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SERVE AND MULTIPLY 4/2019 A M S g l o b a l Aonns

Des familles et des célibataires s’engagent N’est-ce pas imprudent ?!

Sommaire

4/2019

Pris sur le vif

ÉDITORIAL

N’est-ce pas imprudent ?! Des familles et des célibataires s’engagent

1 année, 73 demandes en mariage La végétation autour de moi brille de toutes ses cou- leurs, de magnifiques mangues jaunes et violettes pen- dent des arbres au-dessus de moi et le vent souffle dans les feuilles. Dans la couronne des arbres, on entend différents oiseaux gazouiller et au loin s’y mêlent des cris d’enfants heureux. Plutôt idyllique, non ? Presque romantique. Et comme si cela ne suffisait pas, je reçois juste à ce moment-là une demande en mariage ! Dom- mage seulement que je rencontre aujourd’hui pour la première fois le jeune homme qui me demande si je veux devenir sa femme. Au cours des huit mois passés en Guinée, j’ai sans cesse vécu des situations de ce genre. Que ce soit le mécanicien sous l’arbre, la vendeuse d’aubergines au marché ou n’importe qui dans la rue, dès qu’ils apprennent que moi, jeune femme blanche, je ne suis pas encore mariée, ils disent : « Oh, j’ai un homme pour toi. Moi/mon fils/mon neveu/mon cou- sin/telle connaissance cherche encore une femme. » La plupart des prétendants sont repoussés par le fait qu’ils devraient tout d’abord poser la question à mon père en Suisse ou parce que le chef ne le permettrait pas. Ces demandes n’ont presque jamais déclenché de sen- timents particuliers en moi. Elles ne m’énervaient pas plus qu’elles ne me tentaient, vu qu’elles étaient pour la plupart faites sur le ton de la plaisanterie. Cependant, un cas me restera en mémoire : lorsqu’à la fin de mon engagement j’ai poursuivi mon voyage vers l’Ouganda, un homme s’est approché de moi à l’aéroport. C’était, comme souvent, un jeune Africain qui espérait pou- voir se rendre en Europe grâce à une femme blanche. Nous attendions le même avion et il s’est installé à côté de moi à la porte d’embarquement. La situa- tion était plutôt désagréable et les phrases habituelles m’énervaient – j’ai donc tenté de changer de sujet. Il en est résulté une conversation intéressante sur les diffé- rences et les similitudes entre chrétiens et musulmans. J’étais soulagée lorsqu’une heure plus tard, on a annon- cé l’embarquement – mais l’intervention de Dieu dans la conversation avait fait de ce moment et d’une situa- tion que je n’avais pas recherchée l’une des rencontres les plus intéressantes de mon séjour en Guinée.

Unser jüngster Langzeiter ist derzeit 26 Jahre alt, unsere älteste Mitarbeiterin 65. Insgesamt sind momentan 11 Familien mit einem bis vier Kin- dern, 7 Ehepaare, 14 ledige Frauen und 8 ledige Männer mit SAM global im Einsatz. Was für eine schöne Vielfalt! Wieso, weshalb, warum? Doch weshalb wagt man sich als Familie in den Einsatz? Ist es nicht schwierig, als Single alleine auszureisen? Wo sind die Vor-, wo die Nachteile? Wie sehen die Vorbereitungen aus? Wie ist es für Kinder, in einem fremden Land aufzuwachsen? Was macht man, wenn man sich im Einsatzland verliebt? Und welche Herausforderungen und Erlebnisse warten, wenn man als ganze Familie wieder in die Schweiz zurückkehrt? In diesem Focus erzählen verschiedene Mitarbeitende, wie sie ihren Einsatz als Ehepaar, Single oder Familie erleben. Ein paar besondere Highlights in diesem Focus für mich: die ehrlichen Antworten unserer Sin- gle-Mitarbeitenden auf den Seiten 6-9 , der Be- richt über das Familienleben in Guinea auf Seite 12 und die lustigen Zitate von Kindern, die mit ihren Eltern im Einsatz sind, auf Seite 15 . Und natürlich Seite 21 über unser neues Einsatzland Nepal! Und – hach, eigentlich noch ganz viel an- deres. Ich wünsche Ihnen auf jeden Fall viel Freu- de beim Lesen dieser Ausgabe! Haben Sie Fragen? In Zukunft möchten wir im Focus jeweils eine Frage unserer Leserinnen und Leser aufnehmen und beantworten. Haben Sie Fragen an eine Mit- arbeiterin oder einen Mitarbeiter, beispielsweise in Bezug auf etwas, was er oder sie in diesem Fo- cus sagt? Oder möchten Sie von der Homebase etwas wissen? Dann melden Sie sich bei uns – am besten per E-Mail oder Brief.

Sarah BRÜHWILER, Kommunikation

PS: Zum Thema «Einsatz mit 50 plus» gibt es einen eigenen Focus, den Sie kostenlos bei uns bestellen können: winterthur@sam-global.org oder 052 269 04 69.

Nicole KUTTER, ancienne collaboratrice à court terme pour ActionVIVRE Sud, Guinée

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Le meilleur moment pour un engagement Un engagement ? D’accord ! mais seulement quand… Chacun de nous pourrait compléter cette phrase d’une manière ou d’une autre, et elle sonnerait toujours différemment. Mais alors, quand se situe réellement lemeilleur moment pour un engagement ? Existe-t-il vraiment un temps absolument idéal ?

Autrement dit : chaque étape de la vie et chaque situation familiale a ses défis, mais aussi ses avantages ! Si sou- vent dans notre vie, nous repoussons à plus tard ce que nous aimerions en- treprendre ou devrions aborder. Puis un beau jour, arrive le moment où il est trop tard et un engagement à l’étranger n’entre plus en ligne de compte, par exemple pour des raisons de santé. Que Dieu nous donne une vision as- sez forte pour que nous soyons prêts à surmonter doutes et craintes et ne pas repousser davantage l’engagement à l’étranger ! Nous ne savons pas de quoi l’avenir est fait et si un moment plus favorable viendra. Donc : se pourrait- il que le moment idéal soit justement maintenant ?! Dieu conduit bien Savez-vous quelle époque de ma vie j’aurais le moins voulu rater ? Les an- nées de mon engagement en Guinée ! Ni avant, ni après, je n’ai vécu autant d’expériences avec Dieu. Pendant tout ce temps, j’ai souvent pensé : j’ai failli manquer tout cela, parce que pendant si longtemps je trouvais des excuses. Par exemple, je n’aime en général pas quand il fait chaud, c’est pourquoi la Guinée n’entrait tout d’abord pas du tout en question. Mais heureusement que j’ai dit un jour à Dieu que c’était Lui qui pouvait décider du moment et du pays d’engagement. Il a bien conduit ! Notre Père céleste, qui nous a créés et nous connaît en profondeur, sait le mieux ce qui nous convient. Puisqu’Il nous aime infiniment et veut notre bien, ce serait une faute capitale de ne pas Lui faire confiance et de négliger les œuvres qu’Il a préparées d’avance pour nous (Ephésiens 2.10). Nous vou- lons risquer la confiance, à chaque moment, jeune ou vieux, avec ou sans famille – cela en vaut la peine !

Voici quelques déclarations sur ce thème :

Situation familiale

Ce qui parle contre un engagement Je n’aimerais pas rester célibataire et j’ai peu de chance de trouver un partenaire qui me convienne lors d’un engagement.

Ce qui parle pour un engagement

Je suis libre et flexible, je ne suis responsable que de moi-même.

Je suis (encore) célibataire

Sans enfants, nous pouvons tous les deux nous investir entièrement dans la culture et la langue, et mettre en valeur nos capacités. Nous avons recours à l’enseignement à distance ou à une école internationale, ce qui permet à nos enfants d’apprendre (au moins) une deuxième langue et d’acquérir des compétences interculturelles. D’autre part, des contacts intéressants se nouent au travers des enfants. Nous avons amassé des expériences et des connaissances que nous pouvons transmet- tre. De plus, dans les pays d’engagement, on nous témoigne automatiquement du respect en raison de notre âge.

Nous sommes un couple de jeunes mariés et n’avons pas (encore) d’enfants

Nous devons d’abord apprendre à mieux nous connaître et assurer notre assise financière.

Nous désirons offrir à nos enfants une excellente formation dans un contexte favorable.

Nous avons des enfants en âge scolaire

Nous ne désirons plus faire face à des nouveautés et pas non plus renoncer au confort.

Nous sommes des 50+

Jürg PFISTER, directeur de SAM global

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Célibataires en service

Serait-ce important pour vous que votre partenaire partage votre passion pour le travail interculturel ? Jenny : C’est Dieu qui m’a dirigée vers cette tâche. Tant qu’Il la confirme, un partenaire ayant une vocation totalement différente n’entrera pas en question. Timo : Pour moi, la vocation pour le travail interculturel est le facteur décisif. Plus d’une fois, une relation n’a pas abouti parce qu’il n’y avait pas de vocation commune. Tant que je serai convaincu que Dieu me veut en Afrique, il est évi- dent que ma femme aura besoin d’un même appel personnel. Helen : Il faut un appel clair de Dieu pour les deux personnes, sinon cela ne marchera pas. C’était et c’est encore évident pour moi.

« Je suis célibataire. » Cette petite phrase pro- voque souvent autour de nous des regards compatissants, un sourire embarrassé, des en- couragements formulés sans conviction et un changement rapide du sujet de conversation, surtout quand la personne a plus de 30 ans. Et quand il est question d’un engagement à l’étranger, l’absence de partenaire est pour beau- coup la première raison d’y renoncer. Nous avons demandé à sept collaborateurs pourquoi ils se sont engagés à servir comme célibataires, ce qu’un partenaire pourrait leur apporter et ce qu’ils conseilleraient aux autres, sans aucun em- barras ni changement rapide de sujet.

Jenny, 62 ans, chez SAM global depuis 1992

Où voyez-vous des avantages dans un engagement en tant que célibataire ? Jenny : Mon indépendance et ma flexibilité, toutes deux liées à mon célibat, je les vois tou- jours comme un atout. J’ai pu par exemple vivre dans une famille locale et m’adapter à son rythme de vie pendant que j’apprenais la langue. Je peux être disponible spontanément pour beaucoup de choses, sans devoir prendre des égards envers un mari et des enfants. Timo : Comme célibataire, je suis indépendant. Je peux visiter des jeunes et aménager mon emploi du temps plus librement. J’ai justement des contacts amicaux avec les jeunes, vu que je suis dans la même situation qu’eux. Je crois que le fait d’être célibataire m’ouvre d’autres voies d’accès à la jeunesse. D’un point de vue très personnel, je suis aussi confron- té au défi de dépendre plus étroitement de Dieu dans les moments difficiles ou solitaires. Naemi : J’ai plus de temps et de flexibilité pour les relations. Je peux rester spontanément pour le thé ou passer quelques jours avec une amie dans un village. Je crois aussi que plu- sieurs jeunes femmes se sentent bien dans notre colocation et sont plus ouvertes et libres, justement parce qu’aucun homme n’est présent. Je jouis aussi d’être indépendante. Je vois de nombreux avantages à être célibataire dans le travail interculturel. Helen : C’est comme Paul l’écrit : on peut se donner pleinement au travail, sans devoir se préoccuper d’une famille. On a beaucoup de liberté pour gérer son temps et organiser le travail. Dans le contexte musulman, mon statut de célibataire âgée me donne plus de liberté dans le travail médical auprès des hommes. Les femmes non mariées sont souvent considérées comme des prostituées, mais chez nous, aucun homme ne nous visite la nuit. On nous observe attentivement comme des personnes originales, inadaptées à la société locale. On nous manifeste un certain respect. Les femmes mariées doivent s’adapter au système social local. Astrid : L’engagement comme célibataire est moins compliqué et plus économique ; on est moins limité. Je peux par exemple prendre deux heures pour prier un matin, ce qui ne serait pas possible avec une famille. Frédéric : En tant que célibataire, il est plus facile de prendre certaines décisions ainsi que certains « risques ». Agathe : Je suis libre d’aller rendre visite à mes amies, même le soir, sans avoir la contrainte de rentrer à une certaine heure pour préparer le repas, m’occuper des enfants… J’ai un ministère que je ne pourrais pas exercer de la même manière avec une famille.

Helen, 60 ans, chez SAM global depuis 1984

Pourquoi vous êtes-vous engagé en tant que célibataire ? Avez- vous eu de la peine à choisir un engagement comme célibataire ? Helen : Non, pas vraiment. J’avais 25 ans et le temps de trouver un conjoint. J’ai toujours souhaité un partenaire, mais je n’ai jusqu’à présent trouvé personne qui me plaise et partage ma vocation. Jenny : La décision de m’engager ne m’a pas posé de problème, car je considérais et considère toujours le célibat positivement. La dignité, la valeur, le sens et la liberté que Dieu nous accorde en tant que femmes, indépendamment de notre état civil, m’ont toujours fascinée et ont grande- ment contribué à ma décision de Lui confier ma vie. Mon célibat n’a donc joué aucun rôle dans la décision de m’engager. Timo : Lebut d’un « service enAfrique » était depuis longtemps clair pour moi, mais j’aurais bien aimé partir avec une compagne. Durant un stage pratique au Bénin en 2017, j’ai remarqué que je posais par là des conditions à Dieu, mais n’avais quand même pas envie de partir en étant encore célibataire. D’autre part comme j’étais par ail- leurs prêt à m’engager, je savais que ma candidature était la bonne chose à faire. J’ai compris que je devais faire

Frédéric : Ma première idée était de par- tir en couple, mais lorsque le Seigneur m’a appelé, il est devenu clair que je de- vais partir, même seul. Pour moi, le plus important était de suivre cet appel. Agathe : Jeune fille, je m’imaginais que si jamais je partais en mission, ce ne se- rait pas sans me marier avant, et nous partirions donc en famille. Pendant un court terme au Tchad, je suis tombée sur la promesse du Psaume 22.28 : « Toutes les extrémités de la terre se souvien- dront et reviendront à l’Eternel, et toutes les familles des nations se prosterneront en ta présence. » C’était comme si Dieu me disait : « Et si je te demande de partir seule, es-tu prête ? » La réponse a fusé du fond de mon cœur : « Bien sûr que NON ! Je peux imaginer me marier et partir à deux, mais pas seule… » Cette promesse et cette question ne m’ont plus quittée de la journée et j’ai finalement répon- du : « Seigneur, si Tu m’affirmes que des personnes de cette région pourront Te connaître grâce à moi, je suis prête à par- tir, même si je dois y aller seule. » A mon retour, j’ai suivi différentes formations avant de repartir au Tchad, cette fois pour un long terme. Cela ne veut toutefois pas dire que mon célibat a toujours été facile à accepter.

confiance à Dieu et qu’Il me conduirait, même si je m’étais représenté les choses autrement. Naemi : Je crois qu’abandonner sa zone de confort et un environnement familier demande toujours un certain courage et suscite des craintes et des incertitu- des, qu’on parte seul ou en famille. Après mon premier court terme il y a plus de 10 ans, j’ai dit à Dieu : si Tu veux absolument que je Te serve, alors ce sera à l’étranger, mais je ne peux pas le faire seule. Après le deuxième court terme quatre ans plus tard, je suis arrivée à la conclusion : ok, je partirai seule à l’étranger s’il le faut. Dieu m’a donc conduite pas à pas avec les années jusqu’à ce que je puisse dire : Dieu m’a appelée et j’aimerais obéir, avec ou sans partenaire, car je crois qu’Il veut mon bien et qu’Il est celui qui répond à mes besoins et mes désirs ardents. Après plus de trois ans d’engagement, il me semble évident que ce pas était juste. Je me sens à ma place et j’expérimente sans cesse comment Dieu m’encourage quand surgissent des doutes. En outre, il n’est pas dit que je resterai toujours cé- libataire parce que je suis partie comme telle. Dieu a de nombreuses ressources. Astrid : Pour moi, le but de ma vie, c’est de suivre Dieu. J’ai toujours été convain- cue d’aller là où Il me conduit, avec ou sans partenaire. Je préfère renoncer à la famille et au bien-être que de faire des compromis par rapport à ce que Dieu me met à cœur.

Frédéric, 46 ans, chez SAM global depuis 2016

Astrid, 42 ans, chez SAM global depuis 2017

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Quels inconvénients voyez-vous ?

autorités et les hommes plus âgés, il n’y a pas de respect. Naemi : Mes colocataires changent constamment et j’aimerais parfois que quelqu’un soit là, avec qui je puisse tout partager. En Afrique, il n’est pas courant qu’une femme de mon âge ne soit pas mariée. Il arrive presque tous les jours que quelqu’un veuille s’occuper de mon mariage ou m’épouser. En outre, une femme qui n’est pas mariée a automatiquement un sta- tut défavorisé et elle est moins respectée. On doit parfois pour ainsi dire « mériter » ce respect. Frédéric : N’avoir personne de très proche pour partager ce que je vis – les joies et les défis, les difficultés ou tout simple- ment mon quotidien. Agathe : Dans la culture musulmane, une célibataire n’est ja- mais considérée comme une personne à part entière. Les gens n’arrivent pas à nous placer dans une « case » qu’ils connais- sent, mais en même temps, grâce à notre ministère et après un certain temps, nous pouvons gagner le respect de la popula- tion et être acceptées.

Est-ce une préoccupation dans votre vie quotidienne ? Jenny : Quand l’âge avance, la question se pose de moins en moins, même dans mon environnement culturel qui considère qu’il est normal d’être marié et d’avoir des enfants. Timo : Oui, par exemple quand on me demande si je suis marié ou dans les moments de solitude. Néan- moins cela ne m’est pas arrivé plus souvent ici qu’en Allemagne. Naemi : Non, pas vraiment. Cela me préoccupe par- fois quand-même, mais probablement moins sou- vent qu’en Suisse. Ici, je suis intégrée dans une équi- pe qui est pour moi comme une famille. En plus, je remplis une fonction utile, qui me comble. Helen : On me demande parfois bien sûr où sont monmari et mes enfants. Pour les gens, ce serait nor- mal que ma famille soit en Europe et moi ici. Ne pas avoir d’enfants est pire que de ne pas avoir de mari. Qui s’occupera de vous quand vous serez âgée ? Peu de gens reçoivent une rente de vieillesse, qui ne suffit d’ailleurs pas pour vivre.

Comment percevez- vous l’action de Dieu dans cette question de partenaire ? Jenny : Dieu a mainte- nu mon enthousiasme pour les aspects posi- tifs du célibat. Timo : Dieu s’est sou- vent servi ces dernières années de cette ques- tion pour confirmer mon appel à l’étranger et me montrer la né- cessité de donner la priorité à cet appel plutôt qu’aux circons- tances. Helen : On doit ap- prendre à faire con- fiance à Dieu. Est-ce que je crois qu’Il veut le meilleur pour moi ? Et qu’Il sait mieux que

Jenny : L’absence de vis- à-vis avec qui partager la vie, ses hauts et ses bas. Timo : Il me manque une personne de con- fiance, quelqu’un qui me connaît, avec qui parta- ger ouvertement mes pensées. En Guinée, on n’est considéré comme un homme que si on est marié. Cela ne pose pas de problème dans le travail parmi les jeunes, mais le contact est dif- ficile avec les familles, les

moi ce qui est le meilleur ? C’est un véritable défi dans certaines situations. Astrid : On peut expérimen- ter la réalité des promesses de Dieu ; Il a promis de combler chaque besoin. Quand sur- vient par exemple un problème technique, je Lui dis : Dieu, c’est à Toi d’agir ! Il est beau de Le voir faire à Sa manière. En outre, il n’y a rien que nous puissions donner à Dieu sans qu’Il ne nous rende bien plus en retour. Agathe : Dieu est bon et Il sait ce qu’Il fait. S’Il n’a pas répondu à mes prières pour me marier, Il va certainement me donner la force d’être heureuse comme célibataire. Finalement, ce qui est important, ce n’est pas d’être mariée ou célibataire, mais d’appartenir à Christ, d’être là où Dieu me veut et de L’avoir à mes côtés. Voilà ce qui me rend heureuse !

Agathe, 51 ans, chez SAM global depuis 1996

Naemi, 30 ans, chez SAM global depuis 2016

Qu’aimeriez-vous dire à ceux qui ne s’engagent pas parce qu’ils sont (encore) célibataires ? Jenny : J’aimerais les encourager à faire totalement confiance à Dieu dans cette affaire. Il a des possibilités étonnantes où que nous soyons et Il peut combler notre vie quelle que soit notre situation ! Timo : Je comprends bien cette attitude, je l’ai connue moi aussi. Mais si vous avez l’impression que Dieu vous appelle à vous engager et que vous hésitez seu- lement parce que vous êtes célibataire, alors croyez que Dieu est bon. Il ne veut vous priver de rien. Si vous Le suivez fi- dèlement, Il vous bénira, Il vous confiera de plus grandes choses, probablement différentes et meilleures que ce que vous imaginez. Il n’y a rien de mieux que de participer au mandat que Dieu nous confie. Naemi : Si vous avez l’impression que vous devriez vous engager à l’étranger, je vous encourage à oser faire un pas dans cette direction. Dieu ouvrira ou fermera des portes et Il vous encouragera sur cette voie. Cela en vaut la peine !

Helen : Je connais plusieurs couples qui se sont rencontrés dans les cours de préparation ou dans leur pays d’engagement. Votre futur est peut-être déjà « là-bas » ? Faites-vous confiance à Dieu pour cette question ? Combien de temps voulez-vous encore attendre ? Les années passent et vous pourriez manquer quelque chose ! Astrid : C’est parfois peut-être plus simple d’être célibataire à l’étranger qu’en Europe. On est entièrement orienté vers une tâche significative durant l’engagement, alors qu’en Europe, on est entouré par des familles qui ressem- blent à celle qu’on aimerait avoir soi-même. Frédéric : Je peux comprendre que cela fasse peur ou soit décourageant, mais si on a le désir de le faire et surtout si c’est l’appel et le moment de Dieu, il vaut la peine de se lancer et de suivre cet appel. Ce serait dommage de passer sa vie à repousser une décision, car on peut toujours trouver une excuse pour ne pas partir ou ne pas répondre à un appel de Dieu. Agathe : Juste un exemple : j’ai une amie qui était convaincue d’avoir un appel pour l’étranger, mais pour qui l’idée de rester célibataire toute sa vie était dif- ficile. Elle a décidé de faire passer Dieu d’abord, de s’engager, et a finalement a rencontré son mari sur son lieu de travail. Pour bien montrer que Dieu a tout dirigé, son mari vient de moins de 30 km de son village, mais c’est à plus de 4 000 km qu’ils se sont rencontrés ! Bien sûr, « statistiquement », il y a moins de chances de trouver un conjoint en mission (pour les femmes en tout cas), mais Dieu est capable de contourner les statistiques. Il serait de toute façon dom- mage de passer à côté de Son appel parce qu’on a décidé d’attendre d’être marié avant de partir. J’ai rencontré lors de réunions dans les églises beaucoup de femmes d’un certain âge qui sont venues me voir à la fin, toutes enthousias- tes et un peu nostalgiques aussi, disant : « Tu sais, moi aussi, j’aurais dû partir… Mais maintenant, je suis trop vieille, je ne suis plus en bonne santé. »

Aurais-tu une anecdote ou une histoire en rapport avec ce sujet ? Helen : Quand j’étais plus jeune, onme demandait chaque fois que je rentrais de congé : « Es-tuma- riée maintenant ? » Une fois, quand j’ai dit non, une femme âgée s’est fâchée. « Ne sais-tu donc pas que tu as besoin d’un mari pour avoir des enfants ? » Elle devait penser : « Elle travaille à l’hôpital et n’est même pas au courant. Ce qu’elle est bête ! » Agathe : Un voisin m’a proposé de m’épouser car il avait pitié de me voir seule le soir dans ma mai- son. Il m’a même assurée que sa femme était d’accord…

Timo, 28 ans, chez SAM global depuis 2018

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L’amour transcende les cultures

« Vous êtes vraiment courageux ! »

« Vous partez avec vos deux jeunes enfants pour un engagement en Afrique ? Vous êtes vraiment coura- geux ! » J’ai souvent entendu cela lorsque nous nous préparions à partir en Guinée pour plusieurs années. Il y avait également des réactions encouragean- tes, surtout de personnes qui avaient déjà vécu à l’étranger : « C’est génial que vous fassiez cela. Ce sera une expérience très enrichissante pour vos enfants ! » Durant les préparatifs, des doutes survenaient parfois. Je m’inquiétais de savoir comment nos enfants allaient faire face à ce gros changement. Je repensais à notre engage- ment à court terme quatre ans auparavant au même en- droit, mais à ce moment seulement en couple. Lorsque je regardais les enfants des autres collaborateurs sur place, je me disais toujours : quelle chance de pouvoir grandir ainsi, de recevoir un autre point de vue sur le monde et d’apprendre à juger de la valeur des choses de façon très différente ! Mais maintenant qu’il s’agissait de mes pro- pres enfants, je ressentais avant tout la responsabilité qui reposait sur mes épaules. Nous partons en Guinée, que devons-nous emmener ? Lors des préparatifs du voyage, il a fallu prendre en comp- te de nombreux aspects en lien avec deux jeunes enfants : vêtements, nourriture, jouets, médicaments, vaccins… Que faut-il emmener, que va-t-on trouver sur place ? Le fait d’avoir déjà vécu une année là-bas durant notre en- gagement à court terme a naturellement été une grande aide pour moi. Je pouvais ainsi mieux imaginer à quoi allait ressembler notre nouvelle vie. Et les collaborateurs sur place nous ont beaucoup soutenus pour répondre à toutes ces questions. Le fait d’aller habiter dans une mai- son qui avait déjà été occupée par une famille facilitait également grandement les choses – de nombreux objets se trouvaient à notre disposition. Trouver un nouveau rythme Lors d’un si grand changement, la phase d’adaptation dure naturellement un certain temps. Il faut du temps et de la patience jusqu’à ce que chacun ait trouvé son ryth- me et se sente bien dans ce nouvel environnement. Si- meo avait six mois lorsque nous sommes partis – son plus gros problème au début a été le sommeil. Maëlio avait deux ans et demi. Pour lui, les changements par rapport à la Suisse étaient plus visibles : langue étrangère, vête- ments différents, un autre « supermarché », l’appel du muezzin, les pistes de terre, etc. Tous ces nouveaux lieux et ces nombreuses personnes qu’il devait apprendre à connaître lui ont demandé beaucoup d’énergie au début. Et pour nous les parents, il a fallu aussi un certain temps pour trouver un rythme qui convienne à toute la famille. Dieu pourvoira Ce n’est pas une décision facile que de quitter sa maison confortable, sa famille et ses amis et de partir dans un pays africain – surtout avec deux jeunes enfants. Mais au milieu de tous nos doutes, Dieu nous a remplis de Sa paix et confirmé au plus profond de nos cœurs l’appel à Le servir à l’étranger. Je m’en tiens à Ses promesses et je suis convaincue que s’Il nous appelle, Il prendra également soin de nos enfants.

« Je suis sûr que tu tomberas amoureux et que tu y res- teras pour toujours ! » Presque tous nos collaborateurs entendent cela au moins une fois avant leur départ. Ha- bituellement, il n’y a pas de pénurie d’intéressés dans le pays d’engagement… Chez SAM global, nous décon- seillons d’entamer une relation dans la première année de travail - il est souvent difficile au début de distinguer les vrais motifs des faux dans une culture étrangère, et même de faire le tri dans ses propres sentiments. Cependant, il arrive de temps en temps que des senti- ments plus profonds surgissent – et demeurent. Comme pour Lukas et Somaly. Quand je suis parti pour le Cambodge en 2007, il était en fait prévu que j’épouserais ma petite amie suisse l’année sui- vante. Mais avant d’arriver à ce point, nous avons rompu et je me suis soudain retrouvé dans la situation peu familière d’être célibataire à l’étranger. Comment pouvais-je rencontrer une Suissesse maintenant alors que je vivais si loin de chez moi ? Une Cambodgienne était hors de question pour moi - la culture étrangère, la langue différente, les stéréotypes, etc. me faisaient fuir. Mais malgré toutes ces objections, j’ai fini par craquer pour une Cambodgienne avec qui je me suis marié il y a près de dix ans. Comment y suis-je arrivé ? La relation entre ma petite amie suisse et moi a échoué principalement à cause de notre di- versité et du manque de patience pour endurer et appren- dre à connaître cette diversité. La différence culturelle entre les hommes et les femmes est parfois beaucoup plus gran- de que la différence culturelle entre les nations. Si nous avons peur de renoncer à nos propres convictions culturelles, il vaut mieux rester célibataire. Mais si nous som- mes prêts à nous engager dans une relation, à respecter et à Il existe également des différences culturelles entre Suisses et Suissesses.

supporter les différences, alors le contexte culturel ne joue pas un rôle si important. Supporter les tensions Parfois, je pense que nous nous posons trop de questions, analysons trop et gâchons ainsi beaucoup de beaux mo- ments. Quand j’ai des problèmes dans mon mariage, je ne veux pas blâmer quelque chose ou quelqu’un. Il est impor- tant que j’apprenne à supporter ces tensions dans l’amour et à respecter mon conjoint dans toute sa diversité. Ça ne devrait pas être une excuse Le plus grand défi dans un mariage interculturel est proba- blement de ne pas utiliser les différences culturelles com- me excuse pour les problèmes de mariage. Je suis heureux d’avoir décidé d’épouser mon épouse Somaly. Oui, nous vivons probablement des frictions culturelles que nous n’aurions pas si nous venions du même pays. Mais je suis également convaincu que nous avons moins de frictions, précisément parce que ma femme est cambodgienne - et qu’elle a donc de nombreuses caractéristiques culturelles que les femmes suisses n’ont pas. Le bon fondement Il n’existe pas de recette universelle pour choisir le bon partenaire, mais nous pouvons décider de construire notre mariage, quelle que soit la personne avec qui nous nous lions, sur un bon fondement : L’amour est patient, il est plein de bonté ; l’amour n’est pas envieux ; l’amour ne se vante pas, il ne s’enfle pas d’orgueil, il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite pas, il ne soupçonne pas le mal, il ne se réjouit pas de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ; il pardonne tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. (1 Corinthiens 13.4-7)

Amélie MAURER, ActionVIVRE Sud, Guinée

Lukas BERNHARDT, Lighthouse Battambang, Cambodge

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Comment s’organise l’école ?

Emmener des enfants en âge scolaire à l’étranger, n’est-ce pas irresponsable ? Ils seront assurément désavantagés s’ils retournent un jour dans leur pays d’origine. Et puis, comment fonctionne générale- ment l’école dans un tel pays ? Quand on prépare un engagement avec des enfants en âge scolaire, de très nombreuses questions se posent. Alors qu’autrefois il était normal qu’ils vivent dans un internat très loin de leur famille, d’autres solutions existent de nos jours. Sarah Büchli, mère de quatre enfants, raconte : J’ai moi-même grandi en Afrique de l’Ouest. A cinq ans, j’ai été scolarisée dans une école de village. Le seul autre enfant blanc là-bas était mon frère aîné. Des classes très remplies avec des enfants qui ne possédaient ni table ni chaise à la maison, encore moins un stylo à bille, et des maîtres avec des méthodes éducatives assez rudes, faisaient partie de mon quotidien à l’école. C’est ainsi que j’ai passé mes trois premières années de scolarité. Ensuite nous avons changé pour une école privée fran- çaise non loin de là. L’école locale n’est parfois pas une option Lorsque nous sommes arrivés en Guinée en 2012, nous pensions également envoyer nos enfants dans une école locale. Mais nous vivons dans une petite ville très décentrée du pays. Il n’y a pas d’écoles internationales et même dans les écoles privées des églises, les con- ditions sont difficiles : enseignants mal formés et mal payés, classes comptant jusqu’à 60 élèves, pas de ma- tériel d’enseignement, menaces constantes de grèves, troubles politiques et épidémies, etc. La pensée de sco- lariser notre fille dans ces conditions n’était pas très ras- surante. Le matériel d’enseignement dans un colis Nous nous sommes donc décidés pour une autre so- lution : l’école à distance allemande et l’engagement d’aides-enseignantes. Chaque été, le matériel pour toute l’année arrive dans un colis : des leçons toutes prêtes, des feuilles d’exercices, des tests, des idées de bricolage. Avec les aides-enseignantes, souvent des courts-termes, nous établissons un horaire de classe

pour les enfants de l’équipe qui suivent différents degrés scolaires. Les jeunes filles préparent les leçons à l’aide du matériel et les complètent avec leurs propres idées. Elles sont également régulièrement en contact avec l’école à distance. Selon leur nombre, une partie des enfants de différents degrés suivent la leçon ensemble, et le reste de l’enseignement est individuel. En raison du peu d’élèves dans la classe, les aides-enseignantes ont le temps de ré- pondre aux difficultés de chacun. Cela convient bien aux enfants, ils aiment leur école et, de mon point de vue, le matériel est très bon et prépare de manière optimale pour l’intégration à l’école en Europe. Manque de copains et risque de tensions Malgré tout, ce système a évidemment ses limites : dans notre petite école se trouvent seulement nos enfants et ceux de nos collègues de l’équipe. En particulier quand les enfants sont plus âgés, il leur manque à la longue un groupe de copains, ce qui est pour nous la raison princi- pale de notre retour en Suisse en été 2020. Le fait que les collègues de l’équipe soient les seuls au- tres parents d’élèves comporte un risque de tensions. Si une famille avait par exemple le sentiment qu’un autre enfant perturbe l’enseignement, cela pourrait amener des problèmes dans l’équipe. Ce serait dévastateur, car pour que le projet fonctionne une collaboration étroite et des échanges réguliers sont importants. Je suis donc très heureuse de la bonne ambiance dans notre équipe ! Une bonne solution Nous sommes convaincus qu’il faut de nos jours encore « incorporer » le mandat de Jésus : nous devons Lui obéir de façon à Le ressentir dans notre propre vie, dans notre propre corps. Nous prenons des risques, nous renonçons à certaines choses, nous essayons de faire confiance. Quand nous faisons cela en famille, les enfants sont auto- matiquement inclus. Il est vrai qu’ici nous sommes privés de quelques avantages des écoles suisses, mais nous pouvons quand même leur offrir une très bonne forma- tion scolaire. C’est un privilège !

Difficile d’imaginer une enfance plus belle

J’ai demandé à mon fils de huit ans : « Qu’aimerais-tu pour Noël ? » Sa ré- ponse : « Un sac de bonbons, ça serait parfait. » Cette modestie me touche. Pour nous, de petites choses, qui en Europe sont monnaie courante, sont spéciales. Nous apprécions en Afrique les joies sim- ples de la vie : une excursion au lac, du pain autour d’un bâton sur un feu dans notre propre cour, une nuit dehors sous les étoiles. Nos enfants peuvent ici très bien s’occuper dans la nature : ils construisent des arcs et des flèches, cueillent les fruits des arbres ou vont pêcher des poissons dans le ruisseau d’à-côté. Gazelles, hiboux et canards comme animaux de compagnie Durant notre temps ici, nous avons pu aus- si avoir toutes sortes d’animaux « domes- tiques » : chiens, chats, poules, canards, lapins, tortues, un énorme escargot géant africain, un jeune hibou, une petite gazel- le et même une fois un serpent non veni- meux (que nous avons quand même assez vite relâché dans la nature). Je trouve su- per que les enfants puissent grandir avec des animaux. C’est beaucoup plus simple ici en Guinée parce que nous avons plus de place qu’en Europe. Sinon, nous jouis- sons aussi de beaucoup de liberté – grâce à la prise en charge personnalisée des en-

très ouverts face aux personnes qu’ils ne connaissent pas. Ils ont appris que les gens peuvent avoir d’autres priorités dans la vie et qu’onpeut aussi avoir des amis qui vivent de manière totalement différente de soi. Ils savent d’où vient la viande (ils ont déjà été plusieurs fois à l’abattoir), comment on fait soi-même des lasagnes et peuvent laver leurs affaires à la main. Ce n’est peut-être pas ce qui est le plus demandé en Suisse, mais ce sont tout de même de bonnes ex- périences. L'image de la famille a laissé sa marque sur nous Notre cadet a récemment dit : « Ici les per- sonnesâgéesaimentvraiment lesenfants ! » C’est bien que lui aussi l’ait remarqué. La fa- mille est très importante dans le contexte africain. Ce « vivre ensemble » et « les uns pour les autres » nous a également mar- qués au cours de notre séjour. Deux à trois fois par jour, nous nous réunissons tous autour de la table pour manger. Tous les week-ends nous allons faire des excursions ou des jeux. Quelle famille en Suisse peut en dire autant ?

fants par des aides-enseignants, nous ne sommes pas dépendants des vacances scolaires. Nous pouvons décider en famille quand nous prenons des vacances et aussi entreprendre une excursion une fois par semaine avec l’équipe. De plus, nos gar- çons peuvent être encouragés de manière optimale et individuelle dans ce système scolaire. Il est plus difficile de créer des amitiés profondes Naturellement, il leur manque des camara- des du même âge et de la même culture. Les amis africains viennent pourtant sou- vent pour jouer tranquillement ensemble, mais plus les enfants grandissent, plus il est difficile de créer de fortes amitiés. Les en- fants du voisinage doivent souvent aider à la maison, sont coincés à l’école ou doivent aller à l’école coranique. Même si les en- fants se débrouillent pour se comprendre en français, ce n’est pas la même chose que de communiquer dans sa langue mater- nelle. Beaucoup de riches expériences Et pourtant, une enfance plus belle qu’en Afrique est presque inimaginable pour nous : on peut rester dehors toute la jour- née, courir sous la pluie, être dans la voi- ture sans siège enfant (ils n’aiment pas du tout cela en Suisse) et on trouve toujours quelqu’un pour jouer. Nos enfants sont

Sandra TOGGENBURGER est rentrée en Suisse avec sa famille cet été, après 8 ans d’engagement auprès d’ActionVIVRE Sud en Guinée.

Sarah BÜCHLI, ProESPOIR, Guinée

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Mots d’enfants Les enfants voient le monde à travers des yeux dif- férents – y compris bien sûr les gens et la culture des pays d’engagement.

Une femme bien est une femme qui... les valeurs familiales autrement

Famille Vögeli, Guinée (depuis 2013)

Famille Ringger, Cameroun (2010-2016) et Sri Lanka (depuis 2019)

Abigajil a attaché sa poupée sur son dos avec un linge pendant le service de baptêmes, s’est dirigée vers les femmes locales et s’est assise au milieu du premier banc entre les autres femmes qui portaient leurs enfants. Dès qu’Amos a su marcher, il s’est rendu régulièrement à l’atelier du menuisier derrière la maison pour « aider et contrôler ». Il était à chaque fois accueilli par un « Bon- jour, superviseur ! » Son tout premier mot a été « tappu- go » (planter un clou). Abigajil, à l’âge de quinze mois, aidait une voisine de notre quartier à laver le linge dans une bassine. Quand le petit garçon de la femme s’est approché d’elle et a voulu jouer avec l’eau de la lessive, elle lui a dit : « Laisse ! » du même ton fort et décidé que sa mère et a continué à frotter avec habileté.

Lors de son premier séjour en Suisse, Céline (alors âgée de trois ans) enlevait toujours ses chaussures avant d’entrer dans une maison, comme il est d’usage en Gui- née – mais elle pensait que cette règle était aussi valable pour l’église ou le supermarché. Lorsque Céline a appris à parler, elle ne pouvait pas nom- mer les différentes langues. Le suisse-allemand est tout simplement devenu « le blanc » (la langue que parlaient les blancs autour d’elle) et le français s’appelait « le noir » (la langue que parlaient les gens du pays). Cela sonnait ainsi : « Maman et papa parlent blanc et nos voisins par- lent noir ». Récemment, Céline a expliqué à un maçon qui travail- lait avec nous qu’on ne doit pas battre ses enfants s’ils n’obéissent pas. On doit les mettre dans une pièce, fer- mer la porte et revenir au bout de dix minutes pour parler gentiment avec eux. Céline aime aussi parler de Dieu : « Le vrai Dieu peut gué- rir les malades et laisser pousser dix arbres en une minu- te. » Céline est revenue enthousiaste de l’une de ses pre- mières journées d’école : « C’est la meilleure école du monde entier ! » - elle était la seule élève de son profes- seur…

Gaëlle et Cédric vivent avec leurs deux enfants en Guinée et s’investissent dans l’église et dans le travail auprès des familles. Jus- tement dans le cadre de cette der- nière activité, ils sont confrontés à des questions et valeurs tout à fait différentes de celles auxquelles ils sont habitués. « Pasteur, comment se fait-il que vos enfants soient si joyeux, éveillés et intelligents ? » Nous avons récem- ment posé cette question à l’un de nos collaborateurs de l’Eglise Protes- tante Evangélique de Guinée (EPEG). Il est le coordinateur national pour le travail parmi les enfants, soute- nu et encouragé depuis des années par SAM global. Sa réponse a été un grand encouragement pour nous : « C’est le résultat des enseigne- ments des dernières années. Ce que j’apprends, je ne le transmets pas seulement, j’essaie de le vivre tout d’abord dans ma propre famille. » Plus nous travaillons ici, plus nous réalisons combien le travail parmi les couples, les familles et les en- fants est vital – non seulement pour le bien des familles, mais aussi pour la croissance de l’Eglise et le déve- loppement de la société guinéenne. Des structures familiales différentes Les familles guinéennes com- prennent généralement cinq à huit enfants, parfois plus. La famille afri-

ne sont pratiquement pas stimulés. Lors d’une formation récente avec 50 mères, elles ont toutes été sur- prises d’apprendre qu’il est bien de jouer avec les enfants. Les mères avaient peur qu’ils perdent leur res- pect et deviennent récalcitrants si elles se mettaient au même niveau qu’eux. En classe aussi : avec 80 à 100 élèves, il est difficile de dévelop- per l’intelligence et la créativité des enfants. La famille est le premier lieu Nous vivons maintenant depuis 10 mois en Guinée avec nos deux en- fants de 10 et 12 ans. Nous avons vraiment réalisé ici seulement la si- gnification de la vie de famille. La fa- mille est le premier lieu où l’identité est construite et la foi transmise, où les enfants sont encouragés et leur potentiel révélé. Dans les diver- ses formations que nous donnons pour les couples, les dirigeants, les responsables de l’école du diman- che, les parents, dans les camps d’enfants, etc., nous essayons de transmettre que l’amour de Dieu se voit de manière très concrète dans nos relations les uns avec les autres. Et ceci en premier lieu dans la famil- le.

caine élargie se compose souvent de trois générations et beaucoup de personnes qui doivent être nourries dans un contexte de pauvreté extrê- me. Il n’est pas rare qu’un homme ait plusieurs femmes. Il en résulte des rivalités, des traitements injustes et des problèmes pour la vie commu- ne. En même temps, l’infidélité con- jugale est très répandue et souvent banalisée. En plus, les couples sont confrontés aux conséquences de l’excision, qui rendent la sexualité sensiblement plus difficile. De quoi sont faites les relations ? On nous a dit récemment : « En Guinée, une bonne épouse est une femme qui obéit bien et cuisine bien. » L’Eglise essaie de donner un autre message. Nous aimerions fa- voriser le dialogue entre les époux et encourager leur solidarité. Nous aimerions enseigner aux couples à vivre une relation qui soit emprein- te de la Bonne Nouvelle de Jésus- Christ et non seulement des coutu- mes et devoirs traditionnels. Pas d’encouragement des enfants Alors qu’en Occident, les enfants sont souvent au centre de la famille, parfois même trop, les petits Gui- néens sont fréquemment livrés à eux-mêmes. Les adultes ne s’en oc- cupent que très peu et les enfants

Famille Toggenburger, Guinée (2011-2019)

Eloan raconte à un visiteur étonné de Suisse qu’une fois notre gardien a tué un Coran. Après quelques recher- ches, il comprend qu’Eloan voulait dire un varan. Quand Amael avait trois ans, on lui a donné une petite batterie de cuisine pour Noël. Sans hésiter il est sorti, a pris trois pierres et en a formé une cuisine guinéenne ty- pique, sur laquelle il a ensuite posé ses marmites. Erinn : « Quand je serai grand, je veux une profession qui ne soit pas trop stricte, qui donne beaucoup de sous et qui soit passionnante. Par exemple, missionnaire. » Lors de notre premier séjour au pays, nous sommes allés au restaurant et nous étions tous impatients de manger des escalopes, des frites et autres produits du même genre. Pendant la lecture du menu, Amael (alors trois ans) a commencé à pleurer : « Mais moi, je veux du riz avec de la sauce ! »

Famille Diallo, Guinée (depuis 2017)

Nous avons croisé une femme voilée. Marc Lamine (alors âgé de deux ans et demi) a pointé le doigt vers elle et a dit : « Maman, la femme est drôle ! » J’étais un peu gênée (même si elle n’avait évidemment pas compris), surtout que je ne pouvais pas lire sa réaction sur son visage. Mais elle a réagi très poliment à mes salutations. Au fur et à mesure que nous avancions, j’ai demandé à Marc ce qui était si drôle. Il a dit : « Elle s’est cachée » et s’est mis à rire.

Gaëlle et Cédric CHANSON, ProTIM 2-2-2 Kissidougou, Guinée

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