Ère magazine, édition avril 2023

« Notre plus grand défaut est le « propre en ordre ». C’est un vrai obstacle au maintien de la biodiversité.» Bertrand von Arx Directeur du Service de la biodiversité Office cantonal de l'agriculture et de la nature

Genève est un petit territoire. Comment développer des actions qui vont au-delà des frontières cantonales ? La biodiversité n’a pas de frontière. La coordi- nation avec nos partenaires est donc essen- tielle, que ce soit la Confédération, les cantons ou les départements de l’Ain et de la Haute- Savoie. Avec ces derniers, nous échangeons beaucoup et mettons sur pied des projets transfrontaliers pour garantir les continuités biologiques sur le terrain. Des mesures ont ainsi été introduites en partenariat avec les communautés de communes, les départe- ments, la SNCF ou encore la société autorou- tière ATMB. Vous faites ce métier depuis vingt ans. Sans lassitude ? Aucune ! Ce métier est une passion. J’ai gran - di dans la campagne genevoise. Enfant déjà, j’étais fasciné par la nature. Avec un groupe d’amis, nous passions des journées entières à observer la faune et la flore. En fonction des saisons, les paysages se métamorphosent. L’ambiance change. Les odeurs, les sons sont différents. Cette richesse extraordinaire doit être préservée et il me tient à cœur de parta- ger ces émotions. Il n’y a pas forcément besoin de voyager à l’autre bout du monde pour être dépaysé. En quelques minutes de bus ou de tram, chaque Genevoise et Genevois a accès à cette oasis de biodiversité. Il faut aujourd’hui se reconnecter à la nature, l’apprécier et sur- tout la respecter. Quelles sont vos principales préoccupations en ce moment ? Pendant longtemps, nous nous sommes foca- lisés sur la préservation des espèces menacées et avons totalement laissé de côté les autres. Or, on constate aujourd’hui que les moineaux sont par exemple toujours moins nombreux.

Certaines espèces communes, ou moins vi- sibles comme les insectes, souffrent sans que nous en ayons conscience. Par ailleurs, il faut absolument maintenir les diversités géné- tiques. Toutes les espèces sont constituées de populations formées d'individus tous généti- quement différents. C’est grâce à cette plu- ralité que les espèces réussiront à s’adapter à l’évolution de leur environnement et, peut- être, au changement climatique. La préservation de l’environnement est devenue une priorité, notamment politique. On peut donc être confiant, non ? Oui, mais les priorités changent très vite. On le voit en ce moment avec la crise énergé- tique. Désormais, la priorité est de produire de l’électricité. Mais cela ne doit pas se faire au détriment de l’environnement, qui nous apporte d'autres services essentiels. La facilité nous pousse à exploiter des espaces naturels considérés, à tort, comme vides, pour y déve- lopper les énergies renouvelables. Alors avant d'installer ces nouvelles sources d’énergie, il faut s'assurer que ces mesures en faveur du climat ne péjorent pas la biodiversité. Parlons d’avenir… Vous êtes optimiste ? J’ai intérêt à l’être ! Chacun doit redevenir conscient de l’importance de la biodiversité. Cela paraît bête, mais le raisin qui se trans- forme en vin… c’est possible grâce au vivant, grâce (aussi) à la biodiversité. A nous donc de tout mettre en œuvre pour la préserver.

QUESTIONS EXPRESS À BERTRAND VON ARX Votre retraite idéale ? Retrouver le plaisir de se hâter et non plus d'être pressé. Le moment le plus important de votre vie ? D'un point de vue très égoïste : ma naissance ! Qu’est-ce qui vous fait rire ? (Jaune!): Les experts en greenwashing. Ce que vous ne ferez plus jamais? Jamais ? Ça existe ce mot ? Que représente pour vous le printemps ? Le retour des fleurs et des espèces

pelouse doit être verte et parfaitement ton- due, aucune branche ne doit dépasser des haies : c’est un vrai obstacle au développe - ment de la biodiversité. Mais chacun peut agir. En laissant par exemple un tas de feuilles dans son jardin pour les hérissons, en gar- dant du bois mort où pourront nicher des insectes ou encore en plantant des buissons indigènes bien touffus qui serviront d’habitat à de nombreuses espèces. Tout cela participe à la multiplication des petits habitats naturels. Parallèlement, l’Etat doit informer et dévelop- per des projets ciblés. A Genève, par exemple, nous avons implanté environ 1 300 nouvelles zones humides. Ce sont de petites mares, très prisées des batraciens, situées en forêt, en bor- dure des champs ou même en ville. Ça n’a l’air de rien, mais ces surfaces participent active- ment au maintien de nombreuses espèces.

migratrices, qui représentent l'espoir, chaque fois renouvelé, de belles aventures…

SUR NOTRE BLOG : LA CARTO- GRAPHIE DE LA BIODIVERSITÉ GENEVOISE ET LES DÉTAILS DU PLAN D'ACTION CANTONAL rentesgenevoises.ch/blog

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èremagazine - avril 2023

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