Cornwall_2012_08_23

PORTRAIT

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Robbie Chapman, l’histoire d’un triathlonien

définitivement le tube apparent dans le ventre de Robbie. La cicatrice est là, com- me pour lui rappeler le chemin parcouru. Délivrance cependant, soulagement. Mais un an plus tard, à 15 ans, Robbie vit une autre expérience hors du commun pour un jeune garçon de son âge : il est victime d’une crise cardiaque. Transporté d’urgence à l’hôpital d’Ottawa par hélicoptère, ses jambes restent paralysées pendant deux mois. Avec un surplus de poids et des an- técédents sérieux, ses médecins lui parlent de son sang. Trop épais depuis sa naissance, ils l’encouragent à courir, à se lancer dans un sport afin d’éviter d’autres problèmes cardiovasculaires. C’est alors que son voisin, un triathlonien, l’invite à assister à une course à laquelle il prend part à Lake Placid. «J’ai toujours trouvé ce sport étrange, surtout le costume que les athlètes portent, raconte Robbie. Je me moquais de son accoutrement mais j’ai tout de même accepté son invitation.» De retour chez lui, son voisin lui demande s’il a apprécié. Robbie s’étonne de répondre par l’affirmative. C’est alors que ce cher voisin lui lance un défi : il inscrit Robbie au pro- chain triathlon de Cornwall (nage, course, vélo) mais ce dernier n’a que trois mois pour s’entraîner. Pari tenu. Robbie, alors âgé de 16 ans, prend au sérieux ce défi et s’entraîne tant bien que mal, seul. «Je courais, je nageais, je faisais du vélo mais comme ça, à ma manière, en étant mon propre entraîneur», relate-t-il. Trois mois plus tard, avec quelques kilos en moins et aucune expérience, Robbie se pointe à la course et prend le départ. À son grand étonnement, ce néophyte se classe troisième de sa catégorie. Pari gagné! Ce jour a tout changé dans la vie de Robbie. «J’ai dû prendre une décision importante : poursuivre ma vie d’ado et aller dans des

ANNIE LAFORTUNE annie.lafortune@eap.on.ca

Il est jeune, il est beau, c’est un athlète, un triathlonien, et il se classe honorablement ou gagne ses courses parce qu’il y croit. Sa spécialité : le demi Ironman. Mais s’est-on déjà demandé qui se cache vraiment der- rière chaque sportif? La raison qui pousse à se donner à fond dans une discipline? Robbie, lui, a toute une histoire. Un con- te de fée pour certains, de l’audace pour d’autres. Né le 30 juillet 1993, Robbie Chapman fait le bonheur de sa maman, Jacqueline. Mais le sort frappe rapidement. Robbie a un grave problème au tube digestif. La nourriture ne trouve aucun accès pour de- scendre dans son estomac. Les médecins en perdent leur latin. Les sept premières années de sa vie, il les passe entre les murs de l’hôpital pour un suivi quotidien. On lui installe un tube au niveau de l’estomac. À l’âge où tous les jeunes enfants font leurs premiers pas à l’école, lui poursuit sa vie et sa maternelle à l’hôpital. Puis, on lui décou- vre des caillots de sang au niveau du bras et du cou droit. Afin d’éviter le pire, Robbie se voit contraint de porter un casque afin d’éviter toute blessure à la tête. À sept ans, il intègre enfin l’école ‘’normale’’. Pas facile pour un jeune enfant de se faire accepter avec sa différence. Pour lui, ce qui était nor- mal l’était beaucoup moins pour les autres enfants qui l’entouraient. On le traite de ‘’tête de casque’’, on lui enlève de force son bonnet sous son casque, l’hiver, tout sim- plement parce qu’il est différent. «J’ai beau- coup souffert pendant cette période», con- fie-t-il. Son casque lui sera définitivement enlevé une fois l’adolescence at- teinte. Robbie grandit

Photo Annie Lafortune

Robbie Chapman, en ‘‘civil’’, sur les bords du Fleuve St-Laurent.

«Ma mère. C’est grâce à elle si je suis ce que je suis aujourd’hui, en tant que personne et en tant que sportif», déclare-t-il. Comme Robbie le dit si bien, «nous avons tous une mission sur terre. La loi de vie est de se re- specter si nous voulons être respectés. Ma passion, c’est la vie. Je veux découvrir, vivre ce que les gens vivent et ressentent.» Ainsi, ne lui parlez pas d’aller se reposer dans un hôtel quelconque avec tout le luxe à portée de main. Non. Robbie veut sentir, décou- vrir. Cette semaine, il est à New York. Parti découvrir la ville sur son vélo, son meilleur copain. Pas question de prendre le métro. Il veut sentir, voir, vibrer. Robbie a une âme qui a beaucoup vécu et ne se soucie guère du passé ni du futur. «Je vis le présent en essayant le plus possible d’aider les gens. Je veux découvrir la raison pour laquelle je suis venu sur terre. Terry Fox était un gars tellement spécial. Il avait trouvé la raison.» Aujourd’hui, Robbie a pris sa revanche. Prochain grand défi? Gagner la plus grande course, à Knoxville, Tennesse, en mai prochain. «Pour ma mère», confie-t-il. Robbie Chapman, bon, tout simplement. Un trésor, un être béni des Dieux.

sérieux et la saine alimentation fait naturel- lement partie de son quotidien. Il prend part à une course, en Floride. Il n’avait pas l’âge requis, tout juste un an de moins, mais sa persuasion change la donne. On lui ac- corde le droit de participer au demi Iron- man de Sarasota. Il affronte les plus grands noms de cette discipline dans un 2 km nage, 90 km vélo et 21 km course. À tout juste 17 ans, Robbie monte sur la troisième marche du podium et décroche la médaille de bronze. Aucun doute, il est au bon en- droit au bon moment. Étonné de sa perfor- mance, il pleure sous les cris de joie de sa mère et de sa sœur. On voit tout le poten- tiel chez ce jeune et on prend au sérieux ce phénomène. Mieux, un entraîneur, un agent, un physio et une nutritionniste font aujourd’hui partie de la vie de ce jeune ath- lète qui possède le sésame, sa carte de pro- fessionnel. S’ensuivent des podiums à cha- cune de ses courses, comme celle de janvier 2012, à Naples en Floride, où il se classe sur la plus haute marche devant plus de 550 coureurs. Ce triathlonien d’exception ne se prend cependant pas au sérieux. Tout a changé en seulement trois ans d’expérience sportive.

et vit une vie tout à fait normale. À part de nombreux allers- retours entre la maison et l’hôpital, et son tube qui fait désormais partie de lui, il vit sa vie d’adolescent. Com- me plusieurs autres de son âge, Robbie n’aime pas les lé- gumes, s’alimente plutôt mal et ne fait pas d’exercice. «Pourtant, à la mai- son, ma mère fai- sait toujours de très

La photo officielle du triathlonien..

bons repas santé pour ma sœur et moi, mais je préférais troquer mes brocolis pour des chips», raconte-il avec un air espiègle. C’est à l’âge de 14 ans que les médecins enlèvent

fêtes ou me consacrer à la course. J’ai perdu beaucoup d’amis», relate celui qui a choisi le sport comme leitmotiv. À partir de ce moment, Robbie prend l’entraînement au

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