FNH N° 1139

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JEUDI 8 FÉVRIER 2024 / FINANCES NEWS HEBDO

BOURSE & FINANCES

naie, et son impact direct sur la cryptosphère peut être limité. La création d'une CBDC représente simplement une version digitale du Dirham, gérée par la Banque centrale, sans forcément affecter directement l’utilisation ou l’adop- tion des cryptomonnaies. La participation du FMI ou de la Banque mondiale dans ce projet est compréhensible, car ces enti- tés sont actives dans des projets similaires et peuvent apporter leur expertise à la Banque centrale. En revanche, la décision finale devrait être prise par la Banque centrale marocaine, en tenant compte de ses propres intérêts et du contexte unique du Maroc. Il est souligné que les recommandations du FMI, basées sur des schémas singa- pouriens ou européens, peuvent ne pas nécessairement convenir à l'économie marocaine, qui est distincte. Il est intéressant que le Maroc bénéficie de l'expertise du FMI tout en prenant les rênes du projet de CBDC de manière autonome. La confidentialité des Marocains doit être respectée en évitant tout outil de traçabilité, compte tenu des problèmes de confiance qui existent dans notre pays. L'objectif de la CBDC est au final d'offrir des avantages tels que rapidité, sécurité, accessibi- lité et facilité. La solution CBDC devrait être conçue de manière à ne pas reproduire les difficul- tés rencontrées par la solution du paiement mobile qui, malgré d’im- portants investissements mobili- sés, ne connaît pas l’engouement escompté par les autorités. Pour conclure, la question de l'uti- lisation préférentielle de la cryp- tomonnaie par les Marocains, malgré les restrictions, doit être examinée attentivement. Cela soulève des interrogations sur l'adoption plus faible du Mobile Money, même avec des efforts de marketing et d'investissement. Ce phénomène incite à réfléchir à une approche libérale qui offre plus de liberté à la jeunesse, tout en régle- mentant de manière appropriée, sans succomber à une mentalité restrictive. ◆

tion aux règles financières et une reconnaissance nuancée de Bitcoin en tant qu'actif risqué, sans néces- sairement signifier une adhésion totale de l'establishment financier. F.N.H. : Malgré l'absence d'un cadre réglementaire, le Maroc se classe dans le top 20 mondial en termes d'adoption des cryptomon- naies. Quels facteurs contri- buent à cette position élevée et comment les utilisateurs naviguent-ils dans cet envi- ronnement non réglementé ? B. B. : Pour répondre votre ques- tion, il est important de souligner que le Maroc présente une parti- cularité dans ce sujet : la jeunesse marocaine est fortement attirée par les cryptomonnaies, en particulier le bitcoin, et cela s'explique par divers facteurs. Tout d'abord, de nombreux jeunes voient le bitcoin comme un moyen d'investissement pour améliorer leur situation financière. Certains l'utilisent également pour des paie- ments internationaux pour contour- ner ainsi les limites existantes. Pour ceux qui n'ont pas accès aux ser- vices bancaires, le bitcoin offre une alternative de paiement. De plus, il est utilisé pour des transferts trans- frontaliers en raison de ses frais réduits, et certains jeunes le choi- sissent pour recevoir des paiements liés à leurs activités en ligne et bénéficient de coûts très bas com- parés aux alternatives actuelles. En quelque sorte, le Bitcoin devient une solution aux multiples pro- blèmes (ou restrictions) financiers auxquels les jeunes au Maroc sont confrontés. Ces défis spécifiques auxquels les jeunes font face, com- binés à une forte exposition à la technologie, contribuent à rendre le Bitcoin largement adopté au Maroc. F.N.H. : En quoi la nouvelle législation envisagée par BAM pourrait-elle résoudre les défis actuels et favori- ser un environnement plus sécurisé pour les utilisa- teurs de cryptomonnaies au Maroc ? B. B. : La nouvelle législation envi-

 La progression des cours du bitcoin s’est accélérée au cours du mois octobre 2023 : il ne valait «que» 27.160 dollars.

sagée par Bank Al-Maghrib (BAM) suscite des discussions sur la manière dont elle pourrait résoudre les défis actuels liés aux crypto- monnaies au Maroc, tout en favo- risant un environnement plus sécu- risé pour les utilisateurs. Le wali de BAM a explicitement exprimé l'intention de réglementer les cryptomonnaies, soulignant la prise en considération des direc- tives du G20. Il est noté que de nombreux pays, en particulier en Europe avec la régulation ‘MICA’ (Market in Crypto Assets), ont déjà établi des règles précises pour encadrer les cryptomonnaies. Le Maroc, en adoptant ces normes à son contexte spécifique caractérisé par l'absence de convertibilité du Dirham et des contraintes liées aux règles de change, s'inscrit dans une démarche de convergence avec les pratiques internationales. Toutefois, j’estime que le manque de transparence qui entoure l'éla- boration de ces règles suscite des inquiétudes. Il est important d’inclure le consommateur dans le cœur du processus d’établissement de ces règles qui se déroule der- rière des «portes fermées». Bien que l'objectif affiché soit la protection du consommateur, l'ac- cent doit être mis sur la nécessité d'assurer une réglementation qui ne se transforme pas en une interdic- tion déguisée des cryptomonnaies. On espère que la législation qui en découlera sera favorable pour clarifier les droits et obligations des

investisseurs en cryptomonnaies. Il est essentiel de mettre en place un cadre qui définisse clairement le statut des cryptomonnaies, que ce soit en tant que moyen de paie- ment, actif financier, ou autres. Ainsi, le régulateur est appelé à réaliser un travail approfondi pour créer un cadre législatif équilibré, différent des autres pays en raison de son contexte unique, tout en évi- tant une régulation inadéquate qui pourrait entraver le développement positif des cryptomonnaies dans le pays. F.N.H. : En collabora- tion avec le FMI, Bank Al-Maghrib progresse acti- vement dans son projet de création d’un CBDC. Quelles sont les implications pré- vues sur la cryptosphère et pour l'économie en général, et de quelle manière cette collaboration stratégique avec le FMI renforce-t-elle la viabilité et la stabilité de ce projet innovant ? B. B. : Pour aborder la question de la Central Bank Digital Currency (CBDC), il faut comprendre que cette dernière ne signifie pas nécessairement une cryptomon-

Les fournisseurs d'ETFs rejoignent l'espace Bitcoin principalement pour les opportunités de profit plutôt que par conviction idéologique.

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