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SOCIÉTÉ
FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 30 JUIN 2022
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répondre aux besoins et pour compenser les départs des médecins à l’étranger. Malheureusement, là se pose le problème
de l’encadrement, car une bonne partie des professeurs de médecine sont partis dans le privé. Toutefois, rien n’empêche ces professeurs de médecine exerçant dans le privé de participer à la formation et l’enca- drement dans les facultés de méde- cine publiques.
Le plus grand défi à la mise en place de la couverture sani- taire universelle est celui des ressources humaines.
Il y a aussi la solution des services à effec- tuer pour une durée déterminée dans le secteur public, et notamment dans les zones rurales. Quant à l’amélioration des rémunérations et des conditions d’exer- cice, elles ont déjà été faites en bonne partie. F.N.H. : Au Maroc, plus de 50% des dépenses de santé sont assurées par les familles. Or, la médecine de famille a pour but de réduire les charges. Ne faut-il pas que le sys- tème de santé soit orienté davan- tage sur la médecine familiale ? A. B. : La réalité est que ce chiffre est au-dessous de la réalité, parce qu’il ne tient compte que des frais directs médi- caux et non pas des coûts, tels que les coûts directs non-médicaux et les coûts indirects. Ainsi, les frais de transport des patients entre leur domicile et les lieux de soins ne sont pas pris en charge ou rem- boursés. C’est le cas, par exemple, d’un patient qui doit se rendre régulièrement à un centre de dialyse ou d’un patient qui doit se déplacer dans une grande ville par- fois avec un accompagnateur. Il doit donc payer de sa poche ses frais de transport et d’hébergement. De ce fait, certains patients démunis peuvent renoncer au traitement à leur corps défendant. Par ailleurs, le fait de mettre en place un parcours de soins coordonné, qui commence par une consul- tation chez un médecin généraliste dans un centre de santé, soit chez un généraliste privé, peut éviter de générer des soins inadaptés et souvent inefficaces avec des coûts catastrophiques. Un patient qui a bénéficié du diagnostic préalable du méde- cin généraliste de centre de santé ou du médecin de famille peut déjà être bien pris en charge dans la majorité des cas. Dans les situations qui nécessitent une prise en charge spécialisée, les patients vont être bien orientés vers la bonne spécialité médi- cale. Celle qui répondra le mieux à leurs besoins avec une bonne prise en charge et avec une optimisation des coûts. ◆
F.N.H. : On parle aussi d’une régio- nalisation du système de santé avec des groupements sanitaires de terri- toire (GST). En quoi consiste-t-elle ? A. B. : La régionalisation de la santé à travers les groupements sanitaires de terri- toires se présente sous une forme pyrami- dale avec, en haut, les centres hospitaliers universitaires (CHU), au niveau inférieur les centres hospitaliers régionaux (CHR), avec en dessous les centres hospitaliers provin- ciaux (CHP), et au niveau le plus bas les établissements de santé primaires (ESSP). F.N.H. : On ne peut parler de la réforme de santé dans sa globalité, sans évoquer le manque criant de médecins. Le Maroc en présente un déficit de 32.000. Comment résoudre cette problématique ? A. B. : Effectivement, le plus grand défi à la mise en place de la couverture sani- taire universelle est celui des ressources humaines. Il sera très difficile de répondre aux besoins de la population en soins sans ressources humaines, et notamment des médecins et paramédicaux. Le pro- blème des ressources humaines médicales est leur insuffisance, auquel s’ajoute une insuffisance quantitative en matière de for- mation, et qui est en plus aggravée par un nombre non négligeable de départs de ces cadres vers l’étranger. Régler ce problème consistera à remplir d’eau un seau à moitié vide et qui présente un trou au fond qui laisse couler une partie de sa contenance. Pour espérer remplir ce seau, il faut appor- ter en permanence une quantité d’eau
largement supérieure à celle qu’il perd par son creux. Pour ce qui est des départs vers l’étran- ger, ce qui inquiète, c’est l’ampleur de ces départs et le fait que près de 70% des étu- diants en médecine déclarent leur intention d’émigrer à l’étranger dès la fin de leurs études. A ces mouvements, s’ajoutent des mouvements du secteur public vers le secteur privé où les conditions de travail et de rémunération sont meilleures, ce qui appauvrit davantage le secteur public. Or, à un moment où on doit avoir des CHU et des hôpitaux forts, on risque de nous retrouver avec des infrastructures et des équipements sans ressources humaines pour les faire tourner. Il y a aujourd’hui un important déséquilibre entre l’offre des soins dans le secteur du privé et dans le secteur public. On estime aujourd’hui que 90% des financements de la santé vont au secteur public (remboursements des soins entre autres). Pour résoudre le problème de l’insuffisance des ressources humaines et notamment dans le secteur public, il faut envisager des mesures à court terme et d’autres à moyen et à long terme. Les mesures à court terme consistent à pas- ser rapidement des partenariats public/ privé (PPP). L’expérience du PPP avec les centres d’hémodialyse a été concluante et peut être généralisée à d’autres spé- cialités médicales. Après tout, qu’est-ce qui empêcherait un médecin privé d’aller exercer dans un hôpital ? Les mesures à moyen et à long terme consisteraient à augmenter le nombre de facultés pour former suffisamment de médecins afin de
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