F OCUS AGRICOLE
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JEUDI 10 MARS 2022 FINANCES NEWS HEBDO
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Monde rural
◆ Les prix de l’aliment de bétail ont nettement flambé et le marché des ovins et des bovins a chuté. ◆ Plusieurs exploitants ont réduit leurs investissements et recherchent de nouvelles niches pour assurer des revenus. ◆ Les éleveurs tablent sur Aïd Al-Adha pour combler un tant soit peu le manque à gagner. Les paysans face au diktat de la sécheresse
contre 40 à 50 dirhams aupa- ravant. Celle de paille est commercialisée à partir de 35 DH contre 15 DH il y a deux mois». Compte tenu de cette situation, l'offre sur le marché de bétail est très faible, ce qui entraîne une inévitable hausse des prix. «La demande est faible pour les ovins, bovins et caprins destinés à des activités pas- torales. Par contre, les bêtes d’engraissement dédiées à l’abattage ont la cote. Pratiquement, tous les éle- veurs tablent sur Aïd Al-Adha pour sauver la saison. Les antenais âgés à partir de 6 mois sont très demandés pour être préparés pour la fête du sacrifice», souligne Rachid Halabi, marchand de bétail. Cet octogénaire, natif de Tnine Toualaâ, une bourgade à 22 km d’El Gara, affirme que «la sécheresse de cette saison est terrible. Elle est plus cruelle que celle des années 80. Les agriculteurs sont habitués à cohabiter avec les aléas climatiques, mais pas d’une telle ampleur. Les éleveurs seront mis à rude épreuve. Pour ceux qui préparent Aïd Al Adha, les charges seront très lourdes, surtout celles relatives à l’ali- ment de bétail. Les prix ont plus que doublé et tout laisse présager qu’ils vont encore augmenter» . En effet, tous les prix des produits dédiés à l’alimenta-
secs que la paille jaunie. Vers les coups de 10H30, nous sommes arrivés à destina- tion. Triporteurs, calèches, taxis, voitures de particu- liers, camionnettes chargées de marchandises et d’ali- mentation animalière…, le trafic dense témoigne de la grande affluence que connaît souk El Gara.
A quelques mètres du parking, nous trouvons les marchands de bétail. Première impression : les animaux exposés souffrent énormément.
La sous-alimenta- tion est nettement visible sur l’état du cheptel.
Une opinion qui nous a vite été confirmée par les éle- veurs sur place, tous una- nimes sur le fait que la séche- resse a frappé de plein fouet le secteur agricole. Portant sur leur visage l’empreinte du désespoir, ces marchands se plaignent d’une hausse sans précédent des prix du fourrage, qui a contraint bon nombre d’entre eux à se séparer, même à perte, de leurs animaux, de peur de les voir mourir de faim. Quid des subventions promises par le gouvernement ? «Jusqu'à présent, nous n'avons rien reçu. Les prix des fourrages sont extrême- ment élevés, du coup nous n'avons plus de quoi nour- rir notre bétail» , martèle un exploitant. De leur côté, les vendeurs de fourrage nous confirment la flambée des prix : «une botte de fourrage vaut aujourd'hui 70 dirhams
enquête dans les environs de Casablanca. Immersion.
L e Maroc est en train de vivre l’une de ses pires années de sécheresse. Pour certains observa- teurs, elle est plus sévère que celles des années 80. Le gouvernement n’a pas tardé à annoncer quelques mesures pour venir en aide aux exploitants sinistrés. Le programme comporte le réé- chelonnement de la dette, la distribution d’orge et d’ali- ment composé de bétail subventionné et aussi des mesures en matière d’abreu- vage du cheptel. Mais, dans les campagnes, un climat d’inquiétude et d’attentisme règne. Pour s’enquérir de la situation qui prévaut dans le monde rural, Finances News Hebdo a mené une Par M. Ait Ouaanna (Stagiaire) et C. Jaidani
Le désarroi des éleveurs Jeudi 3 mars 2022, neuf heures tapantes, direction souk El Gara, la grand-messe hebdomadaire des agricul- teurs et vendeurs de bétail. Située dans la province de Berrechid à quelque 55 km de Casablanca, c’est le chef- lieu de la tribu des Mdakra, une région qui dispose des terres les plus fertiles du Maroc, et l’une des princi- pales sources d’approvision- nement du marché national en céréales et légumineuses. Sur la route menant au souk hebdomadaire, le constat est amer : la sécheresse a fait des ravages ! A quelques jours de l’équi- noxe de printemps, les champs, sans vie, sont aussi
«La séche- resse de cette saison est terrible. Elle est plus cruelle que celle des années 80».
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