FNH N° 1191

ECONOMIE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 10 AVRIL 2025

Droits de douane américains Coup de canif dans l’ALE Maroc-USA

taires pointilleuses ou encore des règles administratives trop complexes au goût de l’oncle Sam… Bref, des barrières non tarifaires, arguties tout trouvées pour imposer une pénalité éco- nomique, en contradiction fla- grante avec l’esprit de l’ALE. Me Nouchi ne dit d’ailleurs pas autre chose. Selon lui, «invo- quer ces “barrières non tari- faires” a tout l’air d’un prétexte sans fondement légal, puisqu’il n’y a pas de prohibition géné- rale d’importation au Maroc de produits venant des Etats-Unis, bien au contraire». Et d’ajouter que «le traité comprend tout un chapitre (n°20) concernant le règlement des différends et pré- voit que cette procédure s’ap- plique notamment lorsqu’une mesure prise par une des par- ties est incompatibles avec ses obligations en vertu du traité». Mais lorsque Trump décide de

Le Maroc, pourtant lié aux Etats-Unis par un accord de libre-échange depuis 2006, hérite d’une taxe douanière de 10% sur ses exportations. Comme d’autres pays, le Royaume est pris au piège d’un virage protectionniste tous azimuts. Par D. William

D

ix pour cent. C’est le chiffre fétiche que l’administration Trump a décidé d’imposer, depuis le 5 avril 2025, à toutes les exportations vers les Etats- Unis. Même le Maroc, pourtant bon élève, s’est fait taxer sans avertissement. Alors, certes, dans ce grand délire protection- niste du président américain, le Royaume semble s’en sortir plutôt bien : 10%, c’est moins que les 20% pour l’Union euro- péenne, les 30% pour l’Algérie, les 28% pour la Tunisie, et les… 104% infligés à la Chine. Mais il y a quand même 10%, alors que le Maroc et les USA sont liés par un accord de libre-échange.

Et c’est bien là le hic : en 2006, Rabat et Washington se sont juré, accord signé à l’appui, de ne pas s’imposer mutuelle- ment de barrières douanières. L’article 2.3 de l’accord de libre- échange est formel : «sauf dis- position contraire dans le pré- sent accord, aucune des deux parties ne pourra augmenter un droit de douane existant, ni instituer un droit de douane sur un produit originaire». Me Julien Nouchi, avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit des affaires et fiscalité, précise que « toutefois, le traité autorise le Maroc à répliquer, sous certaines conditions par

exemple, pour “maintenir ou augmenter un droit de douane, ainsi que l'autorise l'Organe de règlement des différends de l'OMC”. Le traité se place donc dans le cadre strict des règles prévues par l’OMC, ce dont les Etats-Unis semblent désormais s’affranchir» . Autrement dit, Trump vient de faire sauter un verrou juridique d’un revers de la main. Pour justifier cette entorse à l'accord, les équipes de l’USTR (Bureau du représentant améri- cain au commerce) ont brandi un argumentaire très créatif : des normes antipollution trop strictes, des exigences sani-

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