FNH N°1060

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JEUDI 31 MARS 2022 FINANCES NEWS HEBDO

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Marché du travail

◆ Beaucoup d’éléments objectifs concourent à l’existence d’un chômage de masse pour cette année particulière. ◆ La contraction de la croissance projetée pour 2022 assombrit les perspectives du marché du travail. L’étau se resserre inexorablement P our peu que l’on s’intéresse à la dynamique écono- mique qui prévaut, il est assez aisé de Par M. Diao

au cours de l’année dernière. Interrogé sur la dynamique du marché de l’emploi largement tributaire de l’activité écono- mique, l’économiste Azeddine Akesbi rappelle d’abord que la crise liée à la pandémie a été à l’origine de la destruction de l’équivalent de trois années de création d’emplois au Maroc. «Il faut savoir que jusque-là, des secteurs pourvoyeurs d’emplois et faisant partie de l’écosystème du tourisme (qui peine à retrouver son niveau d’activité d’avant crise), ont du mal à redémarrer. En conséquence, ces branches relèguent le recrutement au second plan», explique-t-il. Notre interlocuteur, qui qualifie d’optimistes les prévisions de la Banque centrale, n’écarte pas l’hypothèse d’un taux de croissance nul, voire négatif pour 2022. Une année particu- lièrement difficile pour l’éco- nomie nationale en raison de l’accumulation d’une kyrielle de facteurs défavorables

(sécheresse, inflation, hausse des coûts des intrants pour les entreprises, perte de pou- voir d’achat, dégradation des comptes publics, etc.). «Les statistiques prouvent qu’un point de croissance génère entre 28.000 et 32.000 postes de travail au Maroc. Or, avec une croissance quasi nulle que le pays devrait enregis- trer cette année, il n’est pas exagéré de tabler sur un taux de chômage très élevé pour 2022. Sachant que le niveau du chômage a toujours été sous-estimé au Maroc. Plus d’un million d’actifs sont en situation de sous-emploi qui, en réalité, est une forme de chômage déguisé» , avance l’économiste. Par ailleurs, la sécheresse qui prévaut est particulièrement néfaste pour les créations d’emplois. Pour rappel, d’après la DEPF, le secteur agricole est pourvoyeur d’emplois pour une frange importante de la population. L’agriculture représente 38% de la popula-

prendre le relais pour jouer le rôle de locomotive du tissu économique. Ce qui peut prendre la forme d’investisse- ments massifs dans de grands projets d’infrastructures, générateurs d’emplois. Or, de l’avis de Akesbi, les marges de manœuvre budgétaires du gouvernement ont été réduites considérablement par la pan- démie. L’Exécutif aurait les mains liées par un niveau d’en- dettement record et un déficit public qui ne devrait pas être en dessous de 6% du PIB pour l’année en 2022. Au registre des solutions allant dans le sens de la dyna- misation du marché de l’em- ploi pour l’année en cours, Azeddine Akesbi exhorte le gouvernement à multiplier les mesures susceptibles de booster l’activité des métiers du tourisme et celle des autres branches liées à celui-ci. «Exiger le test PCR pour les touristes étrangers au niveau des aéroports pendant que d’autres pays lèvent les res- trictions liées à la pandémie, est une pratique inappropriée dans un contexte où le tou- risme a besoin d’atteindre promptement son niveau d’activité d’avant crise» , fait observer notre interlocuteur. Au final, beaucoup d’éléments objectifs concourent à l’exis- tence d’un chômage de masse pour cette année. L’industrie, qui constitue l’un des premiers secteurs pourvoyeurs d’em- plois stables au Maroc, doit faire face à une contrainte de taille, celle de la flambée des prix des intrants. ◆

constater que les ambitions de l’exécutif en matière de création d’emplois sont dis- proportionnées par rapport à la réalité économique. A l’is- sue de son dernier Conseil qui s’est tenu récemment, Bank Al-Maghrib a revu à la baisse ses prévisions de croissance en les adaptant aux nouvelles donnes nationales et inter- nationales. La Banque cen- trale table désormais sur un taux de croissance inférieur à 1% du PIB (0,7% du PIB). Cette révision commande une réflexion portant sur l’impact de la contraction de la crois- sance sur le taux de chômage. Pour rappel, celui-ci a culminé à 12,3% en 2021. Et ce, en dépit d’un taux de croissance substantiel de 7,3% du PIB

Les sta- tistiques prouvent qu’un point

de croissance génère entre 28.000 et 32.000 postes de travail au Maroc.

tion active occupée. Ceci étant rappelé, pour la cam- pagne agricole en cours, force est d’admettre que le déficit pluviométrique fait le lit d’une destruction

Le taux de chômage a culminé à 12,3% en 2021.

massive de postes de travail agricoles. D’ailleurs, la Banque centrale table sur une produc- tion céréalière très modeste de près de25 millions de quintaux (contre 103 millions de quin- taux en 2021). L’impasse ? En période de crise et de grande adversité, l’Etat doit

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