Carillon_2018_02_15

FRÉDÉRIC HOUNTONDJI frederic.hountondji@eap.on.ca

« Çam’a fait énormément chaud au cœur quand j’ai reçu l’appel. J’avais des larmes qui coulaient sur mes joues. Je vous en parle et je deviens émotive aussi », a-t-elle dit, la voix coupée par un silence fort expressif. Elle poursuit humble et sereine : « Je ne suis pas une personne qui aime les trophées. Je ne suis pas une personne qui aime être en avant-plan. Je suis une personne d’action qui vit plus dans l’action que sur des podiums, mais çam’a fait chaud au cœur de remporter (ce prix). De plus, je ne m’y attendais pas. Qu’on reconnaisse ce que j’ai fait pour ma communauté et ce que j’ai peut-être fait pour nos jeunes, je trouve çamerveilleux. » Native de L’Orignal, où elle a fréquenté l’école primaire, Anne Laflamme a poursuivi ses études secondaires à Hawkesbury. Après le secondaire, elle s’est dirigée vers l’Université d’Ottawa. Elle a d’abord étudié en géographie avant de se diriger vers la Faculté d’éducation. Elle en est ressortie avec une maîtrise en éducation et en administration. Une fois le diplôme obtenu, Mme Laflamme a enseigné plusieurs années avant d’accéder à une direction adjointe, puis à la direction de l’École secondaire publique Le Sommet de Hawkesbury en 2003.

Anne Laflamme, directrice de l’École secondaire publique Le Sommet de Hawkesbury, atteint un autre sommet en accédant à l’Ordre de la francophonie de Prescott et Russell. La distinction lui sera officiellement décernée le 24 mars prochain lors du Banquet de la francophonie, qui aura lieu à Embrun. En lui remettant ce prix, l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO) de Prescott et Russell souligne sa contribution à « la vitalité de la communauté francophone de Hawkesbury depuis plus de 20 ans », ainsi que son engagement dans la réussite de ses élèves. « Anne Laflamme est une personne aux qualités humaines remarquables : compassion, dynamisme, amour des jeunes et persévérance », a décrit l’ACFO dans un communiqué. C’est avec une grande satisfaction et beaucoup d’émotions queMme Laflamme a appris la nouvelle. Celle-ci lui a été annoncée la semaine dernière par Jean-Marie Dufour, surintendant de l’éducation du Conseil des écoles publiques de l’Est de l’Ontario (CEPEO).

"Je ne suis pas une personne qui aime les trophées. Je ne suis pas une personne qui aime être en avant-plan. Je suis une personne d’action qui vit plus dans l’action que sur des podiums, mais ça m’a fait chaud au cœur de remporter..."

Une francophone allumée Anne Laflamme est une francophone allumée jusqu’au bout des ongles. Rien ne l’arrête dans sa fougue contagieuse de promouvoir la culture dans laquelle elle baigne et la communauté qui l’a vue naître. « Il faut prendre soin de notre langue. Je ne suis pas anti autre langue, au contraire, j’adore les langues. Toutes les langues sont une musique à mes oreilles, sauf qu’il ne faut pas oublier qui on est et d’où on vient », a insisté la lauréate. Afin d’expliquer son

anglais. Même les manuels étaient en anglais. Ma mère a dû lâcher l’école parce qu’elle ne comprenait rien de ce que disait l’enseignant », s’est indignéeMme Laflamme. Elle a alors pris la ferme résolution de ne jamais subir ce sort injustement réservé à ses parents et de se battre jusqu’au bout afin de faire respecter les valeurs francophones dont elle est fière. « C’est suite à tout ça que j’ai juré : ‘Jamais je ne voudrais qu’en tant que francophones on ait moins de droits.’ Donc à partir de là,

c’était important pour moi que mes élèves puissent non seulement vivre et parler en français, mais vivre la culture, vivre ce que c’est qu’être francophone jusqu’au bout des doigts, au fond

attachement à la langue française, Mme Laflamme évoque l’amèreexpérience qu’ont vécue ses parents, deux francophones qui ont travaillé fort toute leur vie. Samère, qui était

Jamais je ne voudrais, qu’en tant que francophones on ait moins de droits.

coiffeuse, et son père, un homme d’affaires, ont été contraints d’abandonner leurs études, confrontés à la barrière linguistique. Sens du combat « Ma mère a dû arrêter (d’aller à) l’école en neuvième année parce qu’elle était dans une école de campagne, où il y avait des élèves de la première à la huitième année. Pour aller au secondaire, elle devait faire toutes ses études en anglais », a expliqué la directrice de l’école Le Sommet. « Arrivés à l’école secondaire, même si les élèves étaient tous des francophones dans la classe, et même si l’enseignant était francophone, ils devaient parler en

des tripes », a clamé la lauréate. Elle estime qu’il est important de prendre soin de la langue française parce qu’elle est toujours menacée. Elle s’inquiète de l’omniprésence de l’anglais dans les réseaux sociaux et les téléphones, ces moyens de communication auxquels sont exposés les jeunes. « Il faut sensibiliser les jeunes et leur dire de faire attention, lance-t-elle. Apparemment qu’avec l’avènement des médias sociaux, d’ici 2050, on risque, en tant que francophones, de ne plus exister. Certains osent même dire que ça pourrait être en 2025, mais ça, je n’ose pas le croire, ce n’est pas vrai. »

Anne Laflamme, directrice de l’École secondaire publique Le Sommet, avec une des employées de l’établissement, Geneviève Chartrand. —photo Frédéric Hountondji

Le Carillon, Hawkesbury ON.

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Le jeudi 15 février 2018

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