FNH N° 1192

Découvrez le numéro 981 de Finances News Hebdo, premier hebdomadaire de l'information financière au Maroc

Du 17 avril 2025 - 8 DH - N° 1192

PREMIER HEBDOMADAIRE DE L'INFORMATION FINANCIÈRE AU MAROC

Directeur de la publication : Fatima Ouriaghli

«L’IA va redessiner un secteur plus réactif et mieux connecté» Assurance P. 6/7

 Bachir Baddou, vice-président délégué de la FMA

Le continent code son avenir numérique GITEX AFRICA MOROCCO

P. 2/20 à 36

Droits de douane américains La Bourse de Casablanca encaisse le choc Adéquation formation-emploi L’Afrique face à un défi de taille P. 18 Dépôt légal : 157/98 ISSN : 1114-047 - Dossier de presse : 24/98 - Adresse : 83, Bd El Massira El Khadra, Casablanca - Tél. : (0522) 98.41.64/66 - Fax : (0522) 98.40.22 - Adresse web : www.fnh.ma Rabat-Alger-Paris Le triangle des turbulences P. 37 P. 16

SOMMAIRE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 17 AVRIL 2025

Voyons voir : Palestine : Macron bouscule les lignes Ça se passe au Maroc 3 4 ACTUALITÉ

Editorial

BOURSE & FINANCES

Point Bourse Hebdo : Panique à bord ! IA - Assurance : La FMA ouvre le débat Entretien avec Bachir Baddou : Assurance, «L’IA va redessiner un secteur plus réactif et mieux connecté» Mutandis : Un cas d’école pour les exportateurs marocains vers les USA LCM du FMI : Un nouveau filet de sécurité pour le Maroc Entretien avec Rachid El Fakir : Ligne de crédit modulable, «Levier de résilience et marqueur de crédibilité internationale» Bourse de Casablanca : Pourquoi devient-elle de plus en plus attractive pour les investisseurs particuliers ? Entretien avec Hicham Oudghiri : Bourse, Comment les particuliers prennent le contrôle avec la digitalisation Bourse de Casablanca : Trump ravive les tensions, le marché encaisse le choc 5 6 7 8 9 10 12 14

Fatima Ouriaghli Directeur général, Responsable de la publication

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Gitex Africa Morocco

ECONOMIE

e temps de quelques jours (14 au 16 avril), Marrakech s’est muée en capitale continentale de la tech. Gitex Africa Morocco, troisième du nom, a planté son décor : plus de 45.000 participants, 1.400 exposants, 130 nationalités, des ministres, des geeks, des capital-risqueurs... Et au centre, un Maroc ambitieux, au coude à coude avec les champions du digital mondial. Ce n’est pas tous les jours qu’un salon tech fait battre le pouls du continent. Et pourtant, Gitex Africa semble le faire avec constance et montre, surtout, que ce n’est pas un événement qui se limite à un simple déballage de gadgets et de discours formatés. Et ce n’est pas un hasard. Sous le haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, ce rendez-vous a pris une enver- gure stratégique pour devenir un carrefour d’influence, de souveraineté technologique et de coopération Sud-Sud où les idées fusent, les partenariats s’enclenchent et les ambitions se croisent. Il donne un signal fort qu'en matière numérique, l’Afrique ne veut plus seulement consommer, mais elle veut peser. Aziz Akhannouch, le chef du gouvernement, l’a dit sans détour : Gitex Africa, c’est « le cœur battant de l’innovation africaine ». Et de fait, ça bouillonne. De l’AgriTech aux solutions EdTech, en passant par les paiements dématérialisés et la cybersécurité, omniprésente cette année dans les discussions, notam- ment en raison des récentes cyberattaques contre des institutions marocaines comme la CNSS, le ministère de l’Emploi ou encore la CNDP, ce salon est devenu une immense place de marché des idées. L’économie numérique, c’est désormais 15% du PIB mondial, selon la ministre chargée de la Transition numérique et de la Réforme de l’Administration, Amal El Fallah Seghrouchni. Et le Royaume veut sa part du gâteau. Avec sa stratégie Maroc Digital 2030, il met les bouchées doubles : formation, infrastructure, souveraineté numérique et IA locale... L Le continent code son avenir numérique Mais les derniers événements le rappellent brutalement : sans un socle solide en cybersécurité, tout peut vaciller. Les experts présents au Gitex l’ont martelé, souvent en coulisse : la cybersécurité doit précéder l’IA et les interfaces client. Aujourd’hui, elle devient la priorité numéro un des organisations, parce que dans le silence des lignes de code, il est question de leur sécurité numérique. En cela, dans un contexte où les cyberattaques ciblent les organismes publics, la question de l’allocation budgétaire refait surface. Longtemps négligée, la cybersécurité exige des investissements importants, notamment pour accéder à des clouds plus robustes. C’est pourquoi les entreprises spécialisées dans la cybersécurité ne cachent pas leur optimisme : l’heure est venue pour les institutions publiques de changer de paradigme. Dès lors, un grand mouvement de prise de commandes via les marchés publics est attendu, avec en ligne de mire l’adoption de clouds plus performants. D’ailleurs, le sujet d’un cloud souverain marocain continue de s’imposer dans les échanges, même si, en attendant sa concrétisation, le recours à des solutions internationales semble inévitable à court terme. Et dans cette logique, Gitex Africa devient un levier. Une plateforme stratégique pour les Etats, les entreprises et les investisseurs. Un endroit où l’on parle de cloud, mais aussi de câbles, de data et de talents. Et là où d’autres voient une foire technologique, les stratèges décryptent un espace d’influence, avec un Maroc positionné en hub digital régional, capable de faire converger innovation, géopolitique et diplomatie économique. Bref, ce que Marrakech a montré, c’est que l’Afrique n’achète plus seulement des solutions, mais crée, co-construit, innove et avance. Et tant pis si tout n’est pas parfait. L’essentiel, c’est que le numérique n’est plus un luxe ou une option, c’est un choix stratégique. Un vecteur de transformation, voire d’éman- cipation. Alors oui, le continent a encore ses défis, ses fragilités et ses retards. Mais il a aussi ses compétences, ses rêves et ses idées. Et grâce à des initiatives comme Gitex Africa, il a enfin des lieux pour les rendre visibles. u

Échanges extérieurs : Quelles options pour le Maroc pour réduire le déficit com- mercial structurel ? Adéquation formation-emploi : L’Afrique face à un défi de taille Infrastructures aéroportuaires : Nouvel envol pour l’aéroport Mohammed V de Casablanca 17 18 19

FOCUS GITEX

Gitex Africa 2025 : L’Afrique ne subit plus la tech, elle la dirige Entretien avec Badr Boussabat : Souveraineté numérique, «L’IA au Maroc n’est pas une mode, c’est un mouvement profond» Fintech : Le Maroc centralise ses forces avec le hub MFC Industrie financière : «Sans intégration, pas de décollage pour la fintech afri- caine» Entretien avec Driss Lemjaouri : Transition numérique, «La FinTech est une brique essentielle de notre stratégie digitale» Infrastructures télécoms : Des intérêts de plus en plus convergents entre les 3 opérateurs Maroc Telecom : Leadership numérique affirmé Stratégie digitale : L’ONCF en pleine transformation Entretien avec Younes Zoubir : CIH Bank, «L’innovation n’est pas une façon de faire, c’est une façon d’être» Entretien avec Godfrey Sullivan : Paiements numériques, «L’Afrique fourmille d’innovations» Orange Maroc : Innovation technologique, souveraineté numérique et vision continentale Entretien avec Mohamed Benaouda : Aba Technology, «Une souveraineté techno- logique pensée, conçue et produite au Maroc» Tamwilcom - Flat6Labs : Nouveau programme d’accélération pour les startups marocaines Entretien avec Younès El Himdy : Disty Technologies, «En trois jours au Gitex, nous faisons ce qu’on ne ferait pas en trois mois» Entretien avec Imade Elbaraka : Deloitte, «Le Maroc peut devenir un leader cyber en Afrique» Entretien avec Karim Elbaz : Maintenance prédictive, «Le Made in Morocco est technologique, innovant et exportable»

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37 38 POLITIQUE

Rabat-Alger-Paris : Le triangle des turbulences Entretien avec Me Abdelhakim El Kadiri Boutchich : Rabat – Washington, «Le virage géopolitique actuel n’est pas conjoncturel, mais structurel» Entretien avec Adil Mehnaoui : Digi Firm, L’intelligence technologique au ser- vice de la performance des entreprises 40 L'UNIVERS DES TPME

42 Hydrogène vert : Vers un écosystème industriel intégré DEVELOPPEMENT DURABLE

• Directeur des rédactions & Développement : David William • Journalistes : Charaf Jaidani, Leïla Ouriaghli, Adil Hlimi, Youssef Seddik, Khalid Aourmi, Ibtissam Zerrouk, Désy Mbakou • Révision : M. Labdaouat • Directeur technique & maquettiste : Abdelillah Chamseddine • Mise en page : Zakaria Beladal

• Assistantes de direction : Amina Khchai • Département commercial : Samira Lakbiri, Rania Benchaib • Administratif : Fatiha Aït Allah • Édition : JMA CONSEIL • Impression : Maroc Soir • Distribution : Sochpress Dépôt légal : 157/98 • ISSN : 1114-047 • Dossier de presse : 24/98 • N° Commission paritaire : H.F/02-05 • S.A.R.L. au capital de 5.000.000,00 DH - C.N.S.S. 600 50 62 I.F. 1022303 - Patente 35770001 - ICE N° : 001526693000021

• Directeur Général responsable de la Publication : Fatima OURIAGHLI Contact : redactionfnh@gmail.com

VOYONS VOIR

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Palestine

Macron bouscule les lignes

I l fallait oser. Emmanuel Macron l’a fait. A contre- courant des prudences diplomatiques occiden- tales, le président français a laissé entendre que la France pourrait reconnaître l’Etat palestinien dès le mois de juin. Un geste fort, sans doute risqué, mais porteur d’une ambition assumée : recréer une dynamique politique dans un Moyen- Orient miné par l’échec du statu quo. A l’heure où Gaza s’effondre sous les bombes et où l’espoir s’étiole à mesure que les civils enterrent leurs morts, ce signal mérite d’être salué. Mais cette volonté politique n’a pas tardé à déclencher des foudres, au premier rang des- quelles celles de Benjamin Netanyahu. Le Premier ministre israélien a fustigé «une grave erreur» et reproché à Macron de vouloir créer «un Etat dont la seule aspiration est la des- truction d’Israël» . Ce discours, usé jusqu’à la corde, n’est plus qu’un paravent destiné à dis- simuler une haine viscérale à peine contenue, non pas contre le Hamas (ce serait compréhen- sible), mais contre l’existence même d’un peuple palestinien. Netanyahu ne veut pas d’un Etat palestinien. Il l’a dit, répété et martelé à plusieurs reprises. Par D. William

Toute tentative internationale de relancer la solution à deux Etats est accueillie par Tel-Aviv avec un mépris assumé et une posture de défi permanent. Mais au fond, cette réaction de Netanyahu est compréhensible : elle en dit long sur la peur d’un isolement diplomatique croissant. Car la France n’est pas seule dans sa démarche. Il y a un an, l’Irlande, la Norvège, l’Espagne et la Slovénie ont reconnu l’Etat palestinien. Et d’autres pourraient suivre, emportés par ce que Macron appelle une «dynamique collective». Certes, il conditionne cette reconnaissance à des engagements réci- proques, notamment de la part des pays arabes qui n’ont pas encore reconnu Israël. Mais cette approche graduelle a au moins le mérite de relancer le débat et de poser les bases d’un compromis à terme.

Le Maroc, lui, n’a pas attendu les atermoie- ments européens pour afficher une ligne claire, constante et cohérente. Sa solidarité envers le peuple palestinien ne souffre d’aucune ambi- guïté. Sous l’impulsion du Roi Mohammed VI, Président du Comité Al-Qods, le Royaume a tou- jours défendu une solution politique fondée sur la création d’un Etat palestinien avec Al-Qods- Est comme capitale. C’est cette clarté qui manque cruellement aux grandes puissances. Les Etats-Unis, paralysés par la proximité toxique entre Washington et Netanyahu, semblent incapables d’imposer le moindre frein à l’escalade israélienne. L’Union européenne, quant à elle, hésite, tergiverse et temporise. Et pendant ce temps, le massacre de populations civiles se poursuit à Gaza. La guerre menée contre le Hamas est devenue, de fait, une guerre contre une population entière. Les images de destructions massives, d’enfants et de femmes tués et d’hôpitaux bombardés… ne peuvent plus être qualifiées de «dommages collatéraux» . C’est une politique assumée de punition collective. Qui s’inscrit dans la lignée de l’oppression incessante que vit le peuple pales- tinien depuis des décennies. ◆ oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)

Toute tentative internationale de relancer la solution à deux Etats est accueillie par Tel-Aviv avec un mépris assumé.

ÇA SE PASSE AU MAROC

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ACAPS - FMA : Une charte genre pour promouvoir l'inclusion assurantielle des femmes

L’ Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACAPS) et la Fédération marocaine de l'assu- rance (FMA) ont signé, mercredi à Casablanca, une charte relative à l'intégration de l'aspect Genre dans la conception et la commercialisation des produits d'assurance. Signée en marge du Rendez-vous de Casablanca de l'Assurance, qui se tient les 16 et 17 avril, cette charte s'inscrit dans le cadre des orientations stratégiques nationales en matière d'inclusion financière et de promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes. Elle vise à renforcer l'accès des femmes à des cou- vertures assurantielles adaptées à leurs besoins et à favoriser le développement d'une offre plus inclusive.

A cet effet, la charte définit un ensemble d'engage- ments pour les acteurs du secteur des assurances, notamment «la collecte, l'analyse et l'utilisation de données ventilées par genre afin d'identifier et de réduire les disparités d'accès aux produits d'assu- rance» , «l'adaptation et la création de produits assurantiels tenant compte des spécificités et des besoins des femmes» , et «la mise en place de campagnes de sensibilisation et de formation pour les intermédiaires d'assurance et les assurés sur les enjeux de l'équité de genre dans l'assurance». L'ACAPS accompagnera la mise en œuvre de cette charte à travers un suivi régulier et la pro- motion des bonnes pratiques, tout en veillant à ce que les produits soient adaptées aux besoins spécifiques des femmes.

Pour garantir une mise en œuvre effective de la charte, un comité de suivi composé de représen- tants de l'ACAPS, de la FMA et des entreprises signataires sera chargé d'évaluer périodiquement les avancées et de formuler des recommanda- tions. ■

BAD

Programme «Go Siyaha»

Atelier de haut niveau à Rabat U n atelier de haut niveau se tient, du 14 au 18 avril 2025 à Rabat, à l'initiative de la Banque africaine de développement (BAD) pour renforcer les capacités des parties prenantes natio- nales en matière de sauvegardes environ- nementales et sociales applicables aux projets financés par la Banque, confor- mément à son système de sauvegarde intégré (SSI) révisé, en vigueur depuis mai 2024.

819 projets validés depuis février 2024 L e nombre de projets validés depuis le lancement du programme «Go Siyaha» en février 2024 s'élève à 819 projets, selon la ministre du Tourisme, de l'Artisanat et de l'Économie sociale et solidaire, qui s’expri- mait lundi au Parlement. Fatim-Zahra Ammor précise que ce nombre représente déjà plus de la moitié de l'objectif fixé et ce, en seu- lement une année. La ministre a également souligné que 746 entreprises bénéficient d'un accompagnement technique, avec un inves- tissement de 85 MDH. Ce soutien vise à aider les entreprises à améliorer la qualité des services, accélérer leur transformation numé- rique, renforcer les compétences, diversifier les marchés et à rationaliser la consommation énergétique. En outre, le programme profite à 46 projets d'animation et de loisirs touris- tiques, pour un investissement d'environ 300 MDH, avec des subventions estimées à 90 MDH. Ces projets portent sur plusieurs activi- tés comme le surf, le sandboard, la pêche, les excursions en bateau, les clubs équestres et les murs d'escalade. S'agissant de l'aspect environnemental, Ammor a assuré que 27 entreprises bénéficient d'un appui spécifique pour la transition énergétique, avec un inves- tissement de 52 MDH et des subventions atteignant les 20 MDH. A noter que le pro- gramme «Go Siyaha» a pour but d'assurer un accompagnement et un soutien financier et technique à 1.700 entreprises touristiques à l'horizon 2026. ■

Cet atelier, qui réunit plus de 80 participants marocains, s'inscrit dans le cadre d'un programme panafricain destiné à favoriser l’appropriation du SSI par les pays membres régionaux. Cette initiative vise à assurer une meilleure intégration des normes sociales et environnementales nationales et de celles de la banque dès les phases de conception et de mise en œuvre des projets de développement. Les participants, issus des unités d'exécution des projets, des ministères sectoriels, des organes de contrôle et des partenaires techniques, prendront part à une série de sessions interactives. Les échanges porteront notamment sur les principales innovations du Système de sauvegarde intégré, les rôles et responsabilités des différentes parties prenantes, ainsi que les outils de suivi et de conformité, dont les études d'impact environnemental et social, les plans d'action de réinstallation et les mécanismes d'engagement des parties prenantes. ■

Mines

Africorp Mining investit 230 MDH à Naour

M erija Mining, filiale d’Africorp Mining, pôle mines et carrières de la holding Africorp Consortium, franchit une nouvelle étape stratégique en remportant un appel d’offres international lancé par l’Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM), pour l’exploitation du gisement «Naour» situé dans la province de Béni Mellal, près de Ksiba. Ce nouveau projet, qui mobilisera un inves- tissement de plus de 230 millions de dirhams, s’inscrit dans la dynamique de développement de Merija, après le succès de ses premières opérations minières dans la valorisation du minerai de cuivre par flot- tation entamées en 2019 dans la région de Bouarfa (Talsint), aujourd’hui pleinement opérationnelles. Le gisement «Naour» présente un potentiel évalué à plus de 1,5 million de tonnes de ressources, avec une concentration moyenne estimée à 1,5% de cuivre. Il constitue un levier de croissance important pour l’entreprise, avec un chiffre d’affaires prévisionnel de 250 millions de dirhams dès 2027. ■

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BOURSE & FINANCES

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Point Bourse Hebdo Panique à bord !

I Le Masi enregistre l'une des pires chutes hebdomadaires au niveau mondial cette semaine. Une correction davantage dictée par la peur que par les fondamentaux. l fallait s’accrocher cette semaine sur les marchés. À la Bourse de Casablanca, le Masi a signé une contre-performance qu’on aurait aimé éviter : -6,74% à 16.070 points en cinq séances, soit l’une des chutes les plus marquées à l’échelle mondiale. Même les grands indices asiatiques, pourtant en première ligne dans la guerre commerciale, n’ont pas fait pire ou à peine. Seul le Hang Seng a fait plus fort… dans le mauvais sens du terme. Par Y . Seddik

Evolution de l'indice Masi depuis début avril 2024

vague de ventes désordonnées, alimentée par la crainte d’un retour- nement brutal. Des particuliers qui débouclent leurs positions dans la précipitation, des fonds obli- gataires qui allègent leurs lignes actions pour sécuriser leurs perfor- mances… et au milieu de tout ça, des institutionnels qui observent, puis ramassent. Car derrière la panique, certains ont flairé l’au- baine. En fin de semaine, les pre- miers signes d’un retour des mains fortes sont apparus. Quelques souscriptions nettes ont commen- cé à se manifester, discrètement mais sûrement. Preuve que, sur les marchés, ce qui effraie les uns attire souvent les autres. Dans le détail, peu de secteurs ont échappé à la tempête. L’électricité, l’immobilier, les matériaux de construction : tous dans le rouge vif. Du côté des valeurs, les plus fortes baisses touchent BMCI, Wafa Assurance, S2M ou encore Alliances. Des reculs parfois supé- rieurs à 14% en quelques jours.

TOP Performances

FLOP Performances

BMCI Wafa Assurance S2M

-14,86%

+21,02% +3,14%

Sanlam Maroc Microdata Akdital

-14,49%

-14,09%

+2,4 %

Et pourtant, le paradoxe est là : cette chute spectaculaire ne remet pas en cause la tendance de fond. Le Masi reste toujours positif depuis le début de l’année (+11% en ytd). Une dynamique haussière intacte à moyen terme, qui contraste avec la nervosité extrême qui a balayé le marché ces derniers jours, sur fond de guerre commerciale sino- américaine. Ce que l’on a vu cette semaine, c’est moins une correction logique qu’un réflexe émotionnel. Une

Mais le marché n’a pas été entière- ment déserté. Quelques titres ont su tirer leur épingle du jeu. Sanlam Maroc a surpris tout le monde avec une envolée de plus de 21%, tan- dis qu’Akdital, Microdata ou encore SMI ont résisté avec des progres- sions modestes, mais notables. Les volumes sont restés solides avec plus de 4 milliards de dirhams échangés, concentrés sur les grandes valeurs du marché. Pas un désintérêt donc, mais bien un repo-

sitionnement en cours. Il faut dire que la violence du mou- vement contraste avec les signaux plutôt rassurants sur le plan macro- économique. L’impact de la guerre commerciale, par exemple, com- mence à se faire sentir… mais pas forcément dans le sens attendu. Le recul des coûts logistiques, la baisse du fret, les prix en baisse sur certains produits importés : des effets qui, à terme, pourraient sou- tenir la consommation intérieure. ◆

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IA - Assurance La FMA ouvre le débat

sation en assurance automobile, resté inchangé depuis 1984. Une réforme essentielle qui aura un impact direct sur les niveaux de prix et devrait s’accompagner d’une refonte des critères tari- faires, dans une logique de tarifi- cation plus juste et mieux ajustée aux profils des assurés. Même son de cloche du côté de l’Autorité de contrôle des assu- rances et de la prévoyance sociale (ACAPS). Son secrétaire général, Othmane Khalil El Alamy, a insisté sur les mutations profondes impul- sées par l’IA, la blockchain et le cloud : «L’essor de l’IA générative redéfinit en profondeur les métiers de l’assurance. Cette dynamique se reflète également dans les chiffres : le secteur marocain a connu une hausse de 5,2% des primes en 2024, atteignant 59,6 milliards de dirhams», a-t-il ajouté. Face à ces transformations, un écosystème dynamique s’orga- nise. L’ACAPS a lancé le pro- gramme «Émergence» pour fédé- rer les acteurs autour de cas d’usage concrets de l’IA, tan- dis que des projets structurants comme la dématérialisation de l’attestation d’assurance automo- bile sont en cours de finalisation. Parallèlement, la stratégie natio- nale s’oriente vers une IA respon- sable, adossée à des data centers conformes aux standards interna- tionaux, et une législation proac- tive, notamment via la loi 05-20 sur la cybersécurité. L’actualité concernant la CNSS a résonné comme un avertisse- ment pour l’ensemble du secteur. Plusieurs intervenants ont évoqué cet incident pour souligner l’ur- gence d’une cybersécurité renfor- cée et d’une gouvernance rigou- reuse des données. Notons que la séance inaugurale a également été marquée par la signature d’une convention tech- nique entre la FMA et l’Association des assureurs du Ghana (pays à l’honneur), portant sur le partage d’expériences en matière d’usage du digital. Ainsi que la signature d’une charte relative à l’intégra- tion de l’aspect genre dans la conception et la commercialisa- tion des produits d’assurance entre l’ACAPS et la FMA. ◆

Le monde de l’assurance s’est donné rendez-vous durant deux jours à Casablanca pour penser l’avenir du secteur. Dans un contexte de mutations profondes, les nouvelles technologies dictent désormais les règles. Par Désy M.

 Mohamed Hassan Bensalah, président de la FMA, à l'ouverture de la 11 ème édition

du Rendez-vous de Casablanca de l'assurance.

L

e Rendez-vous de Casablanca de l’assurance, qui se tient les 16 et 17 avril 2025, s’impose comme un véritable «Davos sectoriel». Cette 11 ème édition connait une forte pré- sence de différents organismes d’assurances venus d’Afrique, d’Amérique et d’Asie, avec pas moins d’un millier de participants. Avec la collaboration de «Colibri», l’intelligence artificielle choisie par la Fédération marocaine de l’assu- rance (FMA) pour lier la théorie à la pratique, cet évènement permet d’explorer les bouleversements profonds et les perspectives pro- metteuses que l’intelligence arti- ficielle (IA) et les technologies émergentes offrent au secteur de l’assurance. Présente à ces assises, la ministre de l’Economie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a affirmé que «l’intelligence artificielle transforme en profondeur nos sociétés, mais

elle est surtout une formidable opportunité pour améliorer la per- formance du secteur, enrichir l’ex- périence client et étendre l’inclu- sion financière» . Son intervention a posé les jalons d’un plaidoyer clair pour une IA au service de l’humain et de la résilience collective. Au fil des interventions, un consen- sus s’est dessiné, à savoir que l’IA ne se limite plus à une promesse technologique. Elle bouleverse déjà les pratiques, notamment l’automatisation des souscriptions, la détection des fraudes, la tarifi- cation affinée et la gestion prédic- tive des sinistres. Mieux encore, elle devient un levier d’inclusion, à travers les solutions mobiles qui touchent les populations rurales ou peu assurées. Pour Mohamed Hassan Bensalah, président de la FMA, l’IA représente une transformation majeure. «Elle touche déjà tous les maillons de

notre chaîne de valeur : de la sous- cription à la gestion des sinistres, de la relation client à la détection de fraude», a-t-il expliqué. Il a appelé à bâtir un cadre éthique, responsable et inclusif, propice à l’émergence des Insurtechs et à une couverture plus large des populations. « Cette révolution doit être accompagnée, encadrée et pensée de manière éthique et res- ponsable. Nous devons travailler en étroite collaboration avec les régulateurs pour mettre en place un cadre réglementaire adapté qui encourage l’innovation, tout en protégeant les assurés» , a-t-il déclaré. Bensalah a également rappelé que si ces avancées technologiques sont déterminantes, d’autres mutations majeures, plus struc- turelles, s’annoncent pour le sec- teur. Il a notamment cité la révision attendue du barème d’indemni-

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Assurance «L’IA va redessiner un secteur plus réactif et mieux connecté»

ficier d’un environnement favorable qui passe néces- sairement par un environne- ment réglementaire adapté et, surtout, par des partenariats avec les acteurs traditionnels. Sans ce partenariat et ce sou- tien, elles ne peuvent pas se développer au bénéfice de tout notre écosystème. En combinant innovation et connaissance fine du mar- ché marocain, elles peuvent contribuer à une croissance durable du secteur en inter- venant sur toute la chaîne de valeur. F. N. H. : Face aux défis de cybersécurité, com- ment l’IA peut-elle ren- forcer la protection des données personnelles des clients des compa- gnies d’assurance ? B. B. : La protection des données est aujourd’hui un enjeu majeur pour le secteur de l’assurance. Bien que le risque zéro n’existe pas, nous devons de manière continue muscler nos dispositifs de protection. Les outils utilisant l’IA seront de plus en plus incontour- nables pour cette protec- tion. J’imagine qu’à l’avenir, ils aideront à mieux détecter les menaces en temps réel, identifier les comportements suspects et déclencher des alertes avant qu’une attaque ne se produise. Sachant que la relation de confiance est le fondement même d’un contrat d’assu- rance, l’IA est un allié précieux pour garantir la confidentialité et la sécurité des informations personnelles. ◆

L’intelligence artificielle (IA) redéfinit les contours de l’assurance et joue un rôle structurant. Les services gagnent en rapidité et en efficacité. Face aux enjeux climatiques, à la cybersécurité et à l’évolution des attentes clients, elle s’impose comme un levier stratégique pour les assureurs marocains. Entretien avec Bachir Baddou, vice-président délégué de la Fédération marocaine de l’assurance.

Propos recueillis par Désy M.

l’IA va redessiner un secteur plus réactif, plus accessible et mieux connecté aux attentes de ses clients. F. N. H. : Comment la Fédération envisage- t-elle l’intégration de l’IA dans la gestion des risques climatiques, notamment dans un contexte marocain mar- qué par une vulnérabi- lité croissante face aux aléas climatiques ? B. B. : Beaucoup d’études portant sur le climat consi- dèrent notre zone géogra- phique comme faisant partie de celles qui vont subir de manière graduelle les effets du changement de climat. Pour la couverture des risques agri- coles, domaine dans lequel le Maroc a une très solide expé- rience, l’IA peut devenir un véritable outil d’anticipation. Grâce à l’analyse et à la com- binaison de données clima- tiques, agricoles et géogra-

phiques, elle aide les assu- reurs à mieux prévoir les évé- nements extrêmes, à affiner la tarification et à proposer des produits plus adaptés aux besoins des agriculteurs. L’IA peut également aider à accélérer le paiement des sinistres en fournissant des outils d’aide à l’évaluation des préjudices subis. Cette accé- lération est vitale pour cer- tains agriculteurs vulnérables. F. N. H. : Quelles sont, selon vous, les condi- tions nécessaires pour que les Insurtechs puissent réellement contribuer à une assu- rance plus inclusive et à la création de valeur durable dans le secteur marocain de l’assu- rance ? B. B. : Les Insurtechs ont un rôle important à jouer pour rendre l’assurance plus simple et plus accessible. Mais pour réussir, elles doivent béné-

Finances News Hebdo: Comment visualisez- vous l’apport de l’IA sur le secteur de l’assu- rance ? Bachir Baddou : S’il y a un secteur pour lequel l’intelli- gence artificielle est une vraie bénédiction, c’est bien celui de l’assurance. Elle permet de mieux comprendre les besoins des clients, de personnaliser les offres et d’accélérer l’en- semble des processus : tari- fication, souscription, indem- nisation, etc. L’analyse de la Data et son interprétation sont grandement facilitées par l’IA. Ce gain de temps améliore l’expérience client et renforce l’efficacité des acteurs du secteur. A terme,

Sachant que la relation de confiance est le fondement même d’un contrat d’assurance, l’IA est un allié précieux pour garantir la confidentialité et la sécurité des informations personnelles.

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devenues la norme, Mutandis a réussi à augmenter ses tarifs sur le marché américain durant trois années consécutives, sans impact significatif sur ses volumes. «Une boîte de sardines vendue 3,50 dollars est tout à fait absorbable par le consomma- teur américain», rappelle Douiri. Ainsi, en cas de maintien des taxes punitives sur ses concur- rents, le groupe pourrait à la fois préserver ses marges et gagner en parts de marché. Douiri se montre optimiste pour la suite : « Mon pronostic est que, dans 90 jours, le Maroc sera toujours moins taxé que le Vietnam et la Thaïlande, princi- paux concurrents de Mutandis sur le marché US. Cela devrait se traduire par une montée en puis- sance de nos exportations». ◆

 Adil Douiri, président-fondateur de Mutandis

Mutandis Un cas d’école pour les exportateurs marocains vers les USA

AMMC

Nouvelle édition du guide de l'investisseur consa- crée au crowdfunding L ' Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC) a publié, lundi, une nouvelle édition du guide de l'investisseur consacrée au financement collaboratif, plus communément appelé crowd- funding. Cette neuvième édition vise essentiellement à aider le grand public à mieux appréhender les notions de base du mode de financement collaboratif. Ce guide, qui a pour objectif d'expliquer de façon simplifiée le crowdfunding et de démys- tifier les principaux concepts qui s'y rattachent, s'articule autour de cinq volets, à savoir «Le crowdfunding : histoire, définition et cadre juridique», «Le crowdfunding : typologie, acteurs et fonctionnement», «Principaux intervenants dans une opération de crowdfun- ding», «Investir en crowdfun- ding : les fondamentaux» et «Petit lexique du crowdfun- ding». A noter que le crowdfunding permet à des personnes phy- siques ou morales de trouver des financements pour leurs projets, par l'intermédiaire du site Internet d'une plateforme de financement collaboratif. ◆

Le Maroc tire son épingle du jeu dans ce nouvel environnement mondial. Comment Mutandis profite pleinement de la situation.

A

Par A. Hlimi

lors que les tensions commer- ciales entre les grandes puis- sances redessinent les circuits du commerce mondial, certaines économies émergentes trouvent dans cette instabilité une oppor- tunité stratégique. C’est notam- ment le cas du Maroc, qui béné- ficie d’un repositionnement favorable sur l’échiquier global. La décision récente des États- Unis de mettre en pause pour une durée de 90% les droits de douane à l’exception de la Chine offre une fenêtre de négocia- tions entre les Etats et l’Oncle Sam. Mais dans l’état actuel des choses, l’on ne peut que consta- ter que si la Chine reste visée par des taxes élevées, d’autres pays d’Asie voient également

leurs exportations pénalisées. À l’inverse, le Maroc bénéficie d’un traitement plus favorable, avec des droits de douane plafonnés à 10%. Selon Adil Douiri, président-fon- dateur de Mutandis, cette poli- tique américaine constitue une véritable aubaine pour le Maroc, notamment dans des secteurs comme celui des conserves haut de gamme où opère le groupe. «Cette guerre commerciale nous confère un avantage prix com- paratif énorme», souligne-t-il. Et d’ajouter que le Maroc pourrait en sortir gagnant durablement. Mutandis incarne parfaitement ce basculement des équilibres mondiaux. Grâce à son acquisi- tion de la marque Season, spé-

cialisée dans les conserves de sardines haut de gamme à des- tination du marché américain, le groupe est devenu l’un des plus importants exportateurs industriels cotés à la Bourse de Casablanca à destination des États-Unis. «La politique de Donald Trump, paradoxalement, nous a permis d’avoir une marge de manœuvre exceptionnelle» , explique Adil Douiri. Alors que ses concur- rents asiatiques subissent des hausses tarifaires importantes, Mutandis profite d’un différen- tiel qui renforce sa compétiti- vité, sans même avoir besoin d’ajuster ses prix. Plus encore, dans un contexte inflationniste où les hausses de prix sont

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LCM du FMI Un nouveau filet de sécurité pour le Maroc

ligne de crédit agit aussi comme un facteur de confiance pour les bailleurs de fonds: «Elle permet au Maroc de consolider la confiance des bailleurs de fonds internatio- naux et de soutenir davantage les flux d’IDE, qui constituent le pilier de tout décollage économique et financier». La LCM devrait également renfor- cer la position du Royaume face aux nouvelles contraintes règle- mentaires, notamment celles liées à la directive européenne CRD VI, qui pourrait affecter la dynamique des transferts des Marocains rési- dant à l’étranger. En renforçant la liquidité du secteur bancaire, cette ligne atténue les tensions sur le marché interbancaire et limite l’exposition des établisse- ments financiers au risque lié à la dette souveraine. Elle constitue en cela un appui indirect à la stabilité du système financier, mais aussi au climat d’investissement. Par ailleurs, le FMI a salué les réformes structurelles entreprises par le Maroc, qu’il s’agisse de la mise en œuvre de la nouvelle Charte de l’investissement, de l’opérationnalisation du Fonds Mohammed VI, ou encore de l’adoption de la stratégie bas carbone à l’horizon 2050. Le Royaume a également respecté les critères rigoureux du FMI : position extérieure viable, accès régulier aux marchés internatio- naux, cadre monétaire crédible, stabilité de l’inflation et réserves de change confortables. Mais malgré ces fondamentaux solides, El Fakir alerte sur les vul- nérabilités persistantes. Il estime que «la restructuration de la valeur ajoutée marocaine vers des produits à forte valeur ajoutée, où l’industrie constitue la locomotive, pourrait limiter la dépendance de la croissance aux aléas clima- tiques et aux secteurs tertiaires plus vulnérables à la conjoncture internationale» . Il plaide égale- ment pour une réforme graduelle mais déterminée du régime de change, afin de renforcer la sou- veraineté financière du pays, qui «est un processus de long terme, fondé sur l’objectivité, le volon- tarisme, la confiance et l’opti- misme» . ◆

Le FMI a accordé au Maroc une ligne de crédit modulable de 4,5 milliards de dollars. Derrière ce signal de confiance, des fragilités subsistent : dépendance commerciale, pression sur les réserves de change, exposition bancaire… Par Désy M.

 La LCM est un label de résilience pour toute économie bénéficiant de cet instrument financier du FMI.

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ans un contexte économique mondial marqué par l’incertitude, le Maroc vient d’obtenir une nou- velle ligne de crédit modulable (LCM) du Fonds monétaire inter- national (FMI), d’un montant de 4,5 milliards de dollars. Cette décision, annoncée début avril, marque une évolution straté- gique dans la coopération entre le Royaume et l’institution de Bretton Woods. Ce mécanisme, activé à titre préventif, vise à renforcer la capacité de réponse du Royaume face aux chocs extérieurs, tout en envoyant un signal de crédibilité aux investisseurs internationaux. Plus qu’une aide d’urgence, cette ligne est perçue comme un ins- trument de confiance réservé aux pays aux fondamentaux macroé- conomiques solides. Ce nouveau partenariat avec le FMI s’inscrit dans une relation de long terme. Le Maroc avait

déjà bénéficié de plusieurs lignes de précaution de liquidité (LPL) depuis 2012. Mais la LCM marque un tournant, en raison des critères plus exigeants qui la conditionnent. «À cette époque, le Maroc n’était pas encore éli- gible à une LCM. Le fait qu’il le soit aujourd’hui témoigne d’un saut qualitatif» , explique Rachid El Fakir, expert en économie moné- taire. Et de préciser : «C’est un label de résilience pour toute éco- nomie bénéficiant de cet instru- ment financier du FMI». Une reconnaissance internationale des fondamen- taux économiques du Maroc En effet, selon le FMI, cette ligne a été accordée en reconnais- sance de la solidité des équilibres macroéconomiques du Maroc, de la discipline budgétaire et de la gestion rigoureuse de la poli-

tique monétaire. La LCM offre une réserve de liquidités mobilisable rapidement en cas de besoin, et ce, sans conditionnalités supplé- mentaires. Elle agit comme un filet de sécurité dans un monde où les risques exogènes sont de plus en plus fréquents, à l’image de la volatilité des prix de l’énergie, de la sécheresse persistante ou encore des tensions financières internationales. Dans le même temps, plusieurs défis pèsent sur la trajectoire éco- nomique du Royaume. Le défi- cit commercial a progressé de 22,1% à fin février 2025, attei- gnant 50,74 milliards de dirhams. Les transferts des MRE ont enre- gistré un léger repli évalué à 17,8 milliards de DH, tandis que l’expo- sition des banques marocaines à la dette publique continue de croître, accentuant les risques systémiques. Pour El Fakir, cette

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Ligne de crédit modulable «Levier de résilience et marqueur de crédibilité internationale»

terme; une gestion prudente des réserves de change devient alors un choix bien délibéré. F. N. H. : Dans quelle mesure cette ligne de cré- dit peut-elle contribuer à renforcer la résilience du système financier maro- cain, notamment face aux pressions sur les réserves de change et à l’exposition croissante des banques à la dette publique ? R. E. F. : Avec cette enve- loppe monétaire, le Maroc et le FMI essayent de consolider leur confiance bilatérale en matière de mise en œuvre et d’accompagne- ment de politiques économiques visant l’optimisation des perfor- mances du Maroc en matière de développement économique et financier. En effet, avec cette LCM, l’éco- nomie marocaine va consolider la confiance des bailleurs de fonds internationaux et soutenir davan- tage les flux d’IDE qui constituent le pilier de tout décollage écono- mique et financier. Les agences de notation internationales ne peuvent, quant à elles, que saluer cette opération en donnant de bons signes aux marchés des capitaux internationaux sur la santé finan- cière de l’économie marocaine et réussir ainsi toute éventuelle sortie du Trésor et du secteur privé maro- cains sur ces marchés, à l’instar du grand succès de la dernière sortie à l’international du Trésor en mars 2025. En outre, avec les clauses de la dernière directive de l’Union euro- péenne sur l’activité bancaire, pou- vant porter atteinte au niveau des transferts des MRE vers le Maroc, cette LCM pourrait tempérer cette atteinte sur le court terme. En effet, cette enveloppe pourrait amélio- rer la liquidité du secteur ban- caire en permettant de faire face au besoin de liquidité structurelle dont souffre le marché monétaire interbancaire. Avec cette manne financière, l'exposition potentielle des banques au risque lié à la dette publique pourrait s’estomper, sans oublier l’effet de ladite LCM sur la dynamique du marché boursier marocain en matière d’attractivité des capitaux étrangers.

Dans un contexte économique mondial incertain, le Maroc renforce son ancrage financier en obtenant une nouvelle ligne de crédit modulable du FMI. Une opération qui consolide la confiance internationale, mais qui interroge aussi sur la capacité du Royaume à transformer cette solidité en souveraineté économique durable. Entretien avec Rachid El Fakir, professeur et expert en économie monétaire.

Propos recueillis par Désy M.

Finances News Hebdo : Le Maroc vient d’obtenir une nouvelle ligne de crédit modulable du FMI. Selon vous, ce type de méca- nisme reflète-t-il avant tout une solidité économique ou une vulnérabilité anticipée face à des chocs externes, à la lumière de la conjonc- ture internationale actuelle qui impacte l’économie mondiale, dont celle du Royaume ? Rachid El Fakir : Les expériences du Maroc avec le FMI, en matière des lignes de crédit, datent de 2012. La seule différence qui marque la nouvelle expérience c’est qu’il s’agit d’une ligne de crédit modulable (LCM) et non pas d’une ligne de précaution de liquidité (LPL) dont le Maroc avait bénéficié en 2012 et 2020. A cette époque, le Maroc n’était pas éli- gible à obtenir une LCM. Constituant une facilité financière, la LCM soulève quelques ques- tions quant à la solidité de l’écono- mie et sa vulnérabilité aux chocs externes générés par l’incertitude qui gouverne le contexte interna- tional ces dernières années. Certes, l’obtention d’une LPL témoigne d’une certaine solidité

des équilibres macroéconomique du pays bénéficiaire avec des fondamentaux (taux d’inflation, taux de croissance économique, solde budgétaire, taux d’endet- tement, etc.). Ce qui reflète des performances économiques qui respectent les normes du FMI en matière d’allocation de cette ressource de financement et qui témoignent d’une discipline bud- gétaire et d’une rigueur monétaire incontestables. Avec l’obtention d’une LCM, le Maroc a ainsi confirmé sa place parmi les pays membres du FMI à pouvoir tirer leur épingle du jeu face aux conditions de cette incontournable institution finan- cière internationale. En effet, le dernier communiqué de presse N° 25/094 du 8 avril 2025, portant sur les consultations de 2025 au titre de l’article IV, et la troisième revue de l’accord au titre de la facilité pour la résilience et la durabilité avec le Maroc, confirment la bonne tenue de

l’économie marocaine en termes de stabilité macroéconomiques et de la mise en œuvre de grands chantiers restructurant celle-ci. Dans ce sens, l’accord sur la LCM constitue sur le court terme une panacée pour accompagner cette bonne tenue de l’écono- mie marocaine, tout en l’ados- sant aux grands chocs externes qui continuent de marquer l’envi- ronnement économique et poli- tique international. Le risque de change combiné au besoin de financement du compte des tran- sactions courantes pourraient mettre en jeu la vulnérabilité de l’économie marocaine, notam- ment en présence de signes de guerres commerciales entre les grandes puissances mondiales. Situation qui risque de compro- mettre les équilibres macroéco- nomiques du Maroc en le met- tant sous de grandes contraintes inflationnistes et monétaires. Ces contraintes peuvent rendre l’éco- nomie marocaine vulnérable à

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