Magazine Daniel Féau

C élèbre pour avoir bâti la folie mexicaine de Jimmy Goldsmith dans les années 1980, ce qui lui avait déclenché d’autres chantiers hors norme à travers le monde, des îles Turks and Caicos à l’Azerbaïdjan, en passant par Hollywood ou les Hamptons, Robert Couturier a toujours cultivé secrètement une passion pour le XVIII e siècle, bien éloignée de cette démesure. Installé à New York depuis ses 23 ans, mais né à Paris, le décorateur avait gardé un attachement pour le grand goût français qu’il avait connu enfant. Ses proches connaissaient sa maison du Connecticut, où derrière la façade traditionnelle en bois et peinte en blanc se cachait un intérieur digne d’un château en France. Fauteuils Jacob, table Louis XV, grande console en bois doré, commode de Sageot, lit de repos Régence, tableaux de Nattier, Fabre et Vigée Le Brun… Une bulle hors du temps, un exercice de style que Robert Couturier a pu ensuite plus encore peaufiner, cette fois, dans un manoir normand dont il faisait l’acquisition il y a quelques années. « Je l’ai acheté sur un coup de tête, il ressemblait énormément à la maison de ma grand- mère. C’était une façon de renouer avec mon enfance, recréer un monde intime, et remettre un pied en France. » Tous ses meubles et ses objets d’art, qu’il avait pour la plupart achetés chez des antiquaires parisiens, comme Jean-Marie Rossi ou Hervé Aaron, traversaient à nouveau l’Atlantique, pour retrouver leur terre natale. Et ils ne pouvaient rêver plus bel écrin. Mais aujourd’hui Robert Couturier tourne la page d’un chapitre de sa vie et dit adieu à la Normandie et à sa précieuse collection. « Ce n’est pas sans un pincement au cœur, mais il faut aller de l’avant, imaginer de nouvelles aventures. » Le contenu de la noble bâtisse sera donc dispersé ce mois-ci par Christie’s. Un ensemble de 160 lots d’une parfaite harmonie, où se côtoient une commode estampillée de Louis Delaitre et Pierre Migeon et une autre attribuée à Etienne Doirat, une paire de fauteuils de Jean Gourdin et une autre estampillée de Nicolas Heurtaut, ou encore cette table de milieu néoclassique en bois doré. Les nombreux tableaux sont parfaitement en osmose avec ce mobilier, à une nuance près : Aux maîtres français, Robert Couturier a associé beaucoup de portraits anglo-saxons, pour lesquels il a aussi une

Exemple d’un mobilier de grande qualité, avec des fauteuils estampillés Nicolas Heurtaut et Jean Gourdin. Page de gauche : Une table de milieu d’époque néoclassique.

Robert Couturier a aussi le goût des portraits : autour d’un François-Xavier Fabre, un tableau d’un artiste de l’entourage de Thomas Gainsborough et une toile de Gilbert Jackson.

traditional white-painted timber facade hid an interior worthy of a castle in France. Jacob armchairs, a Louis XV table, a gilded writing desk, a Sageot chest of drawers, a Regency bed, Nattier, Fabre and Vigée Le Brun paintings… A timeless bubble, a stylistic composition which Robert Couturier later perfected in a Norman manor house which he acquired a few years ago. “I bought it on a whim, it looked a lot like my grandmother’s house. It was a way of reconnecting with my childhood, recreating an intimate universe, and getting a foothold in France again.” All his furniture and works of art, most of which he had purchased from Parisian antique dealers such as Jean-Marie Rossi or Hervé Aaron, crossed the Atlantic once more to return home. And they couldn’t have dreamed of a more beautiful setting. But today Robert Couturier is turning the page on a chapter of his life and saying au-revoir to Normandy and his precious collection. “I can’t say it’s not pulling on

Christie’s Sale An aesthete’s world of interior

Despite having lived in New York for years, decorator Robert Couturier has always maintained an attachment to French 18 th century decorative arts, as proven by the collection he is selling today. By Eric Jansen Renowned for having built Jimmy Goldsmith’s Mexican folly in the 1980s, an accomplishment which was to trigger other extraordinary projects across the globe from the Turks and Caicos Islands to Azerbaijan, via Hollywood and the Hamptons, Robert Couturier has always secretly nurtured a passion for the 18 th century, seeming light-years from the quirky… Born in Paris but a New York resident since he was 23, the decorator retained fond memories of the unique French taste and elegance that he had known as a child. Those close to him knew his house in Connecticut, where behind the

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