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BOURSE & FINANCES

JEUDI 16 ET VENDREDI 17 JUILLET 2020 FINANCES NEWS HEBDO

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cette crise a soulevé deux questions : une première qui revient comme un leitmotiv, l’aide à l’Afrique, une seconde question qui est plus récente, est portée par le Président de la République française, Emmanuel Macron. Il s’agit de voir dans l’Afrique, non plus l’enfant malade au chevet duquel le monde accourt, mais un partenaire. Or, la bi-bancarisation peut favoriser la naissance d’une relation renouvelée entre l’Afrique et la France, en particulier, et plus largement l’Europe… F.N.H. : De quelle façon ? A. G. : La bi-bancarisation est un facteur d’accrois- sement des transferts d’argent, notamment vers l’Afrique. Ces transferts sont une source de finan- cement considérable du développement des pays destinataires. Par exemple, en 2019, le montant des transferts au profit de pays africains très différents

les uns des autres, s’est élevé à 7 mil- liards de dollars pour le Maroc, à environ 2,5 milliards de dol- lars pour le Sénégal, 2,8 milliards pour le Kenya, 0,6 milliard pour le Soudan, 2 mil- liards pour la Tunisie, 1,8 milliard pour l’Al-

En 2019, le montant des transferts au Maroc s’est élevé à 7 milliards de dollars.

gérie. Le montant total des transferts au profit des pays à revenu faible ou moyen s’élève à plus de 550 milliards de dollars, représentant jusqu’à plus de 30% du PNB dans certains pays ! Et, il est démontré que les transferts d’argent sont une source de financement des pays en développe- ment plus pérenne et plus stable que l’aide publique au développement (APD), qui pèse sur le budget des Etats contributeurs, et que les investissements directs étrangers (IDE) sensibles aux crises de diverses natures (politique, économique, etc.). F.N.H. : Instrument de développement, facteur d’inclusion financière, érigeant l’Afrique en partenaire de l’Europe. Si la bi-bancarisation est si vertueuse, pour- quoi alors n’est-elle pas mise en œuvre de manière générale ? A. G. : La France et certains pays en Europe ont commencé le travail. En revanche, l’UE, elle, n’a depuis plus de 10 ans maintenant, absolument rien fait pour anéantir les obstacles à la bi-bancarisation. Une banque africaine, comme toute banque étran- gère à l’UE, qui souhaite offrir ses services ban- caires en Europe s’expose à d’importants risques de nature pénale : violation du monopole bancaire, violation de la loi sur le démarchage, sur l’intermé- diation des opérations de banque, des lois sur la publicité et la protection du consommateur, de la loi sur la collecte et le traitement des données per- sonnelles.

La bi-bancarisation

«Un facteur d’accroissement des transferts d’argent vers l’Afrique» ◆ Des propositions d’amendement sont actuellement portées à l’Assemblée nationale française, dans le but d’accélérer la bi-bancarisation, car seules Attijariwafa bank et la Banque Centrale Populaire bénéficient de l’autorisation de commercialisation en France (loi de 2014). ◆ Interview avec Alain Gauvin, avocat associé à Asafo & Co.

moyens de paiement, ce qui est juridiquement facile, mais aussi de pouvoir, depuis l’Europe, bénéficier de services bancaires dans son pays d’origine, ce qui est plus compliqué qu’on ne le pense. F.N.H. : Pourquoi parle-t-on de bi-bancari- sation en ce moment ? Est-ce lié à la crise sanitaire ? A. G. : C’est en partie lié à la crise sanitaire : d’abord, parce que les transferts d’argent ont fortement chuté pendant le confinement. Ensuite, parce que

Propos recueillis par B. Chaou

Finances News Hebdo : Qu’est-ce que la bi- bancarisation ? Alain Gauvin : La bi-bancarisation peut s’entendre comme un processus favorisant l’accès des diaspo- ras, en particulier africaines, aux services bancaires non seulement dans leur pays d’accueil, mais aussi dans leur pays d’origine. Par exemple, il s’agit pour un immigré en Europe de pouvoir y ouvrir un compte bancaire, y souscrire un prêt ou y obtenir des

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