FNH N° 1190ok

POLITIQUE

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FINANCES NEWS HEBDO VENDREDI 28 MARS 2025

Malgré ses rodomontades, elle reste dépendante de ses partenaires historiques. Le populisme ne nourrit pas son peuple. Et les discours mar- tiaux n’attirent pas les inves- tisseurs. Dans ce contexte, le virage de Tebboune ressemble à une manœuvre de sauve- tage. Avec des signaux clairs, comme notamment la visite probable Jean-Noël Barrot à Alger, ou encore la participa- tion remarquée de ce dernier à l’iftar de la Grande Mosquée de Paris, le 18 mars courant, lors duquel il a déclaré que «la France est attachée à sa relation avec l'Algérie avec laquelle nous sommes unis par des liens complexes, mais d'une densité sans équivalent et des intérêts partagés». Tensions latentes Mais cette réconciliation apparente ne doit pas mas- quer les tensions de fond. Rien n’a été réglé pour l’ins- tant. Les dossiers migratoires sont toujours là et les OQTF non respectées continuent de scandaliser Paris. Ajoutons à cela une donnée fondamen- tale : la question mémorielle plane toujours comme un nuage radioactif sur les rela- tions bilatérales. Et puis, il y a le Sahara maro- cain. Ce point de fixation pathologique du régime algé- rien qui en a fait une obses- sion nationale élevée au rang de dogme. Avec des protes- tations et dénonciations théâ- trales dès qu’un responsable français met les pieds à Dakhla ou Laâyoune. Car ce que l’Al- gérie ne supporte pas, c’est la normalisation, lente mais sûre, de la position française en faveur du Sahara marocain.

Le rêve d’une France neutre et bienveillante est bel et bien mort. Et cela change tout. Alger se rend bien compte qu’elle ne peut plus instrumentaliser la France dans son combat contre le Maroc. Elle devient un acteur à ménager et un partenaire à reconquérir. On passe donc du conflit à la séduction. Du bras de fer à la danse du ventre. Un tournant stratégique ? Peut-être. Une nécessité ? Assurément. Mais à trop vouloir ménager la France, Tebboune ne risque- t-il pas d’ouvrir un front inté- rieur? L’affaire Sansal, par exemple, ne fait pas l’unanimité en Algérie. L’emprisonnement d’un intellectuel respecté, âgé et malade, pour des propos tenus sur un média français, choque bien au-delà des cercles francophiles. Et sa libération éventuelle, dictée par les intérêts diplomatiques, pourrait être perçue comme une soumission à Paris. Un comble pour un régime qui s’est toujours voulu fier, indé- pendant et prompt à dénoncer toute forme d’ingérence. Sauf que Tebboune joue sur du velours. Les critiques inté- rieures sont contenues, les médias aux ordres et l’oppo- sition muselée. Il peut donc manœuvrer sans risque poli- tique majeur. Alors, vers quoi allons-nous ? Une vraie réconciliation ? Un apaisement durable ? Pas si vite. La relation franco-algé- rienne, c’est un peu comme un vieux couple usé : chaque dispute est bruyante, mais chaque réconciliation éphé- mère. Abdelmadjid Tebboune, en tendant la joue à Paris, ne signe pas une paix, mais une trêve. Reste à savoir si Emmanuel Macron, «l’unique point de repère» du président algérien, est prêt à faire la bise ou à tourner les talons. Car dans ce couple diploma- tique, on n’est jamais à l’abri d’un nouveau coup de sang. A suivre… ◆

 Abdelmadjid Tebboune : «(…) On garde comme unique point de repère le président Macron».

tourner de plus en plus le dos, au profit du Maroc. Il restait Paris. Mais même ce dernier filet semblait se rompre, surtout depuis que Macron a épou- sé, sans ambiguïté, la pro- position marocaine d’autono- mie au Sahara. Ce soutien, vécu comme une trahison, a tout déclenché : rappel de l’ambassadeur, campagne de presse virulente, arrestation de Boualem Sansal comme signal fort envoyé à Paris… Et, comme souvent, suren- chère verbale pour masquer l’impasse diplomatique. Seulement voilà : l’Algérie a beau jouer à la puissance régionale, elle sait qu’elle ne peut pas éternellement se fâcher avec tout le monde.

des investisseurs en Algérie (probablement la première hors hydrocarbures), der- rière les Etats-Unis et l’Ita- lie» , indique le Trésor fran- çais. Traditionnellement, les IDE français se dirigent vers trois secteurs : les services financiers, l’industrie manu- facturière et les industries extractives. Ensuite, pour des raisons migratoires : la France est encore la principale destina- tion de la diaspora algérienne, et chaque visa délivré est une soupape sociale précieuse pour Alger. Enfin, pour des raisons politiques : l’isolement diplomatique de l’Algérie s’est aggravé. Elle a perdu Madrid, se crispe avec l’Union euro- péenne et voit l’Afrique lui

L’isolement diplomatique de l’Algérie s’est aggravé : elle a perdu Madrid, se crispe avec l’Union européenne et voit l’Afrique lui tourner de plus en plus le dos, au profit du Maroc.

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