Cannabis

ENQUÊTE CANNABIS

…/…

de la culture du kif. Et cela, même si, ici, le haschich est bon marché et dépasse rarement les 2.000 DH par kilo. A Ketama, c’est au moins 10.000 dirhams le kilo. Ce qui est sûr, c’est que l’argent du kif a permis de hausser le niveau de vie de la population». En plus, souligne-t-il, «les gens qui luttent contre le kif sont mal payés. Ils ne touchent que 100 DH par jour, alors que l’Union européenne verse plus de 500 DH par jour». A Ghafsaï, le kif est venu donc combler un grand déficit de développement, et a permis à des familles entières de sortir de la misère. C’est quand même triste pour cette ville qui a produit au fil des ans de nombreux intellectuels, professeurs, scientifiques etc… Dans la province de Larache, le kif résiste

«Nous sommes tout près du barrage El Wahda, et pourtant nous manquons d’eau. Ce sont les terres situées en aval du barrage qui en profitent le plus, notamment les plaines du Gharb», poursuit-il, entre deux bouffées. Selon Rachid, c’est cette marginalisation et la pauvreté qui en découle qui ont constitué un terreau fertile pour l’ap- parition du cannabis à Ghafsaï, alors qu’auparavant, cette culture était cantonnée à Ketama. «Aujourd’hui, les gens ont plus de pouvoir d’achat, vont au souk, achètent de la viande, construisent en dur», indique notre interlocuteur. Après le printemps arabe, les autorités ont fait preuve de beaucoup de laxisme en matière de lutte contre

le cannabis. Au point que les paysans des douars environnants ne s’en cachaient même plus; les champs de cannabis fleu- rissaient jusqu’en bordure des routes. Mais cette année, le Makhzen est revenu à la charge avec une virulente campagne anti- kif : confiscation de biens, arrestations des paysans, etc.... En ces temps de labour, la pression est grande sur les paysans. Au point que certains d’entre eux emblavent leur parcelle de terre la nuit, à l’aide de lampes torches, pour ne pas être pris en flagrant délit.

Certains pay- sans emblavent leur parcelle de terre la nuit, à l’aide de lampes torches, pour ne pas être pris en flagrant délit.

Après Ghafsaï, notre voyage nous mène à Douar Lhssan, à 5 kilomètre de Moulay Abdesslam Ben Mchich, dans la commune rurale de Tazrout, Caïdat de la tribu des Beni Arouss, une tribu jbala d’origine amazighe, dans la province de Larache. La commune de Tazrout se situe à la fron- tière des provinces de Tétouan, Larache et

Chefchaouen. Le kif est apparu dans cette région vers la fin des années 80. Le mimétisme avec Ketama, et l’appât du gain, expliquent la percée du kif dans cette contrée, en plus des problèmes d’isolement de certains douars. «Mais la culture du kif ne produit pas de bons résultats

Rachid reste cependant dubitatif quant à l’efficacité de cette politique répressive : «il y a des zones difficiles d’ac- cès où la lutte est impossible. Par ailleurs, les gens se sont habitués rapidement à un mode de vie qui tourne autour

4 I FINANCES NEWS HEBDO [ ENQUÊTE ]

Made with FlippingBook flipbook maker