FNH N° 1186 V2

DEVELOPPEMENT DURABLE

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FINANCES NEWS HEBDO VENDREDI 28 FÉVRIER 2025

ne change pour les industriels qui peuvent bénéficier d’un grand taux de décarbonation de leur électricité. Sauf erreur, ce cas est actuellement permis, et l’article 26 serait bien activé. Les puissances engagées par projet peuvent être très impor- tantes, 200 MW et plus. • Le producteur et le consomma- teur sont sur des sites différents, mais raccordés au réseau moyenne tension. Dans ces conditions, un très grand nombre de projets renouvelables à partir d’un seuil de 2 MW : cas d’un exploitant qui vend l’électricité aux clients industriels, en conformité avec la loi 40-19, avec possibilité de vente de 40% du productible au distributeur, ou en autoproduction, à partir de 5 MW. Dans ces conditions, nous pouvons affirmer que les deux types de pro- jets ont la possibilité de voir le jour, sauf que l’arrêté des enveloppes 3851-21 pose un sérieux problème, et qui est relatif à la taille des enveloppes énergétiques en GWh/ an permises entre 2022 et 2031. Par exemple, en 2025, la limite nationale totale des renouvelables à ne pas dépasser est de 1.086 GWh, soit 2,37% de la demande électrique prévisionnelle pour cette année. Et si l’enveloppe est saturée la première année par un projet, le second projet doit attendre des années, avec la faible montée de la valeur de l’enveloppe, pour pouvoir se réaliser, afin de placer un deu- xième projet avec une puissance minimale de 5 MW, conformément à l’article 7 de la loi 82-21. On ne peut pas limiter l’injection en moyenne tension dans les 2,5% par an de la demande nationale, alors que nous aspirons à réaliser 52% de notre mix électrique en renouvelables en 2030. C’est très contradictoire, tout en sachant que la part estimée de l’industrie dans le mix électrique du Maroc est de l’ordre de 35%. Le taux des renouvelables à 52% doit s’appliquer partout, on ne peut en aucun cas limiter la décarbonation industrielle à 2,5% : c’est contre la logique de tout le système. • D’autre part, les projets en moyenne tension sont aussi limités par la capacité d’accueil définie par l’ANRE au niveau du territoire

national. Nous avons donc deux limitations : si par exemple je suis autorisé à installer un projet renou- velable de 5 MW, je dois théorique- ment produire dans les 7,5 GWh/ an; on ne peut pas me limiter par exemple à 4 GWh/an avec l’enve- loppe dédiée. L’arrêté des enve- loppes doit impérativement être abrogé, car le système peut fonc- tionner jusqu’à la limite de 1.086 GWh en 2025, ou 1.162 GWh en 2026. Ceci donne une progression de 76 GWh/an ou 43 MW/an (PV à FC : 20%) de projets nouveaux par an, quand nous voulons installer plus de 1.000 MW/an ! On voit bien les limites imposées par l’arrêté des enveloppes; les premiers venus seront les premiers servis. Mais après, la machine va se gripper si cet arrêté n’est pas abrogé. F. N. H. : Vous avez proposé dans l’une de vos publica- tions, la possibilité d’organi- ser les industriels en coopé- ratives renouvelables, pour leurs propres besoins. Quelle serait, selon vous, les avan- tages offerts par cette orga- nisation ? S. G. : L’organisation des indus- triels en coopératives renou- velables n’est pas nouvelle. Elle se développe de plus en plus en Europe. L’Allemagne compte plus de 900 coopératives renouvelables, au Danemark plus de 80% des éoliennes appartiennent à des coo- pératives qui peuvent lever des fonds nationaux et internationaux, avoir accès à des financements participatifs…, et réaliser un formi- dable développement local. C’est le meilleur mode d’organisation dans ce domaine. Le choix du modèle de la coopérative est motivé, entre autres, par la possibilité de dépas- ser la limite de 5 MW imposée par la loi 82-21 dans le cadre de l’auto- production, tout en sachant que le besoin de la majorité écrasante des industriels est compris entre 0,5 et 2 MW. Rares sont les entreprises qui peuvent se permettre d’instal- ler 5 MW ou 7,5 GWh de solaire, un investissement de 50 à 60 MDH. Dans ces conditions, seules quelques grandes entreprises très

 Fixé à 5,92 centimes de DH/kWh, ce tarif est jugé très valable car il permet de garder les prix du kWh électrique renouvelable bien en dessous du prix du kWh fossile.

énergivores peuvent bénéficier des renouvelables à 5 MW et plus, si elles ne sont pas bloquées par les enveloppes. En cohérence avec la consomma- tion électrique de la majorité de nos industries, on peut par exemple imaginer un projet de 0,5 MW/entre- prise au profit d’un regroupement en coopérative de 12 entreprises, soit 6 MW. Cette coopérative serait donc le client du distributeur afin de bénéficier des renouvelables, en conformité avec la loi 82-21. L’industriel est déchargé de la ges- tion des renouvelables, qui n’est pas son cœur de métier. C’est l’une des raisons qui ont permis la mul- tiplication des renouvelables sous forme de coopératives. Si l’auto- consommation sur site (plaque sur les toits) est plus ou moins gérable par un industriel, des sites avec des puissances plus importantes demandent un savoir-faire qui n’est pas à la portée des industriels; une tâche qui doit être impérativement déléguée à un professionnel. Ce que je demande en plus des énergies renouvelables à la coo- pérative, c’est aussi de promou- voir les renouvelables au niveau de sa région. Pour les ménages par exemple, des programmes d’effica-

cité énergétique régionaux au profit des industries : en clair, devenir des bras armés du ministère de la Transition énergétique en matière de développement durable et local sur les douze régions du Maroc. Depuis 1989, année de démarrage du premier projet d’efficacité éner- gétique au Maroc avec la coopé- ration américaine, on n’arrive tou- jours pas à promouvoir l’efficacité énergétique dans tout le pays et de manière probante. Nous ne sommes pas les seuls, plusieurs pays développés ont cette problé- matique. Un grand nombre de pays ont des bilans renouvelables très honorables, mais ils n’ont toujours pas de bilan efficacité énergétique, qui est pourtant un des piliers de la transition énergétique. Un pays comme l’Espagne vise une éco- nomie de 39,5% d’ici à 2030, mais pour l’instant, aucun bilan officiel relatif aux baisses de la facture énergétique n’existe. Au final, nous avons une révolution en matière de transition énergé- tique, et je pèse mes mots, per- mise par l’ANRE et le ministère de la Transition énergétique. Mais qui peut être bloqué par l’arrêté des enveloppes qui constitue un véri- table obstacle à la bonne marche de notre transition énergétique. Il doit impérativement être abrogé, sinon quelques projets insignifiants par rapport à nos besoins peuvent être réalisés. Mais avec la satura- tion des enveloppes, on reviendra à la case de départ. ◆

La définition de ces tarifs, attendue depuis 2010, va offrir une meilleure visibilité aux auto producteurs et divers investisseurs dans le domaine de la moyenne tension.

Avec la participation de

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