Découvrez le numéro 981 de Finances News Hebdo, premier hebdomadaire de l'information financière au Maroc
Du 12 Juin 2025 - 8 DH - N° 1199
Directeur de la publication : Fatima Ouriaghli PREMIER HEBDOMADAIRE DE L'INFORMATION FINANCIÈRE AU MAROC
Politique gouvernementale «L'Etat social est un slogan trompeur»
Salon Auto Occasion Acheter une voiture sans se faire rouler P. 17
P.28 à 32
Entretien avec Nabil Benabdellah, SG du PPS
COMMERCE EXTÉRIEUR
Où se cache vraiment le potentiel de croissance ?
P. 18/19
Partenariat stratégique Rabat et Londres changent d’échelle
«L’imbrication peut générer des externalités positives …» Informel-Formel
Prix des médicaments Les enjeux de la réforme
P.13 à 16
P.26/27
P. 20 à 22
Hassan Edman, professeur d’économie et gestion
Dépôt légal : 157/98 ISSN : 1114-047 - Dossier de presse : 24/98 - Adresse : 83, Bd El Massira El Khadra, Casablanca - Tél. : (0522) 98.41.64/66 - Fax : (0522) 98.40.22 - Adresse web : www.fnh.ma
SOMMAIRE
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
4 5 ACTUALITÉ
24 L'UNIVERS DES TPME
Editorial
Entretien avec Jalal Asfaj : Ranket, «La startup marocaine qui bouscule les codes du SEO»
Voyons voir : Gaza : Un bateau contre l’oubli Ça se passe au Maroc
BOURSE & FINANCES
Point Bourse Hebdo : Le Masi au plus haut et tou- jours en maîtrise Entretien avec Adel El Aroussi : Marché financier , Le dépositaire, pilier stratégique dans l’essor des fonds alternatifs Visa Fintech Day 2025 : L'intelligence artificielle, moteur de la transformation financière
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Fatima Ouriaghli Directeur général, Responsable de la publication
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C Le silence des agneaux
POLITIQUE
ette année, l’Aïd Al-Adha a été calme. Les rues étaient propres et sans fumée, les couteaux dans les tiroirs et les congélateurs vides. Car le Roi en avait décidé ainsi, en ces termes limpides : «Nous invitons notre cher peuple à s’abstenir d’accomplir le rite du sacrifice de l’Aïd de cette année». Sage décision. Car entre la sécheresse prolongée, la flambée des prix, le stress hydrique et l’état déplorable du
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Partenariat stratégique : Rabat et Londres changent d’échelle Entretien avec Nabil Benabdellah : Politique gouvernementale, «L'Etat social est un slogan trompeur» Sahara marocain : Le Polisario, une fiction séparatiste entretenue par l’Algérie
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cheptel national, il fallait faire un choix. Et ce choix fut celui de la pré- servation. Préserver ce qui restait du cheptel. Mais en ne restant pas les bras croisés. C’est pourquoi le gouvernement, sur hautes instructions royales, a sorti l’artillerie lourde. Mardi, devant les députés, le ministre de tutelle Ahmed El Bouari a détaillé le plan de soutien taillé sur- mesure pour le monde rural. Trois milliards de dirhams d’ici fin 2025 pour res- tructurer les dettes d’éleveurs exsangues, subventionner l’alimentation animale, identifier les femelles reproductrices (avec une prime de 400 dirhams pour chacune !), vacciner massivement contre les maladies causées par les conséquences de la sécheresse et améliorer la géné- tique des troupeaux. Et rebelote en 2026 avec 3,2 milliards de dirhams supplémentaires pour ceux qui auront bien gardé leurs précieuses brebis. En parallèle, orge et aliments composés seront subventionnés. L’orge à 1,50 dirham le kilo et les granulés à 2 dirhams. Dans les cam- pagnes, cette mesure fait figure de véritable bouffée d’herbe fraîche. Dès lors, il faut voir en l’appel du Souverain à ne pas procéder au sacri- fice cette année une volonté ferme de passer du curatif au préventif. Plutôt que de faire face à des coûts du mouton excessifs, on se prépare à un futur plus clément en préservant le cheptel pour avoir moins de tensions sur les prix à l’avenir. Bien évidemment, sur le plan purement économique, cela a un coût, d’autant que l’Aïd Al-Adha, c’est habituelle- ment plus de 18 milliards de dirhams de transactions, une manne provi- dentielle pour le monde rural et des milliers d’emplois temporaires. L’Aïd Al-Adha est surtout un rituel qui, bien au-delà de sa signification reli- gieuse, rythme la vie sociale et économique du Royaume. Pour autant, convenons que dans le contexte inflationniste actuel, ne pas sacrifier un mouton cette année aura été un soulagement pour beaucoup de familles marocaines. Surtout que, selon le haut-commissariat au Plan, l’Aïd représente jusqu’à 30% du budget viande annuel des ménages. Mais dans ce grand effort collectif demandé par le Souverain, il y aurait eu comme une fausse note, certains ayant cru bon de sacrifier coûte que coûte à la tradition. Deux walis auraient commis… un crime de lèse- majesté en procédant quand même au sacrifice. Excès de zèle ? Piété mal placée ? Faute morale ? Toujours est-il qu’ils auraient été, selon plusieurs sources médiatiques, démis de leurs fonctions. C’est que la monarchie, lorsqu’elle fait un geste fort, attend que l’appa- reil d’Etat suive. Sans tergiversations. Quand le Roi privilégie la dura- bilité, c’est un investissement pour le futur. Et ce n’est sans doute pas pour que d’autres fassent fi de ses consignes. u
ECONOMIE
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Informel-formel : Une hybridation cachée, mais présente Entretien avec Hassan Edman : Informel-Formel, «L’imbrication peut générer des externalités posi- tives si elle est bien encadrée» Salon Auto Occasion : Acheter une voiture sans se faire rouler Commerce extérieur : Où se cache vraiment le potentiel de croissance ? Entretien avec Abdelmadjid Belaïche : Réforme du prix des médicaments, «Le nouveau système proposé tranche radicalement avec celui en vigueur depuis 2014» Entretien avec Youssef Housni : Immobilier, «Daam Sakane s’accélérera en 2026»
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5 juin, Journée mondiale de l’environnement : Le médecin face à l’urgence écologique, un appel pour la protection de la santé
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35 HIGH-TECH
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TikTok et Instagram : Les nouvelles vitrines du com- merce informel au Maroc
Transition énergétique : Pourquoi le Maroc mise sur l’hydrogène vert 36 DEVELOPPEMENT DURABLE
• Directeur des rédactions & Développement : David William • Journalistes : Charaf Jaidani, Leïla Ouriaghli, Adil Hlimi, Youssef Seddik, Khalid Aourmi, Ibtissam Zerrouk, Désy Mbakou • Révision : M. Labdaouat • Directeur technique & maquettiste : Abdelillah Chamseddine • Mise en page : Zakaria Beladal
• Assistantes de direction : Amina Khchai • Département commercial : Samira Lakbiri, Rania Benchaib • Administratif : Fatiha Aït Allah • Édition : JMA CONSEIL • Impression : Maroc Soir • Distribution : Sochpress • Tirage 5.000 exemplaires • Dépôt légal : 157/98 • ISSN : 1114-047 • Dossier de presse : 24/98 • N° Commission paritaire : H.F/02-05 • S.A.R.L. au capital de 5.000.000,00 DH - C.N.S.S. 600 50 62 I.F. 1022303 - Patente 35770001 - ICE N° : 001526693000021
• Directeur Général responsable de la Publication : Fatima OURIAGHLI Contact : redactionfnh@gmail.com
VOYONS VOIR
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
Gaza
Un bateau contre l’oubli
morts palestiniens, des centaines de milliers de déplacés, des enfants affamés et des hôpitaux à l’agonie. L’OMS a, une fois de plus, tiré la sonnette d’alarme : l’hôpital Al-Amal est «prati- quement hors service», tandis que le complexe Nasser est le dernier îlot de survie en soins intensifs. Une situation que les Nations unies n’hésitent plus à qualifier de possible «géno- cide». Le mot est lâché. Navi Pillay, présidente de la commission d’enquête de l’ONU, parle «d’extermination». Rien de moins. Dans un de ses rapports les plus accablants, la commission accuse Israël non seulement de crimes de guerre, mais de porter atteinte à l’iden- tité collective d’un peuple tout entier. La solution à deux Etats A l’international, les signaux se multiplient. Une caravane partie de Tunisie, via la Libye, entend rallier Gaza avec 1.500 personnes à bord de bus
et de véhicules. Pas pour livrer de l’aide huma- nitaire, mais pour témoigner, «symboliquement», de leur solidarité. Côté diplomatique, Mahmoud Abbas, en perte de vitesse, tente un ultime come-back. Il a écrit à Emmanuel Macron et au prince héritier saou- dien, Mohammed ben Salmane. Il condamne l’attaque du Hamas du 7 octobre 2023, accepte la démilitarisation du mouvement et promet des élections. A 89 ans, le président de l’Autorité palestinienne se positionne donc en homme pro- videntiel pour les chancelleries occidentales en quête d’interlocuteur légitime. Paris, bien évidemment, salue ces engagements «inédits» qui confortent «la mise en œuvre de la solution à deux Etats». Et Macron, qui veut bien reconnaître un Etat palestinien en espérant que cela fasse boule de neige, table sur la conférence internationale qui s’ouvrira le 18 juin à New York pour se faire entendre. Placée sous l’égide des Nations Unies et co-présidée par la France et l’Arabie saoudite, elle pourrait marquer un tour- nant décisif dans le conflit israélo-palestinien. Ou se résumer en une énième rencontre où les diri- geants vont parader pour délivrer des discours cosmétiques. Discours qui ne mettront point fin à cette guerre et à l’extermination méthodique et ignoble du peuple palestinien entreprise par Israël. ◆ oui , je souhaite m’abonner à cette offre spéciale pour 1 an BULLETIN D’ABONNEMENT Mon abonnement comprend : ❑ 48 numéros Finances News hebdo & 2 numéros du Hors-série. Voici mes coordonnées : ❑ M ❑ Mme ❑ Mlle Nom/Prénom : ................................................................................... Adresse : ............................................................................................ Ville : ............................. Code Postal : ............................................ Tél : ........................................ Fax : ................................................. E-mail : ............................................................................................. Mon règlement ci-joint par : ❑ Chèque bancaire ou virement bancaire à l’ordre de JMA Conseil : Banque Populaire, Agence Abdelmoumen, Compte N° 21211 580 5678 0006-Casablanca - (Maroc)
L e Madleen, navire symbolique affrété pour briser le blocus de Gaza, n’aura pas atteint les côtes palestiniennes. Intercepté lundi à 185 kilomètres de la bande de Gaza par la marine israélienne, le bateau a été dérouté et ses passagers arrêtés, suscitant une indignation internationale. Parmi les passagers : des militants des droits humains, l'eurodéputée franco-palestinienne de gauche, Rima Hassan, ou encore la Suédoise Greta Thunberg. Autant dire que ce n’était pas une banale croisière. Ils sont partis d’Italie pour rallier donc une zone d’apocalypse humanitaire. Mais à défaut d’atteindre Gaza, ils auront atteint leur objectif symbolique : rappeler que l’oubli est une forme de complicité. Par D. William
En France, l’affaire a relancé les passions. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a dénoncé des «manœuvres de désin- formation» de certains responsables politiques, tandis que Jean-Luc Mélenchon accusait la diplomatie française d’une «nullité» sans nom. Au-delà du retentissement médiatique de cette initiative, il y a une réalité que l’on ne peut taire : Gaza continue de sombrer, avec plus de 54.000
La conférence internationale de New York pourrait se résumer en une énième rencontre où les dirigeants vont parader pour délivrer des discours cosmétiques.
ÇA SE PASSE AU MAROC
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
Barrages à usage agricole
Tanger Med
Lancement de l’opération «Marhaba 2025»
Un taux de remplissage de 37%
L es retenues des barrages à usage agricole ont atteint 5,2 milliards de m³ cette campagne, soit un taux de remplissage de 37%, contre 30% l’an dernier, a indiqué le ministre Ahmed El Bouari au Parlement. Après des pluies précoces en octobre, un défi- cit pluviométrique a touché le pays de novembre à février,
L’ opération «Marhaba 2 0 2 5 » d’accueil des MRE a été lancée mardi au port Tanger Med. Supervisée par la Fondation Mohammed V pour la solidarité, cette 25è édition mobi- lise un important
avant une nette amélioration dès mars grâce à des précipitations abondantes et des chutes de neige. Au 5 juin, le cumul pluviométrique s’élève à 302 mm, en baisse de 23% par rapport à la moyenne sur 30 ans, mais en hausse de 14% sur un an. El Bouari a affirmé que cette amélioration a ravivé l’espoir chez les agriculteurs d’un retour à un cycle de saisons pluvieuses, après plusieurs années de sécheresse. En outre, le ministre a mis en avant la nette amélioration du couvert végétal qui s’est densifié, boostant les rendements des cultures d’automne et printanières, tout en améliorant l’état du cheptel affecté par la sécheresse. ■
dispositif d’assistance sociale et médicale pour accompagner les Marocains de l’étranger durant leur retour au pays. Elle couvre 26 sites d’accueil, dont deux nouveaux à Laâyoune et Dakhla. Vingt espaces sont répartis sur les ports, aéroports et postes frontaliers du Royaume, et six en Europe. Plus de 1.200 personnes sont mobilisées pour faciliter les démarches administratives et douanières. L’opération se déroule du 10 juin au 15 septembre, avec un accent sur l’humanisme et la qualité d’accueil. ■
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Une formule simple, souple, efficace et rapide pour vos financements
L’Assemblée Générale Ordinaire d’Africa First Assist, a été tenue le 30 Mai 2025, sous la présidence de Monsieur Yahia CHRAIBI, en sa qualité de Président de l’Assemblée Générale. Après avoir passé en revue l’activité de la société durant l’année 2024, l’Assemblée Générale, à titre ordinaire, a approuvé le rapport de gestion du Conseil d’Administration et les rapports des commissaires aux comptes et a donné quitus aux Administrateurs et aux commissaires aux comptes pour l’exécution de leur mandat au titre de l’exercice 2024. L’Assemblée Générale, à titre ordinaire, a approuvé les états de synthèse de l’exercice 2024, tels qu’ils ont été arrêtés par le Conseil d’Administration du 28 Février 2025 et publiés le 28 Mars 2025.
Africa First Assist, Entreprise régie par la loi N°17-99 portant code des assurances. SA au capital de 50.000.000 Dh - RC Casablanca N°40.225 - IF : 1030998 - CNSS : 1038662 – TVA : 806364 Patente : 36100217 - Siège Social : Lot CIVIM, Route de l’aéroport QI. Sidi Maârouf - Casablanca .
BOURSE & FINANCES
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
Point Bourse Hebdo Le Masi au plus haut et toujours en maîtrise
Evolution de l'indice Masi depuis début juin 2024
N L’indice Masi inscrit un nouveau sommet record cette semaine, avec une capitalisation qui se rapproche du seuil des 1.000 milliards de dirhams. ouvelle semaine de progression pour le Masi, qui gagne 3,26% pour s’établir à 18.562,47 points. Depuis la mi-avril, le marché a effacé le stress douanier pro- voqué par les déclarations de Trump, et aligne les hausses sans forcer. Une seule semaine de repli sur près de deux mois, et un indice qui continue de construire son mouvement dans une logique claire : pas d’euphorie, mais des appuis solides. chiffres. Les résultats ne créent pas la surprise, mais valident les valorisations actuelles. Le marché récompense la visibilité. La méca- nique est simple : des fondamen- taux solides, des flux constants et une appétence toujours présente pour les dossiers de qualité. Par Y . Seddik
TOP Performances
FLOP Performances
Quant au contexte technique, il est lui aussi porteur. La période de détachement des dividendes, habituellement plus calme, agit cette fois comme catalyseur. Attijariwafa bank, avec près de 4 Mds de dirhams distribués, en est un bon exemple. Une partie de cette manne est en train d’être redéployée sur le marché. Par ailleurs, les OPCVM continuent d’alimenter la dynamique : plus de 6 Mds de dirhams collectés sur les fonds actions depuis le début de l’année. Sur le plan sectoriel, la hausse de la semaine a été portée par les com- partiments liés aux biens d’équi- pement industriels (+17,59%), aux services de transport (+8,24%) et à l’immobilier coté (+8,02%). À l’inverse, trois secteurs terminent dans le rouge : le papier (-2,89%),
Unimer Jet Contractors M2M Group
-4,07%
+26,99% +16,52%
Stroc Industrie Minière Touissit Fenie Brossette
-4,02%
-3,77%
+13,88%
En effet, l’environnement macro- économique reste favorable. La stabilité budgétaire, la dynamique d’investissement public et la rési- lience de la demande intérieure créent un socle robuste. Le Maroc conserve un profil macro soutenu et les investisseurs l’intègrent. Le marché obligataire, de son côté, confirme la détente : les taux sont contenus et le scénario d’une nouvelle baisse du taux directeur d’ici fin 2025 gagne en crédibilité. Côté entreprises, les publications du premier trimestre confortent la tendance. La majorité des sociétés cotées affiche une progression du chiffre d’affaires, souvent à deux
l’agro-industrie (-2,51%) et l’élec- tricité (-1,94%), pénalisée notam- ment par des prises de bénéfices sur Taqa Morocco. Du côté des valeurs, Stroc Industrie signe la plus forte hausse de la semaine avec +27%, suivie de Minière Touissit (+16,52%) et Fenie Brossette (+13,88%). Bank of Africa, en progression de 13,45%, bénéficie d’un regain d’intérêt institutionnel, tandis que Salafin gagne 13,2%. À l’inverse, Unimer, Jet Contractors, M2M Group, Med Paper et Managem affichent les plus fortes baisses, dans des pro- portions limitées, mais symptoma-
tiques d’un marché où la rotation sectorielle reste active. Les échanges ont atteint 2,6 mil- liards de dirhams, dominés par Marsa Maroc (13,87%), Alliances (11,31%) et BCP (9,36%). La capi- talisation du marché ressort à 973,4 Mds de dirhams. En bref, le mouvement reste sain, mais le marché garde un œil sur les opérations de capital atten- dues. Elles pourraient ponctuel- lement peser sur la liquidité. Pour l’instant, rien ne vient remettre en cause la tendance. Le Masi monte, mais garde les pieds sur terre. ◆
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
Marché financier Le dépositaire, pilier stratégique dans l’essor des fonds alternatifs
finalisation par le régulateur. Ce travail doctrinal a aussi permis d’identifier des points d’amélio- ration et d’émettre des recom- mandations à discuter avec les représentants des dépositaires et des fonds alternatifs. Nous mettons ce travail à la disposi- tion de toutes les parties pre- nantes pour avis. F. N. H. : Peut-on s’at- tendre à des mesures concrètes à l’issue de ce séminaire ? A. E. A. : Absolument. Le point d’orgue de ce séminaire a été l’annonce du lancement d’une feuille de route ambitieuse. Elle repose sur deux leviers struc- turants : la mise en place d’un cadre permanent de collabora- tion entre les dépositaires et les associations professionnelles du marché, et l’élaboration de guides pratiques co-construits avec les parties prenantes et enrichis par les retours d’ex- périence d’experts, nationaux et internationaux. L’objectif est clair : construire un cadre rigou- reux, sécurisé et adapté aux spécificités des fonds alterna- tifs. F. N. H. : Un mot sur la suite ? A. E. A. : Ce séminaire n’est qu’un point de départ. Il s’inscrit dans une démarche continue. Nous avons désormais l’ambi- tion de faire émerger un modèle marocain de référence, fondé sur la confiance, l’excellence et l’innovation. Un rendez-vous annuel sera instauré pour assu- rer un suivi des avancées, favo- riser la concertation continue et accompagner l’évolution de notre écosystème. ◆
À l’occasion du premier séminaire national dédié à la fonction dépositaire, organisé par CDG Capital, les acteurs du marché financier se sont penchés sur les transformations profondes que connaît ce métier aujourd’hui, au cœur des mutations des fonds dits alternatifs. Entretien avec Adel El Aroussi, directeur du Pôle services aux investisseurs chez CDG Capital.
Propos recueillis par A. Hlimi
Finances News Hebdo : Qu’est-ce qui a motivé l’organisation de ce pre- mier séminaire dédié au dépositaire au Maroc ? Adel El Aroussi : Nous avons souhaité, à travers ce séminaire, créer un espace de réflexion autour d’un métier longtemps perçu comme discret, mais dont le rôle stratégique s’af- firme avec d’autant plus de force dans le contexte actuel. Le dépositaire s’impose comme une pièce maîtresse du dévelop- pement d’un marché financier à la fois efficace, sécurisé et rési- lient. Ce rendez-vous intervient à un moment clé, marqué par la montée en puissance des fonds alternatifs au Maroc, notam- ment les OPCI, la titrisation et le capital-investissement. Il nous est apparu essentiel d’enga- ger une réflexion collective sur l’évolution de cette fonction afin qu’elle puisse pleinement accompagner cette dynamique.
F. N. H. : Concrètement, quels sont les défis que doit relever la fonction de dépositaire avec l’émer- gence des fonds alterna- tifs ? A. E. A. : Contrairement aux OPCVM, qui bénéficient par essence d’une infrastructure de conservation bien établie, les fonds alternatifs sont constitués d’actifs non financiers, tels que l’immobilier, actifs titrisables ou les participations dans des entreprises non cotées. Cela implique une adaptation de pos- ture pour les dépositaires : il ne s’agit pas uniquement d’assurer la conservation, mais de mettre en place des diligences spé- cifiques permettant de sécuri- ser les avoirs des investisseurs et de veiller au respect rigou- reux des règles définies dans la documentation juridique des fonds. Cette évolution néces-
site une transformation à la fois humaine, organisationnelle et technologique. Il en va de la crédibilité de l’écosystème et de la confiance des investisseurs. F. N. H. : Comment cette évolution est-elle enca- drée au niveau réglemen- taire ? Le Maroc est-il aligné avec les standards internationaux ? A. E. A. : Une note doctrinale a été diffusée à cette occa- sion aux professionnels. Elle dresse un état des lieux de la réglementation marocaine en la comparant aux cadres euro- péens, notamment français, luxembourgeois ou belge. Le constat est rassurant : la régle- mentation nationale est globa- lement en phase, et certaines missions spécifiques comme le dépôt dans le private equity ou la titrisation sont en cours de
Le dépositaire s’impose comme une pièce maîtresse du développement d’un marché financier à la fois efficace, sécurisé et résilient.
www.fnh.ma
SOCIÉTÉ ANONYME AU CAPITAL DE 221.916.300 DE DIRHAMS SIÈGE SOCIAL : 120-122, BD HASSAN II- CASABLANCA RC CASABLANCA 22 829 / IF : 108 48 66
AVIS DE CONVOCATION DES ACTIONNAIRES A L’ASSEMBLEE GENERALE ORDINAIRE DU 14 JUILLET 2025 A 10 HEURES
Les actionnaires de la société « AXA CREDIT » sont convoqués à l’Assemblée Générale Ordinaire qui se tiendra le 14 juillet 2025 à 10 heures, au siège social de la société, à l’effet de délibérer sur l’ordre du jour suivant :
1. Approbation et ratification de la convocation ; 2. Autorisation des émissions obligataires ; 3. Délégation par l’Assemblée Générale Ordinaire au Conseil d’Administration, avec faculté de subdélégation au Président du Conseil d’Administration des pouvoirs nécessaires pour procéder aux émissions et en arrêter les modalités ; 4. Pouvoirs pour accomplir les formalités légales.
A cet égard, les documents prévus par la loi et les règlements applicables en vigueur seront mis à la disposition des actionnaires au siège social de la société.
Toute demande d’inscription de projets de résolutions à l’ordre du jour doit être adressée au siège social de la société par lettre recommandée avec accusé de réception dans le délai de dix (10) jours à compter de la publication de l’avis de convocation (mention de ce délai étant portée dans ledit avis).
Un actionnaire ne peut se faire représenter que par son conjoint, un ascendant, descendant ou par un autre actionnaire justifiant d’un mandat.
Le Conseil d’Administration
PROJET DES RESOLUTIONS A L’ASSEMBLEE GENERALE ORDINAIRE DU 14 JUILLET 2025 A 10 HEURES
PREMIERE RESOLUTION
TROISIEME RESOLUTION
L’Assemblée approuve et ratifie la convocation qui lui a été faite dans toutes ses modalités et la considère valable dans tous ses effets.
L’Assemblée délègue, en vertu de l’article 294 de la loi n°17-95 relative aux sociétés anonymes (Dahir n°1-96-124 (RABII II 1417)), telle que modifiée et complétée par les lois n°81-99, n°23-01, n°20-05, n°78-12, au Conseil d’Administration, avec faculté de subdéléguer au Président du Conseil d’Administration de la Société, ou à toute personne désignée par lui, les pouvoirs nécessaires à l’effet de : a) Procéder, sur ses seules décisions, aux époques, conditions et selon les modalités qu’il jugera convenables, aux émissions obligataires telles que autorisées par la présente Assemblée ; b) Arrêter la nature et l’ensemble des modalités et caractéristiques de chacune de ces émissions et notamment déterminer les dates d’émission des obligations, décliner l’emprunt obligataire en plusieurs tranches et sous-tâches, arrêter le montant du nominal individuel des obligations, fixer la date de souscription, fixer la date de règlement et signer le contrat d’émission, limiter le montant de l’émission aux souscriptions effectivement reçues, fixer la date de souscription et de jouissance des titres à émettre, fixer le taux d’intérêt des obligations et les modalités de paiement des intérêts, fixer le prix et les modalités de remboursement des obligations et fixer les modalités dans lesquelles sera assurée la préservation des droits des obligataires et ce en conformité avec les dispositions légales et réglementaires applicables et notamment désigner le mandataire provisoire en qualité de représentant la masse des obligataires ; c) D’une manière générale, conclure toutes les conventions, prendre toutes les dispositions et remplir toutes les formalités requises, et généralement, faire tout ce qui sera nécessaire à la réalisation des opérations autorisées ci-dessus en deuxième résolution.
DEUXIEME RESOLUTION
L’Assemblée prend connaissance de la mise en place proposée d’une opération d’émission obligataire par la voie de placement privé et pendant une période de 1 an à compter de la présente Assemblée dont les conditions principales sont les suivantes :
Montant maximum en principal de l’Emission Obligataire
Terme / échéance de remboursement
Taux d’intérêt
Entre 5,4% et 5,7%
115.000.000 MAD
10 ans
Cette émission sera soumise à l’autorisation de Bank Al-Maghrib ainsi que l’autorisation de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC). L’Assemblée prend ensuite connaissance de la mise en place proposée d’une opération d’émission obligataire par la voie de placement privé et pendant une période de 1 an à compter de la présente Assemblée dont les conditions principales sont les suivantes :
Montant maximum en principal de l’Emission Obligataire
Terme / échéance de remboursement
Taux d’intérêt
Inférieur ou égal à 5,75%
16.000.000 MAD
Durée illimitée
Cette émission sera soumise à l’autorisation de Bank Al-Maghrib ainsi que l’autorisation de l’Autorité Marocaine du Marché des Capitaux (AMMC). Après avoir pris connaissance de chacune de ces opérations et échangé sur leurs modalités respectives, l’Assemblée autorise les opérations d’émissions obligataires tel que présentées.
QUATRIEME RESOLUTION
Tous pouvoirs sont conférés au porteur d’une copie ou d’un extrait certifié conforme tout procès-verbal de la présente Assemblée pour effectuer les formalités prévues par la loi et les règlements applicables en vigueur.
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 12 JUIN 2025
Visa Fintech Day 2025 L'intelligence artificielle, moteur de la transformation financière
qu’en collaborant tous ensemble que nous pourrons construire un modèle marocain de FinTech inclusif et intelligent» , note-t-elle. Pour sa part, la vice-présidente exécutive de Visa pour l’Afrique du Nord, le Levant et le Pakistan, Leila Serhan, a salué les avan- cées du Maroc tout en réaffir- mant l’ancrage de Visa dans le tissu fintech local. «C’est intéressant de voir com- ment la vision de Visa pour les FinTechs justement s'est développée au Maroc. (...) L’importance du Maroc pour Visa et pour l’écosystème FinTech se solidifie d’année en année», affirme-t-elle. Elle a rappelé que Visa avait lancé en 2023 le Visa Africa Fintech Accelerator, avec un passage remarqué à Marrakech lors du Gitex Africa. À travers ce programme, Visa soutient acti- vement des startups du conti- nent. Deux d’entre elles ont été mises en lumière lors de cette édition : «Une FinTech tunisienne, Connect, spécialisée dans les services de paiement, et une FinTech marocaine, Paetique, qui est parmi nous aujourd’hui». Une autre startup marocaine bien connue, Charri, également pré- sente à l’événement, a été citée comme exemple de collaboration réussie avec Visa. Dans une séquence très didac- tique, Leila Serhan a repris les cas d’usage cités par la ministre pour montrer comment l’intelli- gence artificielle permet de sur- monter les freins structurels à l’inclusion financière. «Beaucoup de populations n’ont toujours pas accès aux services financiers. L’intelligence artificielle peut combler ces lacunes, améliorer la sécurité, personnaliser les ser- vices et développer des solutions de paiement accessibles à tous» , a-t-elle ajouté. «Visa était peut-être la première FinTech du monde, fondée dans les années 60 sur l’idée que la technologie pouvait démocrati- ser l’accès à la finance. Nous sommes impatients de soute- nir les futurs acteurs, les futurs FinTechs… et peut-être les futurs Visa» , conclut-elle. ◆
Organisé en partenariat avec le ministère de la Transition numérique, l’Agence de développement du digital (ADD), l’UM6P, le Technopark et le Morocco Fintech Center, la deuxième édition du Visa Fintech Day a réuni des acteurs clés de la finance, de la technologie et de l’entrepreneuriat autour d’un thème central : «Intelligence artificielle et inclusion financière: transformer les FinTechs». Par K. A.
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ans une conjoncture où les muta- tions numériques s'accélèrent, cet événement a servi de plate- forme de convergence pour les décideurs publics, les porteurs de projets innovants, les institu- tions financières et les experts du numérique. Il s’est inscrit dans une continuité stratégique, qui illustre les efforts conjoints déployés par les acteurs natio- naux et internationaux pour faire émerger un écosystème fintech structuré, agile et inclusif. Prenant la parole à l’ouverture, Amal Fellah Seghrouchni, ministre déléguée chargée de la Transition numé- rique et de la Réforme de l’Admi- nistration, a ancré son interven- tion dans la vision royale expri- mée dès 2018 : «L’Afrique est en
passe de devenir un laboratoire du monde numérique» , a-t-elle rappelé, citant un discours du Roi Mohammed VI. Elle a poursuivi : «Le digital est en train de changer le visage de notre continent, porté par une jeunesse inventive, créative et audacieuse» . La ministre a souli- gné l'engagement de son dépar- tement dans la structuration d’un écosystème national robuste, propice à l'innovation financière. Elle a mis en avant le rôle central du Morocco Fintech Center, lancé en janvier 2025, comme levier de soutien aux jeunes pousses marocaines. «Ce centre est un guichet unique dédié au ser- vice des FinTechs marocaines. Il propose un accompagnement
complet, comprenant l'incuba- tion, l'orientation règlementaire, l'accès au financement ainsi que le développement des compé- tences», a-t-elle indiqué. Dans la même dynamique, le ministère a déployé l’initiative Offre Start-Up Maroc, conçue pour accompagner les startups à tous les stades de leur déve- loppement. Ce dispositif com- prend des financements non dilu- tifs, allant de la bourse de vie au prêt d’amorçage. «L’objectif est de permettre aux startups à fort potentiel, notamment celles qui développent des solutions IA appliquées à la finance, de se positionner avantageusement sur le marché», souligne Seghrouchni.
L’IA, catalyseur de transformation
Tout au long de son intervention, la ministre a insisté sur la puis- sance transformatrice de l’intelli- gence artificielle dans le secteur financier : «L’intelligence artifi- cielle permet d’automatiser des processus coûteux, de réduire les erreurs humaines, d’améliorer la gestion des risques, de prévenir les fraudes et de personnaliser les services» . Elle a également souligné que l’IA, en croisant les données massives issues des transactions, constitue un atout stratégique pour affiner les ana- lyses, anticiper les tendances de marché et créer de nouveaux modèles économiques. «Ce n’est
Le marché mondial de l'intelligence artificielle dans la Fintech a été estimé à 22,5 mil- liards de dollars US en 2023 et devrait atteindre 79,4 milliards de dollars d'ici 2030, avec un TCAC de 19,8% de 2023 à 2030.
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précarité du travail, du dum- ping social, et une concurrence déséquilibrée pour les petites entreprises formelles. La majo- rité des unités informelles échappe à toute couverture sociale, à la fiscalité profes- sionnelle, et ne respecte ni les normes sanitaires ni les stan- dards environnementaux. Ces unités sont devenues pourtant des maillons essentiels dans des filières structurées. La question se pose alors : faut- il formaliser à tout prix ou recon- naître l’existence d’un entre- deux économique, et adapter la régulation en conséquence ? Les dispositifs actuels comme le statut d’auto-entrepreneur ou la contribution profession- nelle unique peinent à capter la diversité des acteurs informels, notamment les plus petits, sans local fixe, souvent sans capital ni capacité d’enregistrement. Pour Edman, «le Maroc gagne- rait à concevoir des méca- nismes souples d’insertion partielle : un ‘statut d’activité occasionnelle’, une plateforme de contrats simplifiés entre entreprises formelles et pres- tataires informels, ou des inci- tations fiscales ciblées pour encourager l’enregistrement progressif. Le risque, à terme, serait de laisser prospérer une économie duale, où coexistent deux régimes concurrents mais déséquilibrés». Car si l’informel continue de représenter près de 14% de la valeur ajoutée nationale hors agriculture, il ne bénéficie pas d’un cadre propice à sa mon- tée en gamme. L’absence d’ac- cès au crédit bancaire (97,9% des unités), aux infrastructures numériques, ou à la commande publique empêche toute conso- lidation. L’hybridation actuelle ne fait que masquer cette fra- gilité. Le Maroc est donc face à un dilemme stratégique : ignorer ces zones grises, au risque d’enraciner les inégalités éco- nomiques, ou inventer un cadre innovant pour accompagner une transition progressive, dif- férenciée selon les secteurs. ◆
Les dispositifs actuels comme le statut d’auto-entrepreneur ou la contribution professionnelle unique peinent à capter la diversité des acteurs informels.
Informel-formel Une hybridation cachée, mais présente Les derniers chiffres du haut-commissariat au Plan révèlent une montée significative des échanges entre le secteur informel et les unités de production formelles au Maroc. Cette hybridation représenterait-elle un levier de transformation positive ou un risque pour l’économie marocaine ?
L
Par Désy M.
e secteur informel marocain reste d’une ampleur consi- dérable avec plus de 2 mil- lions d’unités de production, représentant environ 33% de l’emploi non agricole. Mais une lecture attentive des dernières données du haut-commissariat au Plan (HCP) révèle une évo- lution moins visible : l’interpé- nétration croissante entre les sphères informelle et formelle. En 2023, 33,7% des approvi- sionnements des unités infor- melles provenaient d’entre- prises formelles, contre 18,2% en 2014. De même, les ventes du secteur informel au secteur formel, bien que modestes, ont quintuplé sur la même période, passant de 0,5% à 2,4%. «L’informel ne se limite donc plus à un marché de survie ou à un sous-système économique marginal. Il s’insère progressi- vement dans des chaînes de
réel dans celui du transport de marchandises, où des flottes de véhicules non immatricu- lés à titre professionnel sont mobilisées par des structures formelles, notamment dans les circuits courts urbains. Le commerce de détail, souvent dominé par l’informel, devient également un canal de distri- bution pour des produits issus d’industries déclarées. Ce phénomène, à la frontière de la régularité, interroge. Car derrière cette coopération dis- crète, se cachent des distor- sions majeures, à savoir une perte fiscale pour l’État, une
valeur partagées, à la fois four- nisseur et sous-traitant discret, d’un secteur formel qui y trouve un levier de flexibilité, de réduc- tion des coûts ou de proxi- mité» , déclare Hassan Edman, professeur d’économie et ges- tion à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales d’Agadir. Dans le secteur du BTP, par exemple, cette hybridation est flagrante. Une entreprise for- melle de second œuvre peut sous-traiter ponctuellement à des artisans informels pour des travaux de peinture ou d’élec- tricité. Le constat est tout aussi
L’informel s’insère progressivement dans des chaînes de valeur partagées, à la fois fournisseur et sous-traitant discret, d’un secteur formel qui y trouve un levier de flexibilité, de réduction des coûts ou de proximité.
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Informel-Formel «L’imbrication peut générer des externalités positives si elle est bien encadrée»
amplifie des tensions si le cadre formel n'évolue pas au même rythme que les attentes du mar- ché et des acteurs économiques, creusant la fracture entre une éco- nomie formelle rigide et une éco- nomie informelle non régulée. F. N. H. : Pensez-vous que cette relation croissante entre formel et informel crée un cercle vertueux pour l'économie marocaine, ou au contraire, entretient une dualité structurelle néfaste ? H. E. : Oui, il est tout à fait légi- time de poser une telle question et d’ouvrir le débat sur la nature fondamentale et non pas appa- rente de la relation entre le formel et l’informel. Est-elle un levier de transformation positive ou une forme de déséquilibre ou d’équi- libre dysfonctionnel ? En d’autres termes, faut -il éradiquer l’informel ou l’institutionnaliser et l’intégrer dans les chaînes formelles, tout en gardant ses forces ? Bien que ses effets néfastes soient palpables, l’imbrication, et c’est le mot le plus précis, croissante du secteur informel dans les chaînes formelles peut générer des exter- nalités positives, si elle est bien encadrée, notamment pour pallier les défaillances institutionnelles, celles de la politique économique de l’Etat, et du système écono- mique formel. En effet, l’adapta- bilité et la flexibilité de l’informel serviront pour de grandes choses dans ce sens. De l’autre côté, l'économie infor- melle offre une voie de contourne- ment des pratiques frauduleuses du secteur formel, tant en termes de fiabilité comptable qu’en matière d’emploi. Cependant, cette relation tout à fait naturelle,
A en croire les chiffres du HCP, l’informel ne fonctionne plus en vase clos, mais devient un rouage périphérique du système économique formel, soulevant des enjeux majeurs de régulation, de concurrence et de justice fiscale. Entretien avec Hassan Edman, professeur d’économie et gestion à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales d’Agadir.
Propos recueillis par Désy M.
Finances News Hebdo : Comment interprétez-vous l’augmentation des échanges entre unités formelles et informelles ? S'agit-il d'une intégration économique naturelle ou d’une réponse à une rigidité du cadre for- mel ? Hassan Edman : Cadrons d'abord cette notion d’«économie informelle». Selon le Bureau inter- national du travail (BIT) et le haut- commissariat au Plan (HCP), le «secteur informel» comprend toute activité et tout emploi non observés ou non comptabilisés, englobant les unités de produc- tion informelles et l'emploi infor- mel (même dans le secteur for- mel). Les frontières entre formel et informel ne sont pas totalement étanches. Nous retenons ici le concept du HCP qui exclut les activités souterraines, illégales, illicites et agricoles. L'évaluation de l'intégration du secteur informel dans l'écono- mie formelle nécessite d’exami- ner l'origine des intrants et les débouchés de sa production. En 2023, selon le rapport de la der- nière enquête du HCP, le secteur informel s'approvisionne principa-
lement auprès de lui-même (57%), en baisse par rapport à 2014 (70,9%), tandis que le secteur formel fournit désormais 33,7% des approvisionnements des uni- tés informelles. La production informelle reste essentiellement destinée à la consommation des ménages (79,5% en 2023, contre 77,8% en 2014), tandis que les ventes au secteur formel restent limitées (2,4%) mais progressent, alors que les échanges internes au secteur informel diminuent (17,7%) et les ventes au secteur public sont négligeables. Les échanges entre secteurs for- mel et informel ne résultent pas uniquement d'une réponse à la rigidité du cadre formel, mais aussi d'une dynamique naturelle découlant d'une complémentarité indispensable entre les deux sec- teurs. Il est normal que le sec- teur informel s'approvisionne ou écoule sa production auprès du
secteur formel et inversement. Le commerce (47% des unités de production informelles) et les ser- vices (28,3% en 2023) dominent ce secteur selon le HCP. Ces acti- vités se procurent leurs consom- mables et matières premières auprès de fournisseurs formels, voire institutionnels, telles que les sociétés régionales multi-services pour l'eau et l'électricité. Il exis- tera donc toujours un lien et une dépendance économique naturels entre les secteurs formel et infor- mel. Cependant, il faut le rappeler, des opérateurs structurés cherchent à contourner les obstacles structu- rels et institutionnels du cadre for- mel, surtout ceux qui alourdissent ses coûts de revient et réduisent sa compétitivité, en privilégiant de bénéficier officieusement de la flexibilité et des coûts réduits de l'informel. Cette relation, parfois souterraine et frauduleuse, crée et
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comme mentionné précédemment, peut encourager les unités de produc- tion informelles à adopter des com- portements plus organisés et des pra- tiques de gestion et de marché mieux alignées sur les normes et les canaux formels et institutionnels. Par exemple, quand votre fournisseur, client, assu- reur ou financeur vous impose des for- malités officielles, vous devez vous y conformer, même partiellement. C'est déjà un premier pas vers la formalisa- tion de vos pratiques. Une entreprise formelle, obligée de tenir une comp- tabilité, a tout intérêt à justifier ses charges avec des factures provenant de fournisseurs formels. Le vrai problème est que, comme dans de nombreuses économies émer- gentes, cette intégration risque de créer une économie à deux vitesses avec des effets clairement néfastes. La faible charge fiscale, réglementaire et sociale appliquée aux activités infor- melles formalisées décourage les opé- rateurs productifs du secteur formel. Ces derniers sont alors incités à allé- ger leurs charges en fragmentant leur activité pour bénéficier des régimes préférentiels comme celui de l'auto- entrepreneur. L'encouragement massif de l'inté- gration du secteur informel dans des chaînes de valeur formelles maintient les mêmes conditions précaires de tra- vail, de formation et de droits sociaux, bien en deçà des exigences légales. Cela représente un risque majeur pour la dignité et la sécurité physique des travailleurs. Cette situation creuse les inégalités et les injustices entre différentes couches de la population. Nous risquons ainsi de manquer l'opportunité de bénéfi- cier pleinement du dividende démo- graphique, dont la fenêtre pourrait se refermer dès 2038 selon les projections du HCP. De même, nous pourrions passer à côté des opportunités offertes par les nouvelles technologies, car le secteur informel reste généralement peu connecté à l'innovation. F. N. H. : Existe-t-il, selon vous, des mécanismes publics ou juri- diques qui pourraient encadrer ces relations hybrides sans tuer la souplesse de l’informel ? H. E. : En effet, il existe aujourd'hui des statuts juridiques simplifiés avec un régime fiscal allégé, parfaitement adap- tés aux petites activités productives
peuvent intégrer des travailleurs infor- mels ou des microstructures dans leur chaîne de valeur grâce à des contrats de sous-traitance souples et des clauses sociales allégées. Le sec- teur public ou semi-public peut égale- ment collaborer de façon formelle mais souple avec des travailleurs informels et des unités de production ou pres- tataires de services informels. Le nou- veau décret sur les marchés publics le permet pleinement en obligeant les
La faible charge fiscale, réglementaire et sociale appliquée aux activités informelles formalisées décourage les opérateurs productifs du secteur formel.
unipersonnelles qui opèrent souvent hors du système fiscal et comptable traditionnel. L'auto-entrepreneur, les coopératives, les personnes physiques et les SARL à associé unique en sont
de bons exemples. Ces formes d'orga- nisation garantissent des conditions préférentielles minimales, souples et allégées. De plus, les grandes entreprises
POUR NE RIEN RATER DE LA BOURSE @bourse_news @boursenews www.boursenews.ma Bourse news
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