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F OCUS AGRICOLE

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DU 26/27/28/29/30 MARS 2020 FINANCES NEWS HEBDO

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Covid-19

◆ Les métiers complémentaires de l’agriculture, déjà impactée par la sécheresse, sont frappés de plein fouet. ◆ Le confinement a réduit sensiblement les opportunités d’emploi dans les villes. ◆ Témoignages poignants de plusieurs travailleurs. Le monde rural entre le marteau et l’enclume A ses débuts, la pandé- mie de Coronavirus a été prise à la légère dans le monde rural. Par C. Jaidani

Les métiers liés à l'artisa- nat présents dans le monde rural tournent au ralenti.

Certains même l’ignoraient totalement et s’estimaient peu concernés, à l’exception de ceux qui ont des enfants sco- larisés et qui ont dû s’adapter aux nouvelles conditions d’en- seignement imposées par le département de tutelle. Mais la situation a complète- ment changé avec le confine- ment de la population, qui s’est accentué à partir du 20 mars avec l’interdiction des déplace- ments interurbains. Sous l’effet de la sécheresse et la baisse d’activité dans le sec- teur agricole, de nombreux pay- sans étaient à la recherche de métiers dans les villes, notam- ment dans la maçonnerie, le commerce, le transport ou le travail journalier dans les entre- prises BTP ou autres. D’autres se ruaient vers les souks hebdomadaires dans l’es- poir de dénicher quelques bou- lots comme aides-commerçant ou porteurs de marchandises, mais ils ont été vite confron- tés aux restrictions imposées par les autorités en matière de déplacement. Dans la province de Benslimane, la décision des autorités locales de fermer les souks hebdoma- daires n’a pas été du goût des habitués de ces sites. «Habituellement, je travaille dans les activités de collecte des légumes ou dans les champs de céréales et de légumineuses. Lors des saisons pluvieuses, je gagnais au minimum 100 DH/jour. Mon revenu pouvait atteindre facilement 200 DH/ jour lors des pics de la cam-

pagne notamment au cours des moissons. Actuellement, il y a une forte offre de main-d’œuvre sur le marché et donc une baisse de la demande. Je peux à peine trouver un revenu jour- nalier de 50 DH et le plus sou- vent quelques jours par semaine seulement. Nous compensons ce manque à gagner à travers de petits métiers journaliers dans les villes qui tournent au ralenti. Ce qui complique davan- tage notre situation» , témoigne Larbi Lahrech, travailleur agri- cole. Le confinement a impacté

d’autres métiers liés à l’agricul- ture même si le secteur figure dans la liste tolérée par le gou- vernement. La fermeture des marchés a perturbé le com- merce de bétail et les produits alimentaires qui lui sont dédiés. «Jusqu’à vendredi 20 mars, nous avons travaillé norma- lement. Le souk Jemaâ de Fedalate relevant de la pro- vince de Benslimane affichait sa dynamique habituelle. Mais le lendemain à Sebt Tit Mellil, la situation commençait à bas- culer. Les autorités ont restreint l’accès au site et l’activité a

beaucoup régressé. Actuelle- ment, les autres souks de la région comme Tnine Toualaâ, Tlat Ziayda ou Khmis Bouznika seront fermés jusqu’à nouvel ordre» , affirme amèrement Ahmed Benatij, commerçant iti- nérant de bétail. Ce dernier n’a pas manqué de souligner que la chaîne d’ap- provisionnement de la filière viandes rouges sera fortement secouée et le risque de flambée des prix des produits n’est plus à écarter. Les transporteurs sont les pre- miers touchés par cette crise.

L’arrêt des déplacements leur a porté un coup fatal. Abdessamad Bichri, résident dans la commune de Moualine El Oued, relevant de la province de Benslimane, est chauffeur de grand taxi qui fait la liaison entre son patelin et la petite ville d’El Gara. Il fait état d’un constat alarmant pour son secteur. Ce sexagénaire affirme que durant toute sa carrière de près de 40 ans, «les périodes d’arrêt de mon activité ne dépassaient guère deux fois et sur ordre de notre syndicat. La première fois, pour dénoncer l’entrée en vigueur du Code de la route en 2009, et la seconde en 2018 pour protester contre la hausse des prix des carburants. Durant les deux événements, la grève n’a pas dépassé une semaine. Alors qu’en 2020, le confine- ment nous impose un chômage technique pendant un mois. La plupart des professionnels du secteur vivent au jour le jour avec la recette quotidienne. Ils ne disposent pas d’économie et ont des charges familiales à supporter» . ◆

Le tourisme est le secteur le plus touché par la crise sanitaire et économique que vit le Maroc. Le tourisme rural est frappé de plein fouet surtout que le prin- temps représente la haute saison pour la filière. Maisons d’hôtes, auberges, hôtels, restaurants, vendeurs ambulants (petits-laits, produits avicoles, pro- duits d’artisanat…), toutes ces activités emploient des milliers de gens. Certains sont saisonniers, d’autres à plein temps. Le secteur est considéré complémentaire pour l’agriculture. C’est une opportunité pour lutter contre la pauvreté surtout dans les régions enclavées. Le tourisme rural complètement paralysé

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