FNH N° 1024 ok (1)

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ECONOMIE

FINANCES NEWS HEBDO

VENDREDI 28 MAI 2021

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10% qui détiennent les revenus les plus bas ne représentent que 2,2% du revenu global. De sorte que les pre- miers représentent 17 fois les revenus des seconds. Les chiffres issus de la deuxième note du HCP que vous évoquez dans votre question, montrent que ce sont à l’évidence les salaires (lesquels repré- sentent 38% du revenu des ménages), qui sont les premiers responsables des inégalités au Maroc. Ainsi, le revenu salarial des 20% des ménages les plus aisés équivaut à 14 fois celui des 20% des ménages les moins aisés. Les revenus des 10% des ménages salariés les plus aisés représentent 26 fois ceux des 10% des ménages salariés les plus modestes. Si l’on sait par ailleurs que les écarts de salaires sont moins élevés dans la fonction publique, force est d’en déduire que ce sont les disparités existantes dans le secteur privé qui sont très proba- blement à l’origine de tant d’inégalités dans la distribution des revenus sala- riaux, et partant des revenus dans le pays. Voilà un résultat qui devrait être médité et pris en compte pour l’élabo- ration de toute politique de meilleure répartition des revenus. 3. Le coefficient de Gini est un indi- cateur pratique habituellement utilisé pour mesurer de manière synthétique la disparité des revenus. Calculé sur la base des dépenses, le coefficient de Gini est évalué à 38,5%, niveau qui était déjà considéré relativement élevé (il est inférieur à 30%, voire 25% en Europe). Or, l’enquête sur les revenus révèle que ce coefficient, appréhendé donc pour la première fois sur la base des revenus, culmine à pas moins de 46,4%, alors que d’après la Note même du HCP, le seuil «socialement tolérable» est de 42%... On est donc à 4.4 points au-dessus du seuil sociale- ment tolérable. Voilà encore un résul- tat qu’il s’agira d’apprécier à sa juste mesure et dont il faudra tirer toutes les conséquences qui s’imposent. Il dit en tout cas que le Maroc est parmi les pays où les inégalités de revenus sont particulièrement marquées. 4. La dernière note du HCP met aussi en évidence le fait qu’en moyenne, chaque ménage a trois sources de revenu. En milieu rural, nombreux sont les ménages qui ont parfois 4 à 5 sources de revenu. En fait, ces chiffres reflètent un niveau de précarité élevé, puisque l’activité «principale» ne per-

met manifestement pas aux ménages concernés de vivre de façon décente. D’où la nécessité pour ceux-ci de mul- tiplier les sources de revenus. En milieu rural et dans le secteur agricole, ce phénomène est répandu, et on sait depuis longtemps que l’activité agri- cole à elle seule ne permet pas à la grande majorité des agriculteurs de vivre décemment, d’où leur propension à la pluriactivité.

5. Enfin, les résultats de l’enquête montrent que les personnes à faibles revenus ou «pauvres» représentent près de 12,7% de la population, soit près de 4,5 millions de personnes. On est loin du 1.7% de «pauvreté moné- taire» publié par le même HCP pour la même année 2019, mais calculés à partir des dépenses de consomma- tion… Par ailleurs, près des 2/3 des pauvres (66%) vivent en milieu rural.

Ce résultat en fait confirme une réalité que nous connaissons aussi depuis longtemps et qui est malheureusement toujours là : la pauvreté, encore impor- tante dans le pays, est d’abord un phénomène massivement rural, même si elle reste aussi un fléau urbain. ◆ (*) : Interview réalisée avant la parution du rapport sur le nouveau modèle de développement.

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