BOURSE & FINANCES
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 18 SEPTEMBRE 2025
Morocco FinTech Center «Le véritable enjeu, c’est la fluidité entre l’idée et l’usage réel»
tation. Quand vous êtes une startup, vous sentez que cha- cun fait des efforts, que ce soit les universités, banques, centres technologiques, mais chacun le fait avec sa logique, ses délais, son agenda. Ce n’est pas par manque de volonté, c’est leur nature. Les startups, elles, n’ont pas le temps. Elles doivent tes- ter, échouer, recommencer, vite. Entre les deux, il y a un écart de rythme qui finit par essouffler les projets. Pour éviter que l’écosystème se disperse, il faut une boussole simple, réduire le temps entre l’idée et l’usage réel. Si une uni- versité, une banque et une startup jugent leur coopération à ce cri- tère, elles finissent par s’aligner. Parce qu’au bout du compte, ce qui importe, ce n’est pas le nombre de réunions, mais qu’un commerçant puisse encaisser plus vite, qu’un étudiant ouvre un compte sans blocage, qu’un investisseur souscrive à une IPO sans paperasse. Il faut aussi choisir des chantiers fédérateurs, qui dépassent cha- cun des acteurs pris isolément. Simplifier la gestion de trésorerie des PME avec des outils qui anti- cipent les flux. Rendre les IPO locales accessibles depuis un smartphone. Donner aux petits producteurs agricoles un accès rapide au microcrédit digital. Fluidifier les paiements transfron- taliers avec l’Afrique, qui restent aujourd’hui trop chers et trop longs. Ce sont des sujets concrets qui parlent aux Marocains et qui obligent naturellement banques, universités et startups à travailler ensemble. Chez Atela, nous avons vu qu’il suffit parfois de constituer une petite équipe sur un projet bien défini pour créer de la valeur très
L’écosystème fintech marocain passe à la vitesse supérieure, porté par une nouvelle dynamique d’initiatives publiques et privées. Derrière cette effervescence, une question persiste : comment passer d’actions dispersées à un écosystème cohérent, capable de livrer
des solutions à grande échelle ? Entretien avec Sofiane Gadrim, CTO et cofondateur d’Atela.
Propos recueillis par Ibtissam Z.
Finances News Hebdo : Le Morocco FinTech Center affiche une nouvelle dyna- mique, portée par plusieurs initiatives en cours. Pensez- vous que cette évolution peut réellement poser les bases d’un écosystème fin- tech structuré et favorable aux startups ? Quelle lec- ture en faites-vous ? Sofiane Gadrim : Quand on est une fintech au Maroc, on découvre vite que l’écosystème existe mais qu’il est fragmenté. Avec Atela, nous avons frappé à beaucoup de portes, incubateurs, programmes, institutions. Chacun a son utilité, mais mis bout à bout, cela res- semble à une carte incomplète qu’on doit redessiner soi-même à chaque étape. Le Morocco FinTech Center peut changer cela en devenant une sorte de bous- sole, un point d’entrée unique qui
évite aux entrepreneurs de perdre de l’énergie à chercher qui contac- ter pour avancer. Il ne faut toutefois pas le réduire à un rôle de guichet administratif. Son utilité sera aussi d’orienter les regards vers des problèmes concrets qui valent la peine d’être résolus. Prenons une scène du quotidien : les files d’attente inter- minables pour payer une facture d’eau ou d’électricité. Pourquoi ne pas rendre ce paiement instantané depuis n’importe quel téléphone ? Ou pensez à ce jeune de Khénifra qui vend via Instagram. Il a trouvé ses clients, mais il n’a pas toujours un moyen simple d’encaisser. Ces petits blocages sont des occa- sions d’innovation. De notre côté, chez Atela, nous avons commencé à constituer des banques de projets et à mobiliser des jeunes équipes pour en faire des spin-offs. Ce type de vivier peut nourrir le Centre, qui devien- drait alors non seulement un para- pluie, mais aussi un amplificateur d’initiatives. Parce qu’au fond, ce
qui manque souvent, ce n’est pas l’idée, mais la vitesse d’exécution et la continuité qui transforment l’idée en usage réel. Le Maroc a déjà de solides atouts. Les rails techniques existent, les banques et telcos sont prêtes à jouer, et la jeunesse fourmille d’énergie. Si le Centre parvient à donner de la lisibilité et de la cadence, alors les fintechs maro- caines cesseront d’être des pro- messes isolées pour devenir des solutions africaines. Et ce jour- là, on ne parlera plus seulement de startups locales, mais d’outils conçus ici qui simplifient la vie à Abidjan, Dakar ou Kigali. F.N.H. : La collaboration entre des entités aussi diverses que l’UM6P, Technopark ou les banques pose des enjeux de gouver- nance. Comment garantir une vision partagée et évi- ter la fragmentation des efforts ? S. G. : J’ai vécu cette fragmen-
Le Morocco Fintech Center se positionne comme l’espace où banques, régulateurs, startups et investisseurs cherchent enfin à travailler ensemble sur une même plate- forme.
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