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a changé

QU’EST-CE QUI

DANS LE TRAVAIL INTERCULTUREL ? Les réponses de Jürg Pfister, directeur de SAM global.

La Mission est démodée, elle est une obligation à vie, faite pour des sur- hommes – de nombreux préjugés et clichés dissuasifs circulent sur le travail interculturel. Pourquoi ? Je crois que beaucoup de gens n’ont sim- plement pas réalisé comment le travail interculturel s’est transformé au cours des dernières décennies, parce qu’ils n’en sont pas très proches. Autrefois, certaines choses étaient vraiment comme elles sont présentées actuellement dans les clichés, mais entre-temps une énorme évolution a eu lieu. Comment le travail interculturel s’est-il donc transformé sur le plan mondial ? Il existe actuellement beaucoup de pays où vivent de nombreux chrétiens évan- géliques et des gens bien formés, ce qui n’était pas le cas il y a 130 ou 100 ans. Nous devons donc examiner exacte- ment où et pour quoi des Occidentaux sont encore nécessaires. Maintenant, les collaborateurs des pays en voie de déve- loppement, c’est-à-dire l’Asie, l’Amérique latine et l’Afrique, sont plus nombreux que les Occidentaux. Certains pays asia- tiques, par exemple, envoient chaque année des centaines de personnes dans le monde entier. Malgré cela, nous avons encore une fonction très importante en tant qu’Occidentaux. Au commencement, nous avons fait beaucoup d’erreurs : man- que de sensibilité envers les autres cultu- res, méthodes peu adaptées au contexte, etc. Lorsque nous soutenons les « nou-

ses dépendaient de nos collaborateurs. Aujourd’hui, c’est différent. Nous avons en maints endroits de bons partenaires avec lesquels nous pouvons collaborer. Nous sommes ainsi plus efficaces, pou- vons en faire davantage et multiplier les connaissances et compétences. Les chan- ces que les choses continuent sans notre présence sur place sont beaucoup plus grandes. Nous sommes devenus plus sensibles et nuancés culturellement. Nous réfléchis- sons plus à ce qui a vraiment un sens dans un contexte donné, et nous questionnons aussi notre propre culture de manière plus critique : qu’est-ce qui est vraiment biblique et qu’est-ce que nous faisons simplement parce que cela correspond à notre culture européenne ? De plus, nos collaborateurs sont long- temps partis comme « missionnaires de carrière » pour un engagement qui du- rait presque toute la vie. Actuellement, le temps d’engagement moyen chez SAM global se situe autour de sept ans. Tandis que d’une part cela représente un défi, c’est aussi un avantage. Les envoyés se demandent plus tôt comment ils peuvent remettre les projets et forment les per- sonnes appropriées. Cependant, on ne s’immerge plus autant dans les pensées et les expériences, ni la langue et la culture de la population locale. Qu’est-ce que cela a changé pour les collaborateurs ? De nos jours, la possibilité pour les en- voyés de mettre en valeur de manière ju- dicieuse leurs connaissances et leurs dons

et de les utiliser est davantage mise en avant. C’est pourquoi il existe des descrip- tions de postes et des descriptions de projets. Pour chaque nouveau candidat, nous examinons : Quelle est la meilleure place pour lui ? Pour quoi son cœur bat-il, quel projet correspond à sa vision ? A quel endroit peut-il le mieux mettre en valeur ses dons et ses capacités ? Une autre différence : autrefois, nous étions beaucoup plus en première ligne pour transmettre l’Evangile. De nos jours, nos collaborateurs travaillent plutôt à l’arrière-plan dans ce domaine et sensi- bilisent, instruisent, encouragent et sou- tiennent d’autres personnes, qui connais- sent parfaitement la culture et la langue. Pourquoi donc le travail intercul- turel en général a-t-il tellement changé ? Le monde a changé, des continents com- me l’Afrique, l’Asie, l’Amérique du Sud sont passés par une transformation, tant économique que spirituelle. Nous avons donc évidemment dû nous demander ce que cela signifiait pour nous chez SAM global. Comment pouvons-nous aumieux servir ces gens maintenant ? Comment pouvons réellement répondre aux besoins actuels ? Ce qui était valable hier n’est plus applicable aujourd’hui. De plus, nous avons bien sûr tiré les leçons de beau- coup d’erreurs. D’autre part, la situation en Europe a aussi changé, les générations actuelles pensent et agissent autrement. A l’époque, par exemple, les enfants étaient envoyés en in- ternat ;denos jours ilest importantpour les

veaux » collaborateurs, ces erreurs peu- vent souvent être évitées. Notre longue expérience est très précieuse. D’autre part, le pouvoir d’achat dans les pays oc- cidentaux est plusgrand et nous avons ainsi également un rôle important à jouer au niveau des finances : nous avons plus de facilité à envoyer et soutenir des per- sonnes. Le travail dans les pays d’engagement s’est aussi transformé. De nos jours, il ne s’agit plus en priorité de tout faire soi- même, mais de déclencher des proces- sus, développer les capacités et former les gens tout en se laissant instruire par eux. C’est pour cela que nous avons défini comme vision « des formations qui chan- gent les vies ». Le travail est davantage orienté sur les projets. Tandis qu’autrefois on répondait simplement aux besoins sans planification concrète, de nos jours on se demande plus souvent comment déclencher un changement durable. Ac- tuellement, le but est dès le début de remettre un jour le projet à la population locale. De plus, maintenant on n’aide plus en premier lieu avec de l’argent, mais on encourage les gens à générer eux-mêmes un revenu. La dépendance peut ainsi être évitée. Comment le travail interculturel de SAM global s’est-il transformé ? Lors de la fondation de SAM global, nous travaillions pratiquement par- tout dans des situations pionnières. Il n’existait guère de partenaires dans les pays d’engagement et beaucoup de cho-

familles, et pour nous, que la situation des enfants soit vraiment adéquate et adap- tée. Alors qu’autrefois on travaillait sans relâche, maintenant on attache beau- coup plus de valeur à un bon équilibre entre travail et vie privée. Il y a trente ans, on était réellement « loin des yeux » dès qu’on était dans le pays d’engagement ; on avait peut-être un contact par lettre avec son pays tous les deux ou trois mois. Maintenant, on est constamment en ré- seau sur les médias électroniques, indé- pendamment de l’endroit où on se trouve. De nos jours, chacun a déjà eu une fois un contact avec des personnes d’autres cul- tures et la sensibilité culturelle est un su- jet dont on parle aussi en Europe ; lorsque je suis allé pour la première fois en Afrique Noire voilà 27 ans, c’était encore complè- tement différent. Les deux générations ont des forces et des faiblesses ; plutôt que de regretter l’ancien temps, nous désirons absolument voir et utiliser les forces de la génération actuelle. De nos jours on ne parle plus de mission, mais seulement de travail interculturel. Pourquoi ? La notion de mission a souvent une con- notation négative, elle est mise en lien avec le chapitre peu glorieux des croisa- des, et nous ne voulons en aucun cas être associés à cela. Nous ne désirons abso- lument pas imposer quelque chose aux gens ou détruire leur culture. Des erreurs ont été commises par le pas- sé, chez SAM global aussi, mais dans l’ensemble nous pouvons tout de même dire que dans de nombreux pays nous

avons pu apporter une contribution im- portante et changer quelque chose ! Par exemple dans la santé publique : en Ango- la et dans la région forestière de Guinée, la lèpre a pu être pratiquement éradiquée par notre travail. En Guinée, des malades du sida ont reçu pour la première fois un traitement ; en Angola et en Guinée des milliers d’aveugles ont pu recouvrer la vue par des opérations des yeux. Nous avons réellement pu faire une différence dura- ble. En théologie également nous avons pu inciter les gens à se demander : – Quel- le est la signification des diverses déclara- tions de la Bible pour notre culture, com- ment pouvons-nous les traduire ? Dans d’autres domaines aussi, par exemple la formation ou l’agriculture, des change- ments visibles ont pu être obtenus. Comment les commandements de Dieu sont-ils alors compris par SAM global aujourd’hui ? De nos jours, il est très important d’exa- miner exactement comment se présente la situation humanitaire et spirituelle du moment. Où existe-t-il encore de vrais besoins ? Où sont les partenaires dignes de confiance ? Les objectifs de développe- ment durable sont également importants pour décider où nous devons encore nous investir. Où et comment a-t-on encore be- soin de nous, où pouvons-nous apporter notre contribution ? Ce qui est aujourd’hui pareil au passé : nous désirons mon- trer aux gens de manière concrète que quelqu’un les aime. Nous désirons leur donner un espoir et une perspective pour leur vie ici-bas, mais aussi au-delà.

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