FNH N° 1095

15

BOURSE & FINANCES

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 9 FÉVRIER 2023

www.fnh.ma

Hausse du taux directeur

◆ Une série de facteurs quantitatifs et qualitatifs plaident en faveur de la poursuite du durcissement de la politique monétaire de Bank Al-Maghrib en 2023. ◆ Le cash en circulation demeure un facteur de vigilance pour la Banque centrale. Pourquoi ce n’est pas fini D ans un contexte inflationniste, Bank Al-Maghrib a débu- té un revirement stratégique de sa monétaire durant le premier semestre de 2023, à la lumière de sa propre lecture des agré- gats monétaires et des nou- velles prévisions de BAM sur la période 2023-2024. En effet, BAM affiche une forte déter- mination à soutenir la stabi- lité des prix au Maroc, et donc poursuivre son tour de vis monétaire. La hausse cumulée du taux directeur de 100 pbs n’est pas encore en mesure de rétablir les taux réels au Maroc en territoire positif, et ce compte tenu d’une inflation cible large- ment supérieure à ses niveaux historiques. Cash en circulation : facteur de vigilance pour BAM Par Y. Seddik

sement et la consommation, et par conséquent peser sur la croissance économique.

politique accommodante en 2022. Elle a relevé son taux directeur à deux reprises depuis septembre, mettant fin à plus d’une décennie de généreuse politique monétaire, et ce en dépit des enjeux de soutien de la croissance éco- nomique post-covid. Beaucoup se demandent jusqu’où cette hausse peut aller et craignent ses effets sur l’économie. Mais la Banque centrale n'a plus beaucoup d'états d'âme : elle veut conti- nuer à durcir les conditions d'accès aux crédits afin de freiner une inflation galopante qui pique à 8,3% en décembre. De son côté, le bureau de recherche Attijari Global Research (AGR) demeure convaincu quant à la poursuite du durcissement

La masse monétaire au sein de l’économie a significativement augmenté en 2022, atteignant un plus haut de 30 ans. Celle- ci représente près de 120% du PIB en 2022. L’agrégat M3, indicateur de référence pour évaluer la masse monétaire en circulation, a augmenté de 8% en 2022 contre 5,1% en 2021. En face, les agrégats de place- ments liquides se sont inscrits en baisse de 12,8% en 2022. Ces derniers refléteraient prin- cipalement la baisse impor- tante des titres OPCVM obliga- taires et la contreperformance des fonds actions et diversi- fiés. Selon les projections de BAM, le rythme d’évolution de la masse monétaire devrait ralen- tir à 3,3% en 2023. À l’ori- gine, une décélération de la hausse de la circulation fidu- ciaire en raison de la bonne tenue des dépôts bancaires et du taux d’épargne national. Ces derniers bénéficieraient de la hausse des taux créditeurs bancaires sous l’effet des relè- vements successifs du taux directeur de BAM à compter du 4 ème trimestre 2022. En effet, les DAT à 6 mois et 12 mois s’établissent à fin novembre 2022 à 2,41% et 2,63%, en hausse de +26 PBS et +12 PBS respectivement par rapport à l’année précé- dente. ◆

L’autre facteur qui plaide pour la continuation de la politique restrictive est la poursuite du durcissement monétaire des Banques centrales à l’interna- tional en 2023. Bien qu’à un rythme moins soutenu, la FED et la BCE devraient poursuivre le relèvement de leurs taux directeurs en 2023, générant ainsi de fortes pressions sur le Dirham. Pour rappel, les spreads de liquidité du MAD demeurent en territoire posi- tif depuis juillet 2022, attei- gnant un plus haut historique à 4,99% en novembre dernier. Enfin, les analystes avancent comme raison des projec- tions de croissance globale- ment «rassurantes» durant la période 2023-2024. En effet, les dernières précipitations nationales confortent les pro- jections de BAM quant à une campagne normative autour de 75 MQx en 2023. À cet effet, selon eux, la croissance du PIB devrait ressortir à 3% en 2023 et rebondir à 3,2% en 2024. Des niveaux qui demeurent en ligne avec la moyenne historique de la croissance du PIB au Maroc. En resserrant davantage les conditions de financement de l’économie, Bank Al-Maghrib devrait ainsi ralentir la dyna- mique de la demande inté- rieure au Maroc via l’Investis-

Les raisons évoquées par AGR sont d’abord une infla- tion «durable» au-dessus des 4% à horizon 2024. Alors que la priorité majeure de Bank Al-Maghrib demeure le réta- blissement de l’inflation à des niveaux modérés, force est de constater que les pressions inflationnistes externes vers les biens non échangeables devraient se maintenir en 2023. Par ailleurs, la décompensa- tion des produits subven- tionnés prévue à compter de 2024 devrait soutenir les ten- sions haussières sur les prix. La rémunération de l’épargne nationale revient égale- ment au-devant de la scène.

Face une inflation tou- jours élevée, la Banque centrale n'a d'autres choix que de pour- suivre son resserrement monétaire en 2023.

Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib

Made with FlippingBook flipbook maker