FNH N° 1208 (1)

POLITIQUE

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FINANCES NEWS HEBDO JEUDI 18 SEPTEMBRE 2025

Aziz Akhannouch

Du storytelling à la réalité Le chef de gouvernement s’est livré récemment à un exercice de bilan mi-solennel, mi-électoral. Satisfecit général, promesses fortes et mise en scène d’une action gouvernementale maîtrisée. L’opposition a vivement réagi. Décryptage.

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Par F. Ouriaghli

un an des législatives, Aziz Akhannouch a choisi le plateau simultané d’Al Aoula et 2M pour livrer ce qu’il présente comme un bilan «positif et concret» . Il a d’em- blée planté le décor, revendiquant d’avoir traversé les «secousses» de la pandémie, la guerre en Ukraine, la sécheresse, le séisme d’Al Haouz, tout en prétendant en être sorti renforcé. Disons-le tout de suite : la communication est bien cadrée, sous-tendue par un optimisme béat. Mais c’est préci- sément là que l’exercice appelle une grille de lecture politique pour vérifier ce qui relève du bilan, de la projection… et du vœu pieux. La séquence médiatique d’Akhannouch avait plusieurs objectifs. D’abord, égratigner son prédécesseur et consolider la majorité. Ensuite, l’obsession de l’efficacité : « nous n'acceptons pas de perdre du temps et nous continuerons à travailler jusqu'à la dernière minute de notre mandat», a-t-il déclaré. Enfin, dérouler un tableau macroéconomique rassu-

rant dans un contexte où le Projet de Loi de Finances 2026 est pré- senté comme le budget d’achève- ment des grands chantiers. Et ce, tout en neutralisant la polémique sur la station de dessalement de Casablanca, pour terminer par une promesse qui claque : «d’ici deux ans, les hôpitaux publics offriront des services comparables à ceux des cliniques privées». Les législatives en question Commençons par les législatives. La décision de confier l’orga- nisation du scrutin de 2026 au ministère de l’Intérieur aurait pu paraître comme une amputation symbolique. Aziz Akhannouch, lui, y voit une garantie d’impar- tialité. Il s’en réjouit et souligne que «cela garantit une forme de neutralité» . Le message est clair à l’égard de l’électeur : ne crai- gnez pas pour la sincérité du vote, l’arbitre sera l’Intérieur. Ce faisant, il gomme un point sensible sou- levé par l’ancien chef du gouver- nement. En effet, dans un post au vitriol sur Facebook, Saad Eddine El Othmani rappelle les usages depuis 2011 et enfonce le clou sur la méthode. Et il n’y va pas par quatre chemins. «Presque toutes les rares prises de parole du chef

du gouvernement obéissent à l’une de ces trois logiques : déni, acca- parement ou désengagement» , affirme-t-il d’emblée. « Concernant la supervision politique du chef du gouvernement sur les élections, il convient de rappeler que depuis la Constitution de 2011, c’est bien le chef du gouvernement qui ouvre les concertations et préside les réunions avec les secrétaires généraux des partis politiques en vue de préparer le cadre électoral, sans que cela ne remette en cause ni ne contredise le rôle et les pré- rogatives du ministère de l’Inté- rieur» , ajoute-t-il. Et de rappeler que « Abdelilah Benkirane a pré- sidé le 16 février 2016 la réunion de concertation avec les partis politiques en préparation des élec- tions de 2016, et j’ai moi-même présidé, le 5 mars 2020, une réu- nion similaire dans le cadre de la préparation des élections de 2021. J’estime que ces réunions, organi- sées sous la supervision politique du chef du gouvernement, ont été couronnées de succès et ont per-

mis d’aboutir à plusieurs réformes et amendements dans un esprit de consensus». Néanmoins, poursuit El Othmani, « M. Akhannouch a prétendu que cette supervision politique avait été un échec». « Je lui donne raison sur un point: ce fut effectivement un échec… en ce qui concerne le passage en force de ce fameux quotient électoral absurde (calculé sur la base du nombre total d’inscrits), auquel je me suis fermement opposé, le contraignant à le faire passer sous forme d’amendement au Parlement», rétorque-t-il. Un «discours creux», selon Benabdallah Concernant la majorité, le RNI, le PAM et l’Istiqlal parlent-ils toujours d’une seule voix ? Pas exacte- ment, reconnaît Akhannouch, mais ce «pluralisme est normal ». Les partis sont des partis, et en consé- quence ils peuvent s’exprimer et proposer des idées différentes, tandis que l’Exécutif travaille,

En politique, on peut être dans la normalité et perdre la bataille de la confiance si l’on donne le sentiment que les cercles public/ privé se chevauchent trop volontiers.

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