Cannabis

ENQUÊTE CANNABIS

agriculteurs. Plusieurs milliers d’entre eux font l’objet d’avis de recherche par les autorités», souligne Hakim Benchemass, président du groupe PAM à la Chambre des conseillers, et parlementaire de la région d’Al Hoceima. Les autres partis politiques, à commencer par le Parti de la Justice et du développement (PJD), ne se sont pas prononcés sur le sujet de façon officielle. Mais le parti au pouvoir n’y serait pas opposé. «Soit on le partage, soit on le brûle» «Il y a une unanimité chez les formations politiques pour bien étudier la possibilité de la légalisation, surtout que les plus hautes sphères de l’Etat penchent pour cette option. L’Istiqlal demande que la grâce touche uniquement les exploitants, alors que le PAM veut une amnistie plus large. Il est donc primordial de traiter le sujet avec le maximum de précautions pour qu’il ne dérape pas de son objec- tif», rapporte Chakib Khayari, un associatif qui milite en faveur d’une légalisation du cannabis, que nous avons rencontré à Nador. Son crédo : «le kif, soit on le partage, soit on le brûle». Il ne peut y avoir cette

Le PAM a organisé en avril 2014 à Chaouen un débat sur la légalisation du kif. Près de 2.000 paysans étaient présents.

hypocrisie qui fait qu’on le tolère ou le prohibe selon les périodes. Soit il pro- fite à tous les Marocains en légalisant les applications médicales et indus- trielles du cannabis, soit on l’interdit en bonne et due forme. Chakib Khiyari penche évidemment pour la première option, plus facile à mettre en place et qui pourrait être une source de revenus non négligeable. Sachant que l’Etat marocain, à travers une régie ou un organisme dédié, agirait comme l’unique donneur d’ordre et acheteur

elle génère une économie qui crée de l’emploi, de la valeur ajoutée et des devises. Le Maroc gagnerait à s’inspirer des expériences étrangères de certains pays qui ont légalisé le cannabis, tels que la Suisse, la Hollande ou l’Autriche. Malgré les efforts pour lutter efficace- ment contre cette culture, le Maroc est toujours considéré comme le premier producteur et le premier exportateur mondial de cannabis.

«Soit le kif pro- fite à tous les Marocains en léga- lisant les appli- cations médicales et industrielles, soit on l’interdit en bonne et due forme».

pour les paysans, avec un prix garanti. Ce qui leur permettra de sortir des griffes des trafiquants.

Rappelons au passage que la culture du kif était une activité légale, et sa consommation aussi, et cela jusqu’à la fin des années 30. Une bonne partie des fumeurs marocains à l’époque utilisait leurs «sebsis» au vu et au su de tout le monde. C’était aussi une façon de résister pour boycotter les cigarettes fabriquées par la Régies des tabacs, considérée, comme un produit qui fait l’éloge du colonisateur. C’est l’administration française qui a décidé de l’interdire sous prétexte que c’était une drogue. Et, depuis cette date, le cannabis est deve- nu un produit prohibé. Pour le plus grand bonheur des «barons». 

Un large débat national s’impose Un large débat et un consensus national s’imposent sur la question de la légalisation. Il serait sou- haitable d’inviter des experts, des penseurs, des sociologues, des hommes politiques et aussi des responsables de la société civile pour imaginer des solutions viables pour la filière cannabis au Maroc. Il est nécessaire aussi de lancer des études pour recueillir des données fiables. Car, même si la culture du cannabis est une activité souterraine,

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