont assigné de manière aléatoire, selon un rapport 1:1, 731 patients atteints d’insuf- fisance cardiaque, avec fraction d’éjection d’au moins 50 % et un IMC ≥ 30 à recevoir du tirzépatide (jusqu’à 15 mg par voie sous-cutanée une fois par semaine) ou un placebo pen- dant au moins 52 semaines. Les deux principaux critères de jugement étaient un composite de décès de causes cardiovas- culaires ou d’aggravation de l’insuffisance cardiaque (évalués selon une analyse du délai avant le premier événement) et la variation du score clinique du questionnaire de cardiomyo- pathie de Kansas City (KCCQ-CSS) entre le début et la fin de l’étude (52 semaines). RÉSULTATS Au total, 364 patients ont été assignés au groupe tirzépatide et 367 au groupe placebo ; la durée médiane de suivi était de 104 semaines. Le critère composite principal est survenu chez 36 patients (9,9 %) dans le groupe tirzépatide et chez 56 patients (15,3 %) dans le groupe placebo ( hazard ratio , 0,62 ; intervalle de confiance [IC] à 95 %, 0,41 à 0,95 ; P = 0,026). Des événements d’insuffisance cardiaque s’aggravant sont survenus chez 29 patients (8,0 %) dans le groupe tirzepatide et chez 52 patients (14,2 %) dans le groupe placebo ( hazard ratio , 0,54 ; IC à 95 %, 0,34 à 0,85), et un décès d’origine car- diovasculaire confirmé est survenu chez 8 patients (2,2 %) et 5 patients (1,4 %), respectivement ( hazard ratio , 1,58 ; IC à 95 %, 0,52 à 4,83). À 52 semaines, la variation moyenne ( ± ET) du KCCQ-CSS était de 19,5 ± 1,2 dans le groupe tirze- patide versus 12,7 ± 1,3 dans le groupe placebo (différence entre les groupes, 6,9 ; IC à 95 %, 3,3 à 10,6 ; P < 0,001). Les événements indésirables (principalement gastro-intes- tinaux) ayant conduit à l’arrêt du traitement expérimental sont survenus chez 23 patients (6,3 %) dans le groupe tir- zépatide et chez 5 patients (1,4 %) dans le groupe placebo. CONCLUSION Le traitement par tirzépatide a entraîné un risque plus faible de décès de cause cardiovasculaire ou d’aggravation de l’in- suffisance cardiaque comparé au placebo et une améliora- tion de la qualité de vie chez les patients atteints d’insuffi- sance cardiaque avec fraction d’éjection préservée et obésité. DISCUSSION L’essai SUMMIT a été conçu pour évaluer de manière pros- pective les effets à long terme du tirzépatide sur les évène- ments majeurs liés à l’insuffisance cardiaque, avec les décès
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