ECONOMIE
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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 18 SEPTEMBRE 2025
toriale au cœur de la note d’orien- tation du Projet de Loi de Finances 2026. Celle-ci prévoit la poursuite des grands chantiers d’infrastruc- tures pour désenclaver les régions fragiles, tels que le port de Nador West Med, le développement du port de Dakhla Atlantique ou la création de nouveaux corridors autoroutiers. «Des politiques publiques de rééquilibrage territo- rial sont de mise» , insiste Rachid El Fakir, qui souligne que l’État entend aussi miser sur l’agro-industrie dans les zones agricoles, le tou- risme durable dans les régions montagneuses ou désertiques, et les énergies renouvelables dans les provinces du Sud. Pour l’expert, la réussite de ce chantier passe par la complémen- tarité des investissements publics et privés. Le PLF 2026 mise éga- lement sur le capital humain, à travers la généralisation des écoles pionnières et le développement des cités des métiers et des com- pétences, afin de limiter l’exode des talents vers les grands pôles. En évoquant des pistes de solu- tions pour réduire ces disparités, suggérées par certains experts, notamment la mise en place des politiques monétaires et/ou bud- gétaires propres à chaque région, El Fakir tempère l’enthousiasme. En effet, la mise en place de poli- tiques budgétaires véritablement régionales se heurte à des obs- tacles, notamment en matière de ressources et de gouvernance. Quant à l’idée de politiques moné- taires différenciées par région, il la juge «non faisable» au Maroc, tout en suggérant que Bank Al-Maghrib pourrait conditionner certains refi- nancements bancaires à l’orien- tation des crédits vers les zones défavorisées. L’équité territoriale devient ainsi une condition de durabilité de la croissance. Si Casablanca, Rabat et Tanger continuent de tirer le pays vers le haut, leur domination pourrait accentuer un sentiment d’exclusion dans les régions péri- phériques. Le PLF 2026 ouvre une fenêtre de correction, mais c’est sur le terrain que se jouera l’ave- nir. Entre ambition et exécution, la réduction des disparités reste l’un des grands défis du Maroc. ◆
Un ménage à Casablanca-Settat dépense près de 29.000 dirhams par an, contre à peine
17.000 dirhams à Drâa-Tafilalet.
Disparités territoriales L’un des grands défis du Maroc Sur 12 régions, 3 drainent plus de la moitié de la richesse nationale. Un paradigme qu’il faut changer impérativement pour répondre aux besoins de toutes les couches sociales.
A
Par Désy. M.
vec l’hypothèse ambitieuse d’une croissance à 4,5%, adossée à de forts niveaux d’investissements publics, la lettre d’orientation rela- tive au PLF 2026 met en avant la réduction des disparités sociales et régionales en matière de créa- tion des richesses et du dévelop- pement. En effet, cet aspect repré- sente un jalon essentiel de l’émer- gence économique du Maroc, et s’inscrit dans une vision royale bien définie. Depuis des années, le Maroc affiche des performances éco- nomiques globalement positives au niveau national, mais l’envers du décor montre que toutes les régions ne profitent pas de la même dynamique. Selon les comptes régionaux du haut-commissa- riat au Plan (HCP), trois régions, dont Casablanca-Settat, Rabat- Salé-Kénitra et Tanger-Tétouan- Al Hoceïma concentrent, à elles
seules, 58,5% du PIB en valeur au niveau national. À elles trois, elles façonnent l’essentiel de la richesse du pays, laissant aux neuf autres régions une contribution cumulée de seulement 41,5%. Cette concentration n’est pas le fruit du hasard. Comme l’explique Rachid El Fakir, expert en éco- nomie monétaire, « l’économie marocaine s’est caractérisée par de grandes disparités terri- toriales; une forte concentration de la création des richesses dans l’axe atlantique, favorisée par des atouts historiques, géographiques et économiques qui ont permis l’émergence de trois pôles écono- miques majeurs». Casablanca s’est affirmée très tôt comme capitale économique grâce à ses infras- tructures portuaires et financières; Rabat bénéficie de son statut de capitale politique et administra- tive; et Tanger, zone historique-
ment internationale, s’est imposée comme porte commerciale vers l’Europe et l’Afrique grâce notam- ment à Tanger Med. Le revers de cette dynamique est une économie nationale à deux vitesses. Certaines régions, comme l’Oriental ou Béni Mellal-Khénifra, peinent à suivre le rythme, enregis- trant même une croissance néga- tive en 2023. Le HCP souligne que l’écart moyen de richesse entre régions s’est creusé, accentuant les disparités sociales et écono- miques. Le niveau de vie moyen illustre ce fossé : un ménage à Casablanca-Settat dépense près de 29.000 dirhams par an, contre à peine 17.000 dirhams à Drâa- Tafilalet.
Le PLF 2026 face au défi de l’équité territoriale
Le gouvernement, conscient de ces fractures, a placé l’équité terri-
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