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SPÉCIALE EDITION COVID-19

Justice

Le digital appelé à la rescousse

Avec la crise sanitaire, le ministère de la Justice a été contraint de fermer tous les tribunaux et de ne laisser courir que les affaires pénales. Pour certains services comme celui du casier judiciaire, il a été recommandé aux citoyens d’utiliser les plateformes digitales mises à leur disposition.

P lus que jamais, le digital a mon- tré sa pertinence dans le secteur de la Justice. Il est question d’encourager son déploiement pour atténuer les encombre- ments dans les différentes juri- dictions. Le système d’audiences par visioconférence lancé depuis le 27 avril dernier a été salué par les acteurs du système judiciaire. Les résultats ont été jugés pro- metteurs. 2.174 audiences ont été tenues et 33.492 affaires mises au rôle. Ces procès impliquent 37.332 détenus. La justice digi- tale, ou à distance, est l’un des chantiers majeurs sur lesquels le gouvernement doit se pencher. Dans ce cadre, une opération pilote a été lancée au niveau du tribunal de Tinghir (Ouarzazate). Elle a permis le jugement de plu- sieurs inculpés qui n’ont pas fait

la procédure pénale ni dans la procédure civile. Il faut établir des textes de loi dédiés. «Un travail législatif doit être fourni en s’inspirant des expériences étrangères réussies, tout en prenant en considéra- tion les spécificités marocaines», prône notre interlocuteur. Pour Nabil Haddaji, avocat au Barreau de Casablanca et éga- lement militant des droits de l’homme, «la technique de la vidéoconférence a été testée effi- cacement dans plusieurs pays. C’est une procédure prévue par le Code pénal français ou améri- cain, par exemple, mais à de cas limités et dans des conditions précises. Elle peut être tolérée dans l’état d’urgence actuel où il est impor- tant de préserver la santé de toutes les parties». Il a insisté sur le principe que «les juges doivent impérativement s’assu- rer du respect concret des droits de la défense et du principe du contradictoire». Techniquement, l’entrée en application de la justice déma- térialisée nécessite de relever d’autres challenges, comme dis- poser de plateformes technolo- giques performantes et fiables permettant des jugements équi- tables et préservant les droits

le déplacement des prisons où ils sont incarcérés, évitant le risque de contamination par la Covid-19. Ce système, déjà adopté par plu- sieurs pays, donne des résultats notables, mais il soulève des défis de taille au niveau de sa gestion et de son fonctionne- ment. Certains juristes et militants des droits de l’homme ont mani- festé quelques inquiétudes à ce sujet. Le Barreau de Rabat, par la voix de son bâtonnier Mohamed Barkou, n’a pas hésité à émettre quelques réserves, surtout au niveau pénal. Il estime que « cer- taines affaires nécessitent la pré- sence de plusieurs personnes comme les témoins ou la partie civile et il est délicat de gérer une séance regroupant différents intervenants par voie digitale». Il a aussi relevé des imbroglios juridiques du fait que le système online ne figure nullement dans

La crise de la Covid-19 est le catalyseur qui a poussé le gouvernement à accélérer la digitalisation du secteur de la Justice. La mise en place de différentes plateformes numériques comme www.mahakim.ma a apporté une valeur ajoutée à ce projet, mais elle est insuffisante pour institutionnaliser une véritable Justice à distance. Un important programme doit être mené pour former tous les intervenants du secteur. Il est question d’installer aussi du matériel et des plateformes adaptés aux spécificités et aux besoins des juridictions marocaines. Des moyens adaptés aux spécificités marocaines

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54 FINANCES NEWS HEBDO [ HORS-SÉRIE N°39 ]

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