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ECONOMIE
FINANCES NEWS HEBDO
JEUDI 16 FÉVRIER 2023
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◆ La banane n’a qu’à bien se tenir, puisque 12 DH est environ le prix actuel de la tomate au Maroc. Cette dernière est le sujet du moment, et est discutée au cœur même de l'hémicycle parlementaire. La tomate de la discorde
de gens concrets, confrontés à une flambée des prix dans leur quotidien. Maintenant, quid du gouvernement ? Ce dernier attribue principalement cette flambée à trois facteurs : • Les intermédiaires, qui ne sont peut- être pas si innocents que cela, du moins pour certains d’entre eux. • A un volume trop important des expor- tations de tomates, qui serait à l’ori- gine d’un déséquilibre entre l’offre et la demande de tomates sur le marché national. • A des fraudes et des augmentations illicites des prix. Effectivement, le Porte-parole du gouverne- ment, Mustapha Baitas, a annoncé lors de sa conférence de presse hebdomadaire, que le chef du gouvernement, Aziz AKhannouch, «a donné des instructions fermes pour lutter contre la hausse illicite des prix». Personnellement, je sais ce qu’un prix illicite veut dire dans une économie planifiée de type soviétique, où le prix est fixé politi- quement par le politburo. Mais dans une économie de marché, cela demeure pour moi un mystère. Car de ce que j’en sais, le prix d’un bien dans une économie de marché résulte dans une première phase d’une concurrence acharnée entre les différents producteurs au niveau des coûts de production, puis, dans une seconde phase, du jeu de l’offre et de la demande. Dans ce schéma, tout écart à la hausse par rapport au prix de mar- ché est immédiatement sanctionné par la demande. Pas besoin dans ce cas de figure d’une sanction politique, puisque le marché s’en charge mieux que quiconque. La seule intervention légitime du politique est celle qui vise à combattre toute tentative de faus- ser la concurrence à travers des logiques de cartels ou d’oligopoles. De même, parler d’un prix illicite ne peut se faire qu’en se référant à un prix qui serait licite, et par conséquent qui serait décrété par la loi, ce qui est loin d’être le cas au Maroc, du moins pour la tomate et pour les légumes. Car oui, la tomate n’est pas un légume, même si je l’ai cru pendant long- temps. Par conséquent, l’Etat ne doit en aucun cas intervenir en aval au niveau des prix
Le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, prévoit que "les prix de la tomate enregistrent, durant les proches semaines à venir, une baisse avec le retour de températures plus clémentes, ce qui contribuera à la maturité des cultures nationales et à leur disponibi- lité sur les marchés.
actuellement. Premièrement, il est important de com- prendre que l’inflation ne peut se résumer en un simple phénomène monétaire. Ce qu’elle est certainement au départ. Mais très rapidement, elle devient un état d’esprit et une dynamique collective. Ce conditionne- ment collectif peut se résumer en un ques- tionnement : «Si tout le monde augmente les prix, pourquoi pas moi aussi ?». Cette peur, cette angoisse de passer à côté de ce qui est perçu comme une opportunité, alimente cette flambée des prix. Mais elle ne relève aucunement d’une quelconque méchanceté, bien que des spéculateurs mal intentionnés existent bel et bien. Car ce qu’il faut garder à l’esprit, c’est que le vendeur ou le commerçant est également par ailleurs un acheteur dans son quotidien. Et que confronté à la flambée des prix des biens qu’il ne vend pas, mais qu’il se doit d’acheter, il finit par augmenter les prix des siens. Et vice-versa. Une spirale infernale et auto-alimentée, qu’il est très compliqué de juguler économique- ment ou politiquement. Ainsi, même si les coûts de production n’augmentent pas dans un métier en par- ticulier, il faut garder à l’esprit qu’un métier et un secteur n’ont pas de petites jambes et de petites mains, mais qu’ils sont constitués
Par Rachid Achachi, chroniqueur, DG d’Archè Consulting
E n bons camarades, d’autres légumes continuent d'œuvrer vaillamment pour rejoindre leur consœur, en battant de nouveaux records en termes de prix. Ainsi, à 10 DH le kilogramme, l’oignon est en pole position pour accéder au podium, faisant ainsi en sorte que bon nombre de Marocains n’auront plus que leurs yeux pour pleurer, faute d’oignons. Quant à la viande avec ses 100 DH le kilo, elle boxe dans une toute autre catégorie. Aujourd’hui, pour frimer au café ou pour tester les limites monétaires et l’amour de son conjoint, c’est un panaché de légumes qu’il faut désormais commander. Le Marocain de base ? Et bien, il joue le rôle passif de spectateur face à cette mascarade par bien des aspects tragiques ? Le gouvernement ? Il fait du coaching politique ou du développement person- nel, à travers des déclarations disant aux Marocains : «Tenez bon, nous allons punir les méchants» . Je caricature à peine, mais la question est effectivement devenue autant économique que politique. Cependant, les points se doivent d’être mis sur les «i» afin de comprendre à quoi nous avons affaire
Aujourd’hui, pour frimer au café ou pour tester les limites monétaires et l’amour de son conjoint, c’est un panaché de légumes qu’il faut désormais commander.
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