FNH N° 1192

DEVELOPPEMENT DURABLE 42

FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 17 AVRIL 2025

de ce forum par les experts a été l’avantage comparatif que confère au Maroc la faible empreinte car- bone de ses équipements et de son hydrogène. Alimentées par des énergies renouvelables avec stoc- kage, les futures usines marocaines d’intégration industrielle pourraient largement se conformer aux stan- dards européens. «Nous savons que l’hydrogène sera vendu en fonc- tion de son empreinte carbone. La notion de couleur va disparaître», précise l’expert, soulignant la perti- nence de ce choix stratégique. Avec une empreinte carbone infé- rieure à 3,38 kg CO2e/kg H2, seuil exigé par l’UE, et bien plus faible que celle de ses concurrents éloi- gnés comme le Chili (jusqu’à 5,33 kg CO2e/kg H2), le Maroc dispose d’un positionnement géopolitique et environnemental idéal pour approvi- sionner le marché européen. Des jalons à poser pour consolider la compétitivité Mais pour que cette ambition prenne forme, les experts ont soulevé plu- sieurs conditions qui doivent encore être réunies. La première est l’in- vestissement massif dans la R&D pour la fabrication locale d’électro- lyseurs et autres composants straté- giques. La seconde est la structura- tion de chaînes industrielles locales capables de produire à grande échelle. La troisième est la mise en place de formations ciblées pour les futurs techniciens et ingénieurs de l’hydrogène, ainsi qu’un cadre réglementaire incitatif pour attirer les investisseurs. Enfin, la logistique d’exportation doit être pensée à long terme. Aujourd’hui, l’ammoniac est envisagé comme principal vecteur d’exportation. Mais, à terme, la construction d’un hydrogénoduc marocain connecté au H2MED, via Barcelone, devien- dra une nécessité. Des mesures qui, si elles sont mises en œuvre avec cohérence, permettront au Maroc de transformer son potentiel énergé- tique en véritable leadership indus- triel sur l’hydrogène vert. «L’hydrogène vert du Maroc sera le mieux placé sur le marché européen, avec une empreinte carbone très faible et un prix de vente compétitif», conclut Saïd Guemra. ◆

 Alimentées par des énergies renouvelables avec stockage, les futures usines maro- caines d’intégration industrielle pourraient largement se conformer aux standards euro- péens.

Hydrogène vert

L'intégration industrielle des équipements est le levier principal de compétitivité. Le Royaume bénéficie d’un avantage carbone unique pour l’export vers l’UE. Il doit encore structurer sa chaîne industrielle, investir en R&D et sécuriser sa logistique export. Vers un écosystème industriel intégré Par Désy M. L

du panel consacré à l’intégration industrielle des équipements EnR, «la production de H2 marocaine d’ici 2050 devrait se situer sur un large segment : entre 9 MTH2/an pour 200 GW, et 24 MTH2/an pour 550 GW. Cela suppose une capacité industrielle d’une ampleur inédite» . Ce potentiel implique nécessaire- ment de produire localement les composants clés pour garantir à la fois la compétitivité économique et la maîtrise de l’empreinte carbone. L’intégration industrielle, en particu- lier dans les segments de l’éolien et du photovoltaïque, est ainsi présen- tée comme la pierre angulaire de la compétitivité marocaine. Pour Said Guemra, «l’éolien occupe une place majeure dans le Capex des projets H2; il constitue en toute logique la première cible de l’intégration des équipements H2 du Maroc» . Il estime que le coût des équipements éoliens pourrait ainsi baisser de plus de 30%, en passant de 1,1 M$/MW à environ 0,70 M$/MW, grâce à une production locale.

e Maroc a franchi une étape stra- tégique dans la structuration de sa filière hydrogène vert. En témoignent les récents projets lancés, huit à ce jour, totalisant 26,6 GW, ainsi que les 40 demandes en cours, qui pourraient à terme représenter une capacité installée de 130 GW, voire 260 GW à moyen terme. Mais plus encore que la production, c’est la mise en place d’un écosystème industriel intégré autour des équi- pements EnR (éolien, solaire, élec- trolyseurs) qui constitue aujourd’hui l’un des enjeux majeurs du posi- tionnement du Royaume dans les chaînes de valeur mondiales de l’hydrogène vert. Récemment à Rabat, lors du Green Hydrogen Industry Forum, l’heure n’était plus aux intentions, mais à l’action. Intitulé «Le temps de l’ac- tion», ce forum a permis de faire un état des lieux des acquis du Maroc en matière de développement d’un écosystème de production d’hy- drogène vert. Selon Saïd Guemra, expert en énergie et modérateur

Un savoir-faire déjà éprouvé En effet, le Maroc possède des acquis indéniables sur lesquels il peut capitaliser pour créer un éco- système robuste. Notamment son expérience dans le secteur automo- bile où il a su attirer des construc- teurs mondiaux et structurer un tissu de sous-traitants capable de répondre aux exigences de produc- tion en série. «Le Maroc sait faire dans la production de masse. Cette précieuse expérience sera mise à profit pour l’intégration industrielle des équipements de production H2» , affirme le Dr. Guemra. Cette démarche permettra éga- lement de répondre aux besoins internes en énergies renouvelables du Royaume, avec une demande électrique estimée à 110 TWh en 2050, dont 50% devraient être couverts par des énergies inter- mittentes. L’écosystème EnR/H2 pourra ainsi bénéficier d’un double marché : export et consommation locale. Un autre point clé souligné lors

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