FNH N_ 1207

POLITIQUE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 11 SEPTEMBRE 2025

rique parisien, lycées fermés, via- ducs incendiés à l’aube…, autant d’images qui réveillent les souve- nirs à peine enfouis des « Gilets jaunes». Les revendications ? Elles sont multiformes : contre la politique d’austérité, contre la verticalité du pouvoir, contre l’érosion du pou- voir d’achat ou encore contre la dégradation des services publics. Mais, surtout, contre Emmanuel Macron, de plus en plus décrié. Avec une cote de popularité qui oscille entre 15 et 18%, le chef de l’Etat est plus isolé que jamais. Aujourd’hui, c’est la question bud- gétaire qui cristallise toutes les tensions. Le plan d’économie de 44 milliards d’euros proposé par Bayrou n’a pas seulement été reje- té par l’Assemblée, il a révolté le pays. En effet, avec la suppression de jours fériés, les dérembourse- ments, le doublement des fran- chises médicales, la conditionna- lité accrue du RSA, l’allongement du délai de carence pour les arrêts maladie…, le cocktail est explosif. A ces tensions sociales accrues, s’ajoute le spectre d’une dégrada- tion de la note de la dette par Fitch, attendue vendredi 12 septembre. Déjà, la France emprunte au même taux que l’Italie sur dix ans; une première depuis plus de quinze ans. Et devient une énigme pour ses partenaires, un problème pour ses voisins et un souci pour ses créanciers. Un pays en déroute Dans ce chaos organisé, une chose frappe : l’érosion du pouvoir prési- dentiel. Emmanuel Macron, réélu en 2022, croyait encore pouvoir tenir jusqu’en 2027 en équilibriste. Mais l’accumulation des crises, la fragmentation de l’Assemblée et le rejet populaire récurrent le placent actuellement en posture très déli- cate. Certains, à gauche comme à droite, n’hésitent pas à réclamer sa démission, alors que les centristes prient pour que la mécanique insti- tutionnelle tienne encore quelques mois. Aujourd’hui, la France est dans une forme de cohabitation qui découle sur une véritable paralysie de l’exé- cutif. L’Elysée n’a plus de prise sur l’Assemblée. Matignon est devenu

un gouvernement ? Obtiendra-t-il un pacte de non-censure avec les socialistes ? La France adoptera- t-elle un budget 2026 ? Macron pourra-t-il continuer à rester au pouvoir ? Et surtout : la France peut-elle encore être gouvernée sans majorité ? Rien n’est moins sûr. Il n’y a qu’une seule certitude : ce n’est plus le Président qui gou- verne, ni le Parlement, ni la rue. C’est l’impasse. ◆

A la crise politique majeure que connaît la France, s’ajoute le spectre d’une dégradation de la note de la dette par Fitch, attendue vendredi 12 septembre.

une antichambre de légitimité tem- poraire. Le Parlement vote pour ou contre des gouvernements à durée déterminée. Et la rue, elle, s’invite

au débat par la casse et les feux de poubelles. Dans ce contexte, Sébastien Lecornu parviendra-t-il à former

La France à l’heure de la fronde sociale «Bloquons tout» EN BREF

Le 10 septembre 2025, la France a vécu une jour- née de mobilisation sociale d’une ampleur iné- dite depuis les Gilets jaunes. Sous le mot d’ordre «Bloquons tout», des milliers de lycéens, d’étudiants et de citoyens en colère ont tenté de paralyser le pays pour dénoncer les politiques d’austérité du gouver- nement et le budget présenté par François Bayrou avant la chute de son équipe. De Paris à Rennes, de Lille à Montpellier, en passant par Nantes, Besançon ou Chambéry, des centaines d’actions ont été recensées : lycées bloqués, universi- tés perturbées, routes coupées, gares ciblées, jusqu’à des occupations symboliques devant des institu- tions publiques. Selon les chiffres officiels, environ 29.000 per- sonnes ont participé à 430 actions recensées, dont 157 blocages, mais les organisateurs estiment avoir mobilisé bien davantage. Le ministère de l’Educa- tion nationale a reconnu qu’une centaine de lycées avaient été perturbés, dont 27 totalement bloqués, tandis que plusieurs universités ont préféré sus- pendre leurs cours ou basculer vers l’enseignement à distance. Dans certains établissements parisiens emblématiques, comme Henri-IV, Lavoisier ou Claude-Monet, les blocages ont donné lieu à des affrontements parfois violents : barricades, feux de poubelles et interventions musclées des forces de l’ordre.

Au total, près de 300 interpellations ont été effec- tuées dans le pays, dont 171 à Paris, où la gare du Nord a connu une matinée tendue. Le ministère de l’Intérieur a mobilisé quelque 80.000 policiers et gendarmes pour tenter d’éviter la paralysie et limi- ter les débordements. Les autorités assurent que les «cibles stratégiques» ont été protégées et que la vie du pays n’a pas été bloquée. Né de la colère face au plan d’économies de 43,8 mil- liards d’euros annoncé en juillet, qui prévoit notam- ment la suppression de jours fériés et le gel des retraites, le mouvement se veut horizontal et sans leader identifié. Mais il a trouvé un relais auprès de syndicats comme la CGT et d’une partie de la gauche, de LFI au PS. Le gouvernement et une partie de la droite dénoncent à l’inverse une «mouvance d’extrême gauche» qui chercherait à «confisquer» la mobilisation. Dans les cortèges, les revendications dépassent pourtant les clivages partisans : on réclame le retour de la retraite à 60 ans, plus de justice fiscale ou encore une meil- leure répartition des richesses… Certains n’hésitent pas à reprendre les slogans des Gilets jaunes, don- nant à cette journée un parfum de déjà-vu. Si le pari de «mettre la France à l’arrêt» n’a pas été gagné, la mobilisation du 10 septembre restera comme un signe fort d’exaspération sociale.

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