FNH N° 1040 (2)

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TRIBUNE LBRE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 21 OCTOBRE 2021

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entreprises, des banques, et du pays, des réserves de change à des niveaux appro- priés et confortables, un bon dosage entre la circulation et le contrôle des capitaux, la confiance des investisseurs nationaux et étrangers, un secteur financier solide, un système de réglementation prudentielle adéquat, un cli-

mat social apaisé, une situation poli- tique stable. Sans qu’au moins toutes ces conditions soient remplies, le passage au régime flottant ne doit pas être envisagé, car

Le taux de change de la monnaie nationale du pays devra aussi être en adéquation avec ces fondamentaux.

le risque serait plus grand d’un effondrement de la mon- naie, entraînant une instabi- lité financière et conduisant à une grave crise économique. Un déficit de la balance com- merciale tend naturellement, par la loi de l'offre et de la demande, à faire baisser la monnaie, puisqu’on a besoin d’acheter des devises pour payer ses importations. Une aggravation ou la génération d’un déficit du compte cou- rant augmente la demande en devises, et si elle est supé- rieure à l’offre, cela va induire une dévaluation du Dirham. Le déficit du compte courant est compensé par des inves- tissements étrangers et par l’endettement extérieur. Dans le cas d’une balance commerciale déficitaire, la monnaie tend naturellement à se dévaluer et le pays peut chercher à la soutenir en payant ses importations avec des dettes contractées en devises, ce qui augmente sa dette. Pour soutenir le Dirham en cas de très forte déva- luation, on doit vendre des devises, qu’on peut choisir d’emprunter. La dette exté- rieure permet d’injecter des devises et donc d’augmenter l’offre et réduire les tensions sur ces devises. Mais il faut dans ce cas disposer d’une

de fluctuation, mais la troi- sième phase ne sera pas pour tout de suite. Le wali de Bank Al-Maghrib, lors du point de presse organisé après le pre- mier Conseil de la Banque centrale de 2021, avait d’ail- leurs répondu à une question portant sur un nouvel élargis- sement de la fourchette de fluctuation en disant que ce n’était pas le moment, et qu’il fallait déjà laisser du temps aux aides de l’Etat pour en récolter les fruits et relan- cer l’économie. On ne pas- sera donc pas à la troisième étape avant quelque temps. Peut-être longtemps si l’on en juge la remarque du wali sur un benchmark qu’aurait fait la Banque centrale, selon lequel des pays seraient pas- sés à la deuxième et troi- sième phase dans des délais dépassant les dix ans, voire quinze, alors que le Maroc a effectué son passage à la première phase en 2018, soit il y a à peine trois ans, et à sa deuxième phase l’année dernière. L’économie marocaine a montré jusqu’à aujourd’hui une résilience à chaque nou- velle étape du processus de flexibilisation, ce qui peut donner, à juste titre ou pas, une certaine confiance dans

la suite du processus. Ces étapes ont été marquées par un nouvel élargissement à chaque fois de la bande de fluctuation, mais le passage à la toute dernière étape de la flexibilité totale du Dirham, régi uniquement par la loi de l’offre et de la demande, reste une toute autre affaire. Les autorités marocaines ont donc tout à fait raison de temporiser et d’adopter une approche progressive et pru- dente. Les prérequis pour un régime flottant On peut discuter d’une manière générale des avan- tages et inconvénients liés au régime flottant, ainsi que les risques qui lui sont associés et qu’encourt un pays qui souhaite adopter ce régime de change. C’est ce que nous avons fait dans de pré- cédents articles. Mais il faut tenir compte aussi de la situa- tion actuelle et des carac- téristiques économiques du pays, car le régime flottant n’est pas forcément bon pour toutes les économies. Il y a en fait, au vu des enseigne- ments tirés des crises du passé, un certain nombre de conditions préalables à rem- plir, en termes de fondamen-

taux macroéconomiques, avant d’instaurer un régime flottant. Le taux de change de la monnaie nationale du pays devra aussi être en adéquation avec ces fonda- mentaux. Toutes les condi- tions que nous allons citer devront être satisfaites pour donner au pays toutes les chances de réussir dans la durée l’adoption d’un régime flottant et limiter au mieux les risques d’instabilité finan- cière. Parmi ces prérequis, et à la lumière des crises historiques déclenchées ou aggravées par un régime flot- tant, il y a la nécessité d’un cadre macroéconomique et financier interne favorable et stable. Il faut une croissance écono- mique satisfaisante et stable, une inflation maîtrisée, à un niveau bas, l’absence de bulle spéculative, une balance commerciale pas trop désé- quilibrée, voire positive, des échanges commerciaux diversifiés, sans prédomi- nance d’un ou quelques pro- duits, des finances publiques en bonne santé, une certaine discipline budgétaire, et une maîtrise du déficit, une dette publique soutenable, un endettement raisonnable en devises étrangères des

Une des pre- mières condi- tions pour réussir ce chan- gement de régime de change est d’y aller progressi- vement. On peut dire que le Maroc, de ce point de vue, fait les choses dans les règles de l’art.

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