FNH N° 1049

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CULTURE

FINANCES NEWS HEBDO

JEUDI 6 JANVIER 2022

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Exposition

◆ Pour son solo-show, l’artiste tangérois dévoile, jusqu’au 23 janvier, un art d’où sourdent le désenchantement, le mal-être et l’angoisse. Immersive et interactive À propos d’Ilias Selfati, on pensait avoir tout dit, tout vu, tout entendu. Et pourtant, le voilà l’antithèse. La forêt n’est pas cependant qu’une question métaphorique, et dans le cor- pus de l’artiste, elle constitue une ligne de force depuis de nombreuses années. Par R. K. H.

iconiques de Marylin Monroe, une citation biblique qui sug- gère que la star aurait été dévorée par les loups d’Hol- lywood : « Behold, I send you out as sheep in the midst of wolves (Matthew 10:16 –ndlr) ». Sur une autre composition, l’évocation d’un destin tra- gique, celui de Jean-Michel Basquiat, artiste unique dont l’élan fut trop tôt décapité… Ilias Selfati n’a pas d’intérêt morbide pour ces damnés, embourbés dans une spi- rale de mensonges, de sou- mission… et pour qui la mort sera leur seule libération, mais pointe les faits, les dissèque de la manière la plus juste. L’idée de cette expo serait de prendre un temps de réflexion, de faire le point sur ce qui a fait du monde ce qu’il est aujourd’hui, pour mieux envi- sager la suite. Il s’agit ici de méditer sur l’état de notre monde et, au-delà, de réfléchir sur nos façons de vivre. On peut donc « rêver » encore « dans une magnifique forêt ». On peut encore rêver d’un monde meilleur. On peut encore désirer, avec simple- ment du carton, papier, encre,

Quoique des silhouettes che- valines ou un dripping de fleurs flottent dans les œuvres, cette exposition n’entend pas simplement donner à voir de vastes étendues de terrains couvertes d'arbres et où vivent une multitude d’espèces animales ainsi que végétales. Une magnifique forêt serait alors l’incarnation même de la notion philoso- phique d’un monde qui irait toujours vers le meilleur. Et pour qu’il aille mieux, il fau- drait que l’Homme délaisse les croyances archaïques, les superstitions et les figures de l’irrationnel qui peuvent être perçues comme autant de formes d’ignorance, d’oppres- sion et de violence. L’humaine condition Plus qu’à la beauté de la forêt, cette expo s’intéresse à l’Humain; celui torturé ou qui simplement se laisse faire et exploiter. Sur l’une des images

qui se révèle à nouveau ail- leurs, radicalement contempo- rain, à force de ne vouloir se restreindre à rien – ni périodes, ni écoles, ni mouvements -. Il échappe à ces mises en boîte afin de couper l’herbe sous le pied aux classifica- tions hâtives. À la galerie Mohamed Drissi, l’exposition montée avec le jeune curateur Achraf Remok, « Dreaming in a Wonderful Forest », en témoigne. Le titre fournit l’entrée en matière : ici, il sera question de « rêver », mais de « rêver dans une magnifique forêt ». De quelles images de la forêt disposons-nous ? Celle qui est la sève des contes et légendes, des rites païens et des mystères ? Des artistes nous en donnent une vision aérienne, lisse et exotique, réa- lisée à l’aide de gros moyens techniques. «Dreaming in a Wonderful Forest» en est

acrylique, fusain, peinture à l’huile ou pastel, partager avec d’autres une «Wonderful Forest». On peut encore, avec un peu de modestie, comme Ilias Selfati le fit, porter sur le monde un regard sensible aussi. On peut encore… Sans nul doute, l’expo « Dreaming in a Wonderful Forest » est l’une des plus belles, mais la plus diffé- rente surtout – les tableaux ont délaissé les cimaises pour s’adosser aux murs et trô- ner sur des encyclopédies -. Sans nul doute aussi, elle sera une magnifique et boulever- sante découverte pour ceux qui n’ont pas encore eu la chance de découvrir le travail de Selfati, un artiste si singu- lier ◆

Sans nul doute, l’expo «Dreaming in a Wonderful Forest» est l’une des plus belles, mais la plus différente surtout.

La Galerie d’art contemporainMohamedDrissi est logée dans une bâtisse de style anglais, construite en 1898 afin d’accueillir la résidence du Consul général du Royaume-Uni. En 1990, le hall et cinq salles d’une surface globale de 276m 2 furent réservés pour accueillir la collectionduMusée d’art contemporainde Tanger, qui regroupait les travaux de plusieurs plasticiens marocains. Après des travaux de réaménagement entamés en 2006, le musée a été rebaptisé «Galerie d’art contemporainMohamed Drissi», et inauguré le 12 avril 2007, par l’exposition Céramiques de Picasso. Un écrin prestigieux pour une expo somptueuse

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